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province, de commis de petites juridictions locales, de procureurs ou notaires de petits bourgs, et de toute la bande de ces processifs municipaux, fomentateurs et chefs des misérables querelles qui désolent incessamment les villages et les petits propriétaires. Puisqu'il suffisait d'être reconnu ou simplement toléré noble ou anobli pour entrer dans les assemblées de l'ordre de la noblesse, les suffrages devaient se réunir sur un grand nombre de nobles nécessiteux, par conséquent sans lumières, envieux et remplis de petits préjugés.

Tout devant être spectacle à des Français, et comme on n'engage leur persuasion qu'en séduisant leur vanité, l'inauguration des états généraux est calculée pour produire cet effet. Loin d'y présenter la simple réunion d'un conseil d'arbitres animés d'un même esprit conciliateur, d'y montrer le calme et le recueillement d'une séance d'ouverture du parlement britannique ou du congrès américain, on y déploie la vaine splendeur et le cérémonial. puéril dont le fils d'Anne d'Autriche faisait des moyens décisifs de gouvernement moyens dont eût dédaigné de se servir l'illustre Béarnais, qui ne trouvait pas plus de grandeur que d'utilité dans des cérémonies pompeuses. La salle d'assemblée, somptueusement décorée, laisse voir mille à douze cents représentans de la France assis sur des banquettes en demi-ellipse. A la droite du trône, le clergé dans son costume de solennité; à la gauche, les députés de la noblesse, l'épée au côté, parés de plumes ondoyantes sur des chapeaux de forme féodale, revêtus de manteaux" de soie noire que relèvent des tissus et des broderies en or et des cravates dentelles; dans le fond, les cinq à six cents mandataires du tiers état, sans épée, vêtus

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tout de noir habit et manteau de laine, large cravate blanche de toile unie, et chapeau simple à la villageoise ou à la clabaude; ressemblant à ces baillis, échevins ou clercs qui jadis servaient de cortége aux seigneurs. Dans la disposition de l'étiquette, les courtisans, à qui leurs charges donnent le soin de ces petits détails, veulent faire sentir aux représentans du corps de la nation qu'ils doivent renoncer aux dehors de la considération! En outre, on a désigné une entrée particulière pour les députés du tiers état; ils sont entrés par une porte de derrière, abritée par un hangar où ils ont été pressés durant plusieurs heures, pendant que la cour, les députés de l'Église et de la noblesse franchissaient commodément la grande porte. Dans un pays où toutes les classes ne semblent vivre que pour la vanité, on affecte de blesser la .. vanité du tiers état, comme si les germes de mécontentement et les sources de division n'existaient pas en assez grand nombre. Le trône s'élève sur une estrade dont les degrés sont couverts par les officiers de la maison domestique, brillans de leurs costumes de cérémonie.

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Le roi prononce le discours suivant, qu'il avait appris par cœur : « Messieurs, le jour que mon cœur » attendait depuis long-temps est enfin arrivé, et je » me vois entouré des représentans de la nation à laquelle je me fais gloire de commander. Un long >> intervalle s'était écoulé depuis les dernières tenues » des états généraux, et, quoique la convocation de » ces assemblées parût être tombée en désuétude, je » n'ai pas balancé à rétablir un usage dont le royaume » peut tirer une nouvelle force, et qui peut ouvrir à >> la nation une nouvelle source de bonheur. La dette » de l'état, déjà immense à mon avénement au trône,

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» s'est encore accrue sous mon règne : une guerre dis>> pendieuse, mais honorable, en a été la cause; l'aug» mentation des impôts en a été la suite nécessaire, et » a rendu plus sensible leur inégale répartition. Une inquiétude générale, un désir exagéré d'innovations » se sont emparés des esprits, et finiraient par égarer » totalement les opinions si l'on ne se hâtait de les >> fixer par une réunion d'avis sages et moderés. C'est >> dans cette confiance, messieurs, que je vous ai ras» semblés, et je vois avec sensibilité qu'elle a déjà été justifiée par les dispositions que les deux premiers » ordres out montrées à renoncer à leurs priviléges pé» cuniaires. L'espérance que j'ai conçue de voir tous » les ordres, réunis de sentimens, concourir avec moi >> au bien général, ne sera point trompée. J'ai déjà or» donné dans les dépenses des retranchemens considé» rables; vous me présenterez encore, à cet égard, » des idées que je recevrai avec empressement; mais, » malgré la ressource que peut offrir l'économie la plus » sévère, je crains, messieurs, de ne pouvoir pas sou» lager mes sujets aussi promptement que je le dési»rerais. Je ferai mettre sous vos yeux la situation » exacte des finances; et, quand vous l'aurez exami»née, je suis assuré d'avance que vous me proposerez » les moyens les plus efficaces pour y établir un ordre » permanent et affermir le crédit public. Ce grand et >> salutaire ouvrage, qui assurera le bonheur du royau>> me au dedans et sa considération au dehors, vous >> occupera essentiellement. Les esprits sont dans l'agi>>tation; mais une assemblée de représentans de la na>>tion n'écoutera sans doute que les conseils de la sagesse » et de la prudence. Vous aurez jugé vous-mêmes, >> messieurs, qu'on s'en est écarté dans plusieurs occa»sions; mais l'esprit dominant de vos délibérations

