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que de ces excommunications si odieuses aux flatteurs des princes, il suffit d'ouvrir les actes du dernier concile général, et d'y lire les anathèmes qu'il ordonne de prononcer contre les usurpateurs des biens des pauvres, de quelque dignité qu'ils soient, même impériale ouroyale (1), et contre ceux, non moins criminels, qui abusent de leur puissance pour attenter à la liberté du mariage (2). Qui ne connoît la trève de Dieu, et qui n'a béni cette loi touchante? Elle n'avoit pourtant d'autre garantie de son observation que la crainte qu'inspiroient les censures ecclésiastiques. Long-temps l'humanité ne respira qu'à l'abri du pouvoir spirituel.

Et qu'enseigne l'Église sur ce pouvoir qu'elle a reçu de Jésus-Christ?

Elle dit aux peuples: Il y a deux puissances, divines toutes deux par leur origine: car toute puissance est de Dieu; mais, à raison même de leur nature et de leur fin, il existe entre elles une subordination nécessaire; et autant l'âme est au-dessus du corps, autant le sacerdoce est au-dessus de l'empire (3). L'obéissance est due à chacune dans son ordre :

(1) Concil. Trident., sess. XXII, cap. XI.

(2) Ibid., sess. XXIV, cap. IX.

(3) Quantò ergò anima corpore præstantior, tantò est sacerdotium regno excellentiùs. Constit. apost., lib. II, cap. XXXIV.Saint Grégoire de Nazianze disoit aussi, dans le même sens, aux princes: « Vos quoque imperio ac throno meo lex Christi subjecit : >> imperium nos quoque gerimus, addo etiam præstantiùs et perfec» tiùs : æquum est enim carnem spiritui fasces submittere, et ter» rena cœlestibus cedere. » Orat., XVII, n. 15.

Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu (1). Que s'il s'élève des doutes sur l'usage que César fait de son autorité et sur son autorité même, vous n'êtes pas juges; adressez-vous à la plus haute puissance (2), et obéissez à ce qu'elle ordonnera. Voilà ce que l'Église dit aux peuples.

Elle dit aux rois : « Il est écrit que nous devons » être soumis à toute puissance. Ainsi nous sommes >> soumis aux puissances humaines, en ce qui est de >> leur ressort, tant qu'elles ne s'élèvent pas contre >> Dieu. Mais si toute puissance est de Dieu, bien plus >> donc la puissance préposée aux choses divines. >> Obéissez à Dieu en nous, et nous lui obéirons en >> vous. Que si vous refusez d'obéir à Dieu, vous ne >> pouvez user du privilége de celui dont vous méprisez >> les commandemens (3). »

Ainsi l'Église possède sur tous ses membres, et sur les souverains comme sur les sujets, une puissance coercitive (4), un pouvoir de coaction pour les forcer à

(1) Marc., XIV, 17.

(2) Omnis anima potestatibus sublimioribus subdita sit. Rom., XIII, 1.

(3) Lellre du pape saint Symmaque à l'empereur Anastase. << Fortassis dicturus es, scriptum esse : omni potestati nos subditos » esse debere. Nos quidem potestates humanas suo loco excipimus, » donec contra Deum suas non erigunt voluntates. Cæterùm si om» nis potestas à Deo est, magis ergò quæ rebus est præstituta di» vinis; defer Deo in nobis, et nos deferemus Deo in te : cæterùm » si Deo non deferas, non potes ejus uti privilegio cujus jura con» temnis. » Ap. Labbe, tom. IV, col. 1298; Paris, 1671.

(4) Potestas ecclesiastica jurisdictionis est potestas coercitiva quæ valet exerceri in alterum etiam invitum, ad dirigendos subditos in finem beatitudinis æternæ. Gerson., de Potest. Eccl., Consid. 4.

une soumission extérieure; suivant les propres paroles de la faculté de théologie de Paris, qui déclare hérétique la doctrine contraire (1): et c'est en ce sens que Clément XI dit que le pontife romain a été établi par Jésus-Christ, le suprême défenseur du droit et de la justice sur la terre (2). On voit, dès le sixième siècle, saint Grégoire-le-Grand user de ce pouvoir à l'égard des rois mêmes, et pour quelle fin? pour la même fin que se proposoit, mille ans plus tard, le concile de Trente, pour assurer la conservation du patrimoine des pauvres (3). L'histoire, depuis lors, ne cesse de montrer cette juridiction coactive exercée par les papes, exercée par les conciles, non, à la vérité, sans résistance de la

(1) Dans la censure de quelques propositions de Marc-Antoine de Dominis, Propositio II. Qui de republicâ ecclesiasticâ sicut purè de humanis philosophantur, mihi videntur non parùm à recto tramite aberrare, non modò quia in eâ re requirunt veram jurisdictionem, hoc est vim coactivam et subjectionem externam, ubi tamen omnis gloria ejus ab intùs. Hæc propositio, quâ parte veram jurisdictionem, id est vim coactivam et subjectionem exlernam Ecclesiæ denegal, est hæretica et totius ordinis hierarchici perturbativa atque confusionem babylonicam in Ecclesià generans. Collect. judicior, etc., tom. I, part. II, p. 105.

