Sayfadaki görseller
PDF
ePub

d'enlever de haute lutte les barrières fortifiées que les Français, battus en 1870, avaient construites de Verdun à Belfort, il fut permis, jusqu'à un certain point, aux Belges, d'envisager comme vraisemblable l'hypothèse du respect de notre neutralité en cas de conflit francoallemand, et de se montrer parcimonieux des deniers publics nécessaires à la défense nationale.

Aujourd'hui les exemples de Port-Arthur et d'Andrinople ont démontré, sans laisser subsister le moindre doute, que les places modernes sont susceptibles d'offrir une résistance considérable à un assiégeant. Il s'ensuit que la durée du siège d'une place qu'il faudrait enlever avant d'entamer les opérations de campagne, nécessiterait des dépenses qu'une grande nation en état de guerre ne pourrait pas supporter.

Comme les couloirs que les Français ont laissé subsister entre leurs quatre grandes places de l'Est ne suffiraient pas au déploiement des forces armées allemandes et comme les fronts défensifs de Metz, Strasbourg et du Rhin moyen seraient autant d'obstacles à bouleverser d'abord par nos voisins du Sud, la nécessité de chercher au plus vite une bataille décisive en rase campagne a rendu vraisemblable l'utilisation du territoire belge par celui des deux adversaires qui chercherait à porter la guerre chez son ennemi.

Or, un conflit entre grandes puissances devient de plus en plus probable. Ne sont-elles pas écrasées sous le fardeau de charges militaires sans cesse croissantes? Deux fois, en quelques années, nos états-majors ont été sur les dents, prêts à recevoir l'ordre de mobiliser l'armée belge; et ne doit-on pas craindre qu'une troisième alerte soit fatale à la cause de la paix ? Aussi la Belgique a-t-elle envisagé la nécessité de se mettre en mesure d'écarter de son territoire les horreurs d'une guerre toujours menaçante.

L'alerte d'Agadir en 1911 a tout particulièrement attiré, sur nos institutions militaires, l'attention du public, qui s'est demandé si c'était absolument par militarisme outré que nos officiers les plus éminents réclamaient, avec tant d'insistance, la refonte et le renforcement de l'armée.

A cette époque les Belges avaient déjà fait un premier pas dans la voie des réformes en adoptant le service personnel, sous le ministère du lieutenantgénéral Hellebaut, à qui on doit également la création de l'État-Major général. M. Hellebaut s'étant retiré à la suite d'une campagne de presse qu'il ne nous convient pas d'apprécier ici, le portefeuille de la guerre fut confié ad intérim à M. le baron Ch. de Broqueville, ministre des chemins de fer, postes et télégraphes et chef du Gouvernement.

Le choix d'un « civil » s'imposait au département de la guerre. A tort ou à raison, les bureaux de la rue. Royale étaient déconsidérés aux yeux de l'armée : une réorganisation radicale était devenue nécessaire. Mais il était bien difficile à un officier, nouvellement promu ministre, de débuter dans la carrière. par les mesures énergiques que les circonstances exigeaient. M. de Broqueville s'en chargea.

Nommé Ministre de la guerre, le 26 février 1912, il présentait le 5 mars au Roi Albert un rapport concernant la réorganisation du Département de la guerre et des divers services de l'armée, l'institution d'un conseil supérieur de la défense nationale et la revision du barême des traitements des officiers.

Nos lecteurs nous permettront de reproduire ici la plus grande partie de ce rapport qui est un point de repère important dans l'historique de l'établissement militaire de la Belgique.

Sire,

<< Depuis le jour où la confiance Royale m'a appelé à la tête du Gouvernement, je me suis fait un devoir d'étudier tout ce qui se rattache à l'établissement militaire du pays et de réaliser immédiatement les mesures dont l'utilité ne pouvait être contestée.

Dans ce dernier ordre d'idées, nous avons développé intensivement nos approvisionnements en vivres et en munitions, de même que les réserves pour le matériel d'artillerie.

Je crois pouvoir dire que nous menons, avec le maximum de célérité, les travaux qui assurent à la position fortifiée d'Anvers une valeur de premier ordre.

