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« J'ai déjà vidé ma corne, donne un peu le fiasque ici ; la montagne tourne, tourne, le cerveau bat la campagne, courez tous de ci de là, comme on le voit faire à moi : « Que chacun, Bacchus, te suive; Bacchus, Bacchus, évohé !

« Je meurs déjà de sommeil, serais-je ivre, oui ou non? Mes pieds ne me portent plus ; je le sais, vous êtes ivres. Faites tous ce que je fais; humez le piot comme moi! «Que chacun, Bacchus, te suive; Bacchus, Bacchus, évohé !

« Crions tous Bacchus, Bacchus, et du vin, du vin encore! Puis en chantant faisons rage, bois donc, toi, et toi, et toi! Mais je ne peux plus danser. Que chacun crie: Évohé!

« Que chacun, Bacchus, te suive; Bacchus, Bacchus, évohé (1)! »

(1)

Ognun segua, Bacco, te;

Bacco, Bacco, evoė.

Chi vuol bever, chi vuol bevere,
Vegna a bever, vegna qui
Voi imbottate come pevere,
Io vo' bever ancor mi.

Gli è del vino ancor per te,

Lascia bever prima a me.

Ognun segua, Bacco, te; etc.

Io ho voto già il mio corno

Dammi un po' il bottaccio in qua.

Questo monte gira intorno,

E'l cervello a spasso va.

Ognun corra in qua e in là

Come vede fare a me.

Ognun segua, Bacco, te; etc.

I' mi moro già di sonno;
Sono io ebria, o si, o no?

Qu'est-ce que cela? Un chœur de Bacchantes dans le petit opéra d'« Orphée », sujet antique où l'on crie << évohé ! » mais où l'on se grise et l'on chante à la toscane. Cet Orfeo n'est guère qu'un dialogue lyrique; il n'y faut pas chercher le commencement du drame moderne ; Politien était un esprit trop féminin pour fonder en Italie un théâtre national. Ceux qui honorent la virilité du talent et du caractère voient avec regret la prostration de cette âme molle aux pieds de Laurent le Magnifique. Ce qui l'excuse un peu, c'est qu'il aimait réellement son maître et qu'il lui sauva la vie le jour de la conspiration des Pazzi. Politien fut en italien comme en latin le meilleur poète de son temps; il mourut jeune.

A côté de Laurent vivait à la même époque un épique bouffon, Luigi Pulci, qui essaya d'amuser les lettres avec les histoires de paladins qui intéressaient le peuple; il fut un contemporain de Boiardo et un prédécesseur de l'Arioste; nous le retrouverons en parlant du « Roland furieux ». Né à Florence en 1431, ce Pulci suivait sa nature et faisait son métier figurons-nous un fou de cour qui aurait des

Star più ritti i piè non ponno;
Voi siet' ebri, ch' io lo so.
Ognun facci com' io fo,

Ognun succi come me.

Ognun segua, Bacco, te; etc.

Ognun gridi, Bacco, Bacc o,

E pur cacci del vin giù;
Poi con suoni farem fiacco :

Bevi tu, e tu, e tu.

I' non posso ballar più
Ognun gridi, evoè !

Ognun segua, Bacco, te;

Bacco, Bacco, evoè !

larmes. Il passa de mauvais jours, chassé de Florence par des créanciers qui venaient le harceler jusque dans sa retraite. << Si cela continue, écrivait-il à Laurent, j'irai me débaptiser à l'endroit où, dans une heure maudite, je fus indignement baptisé, car j'étais certe destiné au turban bien plutôt qu'au capuce. » Il ne paraît pas que Laurent, malgré sa magnificence, eût payé les dettes du brave homme : il préférait tout le monde et n'aima personne, pas même le pauvre Pulci. Tout ce beau mouvement s'arrêta net aux dernières années du siècle. Pulci était mort le premier en 1487; Laurent s'éteignit en 1492, Politien et Pic de la Mirandole en 1494, Marsile Ficin en 1499. Les Médicis tombèrent et la Renaissance faillit tomber avec eux. Il y eut à Florence une velléité de réforme.

VI.

