Sayfadaki görseller
PDF
ePub

l'obéissance que nous rendons à l'Eglise. Qu'un fidèle ou un homme réputé tel, se soumette aux décisions de l'Eglise, et qu'il les accepte, quand elles sont selon ses vues, et selon son sens particulier, quoique sa soumission puisse être bonne et méritoire, elle n'est pas néanmoins à l'épreuve de tout soupçon. Car ce peut être quelquefois autant une simple adhérence à son propre sentiment, qu'une véritable soumission au tribunal d'où ces définitions sont émanées. Mais que je voie cet homme aussi soumis d'esprit et de cœur, quand l'Eglise décide contre lui, quand elle prononce des jugemens qui le condamnent, qui l'humilient, c'est alors que je canonise sa foi, et que je lui applique, avec toute la proportion convenable, ce que le Fils de Dieu dit au Prince des apôtres : Vous êtes heureux dans votre obéissance, puisque ce n'est point la chair ni le sang qui vous l'a inspirée, mais qu'elle ne peut venir que d'en-haut, et de la grâce du Père céleste (1).

Cette remarque regarde tous les temps, et spécialement le nôtre. Je demanderois volontiers à des gens : Pourquoi ce partage que vous faites, et pourquoi contre la défense du Saint-Esprit, avez-vous un poids et un poids? Ou soumettez-vous à l'autorité de l'Eglise en tout ce qui concerne la foi, ou ne vous y soumettez en rien, et retirez-vous. Car c'est la même autorité qui définit un article aussi bien que l'autre; et elle n'est pas plus digne, ou, pour mieux dire, elle est aussi digne de créance sur l'un que sur l'autre.

En effet, dès que nous entreprendrons d'examiner les décisions de l'Eglise, et que nous nous croirons en droit de discerner les unes des autres; dès que nous voudrons, pour ainsi dire, partager notre soumission, et que selon notre sens nous recevrons celles qui nous plairont, ou nous rejetterons celles qui ne nous plairont pas, nous détruirons l'autorité de ce souverain (1) Matth. 16.

tribunal, et la foi que nous y avons. Car la foi que nous devons avoir aux oracles de l'Eglise, cette foi ferme et inébranlable, n'est fondée que sur son infaillibilité, de même que sou infaillibilité est établie sur cette promesse de Jésus-Christ, voilà que je suis avec vous en tout temps jusqu'à la consommation des siècles (1). Or du moment que nous refuserons notre créance à un seul point décidé par le jugement de l'Eglise, nous ne la regarderons plus comme infaillible, puisque nous prétendrons qu'en ce point particulier, non-seulement elle a pu faillir, mais qu'elle a failli en effet. Nous adhérerons, je le veux, à tous les autres; mais ce qui nous y déterminera, ce ne sera point précisément l'Eglise, ni son témoignage. Nous y souscrirons, parce qu'ils se trouveront conformes à nos raisonnemens et à nos principes: de sorte que dans notre adhésion et notre soumission nous ne nous réglerons point tant sur ce que l'Eglise aura jugé, que sur ce que nous aurons jugé nous-mêmes.

Car si l'autorité de l'Eglise étoit, comme elle doit l'être, la règle de notre obéissance, quoi qu'elle prononçât, nous n'aurions là-dessus ni doutes à former, ni difficultés à opposer. Il nous suffiroit de savoir qu'elle a parlé sa parole fixeroit toutes nos incertitudes, et arrêteroit toutes les contestations. Peut-être sur tel article ou sur tel autre, notre esprit naturellement indocile auroit-il de la peine à plier, et peut-être préoccupé de ses opinions, seroit-il porté à disputer et à se défendre; mais bientôt nous le réduirions sous le joug, et nous réprimerions ses révoltes. Nous nous dirions à nous-mêmes En cette décision, ou c'est l'Eglise qui se trompe, ou, malgré mes prétendues connoissances et mes préjugés, c'est moi qui suis dans l'erreur et qui m'égare. Il n'y a point de milieu. Or de penser que, sur aucun point qui appartienne aux dogmes de la re

(1) Matth. 28,

:

ligion et à la doctrine chrétienne, l'Eglise de Dieu, l'Epouse de Jésus-Christ, l'organe vivant et l'interprète de l'Esprit de vérité, ait pu se méprendre et ait manqué de lumière, c'est de quoi, dans une sainte catholicité, je ne puis avoir le moindre soupçon. Par conséquent, c'est moi qui me suis trompé jusques à cette heure, et non point l'Eglise, toujours éclairée d'enhaut. Elle a pris soin de s'expliquer; cela suffit. Pourquoi me persuaderois-je que l'assistance du ciel, dans la question présente, lui ait été refusée, et que Dieu, dans cette conjoncture particulière, l'ait abandonnée? Comment irois-je jusqu'à cet excès de présomption de m'imaginer que je suis mieux instruit qu'elle du sujet dont elle vient de connoître; que je l'ai mieux approfondi, et que j'en ai une notion plus juste? Avant qu'elle se déclarât, et tandis que la question étoit entière, je pouvois raisonner à ma façon ; je pouvois réfléchir, méditer, user de recherches, alléguer mes preuves, et m'y attacher; mais maintenant il faut que l'autorité l'emporte, et si la raison ose encore tenir et ne veut pas se soumettre, il faut que ce soit une raison aveugle, prévenue, éblouie d'une fausse lueur qui la séduit, ou que ce soit une raison opiniâtre et inflexible dans son obstination. Voilà, dis-je, les leçons qu'on se feroit à soi-même; et, conformément à ces leçons, on ne prendroit plus garde si ce sont nos sentimens que l'Eglise a proscrits, ou si ce sont ceux d'autrui; si c'est ceci, ou si c'est cela. On s'humilieroit sous le poids d'une autorité si respectable et si vénérable. On y reconnoîtroit l'autorité de Dieu même, et l'on auroit dans son obéissance un mérite d'autant plus excellent, qu'elle nous coûteroit un sacrifice plus difficile, et plus contraire à l'orgueil de l'homme, qui est celui de notre propre jugement et de nos pensées.

