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étoit constant qu'elle n'avoit point recherché la faveur du roi, et que son seul tort peut-être étoit de s'être montrée trop foible pour un prince qui la punissoit si cruellement des fautes dont il étoit encore plus coupable qu'elle; que d'ailleurs il étoit facile de concilier la présence de M.me de Montespan avec les justes et religieuses dispositions du roi; qu'il n'existeroit plus de scandale dès le moment où le roi ne la verroit plus en particulier, et qu'elle ne tiendroit à la Cour que par le rang et les fonctions qui l'attachoient au service de la reine. On ajoutoit qu'on pouvoit se reposer avec sécurité sur le caractère d'un prince accoutumé à commander à toutes ses volontés comme à celles des autres, et qu'une pareille conduite auroit même plus de décence et de dignité qu'un éclat imprudent qui alloit exciter le zèle indiscret de tous ceux qui chercheroient à couvrir leur intérêt et leur ambition du voile de la religion.

De pareils raisonnemens, dont il étoit aussi facile d'apercevoir la vanité que les véritables motifs, n'auroient assurément rien changé aux premières dispositions de Louis XIV, si malheureusement son propre cœur n'eût pas été complice des insinuations intéressées de ses courtisans, et si une séparation de quelques mois n'eût pas

en quelque sorte ajouté une nouvelle vivacité à sa passion pour M.me de Montespan.

Louis XIV n'étoit pas encore revenu de l'armée, il n'avoit pas encore vu M.me de Montespan, et déjà il avoit fait parvenir ses ordres à Versailles, pour qu'elle s'y trouvât au moment où il y

arriveroit.

Bossuet, averti d'un changement si imprévu, crut devoir tenter un dernier effort *. Il se rendit au-devant du roi à huit lieues de Versailles,

et parut devant lui. Il n'eut pas besoin de parler.
La tristesse religieuse empreinte sur son visage,
révéloit toute la douleur de son ame: aussitôt
que Louis XIV l'aperçut, il lui adressa ces pa-
roles accablantes: « Ne me dites rien ; j'ai donné
» mes ordres, pour qu'on prépare au château
» un logement à Madame de Montespan.
>> Bos-
suet ne put que se taire et gémir.

C'est à cette circonstance remarquable de la vie de Bossuet, que le Père de la Rue a fait allusion dans son éloge funèbre; « à combien de pécheurs a-t-il dit, avec le zèle d'un Jean» Baptiste : Non licet, cela n'est point permis. » Il n'avoit quelquefois qu'à se présenter à leurs » yeux dans des momens imprévus à leurs pas»sions, pour les frapper du regret de n'en être » pas les maîtres. Ils se faisoient eux-mêmes en

* Mts. de Ledieu.

» le voyant les reproches qu'il leur épargnoit,

» et son silence discret les touchoit plus que » deur empressée des autres ».

l'ar

On sait où aboutirent toutes ces promesses illusoires de n'avoir avec M.me de Montespan, que des relations avouées par l'honneur et par la vertu. La naissance de M.elle de BLOIS, depuis duchesse d'Orléans, et celle du comte de TouLOUSE, dont elle fut bientôt suivie, donnèrent un nouvel éclat au scandale de cette réunion.

Sans doute, après un pareil triomphe, M.me de Montespan dut croire que l'ascendant qui lui rendoit le cœur de Louis XIV seroit à jamais irrésistible. Mais ce fut précisément vers cette époque qu'elle commença à perdre sa faveur et son affection, en laissant trop apercevoir à ce prince les hauteurs et les inégalités de son humeur impérieuse.

C'étoit dans la société de M.me de la Vallière, que Louis XIV avoit senti naître la première impression de la passion si vive qui l'entraîna vers M.me de Montespan. Ce fut dans la société de M.me de Montespan elle-même, qu'il commença à éprouver pour M.me de Maintenon le charme plus doux d'un attachement vertueux. M.me de Montespan avoit triomphe de M.me de la Vallière par ses agrémens et sa beauté. M.me de Maintenon

dut l'empire plus durable et plus flatteur, qu'elle conserva sur Louis XIV jusqu'à la fin de sa vie, à son esprit, à sa raison et à sa vertu.

Que l'on oublie un moment toutes les douceurs et toutes les consolations que la religion apportoit à M.me de la Vallière au fond de sa retraite ; que l'on ne considère le cœur humain que dans les affections morales qui l'agitent, le tourmentent ou le consolent; et l'on conviendra que les chagrins et les humiliations que M.me de Montespan eut à essuyer le reste de ses jours, que l'insupportable injure de se voir préférer la femme qu'elle avoit attirée elle-même dans sa maison, et qui avoit été soumise à ses ordres comme à ses caprices, durent être pour un caractère tel que le sien, un tourment mille fois plus affreux que les expiations volontaires que M.me de la Vallière s'étoit imposées.

Et si l'on se représente M.me de la Vallière suivie dans sa retraite de l'estime, du respect, des vœux et des souvenirs touchans qui étoient restés attachés à son nom, tandis que M.me de Montespan, sans amis et même sans esclaves, n'avoit conservé de sa grandeur passée, que l'affectation d'une hauteur et d'une fierté qu'elle ne pouvoit plus exercer que dans sa famille on trouvera sans doute M.me de la Vallière fut assez ven

que

*

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* Voyez les Mémoires dé Saint-Simon.

gée; mais une pareille vengeance ne pouvoit pas arriver jusqu'à cette ame douce et vertueuse; elle dut seulement y apercevoir un nouveau motif de bénir la Providence pour l'avoir conduite par la main de Bossuet au seul port où elle pût reposer en paix un cœur brisé par les orages des passions.

:

On voit avec peine que M.me de Maintenon se montra en cette occasion peu équitable envers Bossuet et il est difficile de retrouver la justesse habituelle de son esprit dans la prévention qu'elle paroît avoir conservée long-temps contre lui à la suite des événemens qui ramenèrent M.me de Montespan à la Cour.

On a pu remarquer dans sa lettre à M.me de Saint-Géran, qu'elle semble placer le duc de Montausier au premier rang pour la fermeté de sa déclaration à Louis XIV, et qu'elle ne nous montre pour ainsi dire Bossuet que sur le second plan de ce tableau si intéressant. Son humeur perce d'une manière encore plus sensible dans une autre de ses lettres à M.me de Saint-Géran. « Je vous l'avois bien dit, Madame, que M. de » Condom joueroit dans toute cette affaire un » rôle de dupe. Il a beaucoup d'esprit; mais il » n'a pas celui de la Cour. » Comment, avec autant d'esprit qu'elle en avoit elle-même, M.me de Maintenon ne s'est-elle pas aperçue qu'en you

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