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Quelles grâces du ciel, quelles communications divines est-on en disposition de recevoir! Car comme Dieu ne se plaît point dans le trouble, il aime à demeurer dans la paix ; et une ame pacifique est d'autant mieux préparée à le posséder, qu'elle sait mieux sc posséder elle-même.

2. La paix au dehors. On l'entretient par la douceur ; c'est-à-dire qu'on vit bien avec tout le monde. Et le moyen qu'on eût avec qui que ce soit quelque démêlé, puisqu'on est toujours attentif à ne rien dire et à ne rien faire qui puisse blesser personne, puisqu'on est toujours prêt à prévenir les autres et à leur céder, puisquon à un soin extrême d'éviter toute contestation qui pourroit naître entre eux et nous, puisque partout on leur donne toutes les démonstrations d'une affection sincère et d'une pleine déférence à leurs volontés? c'est ainsi qu'on se les attache, et que la parole du Fils de Dieu s'accomplit, savoir, que les débonnaires gagneront toute la terre (1). Heureuses donc, soit dans l'état séculier, soit dans l'état religieux, toutes les sociétés qu'une charité douce et officieuse assortit, et où elle maintient la bonne intelligence et l'union des cœurs! Mais par une règle toute contraire, on ne sauroit assez pleurer le sort de tant de familles, de tant de maisons et de compagnies, où des esprits ardens, des esprits impatiens et brusques, des esprits durs et intraitables, des esprits fiers et hautains, défians et délicats, des esprits critiques et sévères à l'excès, de faux zélés, d'impitoyables et de faux réformateurs, allument le feu de la discorde et sèment les querelles et les divisions. Quels scandales, quels maux s'ensuivent de là! On n'en est que trop instruit ; mais, pour couper cours à de tel's désordres et pour y remédier, on ne peut trop s'étudier soi-même ni trop prendre de précautions.

() Matth. 4.

JEUDI.

Jean-Baptiste condamnant la médisance.

SERMON SUR LA MÉDISANCE.

Neque calumniam faciatis.

Ne parlez mal de personne. Luc. 3.

CE que condamne le saint Précurseur, ce ne sont point seulement ces fausses suppositions que le 'mensonge imagine, et ces lâches calomnies dont il noircit le prochain; mais ce sont ces médisances, en cela même plus mortelles ou du moins plus irréparables, que la vérité les accompagne, et qu'elles sont fondées sur des faits plus réels et plus certains. Est-il un péché plus à craindre; en est-il un contre lequel il nous importe plus de nous prémunir par toute la vigilance et toute l'attention nécessaire? Il y a des péchés où l'on se porte plus difficilement; et cette difficulté sert en quelque sorte de préservatif pour s'en défendre. Il y a des péchés où nous nous laissons entraîner plus aisément, mais où nous péchons aussi plus légèrement ; et cette légèreté de l'offense en diminue le péril. Mais un péché où se rencontrent tout à la fois, et une extrême facilité à le commettre, et une offense griève en le commettant, voilà ce que nous devons regarder comme un des péchés les plus dangereux ; et n'est-ce pas là le double caractère de la médisance? Facilité de la médisance: premier point. Grièveté de la médisance: second point. Ces deux points unis ensemble et rapportés l'un à l'autre, nous feront comprendre l'oracle du Saint-Esprit : que c'est un bonheur inestimable de savoir bien gouverner sa langue, et de ne pécher point en paroles.

PREMIER POINT. Facilité de la médisance. Un péché où nous porte le penchant de la nature; un péché dont l'occasion nous est fréquente et presque continuelle, un péché que nous nous justifions à nous-mêmes par de spécieux prétextes et des sujets apparens, un péché qui ne coûte que quelques paroles, et dont les moyens sont toujours les plus présents et les plus prompts, enfin un péché qui fait l'agrément des conversations, et qui se trouve applaudi et bien reçu de tout le monde, c'est sans doute un péché aisé à commettre: or telle est la médisance.

1. Péché où nous porte le penchant de la nature, je dis de la nature corrompue; car voici quelle est la perversité de notre esprit: nous nous rendons mille fois plus attentifs à découvrir dans le prochain le mal que le bien, et nous sommes incomparablement plus enclins à nous entretenir de ses mauvaises que de ses bonnes qualités. C'est ce que nous éprouvons tous: mais outre cette inclination commune, il y en a encore de plus particulières dans une multitude infinie de gens, les uns légers à parler et ne pouvant rien retenir de tout ce qu'ils savent, ou qu'ils croyent savoir; les autres critiques et censeurs, trouvant partout à reprendre, et s'épanchant volontiers sur tout ce qu'ils remarquent dans autrui, ou qu'ils pensent y remarquer d'imperfections et de défauts: or dès que c'est la pente naturelle qui nous conduit, a-t-on de la peine à suivre le mouvement dont on se sent emporté ?

