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avoir à faire un mauvais choix? Son intérêt c'est son honneur, et l'honneur d'un ministre n'est-il pas que, sous sa direction suprême, tout marche et fonctionne bien dans son département? Mettez donc de côté des ombrages injustes, et au lieu de vous en remettre au hasard, laissez choisir le ministre selon son devoir et selon ses lumières.

Reste le dernier paragraphe. La proposition primitive laissait quatre membres au choix du ministre. Quatre membres, a-t-on dit, c'est beaucoup trop, car le ministre choisira des universitaires; il n'en faut que trois. Voilà pour ainsi dire la mesure arithmétique du plus ou moins de faveur que l'université rencontre de quatre on la réduit à trois. En vérité, c'est là un raffinement de défiance, une précaution petite et mesquine, et qui même n'aboutirait pas au résultat que vous vous proposez; car permettez à un homme qui a fait beaucoup d'examens dans sa vie de vous dire que les choses ne se passent point comme vous l'imaginez. Si vous redoutez dans un tel jury quatre voix universitaires, je vous en avertis, trois ne devraient nullement vous rassurer. Ne cherchez pas à éluder la nature des choses: ce sont les gens capables dont l'opinion prévaudra. N'y eût-il dans votre jury qu'un seul membre universitaire, égaré parmi huit pères de famille, quand ce seul juge prouvera devant un nombreux public que le candidat ne sait ni grec, ni latin, ni philosophie, ni mathématiques, ni physique, ni chimie, que diront à cela tous vos pères de famille ? Diront-ils : Non, il le sait? Ils ne l'oseraient; et s'ils l'osaient, l'effet inévitable serait un scandale public. Messieurs, l'université a fait tous les sacrifices qu'elle devait faire; elle a été au-devant de tous ceux qui étaient raisonnables; elle est absente du jury de moralité. Mettez-la dans le jury

de capacité, ne fût-ce que pour ne pas livrer ce jury au ridicule.

Remarquez que votre commission a déjà beaucoup ôté au ministre de l'instruction publique. Il avait le choix des ministres des différents cultes qui devaient siéger dans le jury. Votre commission lui a enlevé ce choix, et l'a transporté à l'évêque diocésain et au consistoire. Le ministre adhère à ce jugement, et je m'y rends moi-même ; il est certain que des ecclésiastiques, désignés par l'autorité religieuse dont ils relèvent, auront encore plus de poids, et apporteront plus de force à votre jury. Ce changement suffit, maintenez le reste. Maintenez ces quatre membres au choix du ministre, qui avaient déjà traversé heureusement en 1836 une redoutable épreuve, et avaient été acceptés par l'autre chambre. Comment se fait-il que ce qui avait paru excellent en 1836 soit devenu mauvais en 1844 ? Que s'est-il donc passé? Et en quoi l'université a-t-elle mérité d'être suspecte?

Je remarque que, parmi les trois membres laissés au choix du ministre, sont des professeurs titulaires de facultés. Mais M. le ministre vous l'a déjà dit, les facultés sont en très-petit nombre, il n'y en a pas dans toutes les académies. Il y a dix facultés des lettres pour vingtcinq académies. Vous direz qu'on fera des facultés nouvelles. Et moi je vous répondrai : Gardez-vous-en bien, vous aviliriez les facultés en les multipliant trop. On avait fait d'abord ce que vous demandez, mais à la pratique on a reconnu qu'on avait eu tort, et on a été forcé d'en détruire un très-grand nombre. Je vous le répéterai sans cesse : ne vous croyez pas plus d'esprit que vos devanciers et tenez grand compte de l'expérience. Si vous n'augmentez pas trop les facultés, si vous n'en avez que dix ou douze

pour remplir vingt-cinq jurys de capacité, il ne reste plus qu'un moyen, c'est de les faire voyager. Mais ce sera donc pendant les vacances, car pendant tout le reste de l'année les professeurs des facultés doivent être à leur poste, c'est-à-dire à leur chaire; autrement quelle perturbation!

Sans doute la déclaration que vient de faire à la tribune M. le duc de Broglie que, par ces mots : «< citoyens notables,» on peut entendre des membres de l'université, par exemple des membres du conseil académique; cette déclaration, dis-je, est déjà rassurante, et elle a satisfait M. le ministre de l'instruction publique. Mais si par ces mots on peut entendre aussi des membres de l'université, il est de la dignité et de la loyauté de la loi de le dire expressément. C'est ce que disait la rédaction primitive du gouvernement. Je préfère cette rédaction, et j'engage M. le ministre à y tenir.