Telle fut l'obéissance des premiers chrétiens dans une célèbre matière qu'ils agitèrent entre eux, et que

[ocr errors]

saint Luc rapporte au quinzième chapitre des Actes des apôtres. Le fait est mémorable, et plût à Dieu que, dans toute la suite des temps, on eût profité de l'exemple de soumission que donnèrent pour lors les premiers fidèles. Il s'agissoit de savoir si les gentils convertis à la foi devoient être assujettis aux cérémonies judaïques; s'ils devoient observer la loi de Moïse, et s'ils étoient obligés à la circoncision. Les esprits ne convenoient pas; il y avoit des raisons de part et d'autre, et chacun s'arrêtoit à celles qui le touchoient davantage. Dans cette diversité d'opinions, on contestoit, on s'animoit, et la chaleur de la dispute causoit du bruit parmi le troupeau. Or pour rendre la paix à l'Eglise, et pour rompre le cours d'une controverse dont les suites étoient à craindre, quel parti prirent les apôtres ? Ce fut de s'assembler à Jérusalem, de discuter à fond et de concert le point en question, d'en faire un examen juridique, et d'en donner une résolution solennelle, qui réunît tout le corps des fidèles, Juifs et gentils, dans une même créance et une même pratique. Tout s'exécute ainsi qu'on se l'étoit proposé. Sous la garde et la direction de ce divin Esprit qui préside à tous les conseils de l'Eglise, Pierre, vicaire de Jésus-Christ, au nom duquel il s'énonce, se lève dans l'assemblée, parle, non point en homme simplement, mais en homme plein de Dieu, qui l'inspire et qui l'autorise ; déclare où l'on s'en doit tenir, et résout en peu de mots toute la difficulté. Mes frères, dit-il, Dieu n'a mis nulle différence entre nous et les gentils, et ce n'est point par la loi de Moïse qu'il purifie leurs cœurs, mais par la foi. Maintenant donc, continue l'Apôtre, pourquoi tentez-vous le Seigneur, jusqu'à charger les disciples d'un joug que nos pères ni nous n'avons pu porter? (1) C'étoit l'ancienne loi et toutes ses observances.

(1) Act. 25.

Jacques,

Jacques, évêque de Jérusalem, prend ensuite la parole, et se joint au prince des apôtres, qui tous ensemble jugent et décident comme lui. Le décret est envoyé au nom d'eux tous. Alors plus de dispute, consentement unanime de toute la multitude; et c'est ce que l'historien sacré nous fait admirablement entendre dans une parole des plus courtes, mais en même temps des plus énergiques: Alors toute la multitude se tut. Nul qui entreprît de répliquer; nul qui se crût en droit de renouveler une affaire finie tant on étoit persuadé qu'après le jugement de l'Eglise, il n'y a plus rien à revoir, et qu'elle est également incapable d'erreur, soit qu'elle décide pour nous, ou contre nous.

Que n'en sommes-nous persuadés nous-mêmes, et que ne portons-nous jusque-là notre obéissance! Avec cette obéissance pleine et sans réserve, qu'on eût épargné jusques à présent de combats à l'Eglise, et qu'on eût prévenu de scandales et de troubles parmi le peuple de Dieu! Mais quel a été le désordre de tous les temps, et quel est encore celui de ces derniers siècles? C'est une chose merveilleuse de voir avec quels éloges et quel zèle on reçoit dans les rencontres une décision qui paroît nous favoriser, et noter nos, adversaires. On n'a point de termes assez forts pour en relever la sagesse, l'équité, la sainteté, et là-dessus on épuise toute son éloquence. On voudroit la faire retentir dans les quatre parties du monde, et qu'il n'y eût pas un enfant de l'Eglise qui n'en fùt informé. Enfin, conclut-on, refuser de souscrire à une vérité si authentiquement reconnue, ce seroit une révolte, un attentat insoutenable. Tout cela est beau; mais le mal est que tout cela ne se soutient pas; et l'occasion ne le fait que trop connoître. Car dans la suite et sur d'autres sujets, que l'Eglise vienne à nous juger nous-mêmes, et à condamner nos opinions nouvelles et erronées, c'est assez pour

TOME XV.

5

« ÖncekiDevam »