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pris à tâche de réaliser ces sinistres paroles : « Je ne

suis pas venu apporter la paix, mais le glaive (1). » Pendant des siècles, les querelles religieuses ont allumé le flambeau de la discorde, ont suscité des guerres atroces, ont semé le carnage et la ruine, ont fait couler des flots de sang. C'est la philosophie qui a inspiré des sentiments plus doux, qui a fait rougir les hommes de ces luttes fratricides, qui a désarmé ces haines insensées, a rapproché les nations civilisées et a préparé l'ère d'harmonie où les peuples ne feront qu'une famille, où la guerre impie aura disparu, où l'on aura peine à comprendre que pendant si longtemps les hommes aient mis leur bonheur et leur gloire à s'entr'égorger, à se persécuter au nom de Dieu.

L'exercice de la liberté religieuse est subordonnée aux institutions qui règlent les rapports entre le spi

(1) Math. x, 34.

rituel et le temporel. Dans les sociétés anciennes, il y a une religion d'État, une orthodoxie officielle; les

magistrats prêtent leur concours aux cérémonies religieuses, les dieux font en quelque sorte partie de la cité dont ils sont les protecteurs; se soustraire à leur empire, c'est abdiquer sa nationalité; les dissidences religieuses sont inconnues, et le droit de discussion n'est pas même soupçonné. Mais, à mesure que s'élève le niveau intellectuel de la nation, il se trouve quelques hommes d'élite qui portent leurs investigations sur toutes les branches des connaissances, qui recher chent le pourquoi de chaque chose, qui, comme Descartes, comprennent que pour constituer la science, il faut faire table rase des idées reçues et n'accepter que ce qui est rigoureusement démontré. Dès lors naît le conflit entre la théologie et la philosophie, l'une s'imposant au nom de l'autorité, l'autre faisant appel au libre examen. Même quand les dissidents sont tolérés, ce n'est qu'à un sentiment de douceur et

de générosité, qu'ils doivent d'être dispensés de fléchir

devant la règle commune; on ne leur reconnaît pas le

droit de s'y soustraire; la loi religieuse continue d'être la loi de l'Etat.

Il vient un temps où cet état de choses est mis en question et n'est plus d'accord avec le progrès social; les anciennes institutions sont soumises au crible de la raison et tenues de justifier de leur légitimité; la possession n'est plus pour elles un titre suffisant. Pour peu qu'on réfléchisse sur ce problème, on ne tarde pas à reconnaître que l'autorité civile, chargée de veiller à la sûreté publique, de maintenir l'ordre, de protéger les personnes et les propriétés, est radicalement incompétente pour décider sur les questions religieuses, pour prononcer sur la vérité ou la fausseté d'une doctrine, et par conséquent pour assurer à un certain culte une supériorité, une prééminence sur les autres. Le prince, le magistrat n'ont pas qua

lité pour s'immiscer dans les affaires religieuses. L'État doit rester strictement neutre entre les diverses sectes, et cette neutralité est la condition de la liberté de tous. Cette idée mise en avant par quelques novateurs, sembla d'abord un audacieux paradoxe, on ne l'accueillit qu'avec défiance; puis on s'habitua à la contempler sans frayeur, on finit par en admirer la justesse et la simplicité; et, comme pour toutes les vérités, on s'étonna qu'elle n'ait pas été plus tôt aperçue et proclamée.

Telle est la solution que nous proposions de faire prévaloir. Nous espérons démontrer qu'elle est conforme à l'équité et à la raison, ainsi qu'à l'intérêt de la société. L'opinion publique est maintenant prépa -rée. Un grand nombre d'écrivains ont soutenu le principe avec autant de talent que d'énergie: il s'agit de le faire passer dans la pratique et d'indiquer les moyens de le réaliser. Après avoir traité la ques

tion en théorie, nous passerons à l'application en discutant les diverses parties de la législation qui devront être transformées. Nous nous occuperons spécialement des lois françaises; mais nous posons les règles pour rendre applicables à tous les pays les réformes proposées.

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