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« La capitale, instruite de cette marque de confiance du plus aimé des rois, se livrera avec transport à l'amour qu'elle vous a toujours manifesté, et rien ne peut plus rétablir la paix que lorsque les peuples seront informés que l'accord règne entre le monarque et l'assemblée nationale. >>

Cette adresse paraît faire la plus vive impression dans l'assemblée; cependant plusieurs membres la combattent comme trop faible; d'autres la réfutent par un motif contraire.

M. le comte de Mirabeau. Je propose d'ajouter à l'adresse la phrase suivante :

« Sire, Henri IV, lorsqu'il assiégeait Paris, faisait passer secrètement des blés à la capitale; et aujourd'hui, en temps de paix, on veut réduire cette ville aux horreurs de la famine sous le nom de Louis XVI. »

Enfin, au milieu de tant de propositions, et après divers débats qu'elles font naître, tous les membres s'accordent sur la nécessité d'envoyer une députation au roi, pour lui faire la demande itérative du renvoi des troupes à leurs garnisons; la demande d'une libre communication pour le transport des blés et des farines nécessaires à la subsistance de Paris, communication qui a été arrêtée par les troupes, suivant la dénonciation qui en a été faite par M. Lecointre, négociant à Versailles; enfin, pour demander au roi une réponse satisfaisante qui pût permettre à l'assemblée d'aller à Paris porter la nouvelle de l'éloignement des forces militaires, et consolider l'établissement des gardes bourgeoises, et essayer de rappeler le bon ordre, en rassurant le peuple sur ses craintes et ses alarmes.

Ce parti est adopté à l'unanimité. Il est arrêté qu'une députation de vingt-quatre personnes ira, sur-le-champ, vers le roi, pour lui porter les voeux de l'assemblée.

M. le comte de Mirabeau. Eh bien! dites au roi que les hordes étrangères dont nous sommes investis ont reçu hier la visite des princes, des princesses, des favoris, des favorites, et leurs caresses, et leurs exhortations et leurs présents; dites-lui que, toute la nuit ces satellites étrangers, gorgés d'or et de vin, ont prédit dans leurs chants impies l'asservissement de la France, et que leurs vœux brutaux invoquaient la destruction de l'assemblée nationale; dites-lui que, dans son palais même, les courtisans ont mêlé leurs danses au son de cette musique barbare, et que telle fut l'avant-scène de la Saint-Barthélemi (1).

(1) La reine, M. d'Artois, madame de Polignac, etc. avaient été, la veille, rendre visite aux hussards abrités dans l'orangerie.

M. le marquis de Lafayette, vice-président, est chargé de présider la députation. L'assemblée déclare qu'elle se repose entièrement sur lui du soin d'exprimer à Sa Majesté tous les sentiments de douleur et d'inquiétude dont tous ses membres sont pénétrés. Les membres de la députation sont nommés; et ils se disposaient à sortir, lorsque M. de Liancourt demande la parole. Il dit qu'il est autorisé à annoncer à l'assemblée que le roi, de son propre mouvement, s'est déterminé à venir au milieu des représentants de la nation, et que M. le grand maître des cérémonies va paraître pour l'annoncer officiellement.

A ces paroles de M. de Liancourt, la majeure partie des membres de l'assemblée fait retentir la salle d'applaudissements réitérés. Plusieurs orateurs s'élèvent contre cette explosion de joie inconsidérée ; ils demandent du silence. Attendez, s'écrient-ils, que le roi vous ait fait connaître ces bonnes dispositions qu'on nous annonce de sa part... Le silence du peuple est la leçon des rois... On suspend toute délibération. salle.