(2) Romanus pontifex, quem Salvator et Dominus noster æqui bonique supremum assertorem in terris constituit, ut juxtà propheticum verbum noxia evellat et destruat, utiliaque plantet. Butle du 10 des calendes de mars 1714 in Collect. judicior., etc., insert., tom. III, part. II, p. 601.

:

(3) Si quis regum, sacerdotum, judicum, personarumque sæcularium, hunc constitutionis nostræ paginam agnoscens, contra eam venire lentaveril, potestatis, honorisque sui dignitate careat. Ces paroles, rapportées par saint Grégoire lui-même, se trouvoient dans un privilége accordé par ce saint pontife à l'hôpital d'Autun. Gregor. Epist. ad abbat. Senator. Les bénédictins de Saint-Maur ont prouvé l'authenticité de cette lettre.

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part des princes, mais sans que ni les princes ni leurs flatteurs osassent, jusqu'à la réforme, contester le droit fondamental de l'Église (1). Et c'est qu'en effet l'on ne peut le contester, à moins d'accuser l'Église entière d'erreur et d'usurpation, c'est-à-dire, à moins de renoncer à la foi catholique. Leibnitz lui-même en fait la remarque : « Les argumens de Bellarmin, ditil, qui, de la supposition que les papes ont la ju>> ridiction sur le spirituel, infère qu'ils ont une >> juridiction au moins indirecte sur le temporel, n'ont >> pasparu méprisables, à Hobbes même. Effectivement » il est certain que celui qui a reçu une pleine puis>>sance de Dieu, pour procurer le salut des âmes, a >> le pouvoir de réprimer la tyrannie et l'ambition des » grands, qui font périr un si grand nombre d'âmes. >> On peut douter, je l'avoue, si le pape a reçu de Dieu >> une telle puissance (2); mais personne ne doute, du » moins parmi les catholiques romains, que cette puis>>>sance ne réside dans l'Église universelle, à laquelle >>> toutes les consciences sont soumises (3). »

Le protestantisme, en attaquant l'autorité de l'Église, n'abolit pas, comme on pourroit le croire, le

(1) Un magistrat français en a fait lui-même la remarque. « Po» testati romanæ Sedis in reges hæreticâ labe infectos, regumque » sceptra, subscripsisse quotquot antè Calvinum theologica tracta» vere; contrariam sententiam novam esse, Luthero et Calvino >> auctoribus natam. » Histoire de France, depuis la mort de Henri IV jusqu'en 1629, par Gabriel Gramond, président au parlement de Toulouse ; ad annum 1615, p. 205.

(2) Leibnitz parle ici selon les idées protestantes ou gallicanes. (3) Pensées de Leibnitz, tom. II, pag. 406, 407.

droit général qui toujours avoit soumis, sous différentes formes, la souveraineté temporelle à la loi divine. Les premiers réformateurs le rappellent, au contraire, perpétuellement dans leurs écrits ; et c'est par ce droit que leurs doctrines les forçoient de dénaturer, qu'ils essayèrent partout de justifier leurs rebellions. Écoulons un protestant, l'historien de l'Écosse, Robertson: << Knox et Willox se présentèrent comme députés » de leur ordre (du clergé presbytérien), et pronon>> cèrent sans hésiter, que, tant par les préceptes que >> par les exemples tirés de l'Écriture, il étoit permis >> aux sujets, non seulement de résister à des princes >> tyrans, mais même de les déposséder d'une autorité >> qui devenoit dans leurs mains un instrument de >> destruction, pendant que le Tout-Puissant ne la >>> leur avoit confiée que pour protéger les peuples(1).»>

En 1596, Jacques IV ayant donné quelque inquiétude aux sectaires, ils se hâtèrent de prendre contre lui des mesures telles que l'histoire de l'Église n'en offre aucun exemple. « Aussitôt, dit le même écri>> vain, que le clergé fut informé de ce nouvel acte de >> clémence de la part du roi, les commissaires nommés >> par la dernière assemblée se rendirent à Édimbourg; » et avec cette précipitation, effet ordinaire de la ter>> reur et du zèle, ils prirent toutes les résolutions >> qu'ils jugèrent nécessaires pour la sûreté du royau>> me. Ils écrivirent des lettres circulaires à tous les

(1) Histoire d'Écosse, etc., par Guillaume Robertson, t. I, p. 276 de la traduction française, édit. de 1772.

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