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et de tous ses adhérents contre le parti des puritains. On sait que ce parti, qui avait fait la révolution de 1640, et qui menaça les trois royaumes d'une réforme radicale, basait sa doctrine politique sur l'Évangile. De là, pour tous les hommes qui voulaient la conservation de tout ou partie de l'ancien système social, un intérêt puissant pour attaquer la vérité et l'autorité du livre évangélique. Ce fut cet intérêt, ce fut la haine du puritanisme, qui dictèrent les livres de Hobbes et donnèrent plus tard appui à ses successeurs. Les Anglais furent nombreux à la cour du régent; ils ne s'épargnèrent pas dans ses orgies. Ils furent présentés et accueillis comme des types de bon sens, de raison, de force et même de sagesse; car alors la sagesse ne consistait pas à se bien conduire, mais à ne rien respecter. Leur littérature devint à la mode. Le nom de lord Bolingbroke, le grand ennemi du christianisme, fut peut-être plus connu en France que dans son propre pays. La philosophie anglaise offrait d'ailleurs une mine immense à exploiter pour le scepticisme français, qui, réduit à ses propres forces, n'eût peut-être jamais été bien sûr de lui-même. Il alla donc chercher chez nos voisins une sécurité qu'il ne pouvait pas encore se donner. Ce fut, sans doute, le motif qui conduisit Voltaire en Angleterre. Déjà connu par des succès littéraires, il fut merveilleusement bien reçu. Après trois ans de séjour dans la société des libres penseurs anglais (1727 à 1750), il revint dans sa patrie rapportant l'idée d'employer la science et l'histoire pour combattre la religion. Pendant que Voltaire allait chercher à l'étranger des doctrines qui plus tard devaient faire dévier la révolution, l'esprit français, qui, dans le dernier siècle, avait produit Descartes et Pascal, se manifestait par une œuvre qui continuait dignement Fénelon, Vauban et Boisguilbert. L'abbé de Saint-Pierre, déjà connu par son projet de paix perpétuelle, publié en 1713, donna, en 1717, le projet d'une taille proportionnelle; en 1724, un mémoire sur les pauvres mendiants et les moyens de les faire subsister, et enfin, en 1724, un mémoire pour diminuer le nombre des procès. Le titre de ces ouvrages en font connaître le contenu. On ne voyait alors en lui qu'un rêveur. Mais ce rêveur était l'apôtre d'une école pleine de vie et d'avenir, qui, dès cette époque, avait déjà des disciples. Il commençait un enseignement que tout, dans le siècle qui commençait, devait tendre à accroître, et que J. J. Rousseau devait plus tard rendre populaire.

CHAPITRE III.

Histoire du gouvernement de Louis XV.

Cependant les hommes du présent n'étaient occupés que de recueillir la succession du duc d'Orléans. Ce fut le duc de Bourbon qui l'obtint avec le titre de premier ministre. Ce prince continua l'exemple des mauvaises mœurs de la régence, en donnant le scandale d'une maîtresse avouée et influente sur les affaires de l'État. Il renouvela les édits de Louis XIV contre les protestants. Il accorda à la compagnie des Indes un décret qui achevait la banqueroute de Law. Il établit sur toutes les terres, même celles de la noblesse et du clergé, un impôt d'un cinquantième ; et, afin d'obtenir l'enregistrement de cette nouvelle taxe, il désorganisa le parlement. Enfin, il établit une société pour l'achat et la vente des blés, qui produisit une disette. Le mécontentement fut extrême et général. Il y eut plusieurs émeutes où le sang coula. Mais tous ces faits n'eussent pas suffi pour renverser un premier ministre qui était prince du sang. Ce fut une petite affaire toute personnelle qui détermina le roi à le renvoyer. Louis XV avait pour précepteur M. de Fleury, évêque de Fréjus. Il était habitué à l'avoir toujours près de lui, et en tiers dans les rapports qu'il avait avec son premier ministre. Le duc voulut travailler seul avec le roi. Cette prétention n'eut qu'un succès passager. M. de Fleury, rappelé par le roi et averti, usa de son pouvoir sur l'esprit du monarque, pour écarter un homme dans lequel il ne pouvait plus voir qu'un rival, et qui était d'ailleurs perdu dans l'opinion. Le duc de Bourbon fut exilé à Chantilly, le 11 juin 1726. Dès ce moment la direction des affaires appartint à M. de Fleury.

