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pinion d'une manière absolue. En outre, les successeurs de saint Pierre, disposant de la dîme de toutes les églises, se trouvèrent les plus riches souverains de l'Europe; par suite, ils purent toujours solder les bras chargés d'exécuter leurs volontés; quant à trouver des soldats, il leur suffisait de décréter une croisade pour avoir, tout de suite, une armée nombreuse et brave. Le droit d'instituer ces pèlerinages militaires leur appartenait en effet entièrement. Le caractère de cette époque fut aussi tranché dans les productions de l'intelligence que dans la vie politique : l'art fut celui que nous nommons catholique; il enseignait des croyances qui devaient fructifier plus tard. La science, comme l'art, travaillait sur des principes reçus et en épuisait les conséquences.

Dans la seconde période, les papes perdirent la haute dictature qu'ils avaient exercée sur les affaires de l'Europe : ils ne furent plus que des princes de l'Église, livrés, trop souvent, comme les seigneurs temporels, aux passions égoïstes ou de famille. Le protestantisme était venu nier leur infaillibilité, et les fautes de quelques-uns donnèrent gain de cause aux réformateurs. Les rois prétendirent que les couronnes leur appartenaient à titre de propriétés héréditaires et de famille; les arts et les sciences devinrent indépendants de l'Église. Dans les premiers, on vit paraître le style de la renaissance; les secondes vulgarisèrent leurs découvertes, et l'on en vit sortir les applications qu'on rapporte en général au quinzième siècle, et dont il fut illustré, quoiqu'elles fussent souvent antérieures à cette époque, telles que la boussole et les verres grossissants, qui datent du treizième; telles que la poudre à canon, l'imprimerie, la découverte du cap de Bonne-Espérance et de l'Amérique, etc.

En France, les deux époques sont encore plus tranchées peutêtre, parce que les différences en sont indiquées par des faits moins généraux. La première époque vit s'opérer la révolution des communes et disparaître le servage; dans la seconde, toutes les individualités seigneuriales furent confisquées au profit de l'unité monarchique. Enfin les deux époques furent séparées par un siècle de désordres effroyables, au milieu duquel naquit, comme intérêt du pouvoir royal, l'évidente nécessité de renverser toutes les seigneuries indépendantes qui occupaient le sol français. Nous allons parcourir rapidement l'histoire de ces deux époques dans les deux chapitres suivants.

CHAPITRE II.

Histoire de France du onzième au quinzième siècle.

A mesure que nous approchons des temps modernes, les événements se pressent et se multiplient, et cette complication rend plus nécessaire à la clarté de notre exposition l'emploi des divisions. Nous partagerons donc la matière de ce chapitre en trois sections, purement artificielles d'ailleurs; car, il n'en est point ici comme dans quelques chapitres précédents, où le sujet présentait des successions de temps nettement différenciées. Dans cette période première de la troisième race, toutes choses sont continues, en quelque sorte, simultanées et croissantes; tout au plus peut-on apercevoir, vers le quinzième siècle, l'occasion d'une de ces divisions naturelles que nous avons si souvent rencontrées précédemment. Dans une première section, nous nous occuperons de la constitution de la monarchie capétienne, et, à cette occasion, nous en nommerons les premiers représentants; dans une seconde section, nous nous occuperons de la révolution des communes et de l'abolition du servage; nous citerons les rois dont les noms présidèrent particulièrement à ces grands changements; enfin, dans une troisième section, nous exposerons l'histoire de la révolte générale des feudataires de la couronne de France contre l'unité, des seigneurs contre le roi.

I. Hugues Capet, en montant sur le trône, apporta à la couronne une force réelle. Il ajouta d'abord au domaine royal, qui était réduit à la possession de la ville de Laon, le duché de France, qui se composait des comtés de Paris et d'Orléans. En outre, il était l'élu des principaux seigneurs français, et, en recueillant leur serment de vassalité, il acquit un droit sur toute la puissance militaire dont ils disposaient. Ainsi, dès le premier jour de son installation, le nouveau roi se trouva le représentant d'une puissance déjà redoutable. En effet, conformément au capitulaire de Charles le Chauve, de 877, que nous avons cité, chaque commandant de cité, de bourg ou de province, avait converti son fief, son bénéfice ou sa fonction en propriété et l'avait transmis, à ses enfants, à titre de possession héréditaire. Dans les cités où il y avait des comtes, le comte s'était approprié le gouvernement de la cité et les droits qui y étaient attachés, et en avait fait un apanage de famille. Dans les cités où il n'y avait que des évêques, ceux-ci avaient joué le rôle des comtes; ils avaient mis l'évêché à la place de la famille. Quelquefois il arriva que le