L'heure semble venue d'aborder les réformes relatives à l'organisation du ministère de la guerre. L'œuvre serait incomplète si elle ne comprenait toutes les mesures désirables et réalisables dans le cadre des institutions fondamentales du pays.

Ce sont ces réformes que je visais lorsque, le 20 décembre dernier, j'avais l'honneur de m'exprimer devant le Sénat de la façon suivante :

« Je pense qu'il convient de donner, bien entendu sous l'absolue responsabilité constitutionnelle du Ministre de la guerre, une plus grande autonomie à ceux qui auront à mener notre armée au danger. Ils doivent avoir une action, une influence, une autorité plus étendues dans diverses matières. Et ici, je vise spécialement et en premier lieu, ce que j'appellerai la confection des plans variés de campagne.

» Il ne faut pas qu'à ce point de vue puisse se produire une dualité quelconque; il faut une unité parfaite et préparée de longue main; j'estime que personne n'est mieux placé pour l'assurer que l'État-Major général de l'armée qui aura à prendre, aux jours mauvais, les responsabilités les plus graves pour le pays.

» Bien entendu, Messieurs, ces plans doivent être élaborés en parfait accord avec le Ministre de la guerre pour la raison bien simple que le Ministre de la guerre a, en ces matières, une responsabilité que, constitutionnellement, aucun autre ne peut assumer. Il faut, d'autre part, que le haut commandement exerce ce que j'appellerai l'indispensable influence sur l'avancement de ceux qui sont appelés à être, à un moment donné, les petits comme les grands chefs.

» Il importe que le haut commandement sache exactement quels sont les hommes qu'il aura entre les mains pour diriger telle et telle unité, depuis la plus faible jusqu'à la plus considérable. Cela me paraît indispensable et ici encore j'estime que l'action du haut commandement doit s'exercer dans toute sa plénitude, mais toujours sous la responsabilité du Ministre de la guerre.

» Et de même, Messieurs, si des officiers je passe aux soldats, je dis que l'intervention du haut commandement, dans tout ce qui concerne la formation de la troupe, depuis l'homme jusqu'à l'unité, doit être plus marquante qu'elle ne l'a été jusqu'ici. Pour qu'une armée soit véritablement forte, il faut qu'elle soit formée suivant les vues mêmes de ceux qui seront ses chefs devant l'ennemi. C'est de commun accord avec eux que les règlements et instructions doivent être revisés suivant les vues modernes et adéquates.

>> De cette façon, nous assurons à l'armée cette unité qui lui est indispen

sable, cette unité qui fait la force militaire et qui a permis à des armées, faibles en apparence, de battre des armées bien supérieures en nombre, mais moins fortement structurées de par leur formation et leur homogénéité.

» Ce sont ces choses-là que je tiens avant tout à assurer, parce que je considère que rien de sérieux ne peut être fait si à la base même on n'établit des règles parfaitement logiques et rationnelles. Si je suis si affirmatif, c'est parce que ces questions ont été pour moi l'objet de longues études et qu'elles ne relèvent pas, à proprement parler, de l'ordre technique, mais de la réflexion, du bon sens et un peu aussi de la clairvoyance. >>

Votre Majesté ayant bien voulu approuver ces déclarations, j'ai l'honneur de Lui soumettre des projets d'arrêtés relatifs à une part importante de leur application.

Le plan général de la réorganisation peut être ramené à ces trois pensées maîtresses:

1o Décentralisation aussi large que possible;

2o Autonomie adéquate à la responsabilité, afin de donner à celle-ci un caractère effectif et équitable;

3o Action sans cesse renouvelée de la vie active sur la vie administrative de l'armée.

La décentralisation qui va s'opérer dans le sens d'une large autonomie, attribuée à l'État-Major général, aux inspections générales, comme aux divers chefs d'unités, va distraire du ministère de la guerre un grand nombre de ses bureaux, dont plusieurs d'ailleurs faisaient double emploi avec des organismes existant déjà. Il importe, cependant, d'assurer tout à la fois l'unité administrative comme l'unité de vues dans l'exécution journalière des mesures de principe adoptées.

