Sayfadaki görseller
PDF
ePub

l'objet de diverses brochures publiées le lendemain, et dont le Moniteur s'est rendu l'interprète. Les détails en sont trop exagérés pour que nous l'enregistrions ici : nous nous bornerons à en exposer la substance, c'est-à-dire la vérité. La nuit du 14 au 15 juillet était fixée, disait-on, pour l'arrestation de plusieurs membres de l'assemblée nationale, pour celle du plus grand nombre des électeurs de Paris, et de tous ceux qui avaient marqué par quelque acte de patriotisme; on devait ensuite faire une vigoureuse démonstration militaire dans Paris, bloquer les barrières et mettre la ville sous le coup de batteries élevées à Montmartre et à Passy. Le 15, le roi devait se transporter à l'assemblée nationale, y tenir un lit de justice et la dissoudre.

Versailles, 15 juillet. La terreur des événements qui se passaient à Paris et la crainte d'une invasion venue de la capitale continuaient à paralyser la cour. On ue songeait qu'à se défendre. Aussi les communications restèrent interrompues par les mêmes précautions que la veille. On craignait cependant la défection des troupes. Aussi, les hommes et les dames de la cour allèrent se mêler aux soldats et leur distribuer de l'argent et du vin.

CHAP. IV. Journée du 14 juillet.

Nouvelle

Prise des Invalides. Prise de la Bastille. L'assemblée le 14 et le 15. - Messages envoyés au roi le 14. députation, le 15. Paroles énergiques de Mirabeau, Le roi se rend à l'as

semblée avec ses frères.

Paris, mardi 14 juillet 1789. Dès le matin, le cri aux Invalides! sortit du Palais-Royal, et alla retentir sur la place de l'Hôtel-de-Ville. M. Ethys de Corny, procureur du roi et de la ville, se mit à la tête du rassemblement qui occupait la place, et prit le cherin des Invalides. Il avait avec lui quelques compagnies de gardes françaises. La foule grossit énormément pendant la route, et cependant elle conservait un certain ordre de marche. On remarquait, au milieu, les clercs de la bazoche, avec leurs habits rouges, et le curé de Saint-Étienne-du-Mont marchant à la tête de ses paroissiens.

Ce n'était pas une expédition sans danger. On savait que trois régiments étaient campés au champ de Mars. Le gouverneur des Invalides avait des canons, des munitions, et un fort détachement du régiment d'artillerie de Toul avec ses pièces. Le jour précédent, on avait remarqué que la troupe était sous les armes derrière les fossés qui couvrent l'hôtel; mais, par une mesure qu'on ignorait, la garnison fatiguée s'était retirée dans ses quartiers. Lorsqu'on

arriva devant l'hôtel, on n'y trouva que les sentinelles ordinaires. M. Ethys de Corny se présenta devant la grille; il demanda à parler au gouverneur, et le somma de remettre son magasin d'armes à la disposition du peuple. Comme le gouverneur hésitait et tardait à répondre, le peuple commença à escalader les fossés. Alors la grille fut ouverte. On enleva de l'hôtel 28,000 fusils et 20 pièces de canon. D'ailleurs, toutes les propriétés publiques ou particulières furent religieusement respectées.

Au côté opposé de Paris, une autre scène commençait : c'était celle qui devait se terminer par la prise de la Bastille.

Dès l'aube du jour, quelques jeunes gens députés du PalaisRoyal se présentèrent devant cette forteresse; ils furent introduits jusqu'à la seconde porte (1). Ils demandèrent des armes; sur le refus qui leur fut fait, ils se retirèrent. Plus tard, une autre députation se présenta et fut également éconduite. Plus tard encore, il en vint une troisième plus nombreuse, plus bruyante, moins docile. On ne parvint à l'éloigner qu'en faisant feu sur elle. (Ami du Roi, p. 107, 3e cahier.) Enfin, vers midi, M. Thuriot de la Rosière, député du district, se présenta; il fut admis dans l'intérieur de la forteresse, et, après quelque hésitation, le gouverneur le conduisit au sommet de la tour qui dominait l'arsenal.

