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Frédéric II (1), ce rejeton des Hohenstauffen, dont les qualités brillantes et les actions glorieuses effacent tout l'éclat des noms de ses illustres ancêtres. Dans l'ardeur de la lutte dont il fut le premier auteur, on a pu exagérer l'éloge et le blame; mais tout cela ne change en rien le point de vue d'où l'on doit apprécier les faits sous le rapport du droit.

Plus encore qu'aucun de ses prédécesseurs, Frédéric avait des motifs de reconnaissance envers le saint-siége; comme eux néanmoins il viola ses promesses et les engagements les plus sacrés. Il était deux choses auxquelles le pape devait attacher une importance toute particulière : la séparation des deux couronnes et la guerre sainte. Frédéric avait promis l'une et l'autre; mais il mauqua doublement à sa parole. Déjà Honorius III, son ancien précepteur, qui lui avait conféré la couronne impériale en 1220, avait été sur le point de le déclarer ennemi de l'Église (2); sa mort (1227) fit retomber le poids de ce pénible devoir sur son successeur Grégoire IX (5). Ce pape illustre, à qui l'Église doit une des plus grandes créations du moyen âge, et qui peut être considéré comme le représentant de tout le droit ecclésiastique, déjà blanchi par les années, se vit dans la douloureuse nécessité de prononcer la terrible sentence contre un prince autrefois si cher à l'Église, qui l'avait, en quelque sorte, porté dans ses bras, nourri de son lait, et doté de grandes richesses intellectuelles et inorales. Mais le souvenir de ces bienfaits ne rendait Frédéric que plus coupable aux yeux de son juge : le crime avait été commis au grand jour, à la face du monde; le châtiment devait être public et solennel. Le roi d'Allemagne fut déclaré indigne, pour cause de déloyauté et de parjure, de faire désormais partie de la communion des fidèles (4)! La croisade entreprise sur ces entrefaites ne le releva point de l'excommunication; et il ne se récon

(1) Höfler, Kaiser Friedrich II, München, 1844.

(2) Höfler, loc. cit., p. 24.

(3) Id., ibid., p. 106 sqq.

(4) Simpert. Schwarzhueber, De celebri inter sacerdotium et imperiuni schismate, tempore Friderici II imper., diss. historica (Salisb. 1771), cap, 2, art. 1. §8 sqq., p. 29 sqq. -- Höfler, loc. cit., p. 34.

cilia avec l'Église que trois ans plus tard, en 1230. Mais cette réconciliation n'eut d'autre résultat que de faire avancer de plus en plus Frédéric dans la voie du despotisme sous lequel gémissaient tous ses États d'Allemagne, et plus encore son royaume de Sicile.

Frédéric Ier avait attenté aux libertés des villes de Lombardie: son petit-fils se montra encore plus tyrannique. Les droits accordés par celui-là furent ouvertement violés par celui-ci. Ce qu'il ne pouvait atteindre de sa propre main, il l'abandonnait au caprice d'Euzius, son fils illégitime. Tant d'énormités provoquèrent encore une fois la juste indignation de l'Église; Frédéric fut de nouveau frappé d'anathème par le pape (1259) (1).

Pour mettre fin aux perturbations que sa querelle avec l'empéreur avait jetées non-seulement dans les possessions temporelles de l'Église, mais jusque dans les mœurs du clergé, Grégoire convoqua un concile général. Frédéric répondit à cette convocation en faisant arrêter en route les cardinaux et les évêques qui se rendaient au lieu fixé pour la réunion. Grégoire IX mourut peu après; il eut pour successeur Célestin IV (1241), qui ne régna que peu de temps et fut remplacé par Innocent IV. Ce pape, le célèbre Sinibald Fieschi, ami de l'empereur, confirma la sentence portée par Grégoire (2). Cette sentence se trouve dans la décrétale Ad apostolicæ, insérée par Boniface VIII dans sa col· lection, et a été rangée sous le titre De sententia et re judicata (5). Pour la juger sainement, il faut se placer au point de vue des événements qui la précèdent immédiatement.

Dès le premier jour de son élévation, Innocent IV s'efforça de rétablir la paix dans l'Église (4). Il se flattait d'obtenir, par la douceur et la persuasion, ce qu'on avait en vain poursuivi jus

(1) Schwarzhueber, loc. cit., cap. 3, art. 2, § 23, p. 102 sqq.

2) Hardouin, Concilia, tom. VII, col. 581; Mansi, Conc., tom. XXIII. col. 613.

3) Cap. 22 (II, 14).

(4) Cap. Ad apostolicæ, pr. - Parati ibi pacem et tranquillitatem dare et universo mundo. Schwarzhueber, loc. cit., cap. 4. art. 1, § 36,

p. 190 sqq.

qu'alors par les voies de droit. Il envoya donc à Frédéric une brillante députation, et lui fit faire la proposition, dans les termes les plus suppliants, de rendre à la liberté les prélats captifs, en lui faisant observer que cet acte de justice serait pour le saintsiége une preuve que l'empereur partageait son désir de réconciliation (1). Cette prière était accompagnée de plusieurs autres. Frédéric était invité à faire connaître ce qu'il était lui-même disposé à consentir pour être relevé de l'excommunication, assuré qu'il pouvait être que, si l'Église, de son côté, avait pu lui donner quelques griefs, elle était prête à les réparer; que, s'il prétendait n'avoir fourni aucun sujet de plainte à l'Église, tandis qu'il avait lui-même à se plaindre d'elle (2), le pape ne demandait pas mieux que de convoquer une grande assemblée de princes ecclésiastiques et séculiers pour leur soumettre la question et révoquer, s'il y avait lieu, d'après leur décision, toute mesure, toute sentence qui aurait violé l'équité à l'égard des prérogatives impériales; que, d'un autre côté, si le jugement de l'assemblée était favorable à l'Église, le pape recevrait avec indulgence et mansuétude les réparations qui seraient exigées de l'empereur (5); qu'enfin les amis et partisans de celui-ci n'auraient jamais à rendre compte de leur conduite passée, et ne seraient aucunement inquiétés à ce sujet.