L'administration de ce prélat fut un accident heureux. Une économie sévère remit l'ordre dans les finances. Une juste indulgence répara les violences des dix dernières années. Malheureusement des discussions religieuses vinrent donner un nouvel aliment à l'esprit d'incrédulité. C'était toujours la vieille querelle du jansénisme à propos de la bulle Unigenitus. Elle pouvait, elle devait avoir de l'importance pour les théologiens, pour le clergé ; mais le public n'y comprenait rien, ou, s'il y comprenait quelque chose, il n'y voyait que les prétentions de la cour de Rome à étendre son autorité. Par conséquent il était avec les évêques qui refusaient la bulle et avec les parlements qui la condamnaient. D'ailleurs, le peuple proprement dit était trop accablé de la masse des misères

de toutes sortes qui pesaient sur lui, pour s'occuper de quelque chose qui ne fût pas sa misère. Aussi ce fut une des grandes fautes du haut clergé de cette époque de n'avoir pas vu que, pour posséder, en théologie, la souveraineté aux yeux de tous, il fallait d'abord acquérir l'autorité du dévouement envers les faibles et les pauvres. Le problème du siècle n'était point un problème de théologie mais un problème de charité. On concevait si peu ces choses, que l'on compliqua la question de la bulle d'une question de calendrier relative à l'admission de la fête et à l'office de saint Grégoire VII. Des évêques s'élevèrent contre cette nouveauté; des parlements rendirent des arrêts; le pape lança des brefs contre les évêques; le parlement de Paris cassa les brefs. Je ne ferai pas ici l'histoire de ces discussions. Elle ne serait point en place dans une introduction où je ne me propose que de constater des résultats. On ne pourrait, d'ailleurs, être exact, à moins d'entrer dans des détails assez longs. Nous nous bornerons à remarquer que, dans cette affaire, le clergé catholique fut divisé contre luimême, alors que les attaques des libres penseurs rendaient l'union plus que jamais nécessaire. La bulle avait dans l'épiscopat une majorité qui équivalait presque à l'unanimité; mais il n'est pas certain qu'il en fût partout ainsi dans le clergé du second ordre. Ainsi, à Paris, l'archevêque M. deVintimille était pour la bulle; mais vingt-huit curés étaient contre, et le plus grand nombre persistèrent jusqu'au bout, quoique leur évêque leur eût montré « les tristes « suites de leur résistance; la docilité anéantie dans les fidèles, « le vicaire de Jésus-Christ calomnié, l'autorité des évêques mé«< connue, toute subordination détruite et une foule d'écrits sé<< ditieux paraissant pour semer l'esprit de haine, de révolte et « d'indépendance. » (Mémoires pour servir à l'hist. ecclés.) Le nombre des pamphlets fut en effet considérable. Dans quelques-uns même la discussion sortait du terrrain spirituel, et respectant médiocrement les pouvoirs temporels, on adressait à celui-ci, en passant, quelques dures vérités et même des menaces. Il y en eut de si violents, que le parlement, quoique favorable aux pamphlétaires, fut obligé de les condamner. Le parti janséniste, car c'était un parti, publia même un véritable journal sous le titre de Nouvelles ecclésiastiques. La cour cependant était ennuyée de tout ce bruit. Elle frappa sur le parlement de Paris; elle emprisonna quelques membres, elle en exila quelques autres; elle tint un lit de justice; mais elle n'en recueillit que des protestations énergiques; enfin elle exila en masse les chambres des requêtes et des enquêtes, sans produire autre chose qu'une interruption dans l'administra

tion de la justice. Le parlement fut rappelé en 1732, la question n'étant pas plus avancée qu'auparavant.

Les jansénistes auraient conservé l'appui de l'opinion publique, car ils apparaissaient comme un parti de réforme vis-à-vis du clergé et vis-à-vis du gouvernement, s'ils n'avaient fini par le ridicule. Soit crédulité, soit mensonge, on répandit le bruit qu'il se faisait des miracles sur le tombeau du diacre Paris. La foule y courut. On allait en pèlerinage au cimetière de Saint-Médard. Vingt-trois curés de Paris signèrent des requêtes par lesquelles ils sommaient en quelque sorte leur archevêque de reconnaître la vérité de quelques-unes des cures prétendues miraculeuses. M. de Vintimille fit intervenir les médecins et en définitive condamna toutes ces histoires (1735). Mais son autorité ne suffit pas pour arrêter la ferveur populaire, il fallut que le gouvernement intervînt et fît fermer le cimetière.

