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cœur,

et en découvrir les sentimens. Ce que nous savons, c'est que, malgré toutes ces marques de repentir, la pénitence de la plupart des pécheurs à la mort a toujours paru suspecte aux Pères de l'Eglise et aux maîtres de la morale chrétienne : pourquoi ? parce qu'ils ont toujours craint que ce ne fût pas une pénitence de cœur, c'est-à-dire, une pénitence où le cœur se fùt détaché réellement et sincèrement du péché.

SECOND POINT. Sans la pénitence du cœur point de vrai attachement à Dieu, ni par conséquent de réconciliation avec Dieu. Je l'ai dit, et c'est un principe universellement reconnu, que la pénitence, en nous détachant du péché, doit en même temps nous rapprocher de Dieu. Telle est la doctrine expresse de saint Augustin, lorsqu'il nous enseigne que la pénitence est renfermée en deux mouvemens tout contraires, l'un de haine, l'autre d'amour; de haine par rapport au péché, et d'amour à l'égard de Dieu : de haine, voilà le détachement du péché ; et d'amour, voilà l'attachement à Dieu. Je n'examine point quel doit être le degré de cet amour : il me suffit que sans quelque amour, ou parfait ou commencé, il n'y a point de pénitence recevable au tribunal de Dieu. Or qui ne sait pas que c'est le cœur qui aime, le cœur qui s'affectionne, le cœur qui s'attache; et de là qui ne conclut pas que, de la part du pécheur pénitent, il ne peut donc y avoir de véritable attachement à Dieu que par la pénitence du cœur? Faisons du reste tout ce qui nous peut venir à l'esprit de plus généreux, de plus héroïque et de plus grand; sacrifions nos biens, mortifions notre chair, versons notre sang, donnons notre vie; tout cela, sans l'action du cœur, n'est point s'attacher à Dieu ni aimer Dieu, et par une suite évidente, tout cela n'est point conversion à Dieu, ni pénitence. Qu'est-ce donc ? c'est, pour user des expressions

figurées de l'Apôtre, courir en vain, et battre l'air inutilement. C'est pour cela même aussi que Dieu, par la bou che des prophètes, rappelant les pécheurs et les invitant à la pénitence, ne leur recommandoit, à ce qu'il paroît, rien autre chose que de revenir à lui de cœur, de rentrer dans leur cœur, de se faire un cœur nouveau; parce que n'étant point à lui de cœur, c'étoit n'y point être du tout.

Vérité que le Roi prophète avoit bien comprise, lorsque, reconnoissant les désordres où la passion l'avoit conduit, et voulant en obtenir de Dieu le pardon, il lui disoit : Si pour vous appaiser et pour me réunir à vous, vous demandiez, Seigneur, des victimes, j'en aurois assez à vous offrir: mais que seroit-ce pour un Dieu que le sang des animaux, et quelle estime feriez-vous de tous les holocaustes? (1) Le grand sacrifice qui doit vous plaire, ô mon Dieu! poursuivoit ce roi pénitent, c'est celui de mon cœur. Sans cette offrande, toutes les autres ne vous peuvent être agréables; mais un cœur contrit et humilié devant vous, mais un cœur qui se tourne vers vous, qui se donne à vous, voilà ce que vous n'avez jamais méprisé, et ce que jamais vous ne mépriserez.

Non, il ne le méprise point; et que dis-je ? il en est même jaloux, et tellement jaloux, qu'il daigne bien, selon le témoignage de l'Ecriture, se tenir luimême à la porte de notre cœur pour nous en demander l'entrée et la possession. Il ne le méprisa point, ce cœur contrit, quand, touché de la pénitence de Manassés, il lui pardonna toutes ses impiétés et le rétablit dans tous ses droits ; il ne le méprisa point quand il remit à Magdeleine tous ses péchés, parce qu'elle avoit beaucoup aimé, c'est-à-dire, parce qu'ayant détaché son cœur de tous les engagemens du monde, elle le lui avoit dévoué désormais et sans réserve. Il ne l'a point

(1) Ps. 50.

méprisé en tant d'autres, et il ne le méprisera point dans nous.

Que de raisons nous engagent à lui faire ce sacrifice, et que de puissans motifs doivent nous exciter à cette pénitence du cœur ! Après nous être séparés d'un maître si bon, et si digne d'un attachement éternel, retournons à lui, non point dans un esprit de servitude, ni par une crainte basse et toute naturelle, mais dans un esprit de confiance, d'espérance, d'amour. Si donc en ce saint temps, il nous fait entendre sa voix, n'endurcissons point nos cœurs, mais ouvrons-les à sa grâce, qui nous est communiquée pour les amollir et pour les rendre sensibles. A quoi le seront-ils, s'ils ne le sont pas à l'offense du souverain Auteur qui les a formés, et qui ne les a formés que pour lui?

MARDI.

