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vols et les assassinats sur les grands chemins. Des bandes de paysans affamés parcouraient les campagnes, insultant et menaçant de l'incendie les fermes et les châteaux, et demandant du pain.

Comment les partis interprétaient-ils ces mouvements? L'aristocratie prétendait qu'ils étaient les symptômes d'une grande conspiration contre elle, que la disette n'était qu'un prétexte. (C'est à cette occasion que l'Ami du Roi avance que Mirabeau n'était que l'agent de l'ambition de d'Orléans.) Le haut clergé les attribuait aux sollicitations des calvinistes. Le tiers é'at les croyait excités par la noblesse. Mirabeau leur enseigna à tous le vrai moyen d'y mettre un terme. Dans la grande émeute de Toulon, il obtint une diminution d'un sou sur le pain; et le calme succéda aussitôt à l'agitation. Alors le parlement nomma des commissaires qui furent chargés de parcourir les différentes villes pour empêcher les accaparements, pour prendre connaissance des dépôts de blé et de farine, et contraindre ceux à qui ils appartenaient à venir vendre dans les marchés ce qui était nécessaire pour la consommation journalière. Comment Mirabeau n'eût-il pas été admiré, lui qui avait trouvé si vite le secret qui était un problème pour tous, et le remède du mal? Cependant les préventions restèrent; seulement elles prirent d'autres prétextes.

Dans le reste de la France, la malveillance des hautes classes borna ses manifestations à quelques brochures et à des démarches pour recueillir des signatures en protestation contre les mesures du gouvernement. Ces manœuvres furent si multipliées, que le ministère en fut alarmé. Un arrêt du conseil du roi, du 25 février, vint défendre ces intrigues, et déclarer nuls tous leurs résultats. La noblesse n'avait l'occasion d'éclater publiquement, ainsi que nous venons de le voir, que dans les provinces d'états. Dans les autres lieux, ce fut seulement dans les assemblées électorales qu'elle put montrer son opposition. Ainsi, presque partout, le tiers état recueillit de puissants motifs d'irritation et de défiance. Le Dauphiné fut la seule province où les trois ordres se réunirent et élurent en commun tous leurs députés.

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Règlement pour les élections de Paris. - Élections. -Affaire Reveillon.

Les assemblées électorales ne furent pas convoquées toutes le même jour pour toute la France. Le règlement du 24 janvier supposait que chaque bailliage serait réuni par des lettres spéciales. En effet, il ne pouvait en être autrement : les anciennes divisions, ainsi que les usages administratifs, propres à chaque province,

offraient une telle irrégularité, qu'il était impossible d'asseoir une mesure générale et uniforme. La première lettre de convocation est du 7 février. Elle est adressée à la province d'Alsace; et la dernière, adressée au pays des Quatre-Vallées, est du 3 mai. Celles qui regardaient Paris sont des 28 mars et 15 avril. Aussi fut-on obligé de proroger l'ouverture des états généraux du 27 avril au 4 mai suivant.

Voici le texte de la lettre de convocation pour Paris et l'analyse des règlements relatifs aux élections. Nos lecteurs pourront y prendre une idée de ce qui se passait dans le reste de la France.

De par le roi,

Notre amé et féal, nous avons besoin du concours de nos fidèles sujets pour nous aider à surmonter toutes les difficultés où nous nous trouvons relativement à l'état de nos finances, et pour établir, suivant nos vœux, un ordre constant et invariable dans toutes les parties du gouvernement qui intéressent le bonheur de nos sujets et la prospérité de notre royaume. Ces grands motifs nous ont déterminé à convoquer l'assemblée des états de toutes les provinces de notre obéissance, tant pour nous conseiller et nous assister dans toutes les choses qui seront mises sous ses yeux, que pour nous faire connaître les souhaits et les doléances de nos peuples; de manière que, par une mutuelle confiance et par un amour réciproque entre le souverain et ses sujets, il soit apporté le plus promptement possible un remède efficace aux maux de l'État, et que les abus de tout genre soient réformés, et prévenus par de bons et solides moyens qui assurent la félicité publique, et qui nous rendent, à nous particulièrement, le calme et la tranquillité dont nous sommes privé depuis si longtemps.