Le parti philosophique triompha de cette affaire, qui accrut considérablement le nombre de ses auditeurs et celui de ses adhérents. Il y eut dès lors une portion notable du public lettré qui, ne voyant dans la religion qu'un moyen d'hébêtement, crut, en travaillant contre elle, agir pour le bien de l'humanité et de la nation. Elle se mit à l'œuvre avec la ferveur de l'apostolat. Ce fut à ce public que Voltaire adressa sa Henriade, et ensuite ses Lettres sur les Anglais ou ses Lettres philosophiques. Il est inutile de dire quel était l'esprit de ce dernier ouvrage, qui plus tard a formé le fond du Dictionnaire philosophique. Il eut d'autant plus de succès qu'il avait le mérite de l'actualité; l'une des lettres était consacrée à attaquer les Pensées sur la religion, de Pascal. Le parquet s'en émut; un arrêt du parlement ordonna d'informer contre l'auteur. Voltaire commença par se cacher, puis il nia qu'il eût pris la moindre part à cette œuvre. Moyennant ce petit mensonge, il put reparaître dans le monde; mais cette menace de persécution, qui n'eut aucune suite, augmenta le succès des lettres. Elles furent réimprimées en secret et vendues sous le manteau. C'est par la même voie que la publicité fut acquise à deux autres ouvrages de Voltaire que l'on ne doit pas oublier parmi ceux qu'il produisit dans cette époque, Brutus et la Mort de César, dont l'impression avait été défendue par la censure. Les écrits de Voltaire étaient les meilleurs et les plus répandus parmi ceux que produisait alors (1734) l'école philosophique, mais ils n'étaient pas les seuls. Il y en eut d'autres qui méritèrent des arrêts du parlement ou des censures en Sorbonne. Beaucoup de livres, au reste, échappaient à l'attention de ces corps, soit à cause du titre, soit à cause du nom

des auteurs. Il y a, de cette époque, des livres d'astronomie, de physique, de voyages, signés par les pères de la compagnie de Jésus, qui contiennent des plaisanteries dans le style et l'esprit de Voltaire, et où il est à croire que celui-ci a même beaucoup puisé. Sans doute, ces pères croyaient jouer un excellent tour à leurs ennemis les jansénistes, en se moquant de certains miracles, de certaines reliques, etc., et quelquefois même en allant plus loin. Mais, en définitive, ils ne faisaient que venir en aide à l'école philosophique, en lui donnant, par leur exemple, l'accès et l'autorité qui lui eussent manqué auprès de beaucoup de gens.

Une suite de guerres vint, comme à propos, distraire l'opinion publique du spectacle de ces émeutes littéraires et religieuses. En 1733, le roi que les victoires de Pierre le Grand sur Charles XII avaient donné à la Pologne vint à mourir. Les Polonais appelèrent à lui succéder l'homme qui avait été son compétiteur malheureux, le protégé de Charles XII, Stanislas Leczinski, depuis longtemps réfugié en France. Un double motif unissait le gouvernement français à la cause de ce dernier. Il était de son intérêt politique de conserver la Pologne dans sa force et son indépendance; de plus Louis XV avait épousé la fille de Stanislas, et par suite le rétablissement du père sur le trône de Pologne était en quelque sorte une affaire de famille. Mais déjà les trois puissances qui devaient, plus tard, partager ce malheureux pays, la Russie, l'Autriche et la Prusse, étaient convenues par un pacte secret, de soustraire la Pologne à l'amitié de la France, et d'en assurer la couronne dans la maison de Saxe. De là la guerre de 1734 et 1735. Stanislas, quoique proclamé par soixante mille voix, fut chassé de son royaume par les armées russe et autrichienne. La France, de son côté, altaqua l'Autriche, qui était la seule puissance à sa portée. Ses armes furent heureuses. On peut en juger par les résultats consacrés dans le traité signé à Vienne le 3 octobre 1755. Elle acquit la Lorraine qui fut assignée au roi Stanislas, et déclarée à sa mort reversible à la couronne de France. De plus la couronne de Naples et de Sicile, donnée à don Carlos, fils de Philippe V d'Espagne, accrut la prépondérance de la maison de Bourbon, et réalisa un des projets favoris de la politique de Louis XIV.

Cette courte prise d'armes fut suivie de quelques années de paix, auxquelles succéda une guerre longue et rude. Ce fut encore une guerre de succession. L'empereur d'Allemagne, Charles IV, mourut, le 20 octobre 1740, sans laisser d'autres enfants qu'une fille, Marie-Thérèse. Or, la loi salique était la loi de l'Empire : les fem-mes ne pouvaient succéder à la couronne. Charles IV avait voulu

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