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blesse ne prétendait pas renouveler cette attribution. MM. de la noblesse en convinrent. Il fut donc reconnu que l'autorité du passé était insuffisante dans cette discussion. On se sépara sans avoir rien décidé.

Le lendemain on se réunit de nouveau. La noblesse offrit, comme moyen conciliatoire, de faire vérifier les pouvoirs séparément, mais de soumettre les contestations qui pourraient en résulter au jugement de commissaires nommés par les trois ordres. Un membre du clergé proposa de porter à l'assemblée générale le jugement définitif, dans le cas où les commissaires des trois ordres, nommés conformément à la proposition de la noblesse, ne s'accorderaient pas. Ainsi il n'y avait rien de changé, quant au fond, dans les prétertions des ordres privilégiés; et cette persistance, à laquelle on s'attendait d'ailleurs, dut être prise par le tiers pour le rejet absolu de toutes ses propositions. La conférence fut rompue.

Cependant on répandait le bruit que le roi viendrait incessamment aux états généraux présenter le projet d'un emprunt préparé par M. Necker. Cette nouvelle fut fort mal accueillie : les députés disaient hautement qu'ils ne donneraient leur voix à aucune mesure de finances avant que les débats entre les prétendus ordres fussent terminés.

On se répandait en propos amers contre les ministres et les grands; on se plaignait avec chaleur de l'affluence des troupes qui environnaient Versailles et la capitale. On récriminait sur le passé ; on disait que si les assemblées primaires à Paris avaient été si peu nombreuses dans beaucoup de districts, c'est que les citoyens avaient été effrayés, qu'ils savaient que tous les fusils des soldats étaient chargés à balles, que les canons de la Bastille étaient braqués, que ceux des Invalides étaient également chargés et prêts à marcher, que la bibliothèque du roi était remplie de munitions de guerre et d'hommes armés: ce n'est pas ainsi, ajoutait-on, que l'on est libre.

La noblesse et le clergé étaient certainement, disait le plus grand nombre, d'intelligence avec la cour. Leur conduite le prouvait. Ils étaient convenus de temporiser, pour donner le temps de réunir les forces militaires nécessaires afin d'assurer la dissolution de l'assemblée.

D'un autre côté, la cour était visiblement en proie à une agitation extrême. On y changeait mille fois de projets en un jour. Il était question de donner le département de la guerre à M. de Broglie, et de changer tous les ministres.

Toutes ces nouvelles allaient de Versailles se répandre à Paris.

Mais là on se rassurait, parce que l'on comptait sur le roi, et sur son ministre Necker. S'il faut une révolution, disaient les plus hardis, on la fera. Pour donner une idée du sentiment de la capitale, il suffit de citer les couplets suivants d'une chanson, alors en vogue, qu'on répétait jusque dans les cafés, sur l'air de Calpigi:

Vive le tiers état de France!

Il aura la prépondérance
Sur le prince, sur le prélat.

Ahi! povera nobilta!

Je vois s'agiter la bannière;
J'entends partout son cri de guerre:

Vive l'ordre du tiers état!
Ahi! povera nobilta!

Le plébéien, puits de science,
En lumière, en expérience,
Surpasse prêtre et magistrat.
Ahi! povera nobilta!

Je vois parler dans nos tribunes
Six cents orateurs des communes,
Comme Fox ou Gracque au sénat :
Ahi! povera nobilta!

Chacun cependant était dans l'attente du dénoûment de la lutte commencée par les communes contre les deux autres ordres, et en admiration devant la persistance des députés du tiers. Les lettres, les encouragements de toute nature leur venaient d'ailleurs aussi bien des provinces que de Paris.

La séance des communes, le 25, fut sans intérêt. On continuait à attendre le résultat des conférences qui n'étaient pas encore terminées. Il n'y eut de remarquable que quelques mots. A l'occasion d'un discours insignifiant de M. Mounier sur des mesures d'ordre à prendre, un membre s'écria : « J'observe que les rangs et les dignités ne doivent pas être répétés sans cesse dans une assemblée d'hommes égaux.

