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et était pour Henri un ennemi d'autant plus dangereux qu'il mettait plus de soin à dissimuler perfidement ses sentiments hostiles.

Jamais, peut-être, aucun pays ne fut en proie à un déluge d'anarchie pareil à celui qui avait inondé l'Italie, privée de son principe d'unité, depuis que, par une fatale résolution, Clément V avait transféré en France le siége pontifical. Cruellement déchirée par des factions acharnées, irréconciliables, qui, sous les antiques noms des Guelfes et des Gibelins, mettaient aux prises le principe monarchique et la démocratie, cette magnifique contrée était devenue une terre de désolation (1). On conçoit aisément que le pape, en présence des luttes des Orsini et des Colonna, dût peu se soucier de venir résider à Rome; mais il n'en est pas moins vrai que son premier devoir eût été de conduire la barque de Pierre dans le port qui lui a été divinement assigné. Clément V ne reparaissant point, tous les regards se tournèrent au-devant de l'empereur. Tout ce qui portait un cœur généreux et patriotique soupirait, avec une ardeur qui tenait de la passion, après un principe d'unité qui pût enfin mettre un terme à des misères sans nom et sans limites. L'expression la plus noble et la plus exaltée de ce sentiment se trouve dans deux lettres de Dante Alighieri, dont l'une (2), adressée au roi des Romains et au peuple, est datée de l'année 1309, et l'autre fut écrite à Henri en 1311, pendant le séjour de ce prince à Crémone, dans l'impatience où l'on était de sa venue (3). Rappelant l'antique splendeur de la dignité impériale, le Dante y rattache les belles espérances qu'il fonde sur le nouveau roi d'Allemagne. C'est à ce point de vue qu'il faut se placer pour se rendre raison des principes émis par l'illustre poëte dans son livre de Monarchia (4),

(1) Histor. pol. Blætter, p. 479 sqq. - Barthold, loc. cit., p. 9 p. 330 sqq. Boehmer, loc. cit.,

253. p.

sqq.,

(2) Divina Commedia de Bald. Lombardo (Rom. 1820), tom. I, p. 38. Barthold, loc. cit., vol. I, p. 345.

(5) Barthold, loc. cit., p. 535.

p.

(4) Barthold, loc. cit., vol. I, p. 219; vol. II, j 510. Blætter, loc. cit., p. 478.

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publié à la même époque, et dont une fausse interprétation l'a fait accuser même d'hérésie (1).

Henri, qui ne concevait pas autrement le pouvoir impérial, se flattait, dans l'espoir d'arriver à la domination universelle dont il devait être investi à l'égard du peuple romain, de se placer au-dessus des diverses factions et de les réunir toutes autour de son trône. Il ne tarda pas à se convaincre que cette pensée était complétement irréalisable; aussi, ne pouvant résister à l'entraînement des circonstances, il se jeta brusquement dans la mêlée des partis, et eut bientôt, comme chef des Gibelins, tous les Guelfes contre lui. Mais c'est à Rome même, où se concentre tout l'intérêt de cette lutte, qu'il faut suivre ce prince pour apprécier sainement la situation lui firent les événements. Les Orsini, soutenus par le roi de Naples qu'ils avaient appelé à leur secours, se déclarèrent contre Henri; les Colonna lui permirent au contraire l'entrée de la partie de la ville occupée par leurs partisans, de sorte que l'empereur ne fut pas couronné dans l'église de Saint-Pierre, mais dans celle de Latran, où il reçut le diadème des mains des cardinaux délégués à cette fin par le souverain pontife (2).

que

Le rôle agressif du roi de Naples rendait la guerre inévitable entre ce prince et Henri; mais le pape intervint aussitôt et ordonna la suspension des hostilités, en vertu des serments de fidélité que celui-ci lui avait prêtés, soit lors de sa reconnaissance comme roi, avant son entrée en Italie (3), soit depuis, tant avant qu'après le couronnement (4). Le même ordre fut également intimé à Robert, Henri, qui ne marchait jamais que suivi d'une escorte de jurisconsultes, déclara (5), en présence d'une assem

(1) Bartolus ad Extrav. Ad reprimendum (Henr., VII, tit. 1, note 59). Azpilcueta, Relect. ad cap. Novit, notab. 3, n. 19 (Opera, tom. II, p. 131), n. 42, p. 135.

p.