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S'il est une loi qui, depuis 1830, ait obtenu la faveur publique, et qui, j'ose le dire, ait honoré la revolution de juillet, c'est la grande loi de 1833 qui a fondé en France l'éducation du peuple. Cette loi a même été favorablement accueillie d'un certain côté, qui, en général, applaudit peu à ce qui honore la révolution de juillet. Elle a paru accomplir loyalement, en ce qui la concernait, la promesse de la charte sur la liberté d'enseignement. Je tiens à la main cette loi, que d'ailleurs je connais assez bien. Savez-vous comment elle a voulu que fût composé le jury de capacité? Remarquez d'abord que dans l'instruction primaire il était bien plus facile de composer un jury de membres de droit, d'y mettre d'office M. tel et M. tel; car il ne s'agit pas là de grec et de latin et des matières du baccalauréat èslettres; il s'agit d'un examen sur la lecture, l'écriture,

l'arithmétique et le dessin linéaire, et bien entendu l'instruction morale et religieuse. C'était bien là le cas de n'admettre guère dans ce jury que ces pères de famille qui, à en croire certaines personnes, sont propres à tout, et sont le remède à tous les maux de la France. Hé bien, la loi de 1833 déclare que le jury de capacité sera tout entier à la nomination du ministre. Voilà ce qu'a fait la loi de 1833 aux applaudissements universels. C'est qu'alors, Messieurs, il n'était pas parti d'un certain côté des attaques violentes et intéressées contre une grande administration publique; c'est qu'alors l'université était honorée au lieu d'être suspecte.

Savez-vous ce que vous feriez en ôtant ainsi partout le libre choix du ministre? Vous ne détruiriez pas moins qu'un des grands principes du gouvernement représentatif, la responsabilité ministérielle. Vous avez voulu donner la liberté d'enseignement, et vous avez bien fait; mais en même temps il vous faut retenir sur la tête du ministre et du gouvernement une part considérable de responsabilité. Vous avez émancipé les établissements particuliers, mais l'État doit toujours avoir la direction générale (entendez bien ma pensée, Messieurs), la direction générale de toute l'instruction publique en France. On doit pouvoir demander compte au gouvernement de cette direction, il en doit être responsable. Mais comment voulez-vous qu'il le soit, si tout lui échappe, s'il ne garde pas la moindre autorité dans le jury qui confère le pouvoir d'enseigner? Quand la France sera couverte de mauvais établissements particuliers, qui donneront une instruction misérable, le ministre vous répondra: Cela ne me regarde pas, prenez-vous-en aux pères de famille que vous avez mis dans le jury de capacité.

Je m'adresse à une chambre composée d'hommes qui veulent la force constitutionnelle du gouvernement. Ne détruisez pas de vos propres mains la responsabilité ministérielle, et, pour cela, laissez quelque chose à l'autorité ministérielle. Il y a quelques séances, elle semblait vous être chère; qu'elle ne vous devienne pas tout à coup suspecte, quand il s'agit d'un jury de capacité, d'un jury où le choix du ministre n'est presque rien, comparé à ce qu'il est dans le jury fondé par la loi de 1833.

Je demande donc le maintien de la rédaction du gouvernement. Si celle de la commission devait l'emporter, j'y proposerais quelques modifications qui peut-être agréeraient à la commission; mais je ne veux pas désespérer du triomphe de la rédaction du gouvernement.

MÊME SÉANCE (10 MAI).

Nécessité de mettre dans le jury de capacité, non-seulement les professeurs titulaires de facultés, mais les professeurs adjoints et les agrégés.

M. COUSIN. Non, Messieurs, je n'accepte pas l'amendement de M. le ministre, ou plutôt je l'accepte; mais il ne me suffit pas. C'est très-bien d'introduire le conseil académique, mais il faut introduire aussi des membres des facultés qui ne sont pas suffisamment désignés par les termes de professeurs titulaires de facultés. Je m'explique en deux mots; je serai très-bref.

Dans les facultés, outre les professeurs titulaires, il y a encore deux classes de professeurs: il y a d'abord les professeurs adjoints. J'ai eu l'honneur de l'être moimême. Ce sont des professeurs inférieurs aux professeurs titulaires, mais inamovibles comme eux et possédant un

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