M. le comte de Mirabeau. J'attache si peu d'importance à mon titre de comte, que je le donne à qui voudra. >>

Le rapport sur le résultat des conférences devait être fait le 26. On s'attendait à une délibération importante. Aussi le public, ordinairement déjà fort nombreux, encombrait, cette fois, toutes les parties de la salle qui lui étaient réservées, et en assiégeait les portes.

Cependant l'assemblée se borna à charger le doyen de nommer des commissaires pour faire un règlement provisoire, et à entendre le rapport des commissaires conciliateurs.

Le même jour, lès commissaires de la noblesse firent leur rapport, et la noblesse prit l'arrêté suivant :

« La chambre de la noblesse, après avoir entendu le rapport des commissaires chargés de conférer avec ceux des autres ordres, arrête que, pour cette tenue des états généraux, les pouvoirs seront vérifiés séparément, et que l'examen des avantages ou inconvénients qui pourraient exister dans la forme actuelle sera remis à l'époque où les trois ordres s'occuperont des formes à observer pour l'organisation des prochains états généraux. »>

CHAP. III. - Deuxième tentative de conciliation. -Situation de Paris. Les Troubles à Marseille. Le Palais-Royal.

brigands.

SÉANCE DU 27 MAI.

Communes.

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On trouva l'arrêté de la noblesse sur le bureau. Plusieurs députés proposèrent immédiatement de reprendre la motion Chapelier.

M. Populus. Toutes les motions que vous venez d'entendre ne portent que sur une base fausse la fin des conférences et l'arrêté de la noblesse. Quant aux conférences, elles ne sont pas achevées; hier encore nous avons prié nos commissaires de continuer. Relativement à l'arrêté, nous pouvons croire individuellement qu'il existe; mais positivement nous devons l'ignorer: tant que la noblesse ne nous en aura pas donné connaissance, nous devons penser que les conférences sont toujours en activité.

A quel moyen devons-nous donc recourir? Je crois que nous devons faire demander par nos commissaires, aux deux autres ordres, quel est le résultat des conférences; et c'est alors que nous verrons quel parti il nous reste à prendre.

M. le comte de Mirabeau. Je ne vois rien que de sage et de mesuré dans la motion qui vous est soumise, et je conviens que l'on peut, sans inconvénient, se donner encore le mérite de cet inutile essai; mais je vous prie d'examiner s'il ne serait pas bon d'y joindre une autre démarche plus efficace, et qui ait un but plus déterminé.

Il est clair, d'après le rapport de nos commissaires, que la proposition qu'on leur a faite est entièrement inacceptable; elle choque tous nos principes; elle excède nos pouvoirs.

Il me semble qu'il est temps, sinon d'entrer en pleine activité, du moins de nous préparer de manière à ne pas laisser le plus léger doute sur notre résolution, sur nos principes, sur la nécessité où nous sommes de les mettre incessamment en pratique. Craignons qu'une plus longue persévérance dans notre immobilité ne com

promette les droits nationaux, en propageant l'idée que le monarque doit prononcer; qu'au lieu de n'être que l'organe du jugement national, il peut en être l'auteur.

Les arguments de la noblesse se réduisent en peu de mots : Nous ne voulons pas nous réunir pour juger des pouvoirs en commun. Notre réponse est très-simple. Nous voulons vérifier les pouvoirs en commun. Je ne vois pas pourquoi le noble exemple de l'obstination, étayé de la déraison et de l'injustice, ne serait point à l'usage de la fermeté qui plaide pour la raison et pour la justice. Le clergé persévère dans le rôle de conciliateur qu'il a choisi, et que nous lui avons confirmé. Adressons-nous à lui, mais d'une manière qui ne laisse pas le plus léger prétexte à une évasion.