Telles étaient les supplications affectueuses par lesquelles l'Église s'efforçait de fléchir le cœur de Frédéric. Elle lui tendait les bras, et son langage était celui de la tendresse et de la miséricorde. On eft dit qu'elle sentait que, si l'union du trône impérial et du saint-siége apostolique, si tristement rompue, n'était pas immédiatement rétablie, l'abîme qui séparait les deux pouvoirs restait ouvert pour des siècles! La circonstance était solennelle, et devait avoir des conséquences incalculables sur les destinées du genre humain! Innocent se réjouissait déjà d'avoir conduit à bonne fin l'œuvre de la paix; déjà il accourait à la ren

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contre de l'empereur, qui avait fait jurer les conditions convenues, lorsque Frédéric déclara brusquement qu'il ne voulait rendre ni les prélats captifs, ni les États de l'Église, qu'il n'eût auparavant reçu l'absolution pontificale (1). Il n'ignorait pas que sa proposition était inacceptable, et son intention manifeste était d'insulter encore par une moquerie aux lois et usages traditionnels de l'Église. En voyant ce prince s'endurcir de plus en plus dans son hostilité contre le royaume et le pontife de Jésus-Christ, Innocent pouvait se rappeler qu'autrefois Dieu avait frappé du même endurcissement le cœur de Pharaon! Si les outrages de Frédéric n'avaient atteint que la personne du раре, celui-ci aurait pu les pardonner; mais, comme ils s'adressaient, non à l'homme, mais au représentant de Jésus-Christ lui-même, l'honneur du roi céleste et la dignité du pontificat suprême lui faisaient un devoir de conscience de fulminer la sentence que l'empereur affectait de provoquer (2).

Quatre griefs principaux étaient élevés contre Frédéric (3) : les nombreux serments qu'il avait violés; le sacrilége qu'il avait commis en faisant incarcérer de hauts dignitaires de l'Église; l'infidélité dont il s'était rendu coupable par ses rapports notoires avec les Sarrasins et ses relations charnelles avec des femmes de cette nation (4); enfin, la domination tyrannique qu'il avait fait peser sur les provinces du patrimoine pontifical, en foulant aux pieds tous les devoirs de vassal du saint-siége: non-seulement il avait négligé depuis longtemps d'acquitter les taxes féodales annuelles, mais il avait encore maintes fois contraint les populations des États romains de combattre contre leur seigneur suzerain (5).

Après avoir accordé à Frédéric un nouveau et long délai, et

(1) Döllinger, Lehrbuch der Kirchengesch., vol. 2, p. 237 sqq. (2) Matth. Paris., ann. 1245 Exitus enim aquarum deduxerunt oculi ejus, et singultus sermonem proruperunt.

(5) § Dejeravit.

Har

(4) Acta Concil. Ludg., ex Matth. Paris., Hist. Angl. ann. 1245. douin, loc. cit., col. 397.- Schwarzhueber, loc. cit., art. 2, § 38, p. 209 sqq. (5) § Præter hæc.

lui avoir fait offrir des conditions encore plus douces, mais toujours vainement, Innocent IV, le 17 juillet de l'année 1245, après en avoir mûrement délibéré avec le concile (§ 116), parlant en qualité de vicaire de Jésus-Christ, à qui il a été dit, dans la personne de saint Pierre : « Tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans le ciel, » prononça contre lui la sentence d'excommunication (1). Ce prince s'était rendu indigne de l'empire, indigne de la royauté, indigne de tout honneur, de tout titre, de toute prérogative; en conséquence, le pape le déclarait comme rejeté de Dieu et dépossédé par lui de tout pouvoir et de toute souveraineté, déchu sans retour de ses couronnes et de ses dignités. Il déliait en même temps tous ceux qui s'étaient obligés envers lui à l'obéissance de leur serment de fidélité, et défendait, sous peine d'excommunication, de l'assister comme empereur ou roi, soit par des conseils, soit par des actes bienveillants. Il devait être procédé sans retard, et en toute liberté, à l'élection d'un nouvel empereur par les princes allemands. Quant à la Sicile, fief pontifical, le pape se réservait d'aviser par des dispositions ultérieures.

La déposition de Frédéric II était un affreux malheur pour la société chrétienne. A dater de ce jour néfaste, la parole d'Yves de Chartres, que l'inimitié des deux pouvoirs est, non-seulement fatale à la prospérité des petites choses, mais mortelle pour les grandes, se vérifia constamment et dans la plus large mesure! Mais la responsabilité de ce malheur, bien que dans les luttes. qui avaient précédé il eût pu être commis bien des fautes par suite de la fragilité humaine, du côté des défenseurs de l'Église, retombe néanmoins sur la tète de ceux qui, dans leur aveuglement opiniâtre et leur orgueil effréné, portèrent contre le royaume de Dieu le glaive qu'ils devaient consacrer à sa défense.

(1) § Nos itaque, Ricordan. Malespini, Istoria Fiorent., cap. 132 (Mura-tori, Rer. Ital. script., tom. VIII, col. 966): E di certo non fu (Federigo) cattolico christiano, vivendo dissolutamente, e participando co' Saracini. poco, o niente usava la Chiesa o suo ufficio, sicchè non senza grandi evidenti cagioni fu disposto e condannato, e poi che fu condannato, in poco tempo Iddio mostro sopra lui e suoi la sua ira.

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