(2) Boehmer, loc. cit., p. 302.

(3) § Porro. - Promissio Lausann., ann. 1310 (Pertz, loc. cit., tom. IV, 501.- Raynald., h. a., n. 5 sqq., p. 56).

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(4) § Dudum. - Donniges, Acta Henrici VIII, vol. II, p. 54, p. 231. Boehmer, loc. cit., p. 347 (n. 338).

(5) Barthold, loc. cit., vol. II, p. 271 sqq., p. 279.

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blée de notaires, et sur leur avis, qu'il n'avait jamais prêté au pape de juramentum fidelitatis. Il avait incontestablement rai son s'il entendait dire par là qu'il n'avait point contracté, ainsi que Robert de Naples, une obligation de vassalité vis-à-vis du saint-siége. Si donc il avait été, en effet, dans la pensée de Clément V d'assimiler ces deux souverains, comme étant placés tous deux sous la suzeraineté du chef de l'Église, il ne serait certainement pas possible de l'excuser ici d'une prétention si évidemment usurpatrice! Mais on ne peut guère prêter au pape une pareille intention (1), et sa démarche s'explique très-bien d'ailleurs en donnant aux serments d'Henri et à ceux de Robert le sens qui convient aux uns et aux autres. Robert était le vassal du saintsiége; comme tel, il avait réellement prêté le serment d'hommage; aussi Clément V le désigne-t-il comme homo ligius du pontife romain (2). Henri, quoi qu'il en pût dire (3), ne pouvait nier avoir prêté, à l'exemple de tous ses prédécesseurs, un juramentum fidelitatis, en vertu duquel il avait promis au pape de lui être fidèle en toutes choses, et s'était engagé spécialement à le protéger dans sa personne et dans son autorité. Mais il y avait encore une autre clause dans ce serment, c'était la promesse de ne point prendre les armes contre les vassaux de l'Église romaine (4); cette clause emportait de soi le droit du pape d'en exiger l'accomplissement par tous les moyens.

Sans avoir égard néanmoins à la défense du chef de l'Église, l'empereur poursuivit ses préparatifs de guerre, et resta ligué avec Frédéric, roi de Sicile, contre le roi de Naples. A l'instigation de Philippe le Bel, Clément V défendit une seconde fois, et

(1) Le pape qualifiait bien ces deux princes de defensores Ecclesiæ; mais ce n'était pas aux mêmes titres.

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(2) Cap. Pastoralis, 2, de Sent. et re judic. § Rursus, in Clem. (II, 11). (3) Cap. Romani principes, § Dictis. - Simulans se immemorem juramentorum, quæ nobis ante coronationem suam præstiteral et post coronationem etiam innovaverat. - § Verum.

(4) § Sub eodem. - Raynald., ann. 1274, n. 9, p. 220. Idem quod rex Rodolphus per se vel per alium non offendet vasallos Ecclesiæ, et specialiter magnificum principem dominum Carolum, regem Siciliæ illustrem, seu heredes ipsius.

sous peine d'excommunication, toute hostilité contre les États de Robert (1). Cette mesure transporta Henri de fureur, et lui inspira l'étrange idée d'intenter un procès à son adversaire 2). Il fit citer par trois fois à sa barre le roi de Naples, se fondant, pour justifier cet acte incroyable, sur la qualité de vassal qui afférait à Robert vis-à-vis de lui, à raison de quelques possessions de ce prince dans le Piémont (3). Toutefois, pour donner encore à ce procédé irrégulier une apparence de légalité, il s'appuyait aussi sur les prérogatives exceptionnelles de la majesté impériale dont il était revêtu.