2. Péché dont l'occasion nous est fréquente et presque continuelle. Hé! que fait-on autre chose dans la société humaine, que de se voir, que d'avoir ensemble d'oisifs et de longs entretiens ; et parce qu'il ne semble pas qu'on puisse les soutenir sans le secours de la médisance, de quelle autre chose s'occupe-t-on? On se donne l'exemple les uns aux autres, on s'excite les uns

les autres ; les plus sages ne peuvent résister au torrent, et sont en quelque manière forcés d'entrer dans le discours et de se joindre à ceux qui l'ont entamé. Bien loin qu'il leur fût difficile de médire, il ne leur seroit presque pas possible de s'en abstenir et de se taire.

per.

3. Péché que nous nous justifions à nous-mêmes par de spécieux prétextes et des sujets apparens. On dit : Que faire? il faut bien que quelqu'un soit mis en jeu; autrement on tariroit bientôt et on demeureroit dans le silence. On dit: Il faut bien être instruit de ce qui se passe; il faut bien connoître le monde, afin de ne s'y pas tromOn dit : Je n'ai rien contre ces personnes, et je ne prétends point leur nuire; si j'en parle, c'est fort indifféremment. On dit: La chose n'est pas secrète, ou dans peu elle cessera de l'être. On dit : C'est un homme dont je n'ai pas lieu d'être content; il en use mal; pourquoi l'épargnerois-je? il se fait trop valoir; il est bon de l'humilier. On dit : Je n'en impose point, je n'avance rien de faux, tout est comme je le rapporte. Enfin que ne dit-on pas? et rassuré de la sorte, avec quelle liberté ne s'explique-t-on pas, et ne lance-t-on pas les traits les plus piquans?

4. Péché qui ne coûte que quelques paroles, et dont les moyens sont toujours les plus présents et les plus prompts; il ne s'agit que de s'énoncer, ou même au défaut de la voix, un geste, un signe, un coup d'œil suffit, et dans un moment fait concevoir tout ce que la bouche pourroit exprimer ; car on médit en plus d'une façon, et il y a pour cela plus d'un langage.

5. Péché qui fait l'agrément des conversations, et qui se trouve applaudi et bien reçu de tout le monde. Ce n'est pas que dans le fond de l'ame, on n'ait souvent en horreur le médisant; mais la médisance plaît, surtout quand elle est assaisonnée de bons mots, c'està-dire, de mots qui percent, quidéchirent, qui expo

sent le prochain à la risée, et qui insultent en quelque sorte à sa honte et à son malheur. Tous les esprits alors se réveillent pour écouter, et on redouble l'attention; il n'est donc point surprenant, après cela, qu'avec un accès si facile la médisance fasse de si grands progrès, et que sans obstacle elle répande de tous côtés son venin. Aussi est-ce le péché le plus commun; et de là les parfaits chrétiens tirent deux conséquences: la première, d'éviter, autant qu'il leur est possible, le commerce du monde; et la seconde, d'y être toujours en garde, toutes les fois qu'ils y sont appelés; car ils n'ignorent pas combien la médisance est un mal contagieux, et avec quelle subtilité et quelle vitesse il se communique.

SECOND POINT. Grièveté de la médisance. C'est un principe général, et que nous devons reconnoître avant toutes choses, savoir, que la médisance est, de sa nature, un péché grief: pourquoi? par le tort qu'elle fait au prochain, à qui elle ravit le plus cher de tous les biens de la vie humaine et civile, qui est la réputation. Car la réputation, disent les théologiens, est un bien propre où chacun a droit, et un bien d'une valeur inestimable dans l'opinion des hommes; par conséquent, si je l'enlève à mon frère sans un titre légitime et sans une solide raison, c'est une injustice dont je me rends coupable envers lui, et dont je lui dois une réparation aussi entière qu'elle le peut être ; mais pour ne pas insister davantage sur un point si universellement établi et tant de fois traité dans la chaire, attachons-nous à quelques circonstances particulières sur quoi il est moins ordinaire de s'expliquer, et mesurons ici la grièveté de la médisance par le caractère des personnes qu'elle attaque, par les tours malins qu'on lui donne, par le dessein prémédité qu'on s'y propose, par l'éclat avec lequel on la répand, par les scandales qui

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