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remédier aux inconvéniens d'un pareil système d'éducation en plaçant à sa tête un évêque; car l'unique résultat d'une si choquante inconvenance est d'abuser quelques familles, de perdre quelques enfans de plus, d'augmenter les dangers du mal en le couvrant d'un voile sacré, de mettre l'athéisme sous la protection de la religion même, et de persuader peut être aux oppresseurs de l'Église, qu'il n'est point de complaisances qu'on ne puisse exiger et attendre de ses ministres.

Cependant, corrompre l'enfance, c'est corrompre l'avenir tout entier, c'est appeler les fléaux et provoquer la ruine. Car quel est le peuple qui puisse subsister lorsque la base des devoirs, méconnue par l'État, est encore ébranlée dans la société domestique? Le temps approche où ces vérités, éternelles comme Dieu, cesseront d'être un objet de doute et de raillerie insensée. Quand, de sa main inexorable, la justice qui ne meurt point les aura écrites en caractères de sang sur une terre désolée, on comprendra que le monde est soumis à d'autres lois que celles inventées par la raison du dix-neuvième siècle. Beaucoup de généra– tions ne passeront pas avant que cette grande et dernière leçon soit donnée aux hommes. Jusque-là tous les avertissemens seront vains; mais ils ne laissent pas d'entrer dans les vues de la Providence pour éclairer ceux qui ont le cœur droit, et pour justifier la sévérité de ses jugemens sur les autres.

CHAPITRE IV.

Que la religion, en France, n'est aux yeux de la loi qu'une chose qu'on administre.

Tout se lie et s'enchaîne tellement dans les sociétés humaines comme dans l'univers, que l'on ne sauroit traiter une question de quelque importance, sans en remuer un grand nombre d'autres, surtout lorsque l'absence de maximes établies et généralement reconnues oblige d'éclaircir et de prouver jusqu'aux vérités les plus simples. Aujourd'hui principalement, qu'il n'est rien sur quoi l'on ne conteste; aujourd'hui qu'à la place de la raison publique, presque entièrement éteinte, il n'existe que des opinions aussi opposées entre elles, aussi diverses que toutes les chimères qui peuvent s'offrir à des esprits abandonnés sans règle à eux-mêmes, on ne doit supposer comme admis aucun principe, ni aucun fait, mais chercher d'abord, en parlant aux hommes, à se faire avec eux une raison commune, si l'on veut en être entendu. Ce n'est pas assurément une difficulté médiocre ; et parvînt-on à la surmonter, il y a loin de là encore à persuader et à convaincre. Malgré l'anarchie des croyances, jamais on ne fut plus affirmatif; et le caractère du temps présent est le dogmatisme individuel et le scepticisme social.

De cette disposition, signe infaillible d'un profond désordre et d'une foiblesse profonde, résulte, puisqu'il faut le dire, une espèce d'idiotisme public, auquel on ne voit rien à comparer dans les siècles précédens. De là l'étrange facilité avec laquelle on se laisse abuser par des mots. Appelez liberté la servitude, et la persécution tolérance, les hommes, tels que les a faits la civilisation philosophique, ne se croiront libres que dans les fers, et s'imagineront de bonne foi protéger en opprimant. Partout on remarque ce genre d'illusion: il se propage si rapidement, qu'il devient chaque jour plus difficile de trouver des esprits qui en soient tout-à-fait exempts ; et c'est pourquoi, voulant traiter de la religion dans ses rapports avec l'ordre politique et civil, nous avons été obligé, pour être compris, d'examiner ce que sont actuellement en France et l'ordre civil et l'ordre politique. Un court résumé des réflexions qu'il nous a paru nécessaire de présenter sur cet important sujet aidera beaucoup à saisir les conséquences que nous ne tarderons pas à en tirer.

Pour quiconque est capable d'assembler deux idées, il est clair qu'à la place de la monarchie chrétienne, dont la révolution qui travaille l'Europe a fait disparoître jusqu'aux dernières traces, nous avons un gouvernement démocratique par essence, mais qui tient de son origine et des circonstances de sa formation un caractère particulier. Car on se tromperoit prodigieusement si on le comparoit à certaines démocraties que des causes naturelles avoient établies dans le sein de la chrétienté, et qu'on pourroit appeler légitimes.

Elles n'étoient, à vrai dire, que des communautés indépendantes où chacun avoit apporté et conservoit des droits égaux, une réunion de familles liées par les mêmes intérêts, et qui, selon des règles convenues, administroient en commun la chose publique. La raison conçoit très bien une semblable forme de police dans un petit État où règnent des mœurs simples, maintenues par une foi simple comme elles.

La démocratie de notre temps, toute différente par son principe, repose sur le dogme athée de la souveraineté primitive et absolue du peuple. Considérées en elles-mêmes, nos institutions, sur lesquelles des discoureurs peuvent faire des phrases et bâtir des systèmes sans fin, ne sont évidemment que des conséquences de ce dogme absurde. Il règne dans les esprits, il est l'âme de la société et le fond réel, quoique inaperçu, des opinions en apparence les plus divergentes. Combiné avec les idées étroites et matérielles de la politique moderne et la corruption morale qu'elles engendrent, il produit et dans les lois une anarchie hideuse, et dans l'administration un despotisme tel qu'il n'en exista jamais de si funeste et de si dégradant. A la vue de ce supplice, car c'en est un, on seroit tenté de croire qu'il y a des crimes pour pour lesquels la justice suprême condamne les peuples à être étouffés dans la boue.

Or la révolution, qu'on a confondue et que l'on continue de confondre avec ce qui n'en fut qu'une horrible circonstance, n'est en réalité que le renversement des doctrines qui, depuis l'origine du monde,

ont été le fondement des sociétés humaines. On la reconnoît bien moins à ses atroces violences, qu'à sa haine réfléchie pour le christianisme, qui partout se présente à elle comme un obstacle, et le seul qui retarde son triomphe complet. Aussi n'a-t-elle pas un moment cessé de le poursuivre. Tantôt, en poussant des cris de rage, elle le traîne sur les échafauds, tantôt elle le bannit de la société publique avec toutes les formules du respect, armant contre lui tour-à-tour et la fureur des hommes de sang, et la basse astuce des légistes, et les bouillantes passions de la jeunesse, et la corruption froide de la classe qui se vend, et l'ignorance de la populace, et l'imbécillité même de quelques bonnes gens qui se croient religieux, qui le sont réellement, et qui, imperturbables dans leur confiance hébétée en des malheureux qui se jouent de leur incurable innocence, s'imaginent faire merveille et sauver la religion toutes les fois qu'ils prononcent contre elle un arrêt de mort.

A l'aide de ces divers moyens, la révolution est parvenue à exclure Dieu de l'État, et à établir l'athéisme dans l'ordre politique et dans l'ordre civil, d'où il passe dans la famille. L'éducation l'y introduit; il s'y propage par l'exemple et par l'influence secrète et puissante qu'a sur les hommes l'esprit de la société dans laquelle ils vivent.

Mais dès-lors qu'est-ce que la religion pour le gouvernement? que doit être à ses yeux le christianisme? Il est triste de le dire, une institution fondamentalement opposée aux siennes, à ses principes, à ses maximes:

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