Sayfadaki görseller
PDF
ePub

CHAPITRE IV.

LE QUINZIÈME SIÈCLE.

I. En Italie: le latinisme.

Les princes protecteurs des lettres.

Les humanistes: le Pogge, Philelphe, Laurent Valla, etc. II. En France: les théologiens.

[merged small][ocr errors][merged small]

« L'Imitation de Jésus-Christ. »imitation des Italiens. En Angle

terre les poètes et Robin Hood.

III. Jean Huss.

IV. L'invention de l'imprimerie.

V. Les Turcs à Constantinople, les Grecs à Florence. L'Académie platonicienne: Marsile Ficin, Laurent de Médicis, Pic de la Miran- Retour à l'italien, Léon-Baptiste Alberti, Politien, Pulci. VI. Jérôme Savonarole.

dole.

VII. Hors d'Italie : Philippe de Commines, François Villon. Les poètes anglais et écossais. Le Meistergesang, les trois Hans, les ballades suisses. Les priamèles, les satires: Eulenspiegel.. Les humanistes: Sébastien Brant et son Narrenschiff.

I.

Fût-ce une simple coïncidence ou y eut-il quelque rapport entre ces deux faits? On pourrait longtemps discuter là-dessus, mais les deux faits coexistent: Dante, Pétrarque, Boccace publièrent leurs chefs-d'œuvre pendant que les papes étaient à Avignon. Les papes reviennent à Rome, (1377) et depuis lors jusqu'au milieu du quinzième siècle, il n'y a presque plus de langue et de littérature italien

T. I.

13

:

nes; tout le monde retourne au latin. « L'Italie, a-t-on écrit énergiquement, semble être un pandæmonium de guerres, d'insurrections, de trahisons, de supplices, d'assassinats reines étranglées, rois empoisonnés, cardinaux décapités... brigands qui font la guerre pour la guerre, et combattent aujourd'hui ceux qu'ils défendaient hier il semble qu'on ne pense plus, qu'on ne lise plus; la langue d'Italie est muette, on ne trouve plus un poète, on ne sait qui est le vrai vicaire du Christ, les conciles excommunient les papes, les papes condamnent les conciles (1).» Ce fut pourtant dans le deuxième tiers du siècle (1429-1468) que l'Italie eut ses princes les plus intelligents à Florence Cosme l'Ancien, à Naples Alphonse le Magnanime, à Rome Nicolas V. Cosme de Médicis, le « père de la patrie », nourrit le peuple entier pendant une famine; exilé à Venise, il y créa la bibliothèque Saint-George; rappelé à Florence, il y fonda la laurentienne, acheta quantité de manuscrits précieux, éleva de nouveaux monuments, institua l'Académie platonicienne; il se faisait accompagner constamment par Marsile Ficin et lui écrivait comme un tendre ami : « Viens me rejoindre à Careggi, mon cher Marsile, viens aussitôt que tu le pourras et n'oublie pas d'apporter avec toi le traité du divin Platon « Du souverain bien ». Si tu m'en croyais, à l'heure qu'il est tu l'aurais déjà traduit en latin; il n'est pas de recherche à laquelle je me livrerais avec plus de passion que la recherche de la vérité. Viens donc, et apporte avec toi la lyre d'Orphée. »

Alphonse d'Aragon, qui avait pris Naples en 1423 et qui l'avait depuis lors perdue et reprise, supplia les

(1) SETTEMBRINI, Lezioni di letteratura italiana (1866).

Vénitiens d'obtenir pour lui des Padouans un os du bras de Tite-Live; il le voulait garder comme une relique. En passant avec son armée devant Sulmone, patrie d'Ovide, il poussa des cris de joie. Quand Fazio, auquel il servait une pension de 500 ducats, eut achevé son Historia Alphonsi, il lui donna spontanément le triple de cette somme et lui dit de plus : « Avec cela, je n'entends point payer votre œuvre qui est sans prix. » En appelant auprès de lui Manetti qui se sauvait de Florence, il lui écrivit ou lui fit écrire : « Je partagerai avec vous mon dernier morceau de pain. » Il voulait qu'on lui lût chaque jour un auteur ancien; tout le monde, même les enfants, assistait à la lecture. Pour ne pas perdre un mot de Tite-Live, il faisait taire ses musiciens. Malade à Capoue, il fut guéri par un livre de Quinte-Curce. A la guerre, il étudiait les Commentaires de César. Nul n'écoutait mieux que lui : un jour, suspendu aux paroles d'un orateur, il ne sentit pas un insecte qui le piquait et ne leva pas la main pour l'écarter de son visage le Panormite et Naldo Naldi n'ont pas dédaigné de rapporter ce trait. Alphonse vivait dans sa bibliothèque, n'avait pour armoiries qu'un livre ouvert et fit la paix avec Cosme de Médicis pour un manuscrit de Tite-Live. On lui dit que le manuscrit était empoisonné, il n'en voulut rien croire et le dévora.

