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rité des mœurs, la sainteté de la vie et la haine du Népotisme, qui méritèrent à Innocent XI les hommages du Monde Chrétien; mais plus ces vertus étoient dignes des éloges que le Clergé leur donne avec impartialité, plus elles formoient un douloureux contraste avec la multitude de Brefs irréguliers, qui, sous le nom de ce Pontife vertueux, inondoient et troubloient la France. Si donc, dans le cours de ces démêlés, trop vifs, trop éclatans pour qu'on puisse les oublier, trop affligeans pour ne pas désirer d'en perdre la mémoire, il y a eu quelques contradictions, ce n'est pas l'Eglise Gallicane, mais le caractère et la conduite d'Innocent XI qu'il faut en accuser; ou plutôt, sans accuser personne, déplorons la foiblesse de l'humanité, qui est telle, comme l'observe le Président de Montesquieu, que, « peut-être « dans la classe des gens supérieurs, il est plus facile de trouver des « hommes extrêmement vertueux, que des hommes extrêmement « sages. L'âme goûte tant de plaisir à dominer les autres âmes, ajoute « ce profond Ecrivain; ceux même qui aiment le bien, s'aiment si « fort eux-mêmes, qu'il n'y a personne qui ne soit assez malheureux << pour avoir encore à se défier de ses bonnes intentions; et, en vérité, << nos actions tiennent à tant de choses, qu'il est mille fois plus aisé « de faire le bien que de le bien faire (1). » Appliquons au l'ape Innocent XI ce passage de Montesquieu, et l'Assemblée de 1682 cesse à l'instant d'être en contradiction avec elle-même.

II. Quant au reproche qu'on lui fait d'avoir réclamé pour la conservation des Canons, des Lois et des Coutumes de l'Eglise Gallicane, il ne faut que lire les Actes de cette Assemblée, ses Lettres à Innocent XI, et l'Article III de sa Déclaration, pour voir qu'elle a religieusement uni le langage de la soumission filiale avec celui de la fermeté Sacerdotale. L'Anonyme travestit ce langage en une censure insolente; et sans doute il accusera de même Saint Bernard de s'être donné les airs de tracer ses devoirs à Eugène III, pour avoir apostrophé ce Pape en des termes bien moins respectueux que ceux qu'a employés le Clergé de France. « Jusqu'à quand, s'écrie Saint Bernard,

(1) Esprit des Lois, liv. XXVIII, ch. XLI.

<< vous verra-t-on dissimuler ou mépriser le murmure de toute la terre? << Jusqu'à quand resterez-vous enseveli dans un sommeil lethargique? << Il est temps de vous réveiller, et de considérer la confusion et l'abus << de tant d'appels qui se font contre le droit et la justice, contre le << bon ordre et les louables coutumes, sans avoir égard ni au temps, ni « au lieu, ni à la qualité des causes, ni à la régularité des formes, ni à « la dignité des personnes (1). »

Ainsi parloit Saint Bernard à un Pape qui n'avoit oublié, sous la ' Tiare, ni la régularité monastique, ni la sainteté qu'on respiroit à Clairvaux. Saint Jérome, Saint Basile, Saint Cyprien, Saint Firmilien, Hincmar de Reims, Yves de Chartres, le zélé Robert Grosse-Teste, Evêque de Lincoln au treizième siècle, une foule d'Evêques renommés par leur science et leur piété, ont élevé la voix contre les abus qui, de leur temps, prévaloient autour du Siége Pontifical; ils ont, suivant l'audacieuse expression de l'Anonyme, tracé leurs devoirs à différens Papes, quand l'occasion le requéroit, sans que ceux-ci l'aient trouvé mauvais, et sans avoir été repris de témérité par l'Eglise. Tous, en usant d'une sainte liberté, savoient que le Gouvernement paternel et fraternel, institué par Jésus-Christ, n'a rien du faste de la Puissance Mondaine, quand celle-ci n'est pas tempérée par les Maximes de l'Evangile; car alors, en violant la Règle, elle interdit le reproche, et se rend inaccessible à la plainte : Non ita erit inter vos. Tous ont suivi l'exemple de Paul, lequel, se disant humblement le moindre des Apôtres, Ego sum minimus Apostolorum, écrit la faute de Pierre, dit Bossuet, «dans une Epître qu'on devroit lire éternellement dans toutes <«<les Eglises ; et Pierre qui le voit, ne s'en fâche pas, mais il se ré<< forme ; et Paul qui l'écrit, ne craint pas qu'on l'accuse d'être vain. << Ames célestes, continue le grand Evêque de Meaux, qui ne sont tou<<< chées que du bien commun, qui écrivent, qui laissent écrire, aux