comte et l'évêque se partagèrent la ville. Or, en quoi consistaient les bénéfices de cette possession? Ils se composaient du cens ou des tailles payés par les citoyens; de l'avantage de commander les bourgs militaires ou les corps de vassaux qui étaient situés sur le territoire de la cité, ou les vassaux qui habitaient dans son propre sein; enfin du droit de tenir des plaids, de réglementer et de rendre justice : c'était donc une véritable souveraineté. Aussi le désir de conserver cette souveraineté comme possession de famille fit-il que plusieurs évêques vinrent à se marier, crimes que les foudres de l'Église eurent même quelque peine à réprimer. Les seigneurs des bourgs militaires imitèrent leurs comtes, les abbés et quelques curés leurs évêques; en sorte que le commandement des soldats casati et le gouvernement des villages élevés sur les terres des églises et des abbayes devinrent des propriétés attachées aux familles, aux églises ou aux abbayes. Ainsi, lorsque Hugues monta sur le trône, il se trouva que la société était une vaste hiérarchie de propriétaires assise sur le sol, qui comprenait tout le monde, en s'élargissant, depuis le plus grand jusqu'au plus petit, et réalisait un système complet de conservation, fondé sur l'intérêt et la subordination des possesseurs de fiefs.

De ce que les fiefs étaient devenus des propriétés, il en résulta qu'ils purent être vendus et achetés, aliénés de toute manière, partagés entre héritiers, qu'ils purent même appartenir à des femmes, ainsi que nous le verrons plus tard. Il en résulta encore que la privation du fief, quel qu'en fût le motif, lorsqu'elle avait lieu comme tradition des usages suivis sous les deux premières races, fut une véritable confiscation. Ainsi la terre qui, jusqu'à ce jour, n'avait été qu'un apanage, tendait à devenir marchandise, et le droit de confiscation se trouva établi.

L'hérédité par ordre de primogéniture n'était pas encore en usage. Le possesseur disposait souverainement de son fief, et le transmettait selon son bon plaisir. Le droit d'aînesse s'établit plus tard, à l'imitation de la loi adoptée dans la succession royale.

Ce fut, en effet, sous la race des Capets que fut fondé le principe de l'hérédité de la couronne, non-seulement de mâle en mâle, comme dans les siècles précédents, mais encore par ordre de primogéniture. Cet usage nouveau fut établi évidemment avec le sentiment de la future utilité qu'il devait apporter aux intérêts du pays. On voulut par là mettre un terme aux guerres de succession qui avaient ruiné la fortune de la France et celle des dynasties antérieures. Pour la première fois le sentiment de famille fut sacrifié au sentiment public, et ce ne fut pas cependant sans peine que cette institution devint loi de l'État. Il fallut que Hugues Capet associât

à la couronne Robert, son premier fils, et que celui-ci à son tour s'associât Henri, l'aîné de ses enfants. Encore il arriva à ce dernier que la royauté lui fut disputée et que le partage lui fut demandé au nom d'un de ses frères. Il est vrai que ce fut sans succès, et ce fut aussi la dernière fois que l'on voulut appliquer à la succession de la couronne les usages admis pour l'hérédité des propriétés particulières.