Je propose en conséquence de décréter une députation vers le clergé, très-solennelle et très-nombreuse qui, résumant tout ce que MM. de la noblesse ont allégué, tout ce que les commissaires conciliateurs des communes ont répondu, adjurera les ministres du Dieu de paix de se ranger du côté de la raison, de la justice et de la vérité, et de se réunir à leurs codéputés dans la salle

commune.

La motion de M. de Mirabeau est accueillie par acclamation et exécutée au même instant. Les commissaires conciliateurs et les membres du bureau se rendent ensuite dans la salle où le clergé est assemblé.

Le clergé s'occupa immédiatement de la proposition des communes. Plusieurs membres de cet ordre, au nombre desquels était l'évêque de Chartres, proposèrent par acclamation de se rendre sur-le-champ à l'assemblée des communes. Mais un autre évêque fit observer que dans cette réunion il s'agissait de délibérer par tête. La proposition des communes devint l'objet d'une discussion qui se prolongea et fut remise au lendemain.

SÉANCE DU 28 MAI.-Les communes s'occupèrent, en attendant la réponse du clergé, à prendre des mesures de police pour limiter la partie de la salle destinée au public et laisser l'intérieur libre aux députés. Bientôt arriva une députation du clergé annonçant que, sur une lettre du roi qui proposait de nouveaux moyens de conciliation, cet ordre avait sursis à toute délibération.

Peu d'instants après, une lettre est apportée par le grand maître des cérémonies. Elle est ouverte et sans adresse. M. de Brézé, qui en est porteur, dit que tel est l'usage quand la chambre n'est pas constituée. Voici sa teneur :

« J'ai été informé que les difficultés qui s'étaient élevées relati

vement à la vérification des pouvoirs des membres de l'assemblée des états généraux subsistaient encore, malgré les soins des commissaires choisis par les trois ordres, pour chercher les moyens de conciliation sur cet objet.

« Je n'ai pu voir sans peine, et même sans inquiétude, l'assemblée nationale que j'ai convoquée pour s'occuper avec moi de la régénération de mon royaume, livrée à une inaction qui, si elle se prolongeait, ferait évanouir les espérances que j'ai conçues pour le bonheur de mon peuple et pour la prospérité de l'État.

« Dans ces circonstances, je désire que les commissaires conciliateurs, déjà choisis par les trois ordres, reprennent leurs conférences demain à six heures du soir, et, pour cette occasion, en présence de mon garde des sceaux et des commissaires que je réunirai à lui, afin d'être informé particulièrement des ouvertures de conciliation qui seront faites, et de pouvoir contribuer directement à une harmonie si désirable et si instante.

« Je charge celui qui, dans cet instant, remplit les fonctions de président du tiers état de faire connaître mes intentions à sa chambre.

« Signé LOUIS. A Versailles, le 28 mai 1789. >>

Le même jour, la noblesse reçut une lettre semblable. Elle venait de prendre, à la majorité de 202 voix contre 16, l'arrêté suivant :

<< La chambre de la noblesse, considérant que, dans le moment ctuel, il est de son devoir de se rallier à la constitution et de donner l'exemple de la fermeté, comme elle a donné la preuve de son désintéressement, déclare que la délibération par ordre et la faculté d'empêcher que les ordres ont tous divisément, sont constiutifs de la monarchie, et qu'elle persévérera constamment dans ces principes conservateurs du trône et de la liberté. »>

Plusieurs membres de la minorité, parmi lesquels était le duc d'Orléans, avaient protesté contre cet arrêté. A la réception de la lettre du roi, la noblesse de même que le clergé sursit à toute délibération et se montra disposée à envoyer ses commissaires.

Dans l'assemblée des communes la lettre du roi fut aussitôt mise en discussion. Malouet ayant demandé qu'on délibérât en secret et qu'on fit retirer les étrangers, Volney s'éleva avec chaleur contre cette motion: «< Des étrangers, en est-il parmi nous? L'honneur que vous avez reçu d'eux lorsqu'ils vous ont nommés députés vous fait1 oublier qu'ils sont vos frères et vos concitoyens?... Nous sommes dans les conjonctures les plus difficiles. Que nos concitoyens nous

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