(1) Quousquè murmur universæ terræ aut dissimulas, aut non advertis? Quousquè dormitas? Quousquè non evigilat consideratio tua ad tantam appellationum confusionem atque abusionem, quæ præter jus et fas, præter morem et ordinem fiunt? Non locus, non modus, non tempus, non causa discernitur aut persona. (S. Bern., de Consider., lib. III, cap. II.)

« dépens de tout, ce qu'ils croient utile à la conversion des Gentils « et à l'instruction de la postérité....., parce qu'ils savent que le << monde est plus disposé à l'obéissance, quand celui à qui on la doit << obéit le premier à la raison..... Il falloit que dans un Pontife aussi <«< éminent que Saint Pierre, les Pontifes ses Successeurs apprissent à << prêter l'oreille à leurs inférieurs, lorsqu'ils parleroient avec moins « de force, mais toujours avec le même dessein de pacifier l'Eglise. <<< Voilà ce que Saint Cyprien, Saint Augustin et les autres Pères, ont << remarqué dans cet exemple de Saint Pierre (1). »

Après tant de grandes autorités, on ne conçoit pas ce que veut dire cet Anonyme avec sa chatouilleuse délicatesse, qui ne lui laisse voir dans l'Eglise Gallicane, qu'une Assemblée de murmurateurs, parce qu'elle a demandé que la Puissance Apostolique fût excercée conformément aux Canons dictés par l'Esprit de Dieu. Le point de fait, savoir qu'Innocent XI avoit méconnu les Règles et les Canons, peut-être en croyant de bonne foi les observer, est d'une si grande évidence que personne aujourd'hui n'entreprendra son apologie sous ce rapport. Faut-il donc que l'Eglise Universelle, ou les Eglises particulières, souffrent tant d'entreprises que les Canons proscrivent, d'énormes abus d'autorité qu'on s'est permis à l'abri d'un nom vénérable, le renversement des Règles, si, en effet, un Pape étoit assez malheureux pour vouloir les renverser; et que néanmoins tous les Evêques de la Chrétienté gardent le silence, comme des chiens muets qui n'osent aboyer? Canes muti non valentes latrare (2).

III. Loin de nous toutefois la pensée d'encourager l'insubordination ou les déclamations irrespectueuses que se permettent des individus isolés, soit en suivant leur penchant atrabilaire, ou par l'impulsion des motifs particuliers qui les portent à s'élever contre la Puissance sacrée du Siége Apostolique. Nous défendons ici la conduite et les Maximes de l'Eglise Gallicane, et non la révolte et les injures grossières de Luther, ni les écarts d'Eybel, de Fébronius où de

(1) Sermon sur l'Unité de l'Eglise.

(2) Is. LVI. 10.

l'Archevêque de Spalatro. Jamais Eglise ne fut plus affectueusement soumise au Saint-Siege que l'Eglise Gallicane; et souvent les Papes lui ont rendu ce glorieux témoignage. Jamais Eglise, depuis la prédication de la Foi dans les Gaules jusqu'à nos jours, n'a plus souvent réitéré l'hommage de son obéissance, non servile, mais filiale, envers la Chaire de Pierre. Tournant ses regards vers le centre de l'Unité Catholique, elle a toujours, à l'exemple de la sainte Antiquité, consulté l'Eglise Romaine dans les affaires douteuses, et combattu l'hérésie en adoptant les Décisions qui en émanèrent. C'est de là, c'est de la main d'un Pape, ami de Charlemagne, qu'elle a reçu le recueil des Canons de l'ancienne Discipline, qui sont à ses yeux la source et le plus ferme appui des Libertés qu'elle réclame; puis, par une tradition fidelement conservée, ces Canous et nos Maximes sont devenus la base de la Pragmatique du plus saint de nos Rois, qui ordonne de maintenir dans son Royaume « le Droit commun et la Puissance des Ordi<«<<naires, selon les Conciles Généraux et les Institutions des Saints << Pères (1). >>

