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pouvoir, chacun pensait à son intérêt propre. Le seigneur, comme la commune, n'agirent plus que pour leur propre conservation. Alors mille partis s'acharnèrent à ruiner la France. L'Anglais vint faire valoir ses prétentions; il trouva le pays hésitant entre deux grandes factions: celle des armagnacs et celle des bourguignons; il traita avec la dernière. Enfin, en 1420, il se trouva en France deux régents l'un était Henri d'Angleterre; l'autre, Charles, dauphin de France. Henri avait avec lui Charles VI, le fou, et le duc de Bourgogne. Tous deux avaient les mêmes prétentions à la couronne. Le premier avait été déclaré, par ordonnance royale, héritier du trône; c'était son legs : le second l'était par droit de naissance. Le premier avait été reçu à Paris et accueilli par la confédération des villes qu'on avait le plus maltraitées dans les jeunes années de Charles VI; le second était réduit à la possession de la Champagne, de l'Orléanais, de la Touraine, du Poitou, du Berri et de quelques provinces du Midi. Il semblait que la France allait être réunie à l'Angleterre sous un même prince. En effet, en 1422, à la mort de Charles VI, les deux régents furent proclamés rois : Charles VII à Poitiers; Henri d'Angleterre à Paris.

Henri avait la supériorité des forces, mais Charles VII avait la supériorité des souvenirs. En effet, il était toujours resté séparé et ennemi de cette cour infâme, qui était morte en quelque sorte avec le dernier roi ; il était resté fidèle à la cause nationale, et, si le sentiment public ne se tourna point vers lui, au moins dut-il cesser de lui être hostile. Enfin, un événement qui, dans ce siècle, dut être regardé comme miraculeux, parce qu'il était inexplicable, lui rendit la faveur populaire. Une femme, Jeanne d'Arc, mue par la religion de la patrie; imbue, avec une foi profonde, de cet enseignement qui apprenait au peuple à regarder la France et la race de ses rois comme les aînés de l'Église, entraîna les masses; elle en fit une armée. Ce fut une guerre sainte, une nouvelle croisade qu'elle conduisit : tout céda devant cette ferveur religieuse. Jeanne d'Arc fut prise et périt par la main des Anglais, martyre de sa foi patriotique. Mais le fanatisme de la nationalité était rentré dans le cœur des Français, et, en 1451, il ne restait plus aux Anglais, sur le sol de l'ancienne France, que la ville de Calais. Une telle suite de succès, après tant de revers, parut aussi miraculeuse que le fait qui y avait donné origine.

Le roi ordonna que l'on revît le procès de Jeanne d'Arc, et l'on cassa le jugement inique qui l'avait condamnée en sorte que le nom de la vierge française ouvrit et ferma cette époque glorieuse.

Le nom de cette vierge est le seul qui soit sorti pur des troubles dont nous venons de parler. Une effroyable démoralisation avait avili les hautes classes de la société. Le principe du mal, l'égoïsme avec son sale vêtement de vanités, de profusions et de débauches, et avec ses affreux serviteurs, le vol, l'assassinat, l'empoisonnement, l'adultère, régnait au sommet. Comment l'être social n'eûtil pas souffert et ne se fût-il pas agité au contact de tant d'agents destructeurs qui le menaçaient de mort? Tout ce qui ne fut pas victime fut souillé.

Ce mal fut pour la France une souffrance sans fruit, fatale pour tout le monde. Ainsi, depuis saint Louis, les plaids annuels tendaient à se changer en assemblées parlementaires semblables à celles d'Angleterre. Cette tendance fut rompue par le règne de Charles VI. Les réunions en cour plénière cessèrent d'avoir lieu d'une manière régulière, et on ne convoqua plus les états généraux qu'à titre d'assemblées exceptionnelles, pour résoudre une difficulté exceptionnelle. Ils se réunirent pour la dernière fois, selon leur coutume régulière, dans l'année même qui vit monter Charles VI, mineur, sur le trône. Voyant un roi enfant, possédé par une cour de seigneurs pillards, ils ordonnèrent la suppression des aides et voulurent réduire la liste civile au revenu des biens de la couronne. Leur résolution fut accueillie, publiée; mais lorsqu'ils se furent séparés, leurs ordonnances furent mises à néant, et leur intervention fut pour toujours écartée : ce fut même une des causes des émeutes populaires qui affaiblirent les premières années de la minorité de Charles VI, et dont il triompha, si insolemment et si sottement, avec l'aide de sa noblesse.

