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dont je n'avois pas parlé. Ce M. Ryckewaërt n'a pas le don de plaire à M. de P., qui en fait un enthousiaste, un ignorant, et qui lui attribue tous les maux du diocèse (1). Je me rappelle que dans l'entretien que j'eus avec M. de P., il nous peignit M. Ryckewaert comme un homme assez ridicule, comme un colosse, plus épais encore au moral qu'au physique. Or, j'ai vu depuis ce colosse, et il se trouve qu'il est un peu moins gros que M. de P. Il est inutile d'ajouter que dans sa conférence M. de P. battit M. Ryckewaert à plate couture. Son récit, et celui de notre entretien, au mois d'avril, ine prouvent son talent pour rapporter à son avantage ses conversations; et la force, l'à-propos, la mesure qu'il sait mettre dans tout ce qu'il dit, contrastent avec les pauvres raisons et les défaites ridicules où il réduit ses adversaires. Par exemple, M. Ryckewaërt, pressé par la logique vigoureuse de son interlocuteur, ne put retenir son secret, et s'écria que c'étoit une œuvre agréable à Dieu de résister à Buonaparte par toute sorte de moyens, ce qui scandalise beaucoup M. de P. Il ne blâme pas moins l'esprit d'opposition qui régnoit dans ce pays, et tout ce qu'on y faisoit sourdement pour renverser l'usurpateur, ou du moins pour contrarier ses opérations. Il a l'air tout étonné de ces dispositions des Flamands, et semble leur faire un crime de ne s'être pas prêté de bonne grâce aux désirs de Buonaparte, et en particulier à ses arrangemens sur la religion. Il est clair que si tout le monde eût pensé comme lui, le grand homine seroit encore debout.

Ces contradictions que rencontroit à chaque pas M. de P. auroient fait juger à tout autre qu'il devoit abandonner une entreprise si fâcheuse, et que M. de la Brue devoit quitter un diocèse où son arrivée avoit jeté la consternation. M. de P. en tira une toute autre conclusion; c'est que M. de Broglie étoit obligé, en conscience, de donner des pouvoirs à M. de la Brue. En conséquence, il minutoit une lettre à ce prélat, lettre qu'il assure être théologique et pathétique, quand ar

(1) J'avois dit, dans mon article du 17 avril, que M. Ryckewaërt avoit été déporté. C'est une erreur. Il se cacha, et quitta les Pays-Bas. Je saisis cette occasion de montrer à M. de P. que je n'ai aucune peine à convenir des méprises qui me sont échappées, bien fâché même de ne pouvoir faire des rétractations plus importantes.

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riva la déclaration du 8 juillet. Fort de cette pièce, M. de P. la porte dans une assemblée du chapitre et du clergé de la ville. Il la lit, la relit, et la fait valoir. Il ne conçoit pas comment, après cela, on ne se rendit pas, et comment on préféra de perpétuer le schisme. En vérité, quels étoient ici les fauteurs du schisme, ou ceux qui ne vouloient reconnoître que leur évêque légitime, ou ceux qui cherchoient à introduire une autre autorité?

M. de P. fait l'éloge de la délibération du chapitre, du 22 juillet, qui donna des pouvoirs à M. de la Brue. Mais il a omis sagement de dire que cette délibération n'avoit été signée que de quatre anciens chanoines, auxquels se joignít M. de Bast, pourvu récemment d'un canonicat, et dont le titre étoit contesté. Dans le récit de l'entretien que j'eus avec M. de P., il dit que je me suis égaré sur la nomination de M. de Bast. Je ne me suis point égayé, car je n'ai mot dit. Je souris seulement en ce moment, mais je m'abstins de toute réflexion. J'aurois peut-être été en droit de demander à M. de P. s'il étoit bien constant que la Régale étoit applicable à la Belgique, et qu'elle fut ouverte dans le cas d'une démission non acceptée. Il étoit très-naturel, dit M. de P., que le gouvernement d'alors suivit l'opinion qui lui étoit la plus favorable. Plaisante raison! Mais il étoit très-naturel aussi que le clergé de la Belgique ne se crût pas obligé de déférer à celle opinion. Il n'étoit pas nourri dans la même soumission que M. de P. pour tout ce qui émanoit du ministère des cultes.

