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de l'Ancien Testament; c'était aussi la croyance des patriarches. Les prophètes ne pensaient pas autrement que Moyse, ni Moyse autrement que les enfants de Jacob, que Jacob lui-même, qu'Abraham le père des croyants, que Noé, qu'Adam le chef et le précepteur du genre humain. Une preuve que la croyance à l'éternité des peines remonte à la tradition primitive, et qu'elle est aussi ancienne que le monde, c'est que nous la retrouvons, quoique plus ou moins altérée, chez tous les peuples. Les Grecs, les Romains, les Egyptiens, les Chaldéens, les Perses, les Syriens, les Indiens, les peuples du Nord et ceux de l'Amérique, tous ceux dont on connaît la religion, admettaient une récompense éternelle pour les justes, et des peines éternelles pour les méchants (1). Ainsi, le dogme de l'éternité de l'enfer est fondé tout à la fois sur la révélation primitive, sur la révélation mosaïque et sur la révélation évangélique, en un mot, sur l'enseignement catholique, dont l'autorité est l'autorité de Dieu même, comme nous l'avons montré dans le premier volume de cet ouvrage.

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227. Direz-vous qu'on ne peut concilier ce dogme avec la bonté de Dieu? Mais « qui es-tu, ô homme, pour contester avec Dieu ? O homo, tu qui es, qui respondeas Deo (2)? Qui osera vous dire, Seigneur, pourquoi vous avez fait cela? Ou qui s'élèvera contre « votre jugement? Qui paraîtra devant vous pour prendre la dé«fense des hommes injustes? Ou qui vous accusera quand vous « aurez fait périr les nations que vous avez formées? Car après « vous, qui avez soin de tous les hommes, il n'y a pas d'autre Dieu, à qui vous ayez à faire voir qu'il n'y a rien d'injuste dans « les jugements que vous prononcez; il n'y a ni roi ni prince qui « puisse s'élever contre vous, en faveur de ceux que vous aurez « fait périr (3). » Non, il ne nous appartient pas de juger les jugements de Dieu. Il est admirable dans ses saints par sa bonté; il ne l'est pas moins par sa justice dans les réprouvés. Il est bon, infiniment bon: mais quoique sa bonté soit infinie, il n'est point tenu de faire pour la créature tout ce que la créature peut désirer; autrement, il pourrait être tenu à l'infini, ce qui implique contradic

(1) Voyez le P. Perrone, Tract. de Deo creatore, part. ш, c. vi, etc. (2) Epitre aux Romains, c. ix, v. 20. — (3) Quis dicet tibi: Quid fecisti? aut quis stabit contra judicium tuum? aut quis in conspectu tuo veniet vindex iniquorum hominum? aut quis tibi imputabit, si perierint nationes quas tu fecisti? Non enim est alius Deus quam tu, cui cura est de omnibus, ut ostendas quoniam non injuste judicas judiciuta. Neque rex, neque tyrannus in conspectu tuo inquirent de his quos perdidisti. Sagesse, c. x11, v. 12, 13 el 14.

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tion : les dons de Dieu, de quelque genre et quelque grands qu'ils soient, ne peuvent être que finis et bornés comme ceux qui les reçoivent. Tout ce que nous pouvons exiger, pour ainsi dire, de la bonté du Créateur, c'est qu'il donne à tous les hommes les moyens d'être heureux, de sorte que personne ne soit malheureux que par sa faute. Le pécheur qui est condamné à un supplice éternel ne peut se plaindre que de lui-même; il ne peut se plaindre de Dieu qu'autant qu'il n'aurait pu éviter cette damnation. Mais il n'en est pas ainsi : Dieu ne réprouve et ne damne après cette vie les pécheurs impénitents que parce que ces pécheurs se sont réprouvés et damnés eux-mêmes, tandis qu'ils étaient sur la terre: libres de faire le bien et le mal, de choisir entre la vie et la mort éternelle, ils ont fait le mal au lieu de faire le bien; ils ont préféré la mort à la vie, les peines de l'enfer aux jouissances du ciel, le séjour de Satan au royaume de Dieu. Ils sont donc malheureux parce qu'ils l'ont voulu; et ils le seront éternellement, parce que, malgré les avertissements et les menaces du Seigneur, ils ont suivi, de plein gré, la voie qui conduit à la perdition éternelle : ce qui fait que l'éternité de l'enfer n'est pas plus contraire à la justice qu'à la bonté divine. La justice de Dieu serait compromise, il est vrai, s'il punissait sans qu'on l'eût mérité; si, dans ses jugements, il ne discernait point entre le coupable et l'innocent, ni entre tel ou tel degré de culpabilité. Mais tel n'est pas l'ordre de la Providence : Dieu récompense les saints, et les récompense éternellement, parce qu'il est bon; il punit les méchants, et les punit éternellement, parce qu'il est juste; il rend à chacun selon ses œuvres, pour le bien comme pour le mal, parce qu'il est bon et juste en même temps.