Toutes les fois que l'histoire nous montre une grande et générale démoralisation, on trouve toujours qu'elle a pour caractère la subalternisation du devoir social à l'intérêt privé. Tel fut aussi le cachet de l'époque dont nous venons de nous occuper. Mais si l'on voulait en indiquer la cause première, il faudrait recourir à l'histoire même de l'Église. En effet, cette période de décadence de la France correspond à une période semblable dans l'Église de Rome. Ce fut elle qui donna, la première, l'exemple de l'égoïsme. La papauté avait cessé d'être un devoir, une fonction catholique; elle était devenue une fortune que les familles ambitionnaient comme un emploi fructueux. Il arriva de là que les papes ne furent plus choisis que parmi des nobles de sang, et qu'ils portèrent sur le trône apostolique les passions des familles et des races dont ils sortaient. Bientôt on vit plusieurs papes se disputer la couronne, ainsi qu'on avait vu des successeurs de rois. Ce schisme

était en pleine vigueur sous Charles V. Ainsi il arriva que les successeurs des apôtres devinrent serviteurs non-seulement des rois, dont ils se disputaient la protection, mais même des évêques, dont ils sollicitaient l'approbation : ceux-ci à leur tour dépendirent des seigneurs, etc. La discipline de l'Église fut compromise, le pouvoir de l'excommunication fut éteint, et comme parmi ces papes nul n'avait un droit incontesté et incontestable, les uns et les autres achetèrent des appuis par leurs complaisances pour les pouvoirs temporels. L'université de Paris, quelques ordres de moines mendiants et le clergé inférieur résistèrent seuls à la démoralisation qui résulta du schisme; l'université, entre autres, se distingua par son énergie à demander un concile général pour la réformation de l'Église et du clergé.

CHAPITRE III.

Histoire de France du quinzième au dix-septième siècle.

L'histoire des deux siècles suivants est celle d'une bataille entre le fédéralisme aristocratique et l'unité monarchique. Aussi, quant à l'organisation sociale, toutes choses restèrent dans le provisoire, et, à la fin de cette époque, sous Louis XIV, nous trouverons que l'unité en France n'est que morale; n'ayant d'autre représentant que l'absolu pouvoir du monarque, mais d'ailleurs embarrassée des mille obstacles que lui opposait la variété des coutumes qui tenaient lieu de codes; divisée en provinces, et par systèmes d'impôts et de priviléges; coupée par des lignes de douanes, et présentant enfin sur le sol qui lui appartenait, sous la domination du même esprit et de la même langue, toutes les différences qu'offre aujourd'hui l'Europe.

Louis XI ouvre cette suite de rois qui travaillèrent à la ruine de la noblesse et de ses priviléges féodaux. A la mort de Charles VII, son père, en 1461, on avait conspiré de donner la couronne à son jeune frère, au mépris de son droit d'aînesse. Il escamota le trône, et dès ce jour il commença cette guerre acharnée, mêlée de succès et de revers, semée d'intrigues et de violences, qui ne se termina qu'à sa mort, en 1483. Nous n'entrerions dans aucun détail sur les accidents de ce règne, quand même nous ne devrions pas saisir toutes les occasions d'abréger notre narration. En effet, il n'eut qu'une seule signification, et toujours la même à travers tous les

événements; il n'eut qu'un seul but, la destruction de la noblesse féodale.

Les états généraux ne furent assemblés qu'une seule fois au commencement de ce règne, en 1468, et pour répondre à une difficulté que leur assentiment seul pouvait résoudre, difficulté exceptionnelle, ainsi que nous l'avons annoncé dans le chapitre précédent: c'était pour résister aux exigences de la ligue que la noblesse avait organisée contre le roi, et pour empêcher le démembrement du royaume, que celle-ci était alors assez puissante pour exiger. Le vote des états conserva l'intégrité de la France.

Louis XI laissa à Charles VIII, son fils, le royaume accru de la Bourgogne, de la Provence, de l'Anjou et du Maine, riche, paisible et obéissant.