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>> répondra aux véritables sentimens d'une nation gé»néreuse, et dont l'amour pour ses rois a toujours été » le caractère distinctif : j'éloignerai tout autre souve>> nir. Je connais l'autorité et la puissance d'un roi »juste au milieu d'un peuple fidèle et attaché de tout

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>> temps aux principes de la monarchie : ils ont fait la
» gloire et l'éclat de la France; je dois en
être le sou-
» tien, et je le serai constamment. Mais tout ce qu'on
>> peut attendre du plus tendre intérêt au bonheur pu-
» blic, tout ce qu'on peut demander à un souverain,
>> le premier ami de ses peuples, vous pouvez, vous de-
» vez l'espérer de mes sentimens. Puisse, messieurs
» un heureux, accord régner dans cette assemblée, et
>> cette époque devenir à jamais mémorable pour le
» bonheur et la prospérité du royaume! C'est le sou-
>> hait de mon cœur, c'est le plus ardent de mes voeux,
» c'est enfin le prix que j'attends de la droiture de
>>mes intentions et de mon amour pour mes peuples. >>

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Le garde des sceaux Barentin retrace ensuite avec quelle facile condescendance le roi dispose les moyens d'amener la prospérité publique, et combien il importe de seconder ses efforts par une confiance égale à celle qu'il témoigne à ses sujets. « L'ambition, oụ » plutôt le tourment des rois oppresseurs, est de ré»gner sans entraves, de franchir les bornes de toute >> puissance légitime, de sacrifier les douceurs du gou>> vernement paternel aux fausses jouissances d'une >> domination illimitée, d'ériger en lois les caprices ef» frénés du pouvoir arbitraire. Tels ont été ces des» potes dont la tyrannie fournira toujours à l'histoire >> des contrastes frappans avec la bonté de Louis XII, » la clémence de Henri IV et la bienfaisance de » Louis XVI. Vous le savez, messieurs, le premier » besoin de sa majesté est de répandre des bienfaits.

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» Mais, pour être une vertu royale, cette passion de » faire des heureux doit prendre un caractère public >> et embrasser l'universalité de ses sujets, Des grâces » versées sur un petit nombre de courtisans et de favoris, quoique méritées, ne satisferaient pas la grande >> âme du roi..... Qu'on se retrace tout ce qu'a fait le »roi depuis son avénement au trône, et l'on trouvera » dans cet espace assez court une longue suite d'ac» tions mémorables, La liberté des mers, que l'huma-· » nité réclamait, et celle de l'Amérique, assurées par » le triomphe des armes, la question préparatoire pro>> scrite et abolie, parce que les forces physiques d'un >> accusé ne peuvent être une mesure infaillible de Pin» nocence et du crime; les restes d'un ancien esclavage » détruits; toutes les traces de la servitude effacées, » et l'homme rendu à ce droit sacré de la nature, que » la loi n'avait pu lui ravir, de succéder à son père et >> de jouir en paix du fruit de son travail; le com>> merce et les manufactures protégés, la marine régé»nérée, le port de Cherbourg créé, celui de Dunker» que rétabli, et la France ainsi délivrée de cette » dépendance où des guerres malheureuses l'avaient » réduite.... » L'inhabile Barentin dévoile, sans s'en douter, toute l'impéritie des ministres, qui n'ont rien. prévu, rien disposé pour détourner les orages dont l'atmosphère est si visiblement chargée. Il annonce que « le roi s'en rapporte au vou des états pour la ma»›nière de recueillir les voix, quoique celle par tête, » en ne présentant qu'un seul résultat, puisse avoir » l'avantage de faire mieux connaître le désir général. » Tout est laissé dans le vague et l'incertitude sur le sujet le plus important : les ministres semblent remettre au hasard la décision de ces questions, auxquelles tient le salut de l'état.

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