228. Ne dites pas qu'il n'y a point de proportion entre le péché qui ne dure qu'un moment et la peine qui dure éternellement. Car évidemment, pour savoir s'il y a proportion ou non entre la peine et l'offense, on ne doit en juger ni par la durée de la peine, ni par la durée de l'acte par lequel on se rend coupable; il ne faut qu'un instant pour commettre les plus grands crimes: mais on doit se reporter à la grièveté de l'offense, dont la malice se tire et de la bassesse de celui qui en est l'auteur, et de la majesté de celui qui est offensé. D'après cette notion, qui ne peut être contestée, on conçoit facilement que la malice du péché, en tant qu'il offense Dieu, qu'il outrage la majesté divine, est en quelque sorte infinie; et que, loin de dépasser les limites de la justice à l'égard des réprouvés, le souverain juge demeure plutôt en deçà, même en leur infligeant une

peine éternelle. D'ailleurs, le péché, le crime d'un moment, qui n'a pas été réparé ici-bas par la pénitence, devient un crime éternel. Non-seulement l'état du péché, mais le péché, mais l'affection du moins virtuelle au péché, survit à la mort du pécheur et subsiste aussi longtemps que le pécheur, c'est-à-dire, éternellement. Celui qui meurt dans l'impénitence meurt dans son péché, conserve son péché et l'affection au péché; ce n'est même que parce qu'il conserve de l'affection au péché, qu'il meurt impénitent: in malignitate nostra consumpti sumus (1). Il est en mourant ce qu'il était auparavant, et il est après la mort ce qu'il était en mourant; il sera toujours le même, toujours pécheur: non qu'il commette en enfer de nouveaux péchés, car les damnés ne peuvent plus démériter; mais parce que, étant mort dans le péché et avec l'affection au péché, il ne peut plus ni sortir de l'état du péché, ni renoncer au péché. A la vérité, il regrette d'avoir offensé Dieu, il s'en repent même, suivant l'expression de l'Écriture: pœnitentiam agentes (2); mais il s'en repent trop tard, il s'en repent inutilement; sa pénitence n'est point l'effet de la grâce; il n'y a plus de miséricorde pour lui; le sang de Jésus-Christ ne coulera point dans les enfers; il ne peut ni expier son péché, ni revenir à de meilleurs sentiments. Il est donc vrai de dire que son péché dure toujours, qu'il devient éternel, et qu'il peut, par conséquent, être puni éternellement.

229. Mais Dieu ne pourrait-il pas, par sa grâce, changer le cœur du réprouvé, rendre ses peines méritoires, et abréger son supplice? On conçoit qu'il le pourrait, si on ne considère que sa bonté, sa puissance et sa justice. Mais y est-il tenu? Non : on ne prouvera jamais qu'il soit obligé de faire pour les hommes plus qu'il n'a fait. Qu'on se rappelle donc que non-seulement Dieu est souverainement bon, mais qu'il est souverainement sage; et, tout en admirant sa bonté à l'égard des élus, on adorera la rigueur de ses jugements à l'égard des réprouvés. On peut même dire que, d'après l'ordre qu'il a établi lui-même, et dans lequel se montre visiblement sa providence, la sagesse de Dieu, que l'on ne doit point séparer de ses autres attributs, s'oppose à ce que les peines de l'enfer aient un terme. En effet, si, malgré la croyance universelle à l'éternité de ces peines, la terre est comme inondée de crimes; s'il se trouve encore un si grand nombre de pécheurs qui boivent l'iniquité comme l'eau, et vivent comme s'ils n'avaient rien à craindre après la mort, que deviendrait le monde, si

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l'enfer n'était plus qu'un purgatoire? Otez la crainte de l'éternité malheureuse, c'en est fait des lois de la religion et de la morale pour le plus grand nombre; elles seront impuissantes contre le crime. Donnez à l'égoïste, à l'avare, à l'usurier, au voluptueux, à l'adultère, au plus grand scélérat, l'assurance ou seulement l'espoir d'en finir un jour avec la justice divine; bientôt vous verrez disparaître de dessus la terre, avec la crainte de Dieu, la pratique de la vertu.

SII. Quelles sont les peines de l'enfer?

230. On distingue deux peines de l'enfer : la peine du dam et la peine du sens. La première consiste dans la privation de la vision intuitive, ou dans la perte du bonheur du ciel, et dans le regret de l'avoir perdu. La seconde consiste dans la douleur causée par le feu. Ce double châtiment est aggravé par le désespoir, le réprouvé ne pouvant espérer de voir la fin de ses tourments. Les peines de l'enfer sont exprimées par ce ver qui ne meurt point et par ce feu qui ne s'éteint point, dont Jésus-Christ lui-même menace les pécheurs: Vermis eorum non moritur, et ignis non extinguitur (1).

