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D'ailleurs Bossuet pensoit, et avoit sans doute le droit de penser qu'il est bien différent d'établir des maximes générales dans un livre dogmatique, qui doit toujours exprimer la saine doctrine avec toute la rigueur théologique, ou de permettre, dans une correspondance particulière, à des ames pieuses dont on connoît les dispositions et la soumission aux règles générales de l'Eglise, de s'abandonner à ces mouvemens affectueux qui les portent à aspirer à la plus haute perfection.

On voit en effet par le témoignage de l'une de ces religieuses, avec laquelle Bossuet a entretenu la correspondance la plus suivie (1), que dans la direction spirituelle des ames il s'étoit principalement proposé pour modèle saint François de Sales, quoique ce soit un des auteurs dont les écrivains mystiques ont cherché le plus à se prévaloir pour autoriser leurs opinions. Bos'suet disoit «<* qu'il étoit redevable à saint Fran>> çois de Sales d'avoir appris les véritables règles Cornuau. » de la conduite des ames; qu'il révéroit la doc» trine de ce saint, et qu'il se le proposoit tou» jours pour modèle; qu'il pensoit à son exem

(1) Elle s'appeloit Marie Dumoutiers, veuve Cornuau. Après avoir habité long-temps la Ferté-sous-Jouarre, elle entra au noviciat au prieuré de Torcy le 16 mai 1697, et fit ses vœux solennels le 22 mars 1698. Ce fut Bossuet lui-même qui prêcha le sermon de sa prise d'habit, et de la profession de ses vœux.

* Manuscrits de M.me

M.me de Luynes et Mme d'Al

bert.

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ple qu'un évêque devoit toujours éviter de » montrer de la sévérité, ou de contrister par >> des reproches trop vifs; qu'il avoit toujours » présent à la pensée l'entretien de Jésus-Christ >> avec la Samaritaine, et la sainte adresse dont » il se sert pour faire connoître à cette femme » pécheresse ses égaremens; qu'une longue expérience lui avoit appris que la douceur ramène plus d'ames à Dieu, et les retiroit plus vérita»blement de leurs désordres, que la sévérité,

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qui ne sert ordinairement qu'à les aigrir, et à >> les soulever contre les avis qu'on leur donne. » Deux autres religieuses d'une naissance plus distinguée que celle que nous venons de nommer, (Marie-Louise de Luynes, et Marie-HenrietteThérèse d'Albert sa sœur) furent du nombre de celles dont Bossuet s'attacha à cultiver avec le plus d'affection les sentimens de religion et de piété. C'est surtout avec la cadette, qu'il paroît avoir eu le plus de relations. Bossuet, encore simple ecclésiastique, avoit, le 8 mai 1664, prêché le sermon de la profession de ses vœux à l'abbaye de la Ferté-sous-Jouarre. Elle y avoit suivi M.me de Luynes sa sœur, qui la veille (7 mai 1664) avoit fait ses vœux dans la même abbaye. Elles étoient sœurs du duc de Chevreuse, cet ami si cher et si dévoué à Fénélon. On sait que

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le duc de Luynes leur père professoit la plus haute estime pour les solitaires de Port-Royal, et il avoit élevé ses enfans dans les mêmes sentimens. Ce fut pour le duc de Chevreuse son fils, qu'Arnauld composa sa géométrie, et Lancelot sa grammaire générale. On croit même apercevoir dans la préface de la logique de Port-Royal, que ce célèbre ouvrage fut entrepris en grande partie pour l'instruction du duc de Chevreuse, ou du moins qu'il y apprit dès l'âge de treize ans les règles de l'art du raisonnement. Racine lui avoit dédié en 1670 sa tragédie de Britannicus. Nous ignorons à quelle époque le duc de Chevreuse abandonna les principes théologiques de l'école dans laquelle il avoit reçu sa première éducation, et en embrassa d'entièrement opposés.

Les deux sœurs se bornèrent à être fidèles aux sentimens de vertu et de piété dans lesquels elles avoient été élevées. Mais une sorte de prévention contre leurs instituteurs devint un motif, ou un prétexte pour les exclure des grandes places auxquelles leur naissance leur donnoit le droit de prétendre. Louis XIV ne consentit qu'avec peine à nommer en 1696 M.me de Luynes, l'aînée de deux sœurs, au prieuré de Torcy, dans le diocèse de Paris. M.me d'Albert sa sœur l'y suivit. Elle y mourut le 4 février 1699, et Bossuet BOSSUET. Tome 11.

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composa son épitaphe, où respire une tristesse douce et religieuse (1); plus heureuses dans l'espèce d'obscurité où elles passèrent leur vie, que si elles eussent rempli les grandes places de leur état, les deux sœurs eurent la consolation de n'être jamais séparées l'une de l'autre, et de vivre et de mourir sous la direction de Bossuet.

C'est pour M.me de Luynes, que Bossuet a composé un petit écrit sur la vie cachée en Dieu (2).

(1) Cy-gît Marie-Henriette-Thérèse d'Albert de Luynes. Elle préféra aux honneurs

D'une naissance si illustre et si distinguée

Le titre d'épouse de Jésus-Christ
En mortification et en piété.
Humble, intérieure, spirituelle,

En toute simplicité et vérité,

Elle joignit la paix de l'innocence

Aux saintes frayeurs d'une conscience timorée.
Fidèle à celui qui, presque dès sa naissance,
Lui avoit mis dans le cœur le mépris du monde,
Elle fut long-temps l'exemple.

Du saint et célèbre monastère de Jouarre.
D'où étant venue en cette maison

Pour accompagner une sœur chérie,
Elle y mourut de la mort des justes
Le 4 février 1699;

Subitement en apparence,

En effet, avec les mêmes préparations

Que si elle avoit été avertie de sa fin....

(2) On le trouve au tome 11.e de la dernière édition de Bossuet.

M.me de Luynes avoit prié ce prélat de lui écrire ce que Dieu lui inspireroit pour son édification sur ces paroles de saint Paul : Vous êtes morts, et votre vie est cachée en Dieu. Bossuet lui envoya ce discours. Il lui montre en quoi consiste la mort à laquelle le chrétien s'engage par son état; et il passe ensuite au grand mystère de la vie cachée en Dieu, en faisant voir de quelle manière la vie de Jésus-Christ a toujours été cachée en Dieu, comment elle l'est encore, même depuis qu'il est entré en sa gloire.

On se tromperoit, si l'on croyoit que ce discours, adressé à une simple religieuse, ne peut être utile qu'aux personnes de la même profession. Il convient à tous les chrétiens, parce qu'il expose des obligations qui leur sont communes. Aussi Bossuet, en finissant, croit pouvoir s'adresser, sans distinction, à tous en général, « grands, » ou petits, pauvres ou riches, savans ou igno»rans, ecclésiastiques ou laïques, religieux ou re

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ligieuses, ou vivans dans la vie commune » (1). Nous devons également à la respectable sollicitude de Bossuet pour les religieuses de son diocèse deux de ses plus beaux ouvrages, les Elé

(1) L'évêque de Troyes, neveu de Bossuet, fit imprimer ce discours pour la première fois en 1731, à la suite des Méditations sur l'évangile.

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