« Un peuple immense accourait de toutes parts. Le gouverneur en pâlit. Saisissant M. de la Rosière par le bras : Que faites-vous, monsieur, vous abusez d'un titre sacré pour me trahir. Et vous, monsieur, si vous continuez sur le même ton, je vous déclare que l'un de nous va bientôt tomber dans ce fossé. M. de Launay se tut. (Récit de M. Thuriot.) »

[ocr errors]

M. Thuriot fit promettre à la garnison de ne pas tirer la première et se retira. Le peuple occupait depuis le matin la cour de l'Orme gardée seulement par deux invalides. Plusieurs personnes avaient pénétré avec le député du district dans la cour du Gouver

(1) Depuis plusieurs jours, M. de Launay faisait des préparatifs de défense. Le 9 juillet, on avait transporté dans la Bastille deux cent cinquante barils de poudre, et six voitures chargées de pavés et de vieux ferrements, qu'on monta sur les tours. On avait élargi les embrasures des créneaux; on s'était muni des fusils de rempart dont on se servit pendant le siége. La garnison se composait au 14 juillet de trente-deux soldats suisses du régiment de Salis-Samade, et de quatre-vingt-deux invalides (Bastille dévoilée, 1789). · Pour pénétrer dans la Bastille, on entrait d'abord dans une grande cour (la cour de l'Orme), ordinairement livrée au public et qui longeait extérieurement le fossé du côté de la rue Saint-Antoine. De là on arrivait, en passant sur le pont-levis de l'avancé, dans la cour du Gouvernement, bâtie sur pilotis dans le fossé, et où se trouvaient la maison du Gouverneur, les cuisines, etc.; un second pont-levis conduisait dans la forteresse même et dans l'enceinte de ses tours.

nement; lorsque M. Thuriot se fut retiré, les invalides firent sortir tous ceux qui s'y trouvaient, et relevèrent le pont-levis de l'avancé; alors l'attaque commença. Chaque parti a prétendu que ses adversaires avaient fait feu les premiers; il est impossible de savoir la vérité sur ce fait, qui d'ailleurs est peu important; car la collision était inévitable. Le peuple reprit immédiatement le pont de l'avancé, mais il fut arrêté au deuxième pont par la fusillade meurtrière qui partait des créneaux du mur d'enceinte, des trous pratiqués dans le pont-levis, et du haut des tours de la forteresse. Il riposta à son tour par une fusillade dirigée des cours qu'il occupait et des toits des maisons voisines, mais sans obtenir de résultat. Alors arrivèrent successivement trois députations de la commune. La première était chargée de porter à M. de Launay l'arrêté suivant:

« Le comité permanent de la milice parisienne, considérant qu'il ne doit y avoir à Paris aucune force militaire qui ne soit sous la main de la ville, charge les députés qu'il adresse au commandant de la Bastille de lui demander s'il est disposé à recevoir dans cette place les troupes de la milice parisienne qui la garderont de concert avec les troupes qui s'y trouvent actuellement. Signé FLESSELLES, etc. >>

Cette députation ne put entrer à cause du feu des assiégeants; la seconde, conduite par l'abbé Fauchet, ne fut pas plus heureuse: <«< Placés au milieu de la cour, rapporte M. Delavigne, l'un de ses membres, et dans l'endroit d'où nous pouvions être le plus facilement aperçus de la garnison, nous avons fait divers signaux tant avec la main qu'avec nos mouchoirs en forme de pavillons blancs... Le feu n'a pas cessé... Nous sommes retournés sur nos pas, dans l'intention d'arriver à la Bastille par la rue SaintAntoine... Parvenus à la rue de la Cerisaie, nous y avons trouvé également un grand nombre de citoyens qui, sans être aucunement couverts ni garantis, se fusillaient avec la garnison du fort, laquelle tirait en outre de grosses pièces d'artillerie... Ayant abordé ces citoyens, nous nous sommes fait reconnaître... Les citoyens ont cessé le feu. Alors, nous avons réitéré nos signaux de paix, mais la garnison a continué de nous charger, et nous avons eu la douleur de voir tomber à nos côtés plusieurs des citoyens dont nous avions suspendu les coups... »

Une troisième députation fut nommée. Il fut décidé qu'elle se présenterait dans la forme usitée pour les parlementaires, c'est-àdire avec un tambour et un drapeau. M. Ethis de Corny, l'un de ces parlementaires rapporte « qu'étant arrivés à l'arsenal par la rue

de la Cerisaie, et par la cour des poudres et salpêtres, dans la cour de l'Orme, ils s'étaient postés au milieu de cette cour, bien en vue de la plate-forme de la Bastille; que le drapeau de la députation avait été signalé; qu'ensuite celui qui le portait s'était acheminé avec le tambour vers le pont-levis... que, pendant ce temps, on avait vu arborer, sur la plate-forme de la Bastille, un pavillon blanc, que les soldats armés de fusils avaient renversé leurs fusils le canon en bas, la crosse en haut, et que les signes de paix et d'appel avaient été multipliés par les chapeaux. Que sous les auspices de ce commencement de réception amicale, les députés avaient engagé le peuple à se retirer dans les districts... Que cette retraite commençait à s'exécuter... lorsque, malgré la foi rigoureusement observée dans les cas de députations parlementaires, au préjudice de celle des signaux du pavillon blanc arboré sur la Bastille et des fusils renversés, tout à coup les députés ont vu pointer une pièce de canon sur la cour de l'Orme, et dans le même moment, ils ont reçu une décharge de mousqueterie qui a tué trois personnes à leurs pieds...» (Procès-verbal des électeurs.)