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231. On entend par ce ver rongeur les peines intérieures, les remords et les regrets des réprouvés, comme on le voit d'ailleurs par ce passage du livre de la Sagesse: A la vue de la gloire et du bonheur des justes, les méchants « seront saisis de trouble et d'une << horrible frayeur. Ils seront surpris d'étonnement en voyant tout « d'un coup, contre leur attente, les justes sauvés. Ils diront en eux« mêmes, étant touchés de regret, et jetant des soupirs dans le « serrement de leur cœur : Ce sont ceux-là qui ont été autrefois « l'objet de nos railleries, et que nous donnions pour exemple des « personnes dignes de toutes sortes d'opprobres. Insensés que nous << étions! leur vie nous paraissait une folie, et leur mort honteuse; . et cependant les voilà élevés au rang des enfants de Dieu, et leur « partage est avec les saints. Nous nous sommes donc égarés de la « voie de la vérité. La lumière de la justice n'a point lui pour « nous, et le soleil de l'intelligence ne s'est point levé pour nous. « Nous nous sommes lassés dans la voie de l'iniquité et de la per«dition. Nous avons suivi des voies difficiles, et nous avons « ignoré la voie du Seigneur. De quoi nous a servi notre orgueil? « Qu'avons-nous retiré de la vaine ostentation de nos richesses?

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(1) Saint Marc, c. ix, v. 43, 45 et 47.

« Toutes ces choses sont passées comme une ombre.... A peine « étions-nous venus au monde, que nous avons cessé de vivre ; nous « avons été consumés dans notre malice. Voilà ce que les pécheurs « diront dans l'enfer : Talia dixerunt in inferno hi qui pecca« verunt (1). »

232. Par là nous apprenons que les réprouvés seront tourmentés par l'envie qu'ils auront contre les saints, qu'ils condamneront leurs égarements, et qu'ils auront une douleur amère de se voir privés de la gloire et de la félicité des justes. Mais ce serait sans fondement qu'on les ferait blasphémer contre Dieu : le blasphème n'est point une peine, et ne peut aggraver les peines des damnés. D'ailleurs, loin de commettre de nouveaux crimes, ils se repentiront, quoique inutilement, d'avoir commis ceux qui sont le sujet de leur damnation : pœnitentiam agentes; et, au lieu de se plaindre de la justice de Dieu, ils ne se plaindront que d'euxmêmes: Insensés que nous étions, diront-ils, nos insensati! A quoi nous a servi notre orgucil? Quid nobis profuit superbia ? Qu'avons-nous retiré de l'ostentation de nos richesses et des vains plaisirs qu'elles nous ont procurés? Divitiarum jactantia quid contulit nobis? Non, encore que leurs péchés subsistent éternellement, et que par là même ils méritent une peine éternelle, une fois en enfer, ils ne peuvent plus offenser Dieu. La mort du pécheur, dit saint Ambroise, met fin à ses péchés: mors peccatoris finem peccandi affert (2). Suivant saint Augustin, à la mort les méchants ne cessent pas d'être méchants; ils conservent le propos qu'ils avaient de pécher; cependant ils ne peuvent plus pécher : Iniqui nec post mortem desinunt esse iniqui; quia etsi peccare non possint, peccandi tamen propositum tenent (3).

(1) Videntes turbabuntur timore horribili, et mirabuntur in subitatione insperatæ salutis, dicentes intra se, pœnitentiam agentes, et præ angustia spiritus gementes: Hi sunt quos habuimus aliquando in derisum, et in similitudinem improperii. Nos insensati vitam illorum æstimabamus insaniam, et finem illo. rum sine honore: ecce quomodo computati sunt inter filios Dei, et inter sanctos sors illorum est. Ergo erravimus a via veritatis, et justitiæ lumen non luxit nobis, et sol intelligentiæ non est ortus nobis. Lassati sumus in via iniquitatis et perditionis, et ambulavimus vias difficiles, viam autem Domini ignoravimus. Quid nobis profuit superbia? aut divitiarum jactantia quid contulit not is? Transierunt omnia illa tanquam umbra.... Sic et nos nati continuo desivimus esse, et virtutis quidem nullum signum valuimus ostendere; in malignitate nostra consumpti sumus. Talia dixerunt in inferno hi qui peccaverunt. Sagesse, c. v, v. 2 et suiv. - (2) Du bien de la mort, c. vn. · (3) Homél. xix, opus imperf. in Matthæum.

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