Nous voici arrivés aux deux circonstances les plus importantes de toute cette affaire, c'est-à-dire, à la dissolution du séminaire, et à l'interdit des curés. M. de P. voyant la résistance des séminaristes, espéra qu'il en triompheroit aisément, et se rendit au séminaire. Une Relation fidèle que j'ai sous les yeux ne prouveroit pas qu'il remplit cette mission avec beaucoup de modération et de prudence. Dans son récit, au contraire, il vante l'adresse, la mesure, le ton calme et affectueux avec lesquels il parla. Lequel croire? M. de P. sans doute, qui est tout-à-fait désintéressé dans cette affaire. Toutefois sa douceur et son habileté échouèrent dans cette rencontre. Les séminaristes ne cédèrent point à son éloquence et à ses raisons, et sortirent. M. de P. fit encore tout ce qui étoit en lui pour éviter l'éclat qui suiyit. Je ne sais comment

il se fait que la pureté de ses intentions et l'ardeur de bou zele sont toujours méconnues par ceux mêmes en faveur des quels il agit. Il n'a rien omis pour pacifier les choses, et les gens de Gand sont assez ingrats pour le signaler comme l'auteur du mal. L'injustice est criante. En vain il invoque sa correspondance avec le ministre des cultes, et M. de la Brue et ses gens, et des lettres qu'il a entre les mains. Ses ennemis répondent qu'ils ne voient point cette correspondance; que ces gens qu'il appelle en témoignage sont suspects, ou ne disent mot, et que le bruit public, à Gand, l'accuse trop haut pour qu'il puisse le détruire par sa seule déclaration."

Dans des réflexions sur ces événemens et sur leurs causes, réflexions où M. de P. cherche à donner le change au lecteur, et à disculper les vrais coupables pour charger ceux qui étoient alors dans la disgrâce, il accuse tour à tour des troubles de Gand, et M. de Broglie, et M. Ryckewaërt, et les séminaristes. Quant à M. de la Brue, il n'a été la cause réelle d'aucune funeste division. Et pour qui donc se faisoit tout ce bruit, si ce n'est pour ce M. de la Brue? S'il ne fût pas venu à Gand, tout seroit resté sur le même pied qu'avant son arrivée. Un mezzo termine, assez singulier à la vé rité, mais dont on se contentoit, maintenoit la paix dans le diocese. M. de Meullenaer étoit généralement reconnu comme grand-vicaire. Dans cet état de choses, l'élection du 22 juillet n'eut pas eu lieu; le séminaire n'eut pas été dissous; les élèves n'eussent pas été plongés dans des cachots; quarante d'entr'eux n'eussent pas été victimes d'une persécution atroce plusieurs ecclésiastiques n'auroient pas été déportés ou exilés, des curés n'auroient pas été interdits et obligés de se cacher; le trouble et la division n'eussent pas été au comble dans le diocese. Et c'est lorsque tout étoit ainsi en feu qu'on vient dire froidement que M. de la Brue n'a été la cause réelle d'aucune division funeste. Au fond pourtant il y a peut-être quelque chose de vrai dans cette assertion. Ce bon M. de la Brue ne se mêloit de rien; il se contentoit du titre de Monseigneur et des honneurs de la représentation; de sorte que l'on pouvoit dire ta que cause réelle des divisions étoit celui qui faisoit mouvoir ce fantôme d'évêque, et que l'on voit toujours parler et agir.

M. de P. n'a pu dissimuler son embarras sur l'interdit des curés; et c'est la partie la plus foible de son plaidoyer, qui,

comme nous l'avons vu, n'est pas en général tres-fort. 11 convient que je ne suis pas le seul qui lui ait donné tort dans cette affaire, et que les formes y furent un peu brusquées. Je le crois ainsi. A l'entendre, on n' n'interdit les curés qu'afin de prévenir la punition que le gouvernement n'eût pas manque de leur infliger. Pauvre défaite! Les curés, qui savoient bien à quoi ils s'étoient exposés, s'étoient de suite tenus cachés, et J'interdit ne les dispensa pas de cette précaution. En quoi donc leur fut-il utile? M. de P. a glisse habilement sur la rédaction de cette piece, aussi révoltante pour la forme que pour le fond. L'interdit étoit conçu dans les termes les plus ridiculement exagérés; la conduite des curés y étoit qualifiée de scandale inoui, et l'on terminoit ainsi : Il deviendroit de notre devoir de requérir l'autorité civile, si vous étiez assez téméraire que de ne point obéir à nos ordres, qui sont ceux de Jésus-Christ et de son Eglise, Et M. de P. espère faire croire qu'il vouloit protéger les curés contre l'autorité civile, même lorsqu'il les en menace! Que dirons-nous d'ailleurs de ce ton arrogant et de cet orgueil démesuré de représenter de tels ordres comme ceux de Jésus-Christ et de son Eglise. Quel abus d'un si grand nom! Les gens de Gand prétendoient que ce style impérieux et emphatique ne permettoit pas de se méprendre sur le rédacteur de cette pièce, ainsi que d'une lettre adressée, cinq jours après, aux marguilliers des sept paroisses. Ce personnage, disent-ils, invoquoit à tout moment l'autorité de l'empereur.