A ces causes, nous vous avertissons et signifions que notre volonté est de commencer à tenir les états libres et généraux de notre royaume, au lundi 27 avril prochain, en notre ville de Versailles, où nous entendons et désirons que se trouvent aucuns des plus notables personnages de chaque province, bailliage et sénéchaussée. Et pour cet effet, vous mandons et très-expressément enjoignons qu'incontinent la pré ente reçue, vous ayez à convoquer et assembler en notre ville de Paris, dans le plus bref temps que faire se pourra, pour conférer et pour communiquer ensemble, tant des remontrances, plaintes et doléances, que des moyens et avis qu'ils auront à proposer en l'assemblée générale de nosdits élats; et, ce fait, élire, choisir et nommer des députés de chaque ordre, tous personnages dignes de cette grande marque de cou

fiance, par leur intégrité et par le bon esprit dont ils seront animés; lesquelles convocations et élections seront faites dans les formes prescrites pour tout le royaume, par le règlement du 24 janvier, annexé aux présentes lettres; et seront, lesdits députés, munis d'instructions et pouvoirs généraux, et suffisants pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l'État, la réforme des abus, l'établissement d'un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l'administration, la prospérité générale de notre royaume, et le bien de tous et de chacun de nos sujets; les assurant que de notre part ils trouveront toute bonne volonté et affection pour maintenir et faire exécuter tout ce qui aura été concerté entre nous et lesdits états, soit relativement aux impôts qu'ils auront consentis, soit pour l'établissement d'une règle constante dans toutes les parties de l'administration et de l'ordre public, leur promettant de demander et d'écouter favorablement leurs avis sur tout ce qui peut intéresser le bien de nos peuples, et de pourvoir sur les doléances et propositions qu'ils auront faites, de telle manière que notre royaume et tous nos sujets en particulier ressentent pour toujours les effets salutaires qu'ils doivent se promettre d'une telle et si noble assemblée.

Donné à Versailles le 28 mars 1789.

Signé Louis.

Paris était dans une situation exceptionnelle. La coutume lui accordait le droit de députer directement aux états généraux, tandis que les autres municipalités ne figuraient que dans l'assemblée générale du tiers état, du bailliage ou de la sénéchaussée dont elles faisaient partie. Le règlement du 28 mars 1789 respecta cette coutume. Mais on demandait, en outre à Paris, que les convocations fussent faites par le prévôt des marchands et les échevins (1). Dans ce cas, Paris eût député comme commune, et la distinction des ordres n'eût pas été applicable. Le règlement ne

(1) L'administration de Paris était répartie entre diverses autorités. Il y avait un ministre de Paris et un gouverneur de Paris. L'administration municipale, proprement dite, appartenait principalement aux officiers du Châtelet, à la tête desquels était le prévôt de Paris, le lieutenant civil et le lieutenant de police. La municipalité n'avait conservé qu'une faible partie de ses anciennes attributions. Elle se composait du prévôt des marchands, nommé par le roi, pour deux ans, des quatre échevins, d'un avocat et d'un procureur du roi de la ville, et d'un greffier, qui, ensemble, formaient le bureau de ville. Réunis aux vingt-six conseillers et aux seize quarteniers, dont les offices s'achetaient, le bureau de ville formait le corps de ville. Les échevins étaient élus parmi les conseillers et les quarteniers, par le corps de ville et par quelques notables qui étaient nommés eux-mêmes par les quarteniers,

fit pas droit à cette réclamation et attribua la convocation au prévôt de Paris et au lieutenant civil. D'après ce règlement et celui du 13 avril, les élections durent se faire ainsi :

Le prévôt de Paris était tenu de convoquer séparément les trois états de la prévôté et vicomté hors des murs (banlieue de Paris). Cette assemblée devait nommer douze députés, trois de l'ordre du clergé, trois de la noblesse et six du tiers état. Le prévôt de Paris était également tenu de convoquer les habitants des deux premiers ordres domiciliés dans Paris.

A cet effet, les curés devaient tenir, le 21 avril, l'assemblée de tous les ecclésiastiques engagés dans les ordres, domiciliés dans leurs paroisses. Chacune de ces assemblées devait choisir ses représentants à raison d'un sur vingt présents, de deux au-dessus de vingt jusqu'à quarante inclusivement, etc., non compris le curé appelé directement à l'assemblée des trois états. Pour les chapitres et les communautés, on s'en référait au règlement du 4 janvier. L'assemblée de la noblesse était divisée en vingt parties, suivant les quartiers. Tous les nobles ayant la noblesse acquise ou transmissible, domiciliés à Paris, avaient droit d'y être admis. Les nobles, possédant fief dans l'enceinte des murs, devaient être assignés personnellement. Ils devaient choisir un représentant sur dix, deux s'ils étaient au-dessus de dix jusqu'à vingt, etc.

