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QUATRIÈME MONASTÈRE

GUINGAMP, 1676

CHAPITRE I

Fondation et construction du Monastère.

Supériorité de la Mère Marie de la Trinité Heurtaut. Mort de la Sœur Marie des Séraphins Moisat.

Dans le récit de la fondation d'Hennebont, nous avons vu comment la Mère Marie de la Trinité préparait en même temps celle du monastère de Guingamp, quatrième de l'Ordre. Mme des Arcis fit part à sa belle-mère, Mme de Kervégan, des merveilleux desseins que Dieu avait sur elle. Aussi pieuse que généreuse, Mme de Kervégan résolut immédiatement d'y employer toute son activité et promit quatre mille livres pour la nouvelle fondation. Le mariage récent de sa fille avec M. de Lasse, conseiller au parlement de Bretagne, semblait cependant devoir absorber ses ressources, mais le jeune magistrat excitait lui-même sa belle-mère à l'accomplissement de cette bonne œuvre.

Mme de Brie, fondatrice d'Hennebont, donna aussi une rente de 15 livres et 86 boisseaux de seigle pour le futur monastère, comme nous l'avons déjà raconté.

Ces signes certains de la volonté divine engagèrent Mme des Arcis à commencer les démarches nécessaires pour obtenir les autorisations indispensables de la ville et de l'Évêque diocésain. Elle fit pour cette fin plusieurs voyages à Guingamp. Ses relations de famille lui facilitèrent beaucoup ces négociations. La ville donna son consentement le 26 août 1676, Mgr Balthazar

Granger, Évêque et comte de Tréguier, signa les lettres d'Institution le 28 septembre de la même année.

Avant même l'obtention de ces permissions, M. et Mme de Lasse cherchèrent eux-mêmes un emplacement convenable pour le futur monastère. D'insurmontables obstacles s'étant opposés à l'acquisition de l'emplacement où furent plus tard établies les dames hospitalières, ils durent porter leur choix sur de vieilles maisons du faubourg de Mont-Bareil. C'était le lieu choisi de Dieu, celui dont la Mère Marie de la Trinité avait fait la description exacte à Mme des Arcis.

Il ne fut pas facile d'amener les différents propriétaires à vendre des maisons où ils avaient toujours vécu. Une bonne vieille demoiselle, dont la maison et le petit jardin étaient au centre du terrain nécessaire, refusait toute proposition, se contentant de dire: « C'est ici que je suis née, je veux y mourir. » Mme des Arcis, désespérant de vaincre son obstination, résolut de s'adresser par de ferventes prières à la sainte Vierge. La Mère Heurtaut, informée de ces difficultés, lui écrivit d'attendre à négocier avec cette demoiselle au lendemain de l'Assomption, l'assurant qu'elle serait alors plus traitable. En effet, dès que Mme des Arcis l'aborda ce jour-là, elle la trouva complètement changée, et si disposée à vendre, que, sur sa demande, le contrat fut passé le jour même.

Dans ce terrain se trouvait une petite statue de la Vierge à laquelle les habitants avaient donné le nom de Notre-Dame-duRefuge. Depuis cinquante ans, quand ils sortaient de leurs maisons, ils avaient la naïve et touchante dévotion d'en suspendre les clefs au cou de la statue, en disant : « Notre-Dame-du-Refuge, gardez notre maison des voleurs et de tout accident. » Leur confiance ne fut jamais trompée. Aussi la bonne vieille demoiselle tenait beaucoup à cette petite image. Mme des Arcis, à laquelle le nom de la statue paraissait providentiel, désirait encore plus la conserver dans le nouveau couvent. A force de présents et de prières, elle finit par l'obtenir. Plus tard, nous verrons cette statue devenir l'instrument de plusieurs faveurs divines.

L'achat monta à la somme de 5,100 fr. que paya Me de Kervégan. Le plus difficile était d'approprier ces masures aux-usages claustraux. Pour commencer, on se servit d'abord de la maison où se trouvait la petite statue de Notre-Dame-du-Refuge. Sa longueur était de 8" 60 et sa largeur de 5" 35. Le rez-de-chaussée

devint la chapelle; le premier étage servit à la fois de réfectoire, de cuisine, de salle de communauté, et le grenier fut changé en dortoir. Le toit en était si bas qu'il fut difficile d'y placer les lits, et qu'il était impossible d'y marcher sans le toucher. La couverture était de genêts. Le reste des bâtiments était si misérable qu'il ne put même servir pour loger des Pénitentes. C'était donc un monastère avec toute la pauvreté de Bethleem, et même quelque chose de plus, car l'Évangile ne nous dit pas que la Sainte Famille eut des dettes, et Mont-Bareil en avait même avant l'arrivée des Sœurs.