La députation reste dans la

Le roi paraît à l'entrée de la salle, sans gardes, accompagné seulement de ses deux frères. Il fait quelques pas dans la salle; debout, en face de l'assemblée, il prononce d'une voix ferme et assurée, le discours suivant :

<< Messieurs, je vous ai assemblés pour vous consulter sur les affaires les plus importantes de l'État. Il n'en est pas de plus instante, et qui affecte plus sensiblement mon cœur, que les désordres affreux qui règnent dans la capitale. Le chef de la nation vient avec confiance au milieu de ses représentants, leur témoigner sa peine, et les inviter à trouver les moyens de ramener l'ordre et le calme. Je sais qu'on a donné d'injustes préventions; je sais qu'on a osé publier que vos personnes n'étaient pas en sûreté. Serait-il donc nécessaire de rassurer sur des bruits aussi coupables, démentis d'avance par mon caractère connu? Eh bien! c'est moi, qui ne suis qu'un avec ma nation, c'est moi qui me fie à vous! Aidezmoi, dans cette circonstance, à assurer le salut de l'État ; je l'attends de l'assemblée nationale: le zèle des représentants de mon peuple, réunis pour le salut commun, m'en est un sûr garant; et j'ai donné ordre aux troupes de s'éloigner de Paris et de Versailles. Je vous autorise, et je vous invite même à faire connaître mes dispositions à la capitale. »>

Ce discours. du roi est interrompu à diverses reprises par les applaudissements les plus vifs.

M. le président s'avance vers le roi et répond :

<< Sire, l'amour de vos sujets pour votre personne sacrée semble contredire dans ce moment le profond respect dû à votre présence, si pourtant un souverain peut être mieux respecté que par l'amour de ses sujets.

« L'assemblée nationale reçoit avec la plus vive sensibilité les assurances que Votre Majesté lui donne de l'éloignement des troupes rassemblées par ses ordres dans les murs et autour de la capitale, et dans le voisinage de Versailles; elle suppose que ce n'est pas un éloignement à quelque distance, mais un renvoi dans les garnisons ou quartiers d'où elles étaient sorties, que Votre Majesté accorde à ses désirs.

« L'assemblée nationale m'a ordonné de rappeler dans ce moment quelques-uns de ses derniers arrêtés, auxquels elle attache la plus grande importance. Elle supplie Votre Majesté de rétablir dans ce moment la communication libre entre Paris et Versailles, et dans tous les temps une communication libre et immédiate entre elle et Votre Majesté. Elle sollicite avec instance l'approbation de Votre Majesté, pour une députation qu'elle désire d'envoyer à Paris, dans la vue et avec l'espérance qu'elle contribuera beaucoup à ramener l'ordre et le calme dans votre capitale. Enfin, elle renouvelle ses représentations auprès de Votre Majesté, sur les changements survenus dans la composition de votre conseil. Ces changements sont une des principales causes des troubles funestes qui nous affligent, et qui ont déchiré le cœur de Votre Majesté. »

Le roi reprend la parole. Il dit que, sur la députation de l'assemblée nationale à Paris, on connaît ses intentions et ses désirs, et qu'il ne refusera jamais de communiquer avec l'assemblée nationale toutes les fois qu'elle le croira nécessaire.

M. le président ajoute que l'assemblée demande depuis longtemps un libre accès auprès de Sa Majesté; que les voies intermédiaires ne conviennent ni à la majesté du trône ni à celle de la nation.

Le roi se retire avec ses frères, et retourne à pied au château. L'assemblée entière se lève et se précipite à sa suite.

.

Tous les députés, sans observer aucun rang, les trois ordres mêlés, l'accompagnent; ceux qui sont près de lui forment une chaîne qui le préserve de la trop grande affluence. Souvent elle est rompue par le trop grand nombre de spectateurs qui tous veulent jouir de son aspect. Une femme se jette à ses genoux et les embrasse. Les cris de vive le roi! retentissent de tous côtés.

Arrivé à la cour des ministres, les cris d'allégresse et la foule

redoublent; les musiciens contribuent à l'enthousiasme par une idée très-heureuse; ils jouent l'air : Où peut-on être mieux qu'au sein de sa famille ?