Jean-Baptiste prêchant une pénitence humble et sans présomption.

SERMON

SUR LA FAUSSE CONFIANCE EN LA MISÉRICORDE DE DIEU.

Genimina viperarum, quis ostendit vobis fugere à venturâ irâ?... Et ne cœperitis dicere : Patrem habemus Abraham.

Race de vipères, qui vous a appris à fuir la vengeance dont vous étes menacés ? Et ne dites point: Abraham est notre Père. Luc. 3.

CE's Juifs à qui parle Jean-Baptiste descendoient d'Abraham et s'en glorifioient; mais pour confondre leur orgueil, ce zélé prédicateur leur reproche la corruption de leurs mœurs, jusqu'à les appeler race de vipères. En cette qualité d'enfans d'Abraham, ils pensoient être à couvert de la colère du ciel; mais le divin Précurseur leur annonce qu'elle éclatera sur eux, et qu'ils n'ont qu'une confiance présomptueuse qui les sé

duit. Telle est encore, par une juste comparaison, la fausse confiance de tant de pécheurs, qui se font de la miséricorde du Seigneur un prétexte pour s'autoriser dans leurs désordres et pour se flatter d'une impunité prétendue. Confiance que j'attaque aujourd'hui, et que nous allons considérer sous deux rapports : par rapport à Dieu, et par rapport au pécheur. Par rapport à Dieu, confiance la plus injurieuse : premier point. Par rapport au pécheur, confiance la plus trompeuse : second point. Heureux l'homme qui craint le Dieu tout-puissant, et qui, touché de cette crainte, prend soin de le fléchir par l'humilité de la pénitence, et prévient ainsi ses jugemens éternels.

PREMIER POINT. Confiance par rapport à Dieu la plus injurieuse. Dire: Dieu ne veut pas me perdre, il est bon, il est miséricordieux; et en conséquence de ce principe, se confirmer dans son péché et devenir plus libre à le commettre, c'est se rendre tout à la fois coupable envers Dieu, et de l'abus le plus énorme, et de la plus sacrilége profanation.

1. Abus le plus énorme : de quoi? de la bonté de Dieu. Car de cette bonté même de Dieu qui est un des motifs les plus puissans pour nous attacher à lui, c'est prendre sujet et se faire une raison de se tourner contre lui. Hé quoi, disoit l'Apôtre, parlant aux Romains, ignorez-vous que la miséricorde du Seigneur vous invite à la pénitence? (1) N'est-ce pas par sa miséricorde qu'il est plus digne de notre amour? Et est-il donc enfin une dureté de cœur pareille à celle d'un homme qui veut vivre ennemi de Dieu et dans un état de guerre avec Dieu, parce qu'il sait que Dieu l'aime assez pour être toujours disposé à le recevoir et à lui pardonner? 2. Profanation la plus sacrilége: car c'est

(1) Rom. 2.

profaner la miséricorde divine. Sa fonction la plus essentielle est d'abolir le péché en faisant grâce au pécheur; mais par l'usage le plus monstrueux, et par le plus abominable renversement, ce péché qu'elle doit effacer, un pécheur la fait servir à l'entretenir, à le fomenter et à le perpétuer. Voilà de quoi le Dieu d'Israël se plaignoit si amèrement à son peuple, et de quoi il peut se plaindre à nous-mêmes : Vous m'avez fait servir à vos iniquités (1); comme si j'en étois le fauteur; comme si ma miséricorde, cet excellent attribut de ma divinité, n'étoit qu'une indulgence aveugle et molle; comme si, par une patience contraire à ma sainteté et aux intérêts de ma justice, elle devoit excuser tout, tolérer tout, me rendre insensible à tout.

Telle est en effet l'idée que le pécheur présomptueux conçoit de Dieu, et qu'il en veut concevoir : pourquoi? parce que cette idée est favorable à sa passion, et voici le mystère. Quelque libertin et quelque abandonné qu'il puisse être, il y a toujours de secrets reproches de la conscience qui le troublent; et à moins qu'il n'ait éteint dans son cœur toutes les lumières de la foi, les menaces du ciel et ses vengeances l'effraient malgré lui à certains momens. Mais que fait-il pour se délivrer de ces remords et de ces frayeurs? Il se figure dans Dieu une miséricorde selon son gré, une miséricorde qui ne lui manquera jamais, une miséricorde où il trouvera dans tous les temps une ressource prompte et présente. De cette sorte il vient à bout de deux choses qui l'accommodent : l'une, de demeurer dans son péché ; l'autre, d'y être tranquille et sans alarmes. De demeurer, dis-je, dans son péché ; et voilà ce qui lui plaît, voilà ce qui fait toute la douceur de sa vie ; mais afin de mieux goûter cette douceur, il faut qu'il ý soit exempt de toute inquiétude, et voilà ce qu'il obtient, ou ce qu'il tâche

(1) Isai. 43.

d'obtenir,

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