Non moins ami des lettres, Nicolas V qui, avant d'être pape, avait illustré son vrai nom, Thomas de Sarzane, attirait les humanistes à la cour et leur faisait traduire en latin les auteurs grecs. Il donna de sa main à Laurent Valla 500 écus d'or pour une traduction de Thucydide; il offrit à Philelphe, contre une traduction en vers latins de « l'Iliade» et de « l'Odyssée » une belle maison à Rome, une bonne terre et 10,000 écus d'or.

Ce fut Nicolas qui fonda la bibliothèque vaticane. Pour son pontificat trop court (de huit années) il mérita d'être loué par Casaubon.

D'autres princes, les Visconti, les Sforce, se piquant d'honneur, protégèrent les érudits; il en résulta pour l'Italie un mouvement très curieux qu'on a voulu appeler « le latinisme ». Dante, Pétrarque, Boccace, les deux derniers surtout, avaient donné l'impulsion; c'était pourtant en italien que ces trois maîtres avaient écrit leurs chefs-d'œuvre. Au quinzième siècle, leurs successeurs eurent l'air de ne s'en pas douter : la langue vulgaire fut rejetée comme un vêtement trop grossier, on reprit la toge, et de tout ce que les triumvirs avaient inauguré, on ne continua que le travail archéologique. A l'antiquité retrouvée, on ne demanda pas de beaux souvenirs, de gands exemples; on ne songea guère à relever César ou Scipion; les humanistes nouveaux, protégés par les papes et les souverains, ne faisaient pas de politique. Ce qu'ils allaient reprendre aux anciens, c'étaient des formes, des « élégances »>, des modèles de bien dire et de se draper magnifiquement. La pensée va donc reculer et disparaître à mesure qu'avancera l'érudition; le latin d'ailleurs (notre langue, lingua nostra, comme l'appelait Laurent Valla) ne détruira rien, parce qu'il n'y a plus rien à détruire. « Nous sommes dans un temps où l'Italie n'a plus ni sentiment religieux, ni sentiment public, ni sentiment moral (1). »

On en était déjà là au moment où deux grands événements contemporains, la conquête de Constantinople et l'invention de l'imprimerie, vinrent seconder puissamment les efforts des humanistes; nous disons seconder, non pro

(1) PASQUALE VILLARI, Niccolò Machiavelli e i suoi tempi. 1877-82.

mouvoir. Les chercheurs de manuscrits n'étaient plus deux seulement, comme au temps de Pétrarque et de Boccace, mais peut-être cent, tous fossoyeurs acharnés, hantant les sépulcres, exhumant de beaux cadavres. Le plus vieux, le Pogge (Poggio Bracciolini), avait soixante-dix ans l'année où s'associa Gutenberg avec Jean Fust (1450). Toscan de naissance, après avoir appris le latin avec Jean de Ravenne et le grec avec Chrysoloras, il était allé chercher fortune à Rome où il devint à vingt-deux ans rédacteur des lettres pontificales; il garda cinquante ans cet emploi. En 1414, il était au concile de Constance, non pour brûler Jean Huss, mais pour déterrer des manuscrits; à l'abbaye de Saint-Gall, il trouva le premier Quintilien complet, mais couvert d'ordures; d'autres livres précieux étaient oubliés dans un cachot humide au fond d'une tour « où l'on n'eût pas même voulu jeter des condamnés à mort ». Le Pogge continua ses fouilles en France, en Allemagne, « dans les ergastules gaulois et germains »; à Langres, chez les moines de Clugny, il sauva le discours de Cicéron pour Cæcina, ailleurs d'autres morceaux du même orateur, une grande partie de Lucrèce, un livre de Pétrone, Columelle, douze comédies de Plaute, vingt autres livres que nous passons. En même temps, il voyait mourir Jérôme de Prague et, tout en donnant tort à cet hérésiarque, il admirait en lui l'héroïsme antique, une réminiscence de Mucius Scévola. Après quoi le Pogge émigra en Angleterre où il s'ennuya vite et revint en Toscane où il osa défendre Cosme alors exilé, de là une violente querelle contre Philelphe, ennemi acharné des Médicis un duel de savants, gros d'invectives et de calomnies. Au retour de Cosme, il acheta une villa d'antiquaire encombrée de livres et ornée de statues ; il y vécut

« ÖncekiDevam »