S'il faut en croire les invalides, on cria aux députés de s'approcher pour que la garnison pût vérifier leurs titres, mais ils se retirèrent sans avoir entendu, et ce ne fut que lorsqu'on eut cessé de les voir que le feu recommença. (Bastille dévoilée.) Quoi qu'il en soit, la fusillade continua. Le peuple mit le feu à la maison du gouverneur et aux cuisines; on poussa des charrettes de paille enflammée devant le pont, pour détruire les bâtiments qui le couvraient. Ce fut à ce moment que, suivant les invalides, on tira le seul coup de canon qui, dans la journée, partit de la forteresse; ce fut à ce moment aussi, et non comme on l'a écrit, après la prise de la Bastille, que se présenta une jeune fille qu'on prit pour la fille de M. de Launay. Des furieux menacèrent de la brûler, si le gouverneur ne se rendait; on l'arracha évanouie de leurs mains. Enfin arriva une troupe d'hommes armés commandés par Hullin et accompagnés de gardes françaises. Ils amenaient deux canons qu'ils mirent en batterie dans la cour de l'Orme. M. de Launay avait perdu la tête; il parlait de mettre le feu aux poudres et de faire sauter la Bastille. Mais l'état-major et les soldats ne pensaient qu'à se rendre. On cessa de tirer; un officier suisse appela à travers un créneau et tendit un billet. Les assaillants cessèrent à leur tour le feu. Une planche fut jetée à travers le fossé; un huissier, nommé Maillard, se hasarda sur ce pont dont un homme venait de tomber et prit le billet. Hullin le lut à haute voix : on demandait à capituler si la vie de la garnison était garantie sauve. « Foi d'officier, dit

Hullin, je le jure. » Le peuple accueillit cette parole avec des cris de réprobation. Cependant un petit pont-levis s'abaisse, et le peuple se précipite dans la forteresse, pendant que du haut des tours on ne cesse de lui tirer des coups de fusil. Il était cinq heures et demie du soir.

La prise de la Bastille coûta aux assiégeants quatre-vingt-dix-huit morts et soixante-treize blessés. Les assiégés ne perdirent qu'un homme dans le combat. Faut-il s'étonner que le peuple furieux d'une résistance aussi obstinée, terminée par une capitulation qu'on aurait pu consentir plus tôt, ne se soit point opposé à la colère de ceux qui, dans un premier mouvement, ne pensèrent qu'à punir les auteurs d'une ténacité et d'un massacre dont les causes n'étaient pas même justifiées par la rigueur du devoir militaire. M. de Launay fut arraché à ceux qui le conduisaient prisonnier à l'hôtel de ville; on lui trancha la tête et on la mit au bout d'une pique; M. de Losme, son major, eut le même sort. Deux officiers et quelques invalides furent tués dans la forteresse. Deux autres invalides, saisis les armes à la main et faisant feu sur le peuple, furent trainés sur la place de l'Hôtel-de-Ville, jusqu'au coin de la rue de la Vannerie, où était une potence en fer qui soutenait une lanterne; cet appareil devint l'instrument de leur supplice. Les autres prisonniers furent sauvés par les gardes françaises. On s'était acharné contre les invalides, parce qu'on les avait vus sur le haut des tours, acharnés eux-mêmes à diriger un feu meurtrier sur la population. On emmena saufs les gardes suisses qui n'avaient point paru et qui, couverts de sarreaux, furent pris sans doute par quelques-uns pour des prisonniers.

M. de Flesselles était resté à l'hôtel de ville, suspect aux électeurs, hautement accusé par le peuple. Le bruit courut et fut généralement accrédité (rien n'a démontré qu'il fût faux), qu'on avait trouvé dans la poche de M. de Launay un billet signé de lui qui contenait ces mots « J'amuse les Parisiens avec des cocardes, tenez bon jusqu'au soir et vous aurez du renfort. »> «Sortez, monsieur de Flesselles, dit Garan de Coulon, l'un des membres du comité des électeurs, vous êtes un traître. » M. de Flesselles quitta l'hôtel de ville suivi de la foule. A peine fut-il arrivé au coin du quai Pelletier, qu'un particulier s'approcha et le tua d'un coup de pistolet. On lui trancha la tête et on la mit au bout d'une pique.

[ocr errors]

Pendant que l'on se battait à la Bastille, une reconnaissance de hussards pénétra jusqu'au Pont-Neuf par les quais. Arrivée là, elle se trouva entourée et comme assiégée par la foule : « Messieurs, dit l'officier, nous venons nous réunir à vous. Eh bien s'écria

« ÖncekiDevam »