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fut de les ajourner par des mesures qui associaient ensemble les illusions de Turgot, les agiotages de Calonne, les popularités de Necker. En voulant imposer au parlement quelques-uns des édits refusés par les notables, Brienne éprouva devant ces corps les mêmes résistances qu'il avait éludées devant le clergé et la noblesse. Il fit faire au roi des coups d'autorité contre les parlementaires. Le peuple soutint le parlement par des séditions. D'Espréménil invoqua de nouveau les états généraux, cette menace suprême contre le trône et qui était aussi le suicide des parlements. « La Providence, » lui répondit le président d'Ormesson d'un mot prophétique, « punira vos >> funestes conseils en exauçant vos vœux! »

La cour n'éclatait pas moins contre quelques tentatives d'économie qui lui semblaient des attentats contre la propriété de ses profusions. Le roi exila le parlement à Troyes; ses deux frères, le comte de Provence et le comte d'Artois, allèrent eux-mêmes en son nom faire enregistrer de force les édits contestés. L'un fut applaudi, à cause de son attitude populaire, à l'assemblée des notables, l'autre insulté à cause de sa partialité pour l'aristocratie.

XLII.

Le parlement exilé à Troyes y devint le foyer des oppositions et le but des hommages de l'opinion publique. << Paris, » lui disait-on dans des adresses de condoléance,

<< la nation entière cherche en vous ses dieux tuté

>> laires. >>>

Les parlements de province ressentirent comme une injure commune l'exil du parlement de Paris. « Les >> coups d'autorité, » écrivirent-ils dans leur délibération factieuse, « les coups d'autorité sans cesse renou» velés, les exils, la contrainte et la force mises à la » place de la justice, étonnent dans un siècle éclairé, » blessent une nation idolâtre de ses rois, mais libre et » fière, glacent les cœurs, et pourraient rompre à la fin >> les liens qui unissent le souverain aux sujets et les >> sujets au souverain! >>

Le roi et les parlementaires sensés aspiraient à une réconciliation. D'Espréménil et les parlementaires fanatiques de leur corps la repoussaient. « Vous êtes sortis >> de Paris couverts de gloire, » s'écriait ce tribun de la magistrature, «< et vous y rentrerez couverts de boue! >>

Duport, Robert de Saint-Vincent, Fréteau, conseillers au parlement, soutenaient ce jeune factieux dans ses audaces. Le roi céda et retira ses édits à des conditions honteuses pour son autorité. La rentrée triomphale des parlements dans Paris fut une insulte à la majesté royale. Le peuple, ameuté par les jeunes séditieux de la magistrature, y promena dérisoirement, y couvrit de fange et y brûla dans un prophétique supplice les images du baron de Breteuil, ministre de la maison du ri, de la duchesse de Polignac, épargnant à peine la reine elle-même dans ses simulacres de vengeance, et

mêlant déjà le nom de la reine à toutes les imprécations populaires. Les parlementaires contemplaient avec une joie secrète ces délires de popularité qui leur annonçaient un triomphe factieux sur le trône, triomphe derrière lequel ils ne voyaient pas leur propre échafaud.

XLIII.

Enfin, le premier ministre, dans le désespoir de ses mesures qui avortaient toutes, résolut d'arracher un dernier emprunt de 400 millions au parlement, au prix de la convocation des états généraux ajournée à cinq ans. Le roi s'alarma, la reine frémit, les princes et les courtisans s'indignèrent. Brienne répondit à tout par la nécessité du trésor et par le long délai entre la promesse et l'exécution. Se fondant sur la mobilité du caractère national, il sourit des craintes qu'on affectait sur une mesure ajournée à cinq ans dans un pays où les années étaient des siècles. Il affirma au roi et à la reine que le déficit une fois comblé par les quatre cents millions obtenus des parlements, une bonne gestion des finances, le calme rendu aux esprits, les occasions de remontrance enlevées une fois pour toutes aux parlements et le murmure étouffé dans le peuple, d'heureuses et inévitables diversions entraîneraient l'opinion publique à d'autres courants d'idées, et que ce subterfuge de gouvernement serait oublié avec les circonstances qui y faisaient recourir.

XLIV.

Le roi et la cour, convaincus par ces sophismes de la légèreté, consentirent à tout promettre. Une séance royale fut assignée pour l'enregistrement par autorité à l'emprunt de quatre cents millions. Le roi y parla en maître et revendiqua pour lui seul le pouvoir législatif sans dépendance et sans partage. Son ministre semblait compenser par les vaines maximes du pouvoir absolu la concession entière du pouvoir monarchique qu'il lui arrachait dans l'acte de convocation de la nation.

Cette concession suprême ne ferma pas la bouche aux tribuns du parlement devant le roi. Ils murmurèrent contre la violence de l'enregistrement, contre l'énormité de la somme, contre le délai de cinq années qui suspendait le bénéfice de la promesse.

<«< Vous nous parlez de cinq années,» s'écria le vieux parlementaire Robert de Saint-Vincent, sans s'intimider devant la majesté royale; « mais depuis le

règne de Votre Majesté, les mêmes vues ont-elles » présidé jamais cinq ans de suite à l'administration » de vos finances? Vous flattez-vous, ministre d'un » jour, d'avoir le temps de réaliser les vôtres ? Cette » faveur qui vous a élevé, vous flattez-vous qu'elle vous » maintienne? Sire, le remède aux plaies de l'État vous » a été indiqué par votre parlement : c'est la convoca>>tion des états généraux; mais cette convocation, pour

» être utile, doit être prompte. Pourquoi ce retard? >> C'est que vos ministres veulent éviter cette assem» blée dont ils redoutent le contrôle, mais leur espé>>rance est vaine : les besoins de l'État vous forceront à » les réunir d'ici à deux ans! » (Et comme un murmure s'élevait dans le groupe des courtisans qui entouraient le roi.) << Oh! oui,» reprit l'orateur populaire, ils vous y forceront. Retranchez ce préambule déri»soire, parce qu'il est indigne de la majesté royale. »

XLV.

De telles paroles, prononcées en face du roi, aans tout l'appareil de sa force, semblaient faire entendre, sous la monarchie, l'éloquence républicaine. D'Espréménil y ajouta le pathétique et l'objurgation en conjurant le roi, avec larmes, de céder aux vœux de son peuple et de se jeter à l'instant dans les bras des états généraux.

Le roi ému balbutia quelques mots qui semblaient arracher ce consentement de son cœur.

Le duc d'Orléans changea la scène en se levant avec un embarras qui trahissait la timidité sous l'audace. « Sire,» dit-il d'une voix tremblante et en perdant la mémoire du peu de paroles que ses conseillers lui avaient soufflées, « cet enregistrement est illégal, et il >> faudrait exprimer qu'il est fait par le commandement » de Votre Majesté. »

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