L'établissement du droit d'aînesse fut la source de grands avantages pour la France: il contribua puissamment à l'édification de l'unité. Hugues Capet, au reste, porta la même intelligence de conservation dans tous ses actes: ainsi, lorsqu'il adopta Paris pour capitale, il n'est pas douteux que ce fut par calcul. En effet, cette cité avait alors une grande importance, autant par sa situation, comme position militaire, que par sa nombreuse et riche population. Comme position militaire, elle commandait tout le cours de la Seine et de la Marne, c'est-à-dire deux grandes voies de communication qui unissaient de vastes provinces; elle était le point central de tout le territoire de la vieille France, de celui qui était situé entre la Meuse et la Loire. Sa population s'était accrue, non pas tant encore par le commerce qu'elle entretenait à l'aide des rivières sur lesquelles elle était assise, que par le concours de tous ceux qui étaient venus se réfugier dans l'asile imprenable qu'elle leur offrait pendant les troubles du dixième siècle. Il fallait que le nombre de ses citoyens fût considérable, puisqu'ils suffirent à former, presque à eux seuls, un corps d'armée assez puissant pour repousser une invasion faite par Othon II, en 978, à la tête de ses Allemands, et pour le forcer à une retraite qui lui fut fatale. Paris, d'ailleurs, devait jouir d'une grande renommée et, par suite, d'une grande influence sur l'opinion du peuple des cités. Cette cité avait noblement repoussé toutes les attaques des ennemis du pays, depuis celle des Huns, au cinquième siècle, jusqu'à celle des Normands; elle avait conservé intactes toutes ses anciennes immunités; enfin elle était le théâtre et l'origine de la gloire de la nouvelle famille royale. Aussi Hugues Capet ne la choisit pas seulement comme le lieu de son séjour personnel; il en fit la capitale du royaume, en transmettant à ses enfants l'attachement calculé qu'il lui portait. Ce fut même en partie pour avoir manqué à cette tradition de popularité, dans la grande ville, qui était comme un héritage et une maxime de famille, qu'arrivèrent les malheurs qui signalèrent le règne de Charles VI, dans le commencement du quinzième siècle.

Hugues Capet mourut en 996, laissant Robert, son fils aîné, roi de France. Robert mourut en 1031, laissant aussi Henri Ier, son fils

aîné, roi de France. A Henri succéda Philippe Ier, en 1060, et à Philippe, Louis le Gros, en 1108. A cette dernière époque, les provinces qui appartenaient à la couronne se composaient de l'île de France, d'une partie de la Picardie, du Soissonnais, du Sénonnois, de l'Orléanais, du Maine, du Berri, du Limousin, du Forez et du Béarn; c'est-à-dire que le domaine royal n'était guère plus étendu qu'à la mort du chef de la troisième race.

Quant à l'étendue de la communauté féodale qui, sous le nom de France, formait un seul État uni par les devoirs du vasselage, elle comprenait tout ce qui est enfermé entre les Pyrénées, la Méditerranée, l'Océan et les Alpes, jusqu'aux cours du Doubs et de la Meuse.

Ces princes, et surtout les trois premiers, ne firent point de guerres considérables. Ils s'occupèrent presque uniquement d'affermir les lois de la vassalité et d'apaiser les querelles qui armaient les grands feudataires les uns contre les autres. L'Église se réunit aux rois dans ce but. Aux conciles de Bourges et de Limoges, en 1031, les guerres privées furent défendues sous peine d'excommunication. Le règlement de cette pacification, qui fut connu sous le nom de trêve de Dieu, fut arrêté en concile en 1041. Aussi la France rentra dans les voies de la prospérité, et se trouva assez riche et assez peuplée pour fournir aux frais des grandes expéditions qui illustrèrent le onzième siècle.

Dans ces entreprises, ce fut l'esprit religieux qui eut le pas sur l'esprit d'ambition; au moins ce fut cet esprit qui conduisit aux plus glorieuses et aux plus importantes entreprises.

Dans la fin du dernier siècle, une crainte superstitieuse s'était répandue en Europe. D'après une fausse interprétation d'un verset du Nouveau Testament, lequel pouvait indiquer l'achèvement de la fonction romaine, on croyait que le monde devait finir avec le siècle, au moment où s'accomplirait la millième année de l'ère chrétienne. Cette conviction était profonde; elle s'était emparée même des intelligences supérieures. Ainsi, nous possédons plusieurs chartes portant institution de bénéfices au profit de l'Église, qui commencent par ces mots : La fin du monde étant prochaine... Cette terreur, qui n'était autre chose que le sentiment vague qui précède les grandes rénovations sociales, inspira à tous les hommes du siècle un redoublement de ferveur religieuse. Ce fut l'origine des pèlerinages à la terre sainte. Les hommes de toutes les classes se jetèrent avec passion dans cette voie d'expiation; et l'habitude resta, lors même que la cause n'existait plus. On continua donc dans le onzième siècle à chercher le rachat de ses péchés dans le long et 8

TOME I.

« ÖncekiDevam »