Le jeune roi était mineur, âgé de moins de quatorze ans. Pour assurer la régence dans les mains auxquelles Louis XI l'avait confiée, il fallut encore recourir aux états généraux; ils ouvrirent leurs séances le 15 janvier 1484 et les prolongèrent jusqu'au 17 mars. L'histoire de cette assemblée nous a été conservée. Les états votèrent non-seulement par ordres, mais par nations. Il y avait six nations, celles de Paris, de Normandie, de Bourgogne, d'Aquitaine, de Languedoil et de Languedoc. Parmi les réclamations faites part cette assemblée, nous remarquerons les suivantes on demanda l'abolition de la vénalité des charges, l'inamovibilité des offices, sauf le cas de forfaiture, et la suppression des douanes intérieures. On insista d'ailleurs sur les sujets habituels des réclamations de toutes les assemblées, sur la diminution des impôts, la suppression des tailles et des gabelles; enfin les états confirmèrent le testament de Louis XI (1).

Le vote de cette assemblée fut souverain. On avait pris toutes les précautions pour que sa décision ne pût être un acte de complaisance pour aucun parti. On avait adressé aux baillis et aux sénéchaux la commission de réunir les députés de leur ressort. En conséquence, ils avaient convoqué des réunions de tous les possesseurs de bénéfices ecclésiastiques et seigneuriaux; enfin des députés des villes, bourgs et villages. Cette réunion avait rédigé son cahier et en avait chargé des députés qu'elle avait élus pour représenter chacun des ordres dont elle était composée elle-même. A Paris, on avait procédé ainsi : on convoqua le prévôt des marchands, les échevins de la ville, tous les officiers, les notables bourgeois de chaque quartier, tous les principaux maîtres fourreurs,

(1) Pelation mar uscrite de Massel, tirée de la Bibl. du Loi.

TOME I.

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drapiers, orfévres, etc., deux membres de chaque communauté religieuse, enfin l'archevêque, en qualité de bourgeois de Paris. On invita chacun, dans les églises et au prône, à transmettre à cette assemblée ses projets et ses plaintes, et, sur ces matériaux, on rédigea le cahier de Paris, que quinze députés furent chargés de porter aux états.

Alors la France, qui depuis plus d'un siècle n'était occupée qu'à user ses forces sur elle-même, vint prendre sa part dans la politique européenne. Il ne sera pas inutile d'examiner quel fut le caractère général de celle-ci, jusqu'au moment où les guerres de la réforme vinrent en changer le but.

La révolution qui avait eu lieu en France au profit de la puissance monarchique s'était opérée également, sous d'autres formes, dans les autres parties du royaume de Charlemagne. En Allemagne, l'empire était, en quelque sorte, devenu héréditaire; en Espagne, les chrétiens avaient conquis tout le sol, et un seul roi gouvernait ce vaste et riche territoire. Ces grands centres avaient été formés par la guerre. Mais l'œuvre terminée, l'esprit d'agrandissement qui l'avait conduite restait tout entier, et les peuples eux-mêmes étaient dressés à une activité militaire qui avait besoin de s'épancher. Alors les princes conçurent l'idée de reconstruire l'empire de Charlemagne; la monarchie universelle fut le but de tous les désirs et de tous les efforts de cette époque. Cette ambition mit les armes à la main aux trois principaux monarques de l'Europe. La France ne cessa donc de combattre depuis Charles VIII, soit pour établir cette monarchie sous son nom, soit pour l'empêcher sous un autre. Elle sortit victorieuse de ces guerres, car elle rompit les projets de ses adversaires et conserva sa personnalité souveraine. Sous Charles VIII, elle combattit en Italie; sous Louis XII, elle combattit en Italie encore et, de plus, en Picardie contre les Anglais et les Impériaux, et en Bourgogne contre les Suisses; sous François Ier, il y eut un champ de bataille de plus sur les frontières d'Espagne; enfin, sous Henri II, une trêve fut signée à CateauCambrésis, en 1559, sous le nom de paix. C'est pendant cet intervalle de repos que commencèrent à paraître en France les premiers symptômes d'une nouvelle crise civile où le peuple lui-même continua ce que Louis XI avait commencé.

Les quelques mots qui précèdent suffisent pour l'histoire des quatre rois que nous venons de nommer. Ajoutons cependant que Louis XII monta sur le trône en 1498, François Ier en 1515, Henri II en 1547.

Pendant la durée de cette guerre, les états généraux ne furent

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