Pour ce qui est du premier point, il pouvait à la rigueur servir de fondement légal à une action judiciaire; mais, Robert ayant son domicile à Naples et étant, par ce fait, vassal du pape, celui-ci était, par la mème raison, son juge régulier, et l'empereur ne pouvait, sans son agrément, contraiudre Robert à quitter son royaume (4); encore moins pouvait-il exiger de lui qu'il vînt seul et sans armes se livrer à son ennemi, alors campé à Pise et entouré d'une puissante armée. « On est en droit, comme disait « Clément V, de craindre un pareil danger; l'ancienne coutume « permet de l'éviter, la raison humaine le fuit, la nature s'en ef« fraye (5). » Quant à la considération basée sur les prérogatives de la puissance impériale, Henri puisait, dans l'idée fantastique qu'il avait conçue de la dignité d'empereur, un droit de juridiction suprême qui certainement n'allait pas aussi loin qu'il le prétendait (6). Cependant, s'engageant toujours plus avant dans cette voie, l'empereur publia ses fameuses constitutions: Quomodo in læsæ majestatis crimine procedatur, et qui sint rebelles, insé rées dans les dernières feuilles du Corpus juris civilis (7), et condamna le roi de Naples (8), comme rebelle, traître, ennemi

(1) Bohmer, loc. cit., p. 345 (n. 340).

(2) Pertz, loc. cit., p. 544 sqq.

(3) Cap. Pastoralis, cit. § Denique. (4) § Nos quoque.

(5) § Numquid etiam.

(6) Barthold, loc. cit., vol. II, p. 218.

(7) Extravagantes, quas nonnulli XI. Collationem appellant. (8) Barthold, loc. cit., vol. II, S. 381.

de l'empire, coupable du crime de lèse-majesté, à perdre la vie par le glaive et à la déchéance de tous ses biens, droits et juridictions, quels qu'en fussent les titres, définitifs ou transitoires (1). Cette sentence ne pouvait manquer de blesser au vif le pape et toute la maison capétienne. Dans cette circonstance, Philippe IV prouva que, lorsque son intérêt le demandait, il savait reconnaître toute l'étendue de la puissance pontificale. Il pria le pape d'annuler sans délai l'inique décision de l'empereur (2), et Clément s'empressa d'obtempérer à cette demande, en sommant Henri d'avoir à révoquer son arrêt; mais celui-ci n'était rien moins que disposé à tenir compte de cette injonction, et déjà il se préparait à marcher sur Naples, lorsqu'il mourut subitement, au moment où le pape était sur le point de le frapper d'excommunication (3).

Tous ces démêlés déterminèrent Clément V à se prononcer, dans deux décrétales, sur les principaux points en litige. C'étaient, d'une part, le doute élevé sur la nature des serments que l'empereur lui avait prêtés, et auxquels il maintint leur caractère de juramenta fidelitatis (4), et, d'autre part, la question relative à la valeur juridique de la sentence portée contre Robert. Cette sentence fut pleinement annulée en des termes où perçaient une antipathie visible pour l'empereur défunt et une bienveillance non moins marquée pour le roi de Naples (5), comme émanée, non d'un sage discernement, mère de toutes les vertus, mais d'une précipitation capricieuse, marâtre de la justice (6), et ne méritant pas même, dans la bouche du peuple, le nom de sentence (7).

Bien que, dès l'année 1311, Clément V eût édité, dans le concile de Vienne, la collection de ses décrétales, ces deux constitutions y ont été néanmoins incorporées de ses mains et publiées

(1) § Sane. § Propter quam.

(2) Barthold, loc. cit., vol. II, p. 408.

(3) Raynald., ann. 1313, n. 24, p. 128.

(4) Cap. Romani principes. § Nos itaque. § Verum quia.

(5) Cap. Pastoralis. § Sane.

(6) Cap. Pastoralis. § Rursus.
(7) Cap. Pastoralis. § Ut igitur.

Romani principes. § Dudum.

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