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nation du pouvoir spirituel à la puissance temporelle. En écrivant ce livre, les alliés de Louis avaient certainement sous les yeux le traité de Monarchia (1), que l'on place à tort à cette époque; il est évident que la pensée de la nécessité de la paix, par laquelle ils entrent en matière, est un emprunt fait au Dante. L'œuvre de l'illustre poëte, éclose des aspirations d'un cœur généreux vers un principe d'unité nationale, est divisée en trois livres et traite de ces trois questions principales :

1° La nécessité de la monarchie en général;

2° La destination et la vocation du peuple romain à la monarchie universelle ;

3° Enfin, l'origine immédiatement divine de la puissance impériale.

Le Dante subordonnait le pape à l'empereur dans toutes les choses de l'ordre temporel; placé à ce point de vue, le pouvoir indirect revendiqué par les pontifes romains sur le domaine temporel des empereurs et des rois ne lui apparaissait plus que comme une perturbation permanente de la paix et de l'harmonie sociale (2). Mais, bien qu'il fût dans l'erreur sous ce rapport, comme aussi en professant la doctrine de l'égalité des deux pouvoirs (§ 113), il était loin de sa pensée de s'insurger contre l'autorité du saint-siége et de vouloir déserter le terrain de l'orthodoxie. Bien différents de lui, les auteurs du Defensor pacis, véritable libelle, plein d'invectives contre le chef de l'Eglise (3), et qu'ils dédièrent à Louis, dépassèrent à tel point la ligne si nettement tracée par Alighieri, qu'ils émirent sur l'origine du pouvoir spirituel des principes qu'on pourrait croire, à ne tenir aucun compte de l'ordre chronologique, empruntés aux écrivains anticatholiques du seizième siècle (4). D'après ces étranges théo

(1) Edit. Zatta (Venez. 1758), tom. IV, p. II. Schard, loc. cit.,

p. 237.

(2) Monarchia, lib. III, p. 57 (edit. Zatta); dans tout cela, du reste, le Dante ne voyait que le zèle du dépositaire des clefs, zelo clavium, et non l'orgueil de l'homme, non superbia, langage bien différent de celui du Defensor pacis, Dict. I, c. 19, p. 188.

(3) Dict. I, c. 19, p. 187 sqq.; II, 23, 24 et 25; III, 1.

(4) Raynald,, ann. 1327, n. 23, p. 324.

ries, la puissance spirituelle aurait appartenu originairement à la société des fidèles, dont l'empereur est le représentant suprême; de la société elle avait passé au clergé, dont la gradation hiérarchique repose uniquement sur la concession de l'empereur, et non sur le droit divin. Conséquemment c'était à l'empereur qu'appartenait le droit d'instituer et de déposer les papes; et l'Église ne pouvait poursuivre, juger et punir personne sans sa permission. De plus, comme le Christ avait payé le tribut, non point spontanément et de son plein gré, mais par force (1), l'empereur pouvait disposer aussi de tous les biens de l'Église.

De tels hommes appelaient inévitablement sur leur tête les foudres pontificales; elles ne se firent pas attendre, et le pape frappa d'excommunication par la bulle Sicut juxta doctrinam les auteurs de ce libelle (2). Comme cela ne pouvait manquer, Louis les prit alors sous sa protection et se servait d'eux comme d'instruments parfaitement appropriés à l'exécution de ses ambitieux projets sur l'Italie. Marsilius, dont l'âme orgueilleuse n'aspirait à rien moins qu'à l'honneur de la tiare pontificale (3), fut nommé vicaire de l'Église romaine (4), et eut ainsi la plus grande part à la déposition du pape, si brusquement prononcée par le roi d'Allemagne. D'un autre côté, le peuple romain, aux yeux duquel on faisait incessamment briller, comme un leurre, la gloire depuis longtemps éteinte de sa domination universelle, voyant ses gouvernants couronner Louis empereur, devait naturellement se persuader que la dignité impériale prenait sa source dans la volonté nationale.

Le système qui replaçait absolument cette dignité sur l'antique fondement païen comptait aussi parmi ses champions Occam (5), disciple de Dom Scott, le chef des Nominalistes, qui avait obtenu le surnom de docteur invincible. C'est ce même Occam

(1) Supra, § 115.

(2) Raynald., ann. 1327, n. 27, p. 326. — Bianchi, Della potestà e della politia della Chiesa, tom. II, p. 564.

(3) Raynald., ann 1528, n. 63, p. 356.

(4) Idem, ann. 1328, n. 9, p. 338.

(5) Dællinger, Lehrbuch der Kirchengesch., Bd. II, S. 289.

qui tomba dans une erreur beaucoup plus grave encore, en refusant le droit de décision définitive en matière de foi, non-seulement au pape, mais même au concile général, et en plaçant l'infaillibilité dans l'universalité des chrétiens (1). Dans un traité ex professo sur la grande question, si importante alors pour l'Allemagne, du rapport de la royauté avec l'empire, il déclare ces deux pouvoirs à peu près identiques (2) et tend à restreindre autant que possible la puissance pontificale, tant pour le spirituel que pour le temporel. Ce traité était une réponse à huit questions qui lui avaient été proposées. Les mêmes questions et plusieurs autres de droit public furent résolues dans le même sens, quoique dans un style moins violent, par Léopold de Babenbourg, qui devint plus tard évêque de Bamberg (3). Il reconnaissait au pape le droit de décider de l'empire, non comme un droit régulier, mais seulement dans le cas d'un concours de circonstances qui rendissent cette intervention nécessaire. Quant au royaume d'Allemagne, il posait en principe que le prince élu soit à l'unanimité, soit à une simple majorité des suffrages, entrait de plein droit dans l'administration de l'État.