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« Ces Maximes, » dit Bossuet, dont nous aimons à rappeler au Lecteur les fortes pensées et le sublime langage, « ces Maximes sont de << tous les Siècles; mais, dans l'un des derniers Siècles, un besoin << pressant de l'Eglise, un grand mal, un Schisme effroyable, obligea « toute l'Eglise à les expliquer et à les mettre en pratique, d'une << façon plus expresse, dans le Saint Concile de Pise et dans le Saint << Concile de Constance. La France fut la plus zélée à les soutenir, mais « la France fut suivie de toute l'Eglise. Ces Maximes, supposées << comme indubitables du commun consentement des Papes, de tous <«<les Evêques et de tous les Fidèles, rétablirent l'autorité du Saint« Siége, affoiblie par les divisions. Ces Maximes mirent fin au Schisme, <«<extirpèrent les hérésies que le Schisme fortifioit, et firent espérer au << Monde la réforme universelle de la Discipline dans toute la Chré«<tienté. Ces Maximes demeureront toujours en dépôt dans l'Eglise « Catholique. Les esprits inquiets et turbulens voudront s'en servir

(1) Pragmat. S. Ludov.

<< pour brouiller; mais les humbles, les pacifiques, les vrais Enfans « de l'Eglise s'en serviront toujours, selon la Règle, dans les vrais « besoins et pour des biens effectifs.....

Ne me demandez plus, dit encore Bossuet, ce que c'est que les « Libertés de l'Eglise Gallicane; les voilà toutes dans les précieuses << paroles de l'Ordonnance de Saint-Louis : nous n'en voulons jamais « connoître d'autres. Nous mettons notre Liberté à être sujets aux << Canons; et plût à Dieu que l'exécution en fùt aussi effective dans « la pratique, que cette profession est magnifique dans nos Livres! « Quoi qu'il en soit, c'est notre Loi; nous faisons consister notre « Liberté à marcher, autant qu'il se peut, dans le Droit commun, << qui est le principe, ou plutôt le fond de tout bon ordre dans « l'Eglise, sous la Puissance Canonique des Ordinaires, selon les « Conciles Généraux et les Institutions des Saints Pères....... Ce « n'est pas nous diviser d'avec le Saint-Siége, à Dieu ne plaise; «< c'est, au contraire, conserver avec soin jusqu'aux moindres fibres << qui tiennent les Membres unis avec le Chef. Ce n'est pas dimi<< nuer la plénitude de la Puissance Apostolique : l'Océan même a << ses bornes dans sa plénitude; et, s'il les outre-passoit sans mesure << aucune, sa plénitude seroit un déluge qui ravageroit tout l'Uni<<< vers (1). >>

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Nous avons transcrit ces passages du Sermon de Bossuet sur l'Unité de l'Eglise, non seulement parce qu'il est impossible de mieux penser et de mieux dire, mais parce qu'ils servent tout à la fois de Commentaire et de preuve au troisième Article de la Déclaration de 1682. Il seroit aussi fastidieux qu'inutile d'accumuler d'autres témoignages à l'appui de vérités aussi claires, et que les Ultramontains euxmêmes n'osent plus contredire ouvertement. Comment, en effet, soutenir aujourd'hui, sans exciter une réclamation universelle, que la Puissance Apostolique ne doit pas être exercée conformément aux Canons de l'Eglise; que les Coutumes antiques d'une grande Eglise Nationale peuvent être bouleversées par un seul Acte de la volonté

(1) Sermon sur l'Unité de l'Eglise.

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