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Les choses étaient en cet état, lorsqu'un jour la Mère Marie de la Trinité dit, à Rennes, à Me des Arcis: « Il nous faut préparer une chambre à notre bonne fondatrice de Guingamp; je lui ai vu sur les épaules une croix si pesante que j'en ai moi-même frémi. » Peu après arriva la mort de Me de Lasse qui fit connaître ce que signifiait cette terrible vision. Mme de Kervégan vint se consoler de cette douloureuse perte près de la Mère Marie de la Trinité. Ne pouvant plus espérer d'héritiers, cette généreuse dame ne pensa plus désormais qu'à s'assurer des enfants spirituels. Elle regardait comme tels toutes les âmes qui devaient se consacrer à Dieu dans le nouveau monastère et tripla le prix de la fondation.

Les Religieuses désignées pour cette nouvelle maison furent la Mère Marie de la Trinité Heurtaut, supérieure, la S' Marie du Saint-Esprit de Porçon, assistante, et la S' Ménard, toujours en habits séculiers pour remplir plus librement ses fonctions d'économe. Les Annales disent que ce petit nombre de Religieuses fut cause, dans la suite, des quelques désagréments qui arrivèrent. Il est certainement plus sage de s'en tenir pour les fondations au nombre de six ou sept sœurs indiqué par le Coutumier. Toutes les observances sont ainsi possibles dès le premier jour. Dans le cas présent, les difficultés sont surtout imputables au départ de la Mère Heurtaut et à la mort de la Mère de Porçon. Le monastère de Guingamp n'eut point, comme celui de Rennes, la bonne fortune de voir ses deux fondatrices rester plus de trente ans à sa tête. S'il en eût été ainsi, les peines de sa formation eussent été évitées.

Les Sœurs reçurent de Mgr de Tréguier une lettre fort aimable où il les priait de hâter leur départ et les assurait de sa bienveillance et de sa protection. Elle est du 3 octobre et le départ eut lieu le 25, en compagnie des Sœurs envoyées de Caen pour la

fondation d'Hennebont. Au passage d'une rivière qui était débordée, leur vie fut dans un sérieux danger. La S' Marie du Saint-Esprit fit vœu à Sainte Anne de visiter son sanctuaire. Sa foi fut immédiatement récompensée et la rivière franchie sans accident. Aussi, toutes ensemble, elles accomplirent la promesse de la S' de Porçon. Après avoir vu les heureux commencements d'Hennebont, la Mère Marie de la Trinité et ses compagnes arrivèrent à leur destination le 20 novembre 1676.

La fervente Supérieure passa une partie de la première nuit en prières pour demander à Dieu de bénir ses travaux. Dans d'ineffables communications, Dieu lui fit connaître les principales familles appelées à donner des novices à la nouvelle fondation. La connaissance qu'en reçut la Mère Heurtaut fut si claire, que le lendemain elle les désigna à Me des Arcis en lui annonçant en même temps qu'elle même serait leur compagne de noviciat. M. des Arcis vivait toujours et ne paraissait pas devoir rendre possible cette étonnante prophétie. Sa mort permit cependant peu après à son épouse de la réaliser.

Le lendemain de l'arrivée, fête de la Présentation de la Sainte Vierge, eut lieu la bénédiction de la chapelle et du monastère. La messe fut chantée et les Sœurs renouvelèrent leurs vœux en présence des principaux membres du clergé, qui regardaient cette œuvre si utile comme un grand bienfait pour la ville. Les Carmélites confirmèrent ces espérances en faisant connaître que plusieurs fois elles avaient vu des globes de feu tomber sur l'emplacement du nouveau couvent.

Malgré les grandes incommodités de leur installation, les Sœurs, au lieu de s'occuper d'améliorer leur habitation, commencèrent par construire un grand bâtiment à quatre étages destiné aux Pénitentes. Le salut des âmes était leur but, il fallait y travailler avant tout. Quatorze mois après, cette maison était terminée, grâce aux générosités de la fondatrice.

Les bénédictions spirituelles étaient encore plus abondantes. En moins de deux ans, dix-sept novices reçurent le voile. Les plus honorables familles de Guingamp les fournirent, et toutes ces jeunes personnes, élevées dans l'aisance, se mirent avec une sainte émulation à la pratique des vertus religieuses sous la direction de l'habile Supérieure. Sa vision de la première nuit se réalisait ainsi.

Mais la petite maison et en particulier le dortoir au toit

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