Nous avons montré ailleurs ce qu'il y avait de vrai et de faux dans ce sentiment; nous dirons seulement ici qu'à la même époque de nombreux écrivains se rencontrèrent aussi pour défendre avec autant de talent que de courage les droits de l'Église et ceux de la papauté (4). Sans compter Alexandre de Saint-Elpidio (5), général des Augustins et plus tard archevêque de Ravenne, et le dominicain Pierre de Palude (6), l'on voit figurer

(1) Guilelm. de Occam, Dialogus, p. I, lib. V, c. 29 (Goldust, Monarchia, tom. II, p. 498), cap. 35, p. 505.

(2) Guilelm. de Occam, Octo quæstiones, quæst. 4, cap. 1 (Goldast, tom. II, p. 356). — Du reste, cet écrivain a rétracté lui-même ses erreurs. Raynald., ann. 1349, n. 16 (tom. XVI, p. 290).

(3) De jure regni et imperii 'Schard, loc. cit., p. 328 sqq.). — Ludzwiy, Script. rer. Bamberg., tom. I, p. 203.

(4) Bianchi, loc. cit., tom. I, p. 105. — Dællinger, loc. cit., p. 290.

(5) Ses écrits De auctoritate summi pontificis et De potestate ecclesiastica libri duo sont dans Rocaberti, Bibliotheca pontif. maxima.

(6) Entre autres ouvrages, il en a été intitulé: De potestate ecclesiastica. Vide Raynald., ann., 1321, n. 33, p. 222.

parmi les plus illustres vengeurs des prérogatives papales Alvarus Pelage, évêque de Silva, en Portugal, auteur d'un livre célèbre qui porte pour titre De planctu Ecclesiæ (1), et Augustin Triomphi, de l'ordre des Augustins, qui écrivit dans sa Summa de potestate ecclesiastica une magnifique réponse aux déclamamations hérétiques des Fratricelles (2). Ce dernier va jusqu'à reconnaître au pape le droit d'instituer seul un empereur et de dissoudre et recomposer à son gré le collége des princes élec teurs. C'est là évidemment une exagération; mais à cela près, le savant augustin est entièrement dans le vrai (3) en prétendant que, si le choix unanime des électeurs suffit pour décerner la couronne d'Allemagne, l'approbation du pape et le couronnement reçu de ses mains peuvent seuls conférer la dignité impériale.

§ CXXXIV.

13. Époque de la décadence et de la réforme de la discipline ecclésiastique.

Quand on considère avec quelle facilité la doctrine de Marsilius de Padoue et de Guillaume Occam, à la faveur de la protection d'un prince dont le long règne vit s'élever et grandir toute une génération d'hommes, avait pu se propager en Allemagne et en Italie, on s'étonne justement que la grande hérésie n'ait pas éclaté dès ce moment et ne se soit consommée que dans le quinzième siècle. Néanmoins, par un examen plus approfondi, on reconnaît que le fruit de la longue guerre de l'Église et de l'État n'était pas encore entièrement mûr à cette époque : il fallait auparavant, d'une part, que le schisme, la complète décadence de la discipline, de l'autre, que le principe de nationalité, qui déployait les plus grands efforts pour se dégager et se faire admettre comme un droit positif dans l'ordre spirituel, et la lutte, enfin victo

(1) Edit. Venet. 1570, in-fol.

(2) Edit. Rom. 1684, in-fol.

(3) Quæst. 39, art. 3, p. 229. — Quæst. 55, art. 1, p. 205, art. 3 p. 207.

III.

11

rieuse, des souverains feudataires contre la suprématie impériale, eussent tout préparé pour cette explosion fatale; alors seulement pouvait se réaliser cette funeste rupture de plusieurs peuples avec le chef spirituel de la famille chrétienne, avec la communion de l'Église.

Le titre de l'ouvrage d'Alvarus Pélage: De planctu Ecclesiæ, répond expressivement à son objet principal. Après avoir développé dans le premier livre sa théorie sur l'origine et les rapports des deux puissances, l'évêque de Silva commence le second par les lamentations de Jérémie, et il les commente éloquemment par le tableau saisissant de la déplorable situation de la chrétienté dans ce temps de dissolution morale et religieuse. Il dépeint sous les couleurs les plus vives la dépravation qui a envahi tous les rangs, toutes les conditions, et surtout le clergé (1). Mais quels accents encore plus lamentables n'aurait-il pas pu faire entendre si sa vie se fût prolongée de quelques années et qu'il eût écrit sous le règne d'Urbain VI? Hélas! de son temps la discipline de l'Église était encore bien loin d'avoir atteint le degré de décadence où elle tomba plus tard, alors que le schisme de 1378 fut venu briser pour de longues années l'admirable unité de la monarchie chrétienne (2).

L'on avait vu, il est vrai, à d'autres époques de faux papes usurper la chaire apostolique, mais ils n'avaient jamais fait que passer comme des apparitions éphémères, et la conscience publique ne s'était point méprise sur l'illégitimité d'un pontife institué au mépris de toutes les lois canoniques. Les choses avaient bien changé depuis que le monde catholique s'était accoutumé à entendre la voix du successeur de Pierre lui parler, non plus de Rome, mais d'Avignon. Lorsque, après la mort de Grégoire IV, Urbain VI eut été élu dans l'Église romaine, et qu'un autre pape prenant aussi possession du siége avignonais, deux pontifes se trouvèrent régner simultanément sur la catholicité, alors commença une ère de confusion, de trouble, d'incertitude sur le

(1) Lib. I, cap. 69, fol. 94, a. c. 70, fol. 99.

(2) Dællinger, Lehrbuch der Kirchengeschichte, vol. II, p.

308 sqq.

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