Les députés devaient accompagner le roi jusque dans son appartement, passer devant lui et sortir par l'œil-de-bœuf; mais le monarque était tout en sueur et couvert de poussière : les flots du peuple qui se précipitait sur lui l'avaient extrêmement fatigué. Ce n'était plus ce roi renfermé dans son palais, ne mettant sa sûreté que dans les canons et dans les armées; c'était Henri IV au milieu de ses troupes après la bataille d'Ivry; c'était peut-être plus encore, c'était un prince triomphant de la perversité de ses conseils, de l'amour-propre et de l'ambition.

Le roi parvenu à l'escalier de la cour de marbre, les députés se retirent. Mais la foule devenait de plus en plus considérable; les gardes du corps, sans armes, sans ordre, égarés comme les autres par le délire général, croient cependant qu'ils doivent fermer les portes du petit escalier. Le roi se retourne et les fait rouvrir.

Le roi, la reine, M. le dauphin, madame royale, paraissent un instant sur le balcon : les applaudissements, les cris de vive le roi ! redoublent.

Au milieu de la joie commune, chacun s'empresse de bénir l'assemblée nationale.

L'assemblée étant rentrée dans la salle, M. le duc d'Orléans, qui avait également formé la chaîne autour du roi, reçoit des applaudissements universels. L'attachement que le peuple porte à ce prince avait été alarmé; depuis les troubles, on l'avait prié de coucher au château. C'est ainsi que les ennemis de l'État croyaient se soustraire à la vengeance de la patrie, en s'assurant d'un otage aussi cher.

On invite les membres de la députation vers Paris de se rendre au plus tôt dans la salle. Le nombre est de quatre-vingt-huit.

Ils sont chargés de faire tous leurs efforts, d'employer tous les moyens pour ramener le calme, pour consolider la garde bourgeoise, et de faire publier dans tous les quartiers l'assurance donnée par le roi, que les troupes vont s'éloigner de Paris et de Versailles.

La députation part avec promptitude, afin d'arriver à temps pour demander la grâce et prévenir le supplice de trois officiers soupçonnés d'avoir voulu empoisonner les gardes françaises.

Un membre de l'assemblée donne lecture d'un arrêté pris par

les électeurs de la ville de Paris. Ils supplient l'assemblée de prendre la capitale sous sa protection et sous sa sauvegarde.

Un des membres de l'assemblée dit que MM. les gardes du roi le chargent d'offrir, en leur nom, un détachement pour accompagner la députation qui va à Paris, non pas qu'elle ait besoin d'être défendue, mais pour qu'elle ait une garde d'honneur.

L'assemblée reconnaît à cette proposition l'esprit qui jusqu'à présent caractérise MM. les gardes du corps; mais elle considère qu'une députation nationale, allant remettre le calme dans une ville menacée des plus grands malheurs, doit y entrer sans aucune apparence de forces militaires. Elle arrête que MM. les gardes du roi seront remerciés d'une offre qui augmente pour eux l'estime de tous les Français, et charge son président et ses secrétaires de leur écrire, pour les féliciter sur leur acte de patriotisme, et les assurer des sentiments de l'assemblée nationale.

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Lafayette et Bailly.

Députation de l'assemblée reçue à Motion pour le rappel de Necker. Mesures d'ordre public. Le roi Premières défiances

l'hôtel de ville.
Discours de Mirabeau sur le ministère.
vient à Paris. - Misère des vainqueurs de la Bastille. -
contre les électeurs.

La journée du 15 fut encore agitée de terreurs assez vives. On apprit l'arrestation des convois de farines faite à Sèvres et à SaintCloud. On venait encore d'en arrêter un autre à Saint-Denis. Quelques patrouilles de hussards, sorties du camp établi dans cette ville, se montraient dans la campagne. Elles poussèrent des reconnaissances jusque près des barrières. Deux nouveaux régiments étaient arrivés le matin à ce camp. Enfin une tentative faite sur la Bastille irrita les soupçons. Deux compagnies d'infanterie revêtues de l'uniforme des gardes françaises, et déguisées, disait-on, se présentèrent aux portes de la Bastille. On croisa la baïonnette, et elles se retirèrent. Dès lors un corps de citoyens se voua à la garde de cette forteresse sous le nom de volontaires de la Bastille.

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