C'était au prévôt des marchands à convoquer l'assemblée du tiers état intra muros. A cet effet, Paris était divisé en soixante quartiers ou districts. Pour être admis à l'assemblée du quartier, il fallait pouvoir justifier d'un titre d'office, de grades dans une faculté, d'une commission ou emploi, de lettres de maîtrise, ou enfin d'une quittance ou avertissement de capitation, montant au moins à la somme de six livres en principal. Chaque assemblée devait être présidée par un officier du corps municipal. La première réunion était indiquée pour le 21 avril à sept heures. En entrant, chacun était tenu de remettre sur un carré de papier son nom, sa demeure, son domicile. Ces carrés, réunis par centaines, devaient servir à faire l'appel nominal des personnes présentes. Le jugement des contestations sur le titre de ceux qui se présenteraient était réservé au président assisté de quatre bourgeois choisis par lui. Après neuf heures, les portes étant fermées, l'assemblée avait à nommer, au scrutin de liste et parmi les personnes présentes ou celles qui auraient eu droit de venir à l'assemblée, un représentant sur cent présents, deux au-dessus de cent jusqu'à deux cents, et ainsi de suite.

La condition générale pour être admis aux assemblées primaires

du clergé, de la noblesse et du tiers état, était d'être né Français ou naturalisé, et âgé de vingt-cinq ans au moins. L'université devait nommer directement quatre représentants parmi ses meinbres un du clergé, un de la noblesse, deux du tiers état.

Les représentants des trois ordres devaient se réunir le 25 avril et procéder, séparement ou en commun, à la rédaction de leurs cahiers et à l'élection des députés aux états généraux, au nombre de quarante, dont dix du clergé, dix de la noblesse et vingt du tiers état (1).

L'opinion du tiers état, bien qu'énergiquement révolutionnaire, n'avait été irritée à Paris par aucune discussion directe avec les deux autres ordres. En effet, ceux-ci disparaissaient dans son immense population; et leur présence était une cause d'irritation moins par elle-même que par l'importance que la cour avait voulu leur donner, et par le refus qu'elle avait fait d'admettre plus qu'une seule classe de députés à Paris. Mais le spectacle de Versailles offensait les regards, et l'on s'était échauffé à toutes les nouvelles venues des provinces. On alla donc dans les districts avec la ferme volonté de faire en sorte qu'ils fussent le moyen d'un affranchissement définitif. Le peuple, d'ailleurs, n'était pas moins ému que dans quelques autres parties du royaume, par le ressentiment des souffrances que lui causait la rareté du grain. Il l'attribuait à des accaparements dont il désignait les auteurs qui tous appartenaient, suivant lui, à la caste privilégiée. Il avait, pour croire à cette explication de la disette, toutes les raisons qui peuvent rendre une chose probable aux yeux des hommes. Au mois de mars, les boulangers de Paris avaient adressé une pétition au ministre Necker, puis déposé une plainte au parlement, dans laquelle ils dénonçaient une société de spéculateurs sur le monopole du blé et des farines. Dans ce mémoire du 19 février, rédigé par le sieur J. Rutledge, la communauté des boulangers de Paris exposait comment les sieurs Leleu et compagnie, adjudicataires des moulins de Corbeil, avaient, sous divers prétextes, fait hausser le prix des farines; comment les boulangers avaient cherché à se fournir ailleurs à meilleur marché; comment ayant trouvé toutes les halles circonvoisines vidées par les sieurs Leleu, ils s'étaient vus à la merci de la compagnie de Corbeil, et comment ils avaient été obligés d'enchérir le pain, etc. Cette requête fut repoussée par la cour de justice. Plus

(1) Le nombre total des électeurs du tiers état avait été fixé, par le règlement du 28 mars, à 300. Comme on craignit dans les districts que par le mode adopté ce chiffre ne fût pas atteint, plusieurs districts nommèrent des suppléants, que 'assemblée électorale admit dans son sein.

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