La création d'un secrétariat général, d'ordre essentiellement administratif, est née de la première de ces nécessités : l'institution d'un conseil habituel du département est issue de la seconde.

Sous la présidence du Ministre, ce conseil, composé du chef de l'État-Major, des inspecteurs généraux, du secrétaire général, d'un officier général d'infanterie et de cavalerie, de l'intendant en chef, se réunira fréquemment pour veiller à l'harmonieuse exécution des décisions d'ordre général, comme au perfectionnement de tous les points d'ordre secondaire,

Les questions se rattachant à la défense nationale forment un tout où l'intérêt supérieur du pays commande de faire régner l'esprit de méthode et de suite.

Il m'a donc paru désirable de mettre, dans une légitime mesure, ces problèmes vitaux à l'abri des vicissitudes des carrières ministérielles. De là, l'institution, sous la présidence du Roi, d'un conseil supérieur de la défense nationale, qui comptera dans son sein les éléments investis des responsabilités les plus élevées en matière de commandement ou d'administration.

Le Ministre a le droit de saisir le conseil de toutes les grandes questions de principe intéressant la défense nationale.

Dans le cadre des lois existantes, chaque membre du conseil exerce le même droit.

Parmi les objets qui retiendront l'attention du conseil se trouvera, je n'en doute pas, la question des meilleures méthodes à suivre pour mener en temps utile les éléments les plus capables aux commandements supérieurs de nos forces militaires. C'est là une question d'une importance capitale et, par le fait, de nature à faire l'objet d'un débat approfondi.

Il appartient au Roi de réunir le conseil périodiquement ou autrement. Il est incontestable qu'une revision organique, comme celle que j'ai l'honneur de soumettre à Votre Majesté, ne peut être réalisée instantanément, par le seul fait de la publication de l'arrêté royal la décrétant.

A côté de l'arrêté formulant les principes, il y a une série de mesures d'exécution à prendre; la plupart d'entre elles relèvent de l'arrêté ministériel. Ces mesures doivent être bien mùries et fixées d'accord avec les autorités, désormais responsables vis-à-vis du Ministre.

Je crois répondre à l'intérêt de l'armée en proposant à Votre Majesté de ne pas conserver plus de cinq ans dans les bureaux les militaires en activité de service; la limite actuelle de dix ans me parait excessive.

Sans vouloir adresser à qui que ce soit une critique quelconque, j'estime préférable que les bureaux ne perdent jamais le contact de la vie et des besoins réels de l'armée active.

Le rapprochement constant des deux éléments constitue une source de lumière et de progrès.

La confiance de l'armée dans les bureaux chargés de pourvoir aux nécessités de la défense nationale ne peut que s'accroître dans le régime nouveau. En même temps que le premier arrêté, j'ai l'honneur d'en soumettre au Roi un second portant revision des traitements des officiers.

Sire,

Les principes qui consacrent les projets d'arrêtés royaux ont été accueillis avec faveur par les mandataires de la Nation.

Ils sont en quelque sorte la conséquence des déclarations franches et loyales que j'ai cru de mon devoir de faire au Parlement, dès le début de cette session. Assurément les transformations décidées apporteront quelque trouble dans les usages reçus ; elles heurteront peut-être les habitudes de tel ou tel bénéficiaire du régime antérieur.

Nul plus que moi ne regrette tout désagrément causé à autrui ; mais devant l'honneur et la sécurité du pays, il n'y a place que pour un sentiment : celui du devoir.

Après avoir consciencieusement cherché à éclairer mon jugement, je crois pouvoir soumettre en toute confiance les arrêtés à la Sanction Royale.

que

Bien la réforme d'un organisme aussi compliqué que l'armée ne puisse se faire sans créer des frottements, les mesures de décentralisation se sont succédé, donnant aux différents chefs militaires une plus grande responsabilité et aussi plus d'autorité.

En abandonnant aux chefs de corps une partie de ses prérogatives, le département de la guerre a détruit d'un seul coup l'influence débilitante pour la discipline de certains solliciteurs politiciens.

Nous étions en retard sur les puissances voisines, dans l'organisation de l'aviation militaire. Si notre

« ÖncekiDevam »