En effet, au milieu de ce carnaval où, malgré les crimes des tyrans, l'Italie entière était en fête, où Pontano chantait à Naples en vers exquis, à la fois latins et modernes, les voluptés païennes de ce beau pays aimé des dieux, où un conteur salernitain, Masuccio, venait de recueillir, en son dialecte fougueux et franc, des gravelures qui auraient peut-être horrifié Boccace; tandis qu'à Florence, dans un étrange débordement de passions et de doctrines, s'ébattaient la débauche et l'orgie aux pieds de Platon et de Jésus, une voix avait tout à coup retenti qui prêchait le carême. Jérôme Savonarole, moine dominicain, né à Ferrare en 1452, était venu à Florence en 1488 et, nommé prieur du couvent de Saint-Marc, osa d'abord attaquer Laurent, le magnifique seigneur qui essaya d'abord de le

séduire, et, n'y parvenant pas, le laissa parler, bien plus, l'appela instamment à son lit de mort. Le Médicis avait du sang sur la conscience, et se confessait avec épouvante; le moine lui dit : « Dieu est bon, Dieu est miséricordieux... Seulement, il exige de vous trois choses. Et quelles ? D'abord une grande et vive foi dans la miséricorde de Dieu. Je l'ai, dit le Magnifique. En second lieu, il vous faut restituer le bien mal acquis ou ordonner à vos fils qu'ils le restituent. » Ceci parut étonner Laurent, qui acquiesça pourtant d'un signe de tête. Alors Savonarole se leva et dit : En dernier lieu, il faut rendre la liberté au peuple de Florence. » Le moribond ne répondit pas et tourna le dos, le confesseur refusa l'absolution (1).

En 1494, pendant tout le carême, le moine de SaintMarc annonça la venue d'un nouveau Cyrus qui traverserait l'Italie sans rompre une lance. Fut-ce une vraie prophétie ou simplement un pronostic, une menace oratoire ? En tous cas, Savonarole avait prévu juste; Charles VIII descendit en Italie et alla camper aux portes de Florence où le bon frère osa le haranguer : « O roi très chrétien, lui dit-il, tu es un instrument dans la main du Seigneur qui t'envoie pour soulager les maux de l'Italie, comme je l'avais prédit depuis plusieurs années, et pour réformer. l'Église qui gît abattue sur le sol. Mais si tu n'es pas juste et miséricordieux, si tu ne respectes pas la ville de Florence, ses femmes, ses citoyens, sa liberté (2); si tu oublies

(1) PASQUALE VILLARI, La storia di Girolamo Savonarola e de' suoi tempi. 1859 (traduction française par Gruyer; Firmin-Didot et Cie). — PERRENS, Jérôme Savonarole, sa vie, ses prédications, ses écrits. 1853.

(2) Les ennemis prêchoient le peuple en tous quartiers, nous chargeans de prendre femmes à force, et l'argent, et autres biens où nous le pouvions trouver. De plus grands cas ne nous pouvoient-ils char

l'œuvre pour laquelle le Seigneur t'envoie, alors il choisira un autre homme pour l'accomplir, il fera peser sur toi sa main irritée et te punira par des fléaux terribles. Je te dis ces choses de la part du Seigneur. » Très peu de temps après, la république de Florence était reconstituée sur les conseils du dominicain qui se montra, dit-on, politique fort avisé; Guichardin, qui s'y connaissait, a prisé très haut son esprit pratique et l'a proclamé le père de la patrie. Cependant, même en ce temps de triomphe, le moine avait des tristesses, des inquiétudes qui le rongeaient. Un jour il prêchait sur ce texte : « Louez le Seigneur parce qu'il est bon. » Le peuple, accouru en foule pour l'écouter, s'attendait à un cantique d'actions de grâces:

<< Un jeune homme, dit Savonarole, sortant de sa maison, se mit à pêcher sur la mer, et le maître de l'embarcation le conduisit en pêchant jusque dans la haute mer d'où on ne voyait plus le port, si bien que le jeune homme se mit à se lamenter hautement. O Florence! celui qui se lamente est dans cette chaire. Je fus conduit hors de ma demeure au port de la religion, où j'allai à vingttrois ans, sans autre espoir que de trouver le calme et la paix, deux choses que j'aimais par-dessus toutes les autres. Mais là je regardai les flots de ce monde et je commençai par la prédication à gagner quelques âmes, et comme j'y trouvai du plaisir, le Seigneur m'a mis sur la mer et m'a conduit jusque dans la haute mer d'où maintenant je ne vois plus de port. Undique sunt angustia. Devant mes yeux, je vois se préparer des tribulations et

ger en Italie, car ils sont jaloux et avaricieux plus qu'autres. Pou les femmes, ils mentoient, mais du demourant il en étoit quelque chose. PHILIPPE DE COMMINES.

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