Je ne dois pas omettre que, dans toute cette discussion, M. de P. regarde constamment la question du pouvoir des chapitres comme une chose incontestable. Il l'avoit en effet décidé ainsi dans une consultation qu'il avoit donnée précédemment pour le siége de Troyes. Il avoit essayé de prouver que le chapitre de cette derniere église, qui étoit dans le inême cas que Gand, pouvoit et devoit donner des pouvoirs à l'évêque nommé, et il lui sembloit que l'ignorance ou les préjugés pouvoient seuls contredire ce jugement doctrinal. Ce qui est remarquable encore, c'est que M. de P. ne daigne pas dire un mot des brefs du Pape sur ces matières. Il n'ignoroit pas l'existence des brefs au cardinal Maury et au chapitre de Florence, et il les regarde comme non avenus. On ne les lui avoit peut-être pas notifies officiellement. Il est impossible qu'il n'eût pas ouï parler de quelques réponses

attribuées à des cardinaux consultés sur l'affaire de Troyes. Ces décisions ne lui ont pas paru dignes de la moindre mention. Il regarde comme un scandale que les séminaristes de Gand aient refusé d'obéir à la délibération de la moitié d'un chapitre, et il se croit permis d'être en opposition avec des actes du chef de l'Eglise. Il nous parlera peut-être ici de son gallicanisme, comme il en parle dans ses Observations. De bonne foi, comment un ecclésiastique pouvoit-il mettre en avant les libertés de l'église gallicane, alors qu'elle gémissoit sous l'oppression, et crier contre l'ultramontanisme lorsque l'église romaine étoit frappée de la persécution la plus violente? Ou M. de P. entendoit les libertés comme Buonaparte, et alors il ne les connoissoit guère; ou il les entendoit autrement, et alors il n'y avoit guère de loyauté et de franchise à les invoquer pour faire croire apparemment qu'on pensoit comme le despote. Je me rappelle avoir ouï à cette époque un ou deux individus vanter leur gallicanisme, et j'avoue que cette lâcheté m'a toujours révolté. C'étoit, ce me semble, servir la cause du persécuteur de l'Eglise; c'étoit se joindre à lui dans la guerre qu'il faisoit au souverain Pontife. Eh! messieurs, votre chef est en prison, soyez un peu généreux, et attendez au moins pour lui lancer vos traits qu'il soit remonté sur son trône. C'est une réserve que n'eut pas l'orateur chargé de faire à Gand le discours anniversaire du couronnement de Buonaparte et de la bataille d'Auster litz, le 4 décembre 1813. On dit qu'il se permit une sortie assez vive contre le souverain Pontife. Le même avoit prononcé, à la fête du 15 août, un discours où il disoit : L'orateur de cette fête nationale excite facilement l'enthou siasme, et inspire un noble orgueil d'étre chrétien, et chré tien catholique, et catholique françois, et François sous le regne du héros qui nous gouverne; crescendo assez curieux de la part d'un ecclésiastique qui se félicite en chaire, d'abord d'être chrétien, puis d'être catholique (et jusqu'ici il a raison), puis d'être François, et par-dessus tout de vivre sous Buonaparte. C'est-là le dernier degré et le nec plus ultrà de l'orgueil et du bonheur. Cela étoit un peu fort en tout temps, et surtout en 1813.

Je termine ici ma tâche. J'espère que M. de P. n'imputera qu'à lui-même tout ce qu'il m'a forcé de lui dire. Ne pouvoit-il essayer de se justifier sans récrimination et sans

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