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et du quinzième siècle nous aidera à comprendre comment la véritable notion du caractère essentiel de l'Église avait dû nécessairement s'altérer et s'obscurcir, sous plus d'un aspect, dans l'intelligence des peuples. L'Église, royaume de Dieu sur la terre, restait sans doute constamment une et identique; mais l'éclat du soleil divin qui répandait dans son sein ses ineffables clartés, ainsi que la plupart de ses magnifiques attributs et de ses caractères distinctifs, était presque devenu invisible, voilé qu'il était par le nuage des iniquités humaines. Ubi Petrus, ibi Ecclesia; ce principe est rigoureusement vrai; mais ce qui ne l'est pas moins, c'est que Rome a été choisie par la Providence pour être le siége du prince des apôtres, et que la translation de ce siége à Avignon, en obligeant les fidèles d'aller chercher en France l'évêque de Rome, créait une anomalie dans l'Église. Les yeux de la chrétienté étaient forcément détournés de la ville prédestinée à la domination universelle, et par là le principe de l'union absolue avec Rome profondément ébranlé. Cette transposition ayant une fois donné carrière au sentiment national, il en résulta que, par un enchaînement fatal, on vit successivement mettre en question la catholicité, par le fait même de cette transposition; l'unité, par la consommation du schisme; la sainteté, par la dégradation morale de la hiérarchie; l'apostolicité, par la prédominance antiapostolique des évêques sur le pape; il ne restait plus qu'à révoquer en doute l'infaillibilité et la nécessité de l'Église, et enfin sa visibilité. C'est là qu'aboutirent un grand nombre de peuples, en réclamant au seizième siècle la réforme ecclésiastique et en prenant pour y arriver le chemin du schisme et de l'erreur.

Les tristes observations et expériences auxquelles avaient donné lieu les conciles réformateurs du quinzième siècle, l'extrême indolence des souverains pontifes, qui se montraient tellement oublieux de leur vocation, qu'à être pape à ce titre un empereur Maximilien ne voyait pas trop pourquoi il n'aurait pas pu être pape lui-même, et peut-etre même quelque chose de mieux; tout cela pouvait facilement engendrer l'opinion que ces organes de la puissance ecclésiastique n'étaient pas appelés à réaliser la réforme de l'Église. Erreur, sans doute, immense, déplorable, et

que rien ne saurait justifier, mais qui était excusable chez un grand nombre de personnes. Cette erreur ouvrait une large porte à toutes les idées fausses qui surgissaient en foule à cette époque, et c'est ce qui explique comment il arriva qu'alors que l'Église, assemblée à Trente, dans la personne de ses évêques, exécutait la réforme sur de vastes bases (1), s'opérait en même temps la rupture définitive, avec l'unité catholique, de ceux qui prétendaient arriver au même but par une autre voie, principalement avec le concours des seigneurs.

Le haut degré d'influence et de puissance matérielle auquel le pouvoir seigneurial était déjà parvenu dans ce temps-là mettait l'empereur dans une position toute particulière. Comme protecteur de l'Église, son devoir aurait été de la défendre énergiquement contre les attaques de chaque hérésie, alors même qu'elle aurait eu pour protecteurs et pour disciples les plus puissants princes de l'Europe, et de détruire l'erreur jusque dans ses dernières racines. Du côté des catholiques, on a reproché à CharlesQuint d'avoir été, par la négligence avec laquelle il traita les affaires d'Allemagne, la principale cause des progrès rapides des innovations religieuses et de leur triomphe définitif dans une grande partie de l'empire. Nous sommes bien loin de vouloir absoudre de toute culpabilité ni la négligence de ce prince, ni encore moins sa conduite à l'égard du pape et de la ville sainte, qu'il livra au pillage de ses troupes mercenaires; non, il fut grandement coupable, et l'on ne saurait être trop sévère envers lui. Mais quand, au lieu de s'être fait la réputation d'un empereur tout imprégné des principes de la savante politique de Machiavel, il eût été embrasé du zèle religieux d'un Charlemagne ou d'un saint Henri, il est encore douteux qu'il eût réussi à conjurer l'orage. Le mal avait pénétré trop avant dans les entrailles de la société spirituelle, pour qu'une guérison fût possible par les moyens ordinaires. Dieu devait à sa justice de prendre une autre voie; en punition des iniquités des siècles précédents,

(1) Abhandlung über die Reformation in den Histor. polit. Blæltern, Bd. II, S. 121. Deutsche Reichs- und Rechtsgeschichte, p. 5 sqq., p. 288 sqq.

il permit que l'empereur vît surgir en face de lui, dans le pouvoir seigneurial, une puissance qui, à la faveur de l'énergie d'un faux zèle et de l'ardeur de diverses passions, devait bientôt éclipser la sienne.

Ce que l'empereur n'était plus en état de faire, la puissance seigneuriale le rendait facile aux princes qui tenaient à l'Église par une foi sincère, au moins dans les limites de leur territoire, et la mesure de leur attachement au catholicisme donnait celle de leurs succès dans la défense des droits et des priviléges de l'Église romaine. Parmi les maisons souveraines qui prirent la plus grande part à cette lutte sainte et glorieuse, on distingue principalement celle de Bavière, qui laisse bien loin derrière elle, sous ce rapport, celle de Habsbourg, et qui fit solennellement consister sa mission, non à s'ingérer de sa propre autorité dans les affaires spirituelles, mais à appeler, par des exhortations continuelles, l'initiative du pouvoir compétent, et à prêter son appui aux mesures réformatrices de l'épiscopat et du pape (1). Aussi, Adrien III accordait-il aux ducs de Bavière une confiance sans bornes, et il leur en donna la preuve en leur conférant, en 1523, un privilége tout spécial, celui de punir, sans le concours des évêques, tous les délits graves des ecclésiastiques (2). Telle est la base du droit exercé à diverses époques par les ducs, de visiter les églises (3), droit qui donna plus tard naissance à l'institution d'un dicasterium propre ou conseil ecclésiastique (4).

Les ducs de Bavière avaient donc été, dès l'origine de leur élévation, les véritables protecteurs de l'Église dans leur principauté, et avaient réussi à y maintenir la foi catholique. Leur fidélité à remplir cette noble tâche, indépendamment du mérite qui leur revenait pour avoir accompli un devoir de prince chrétien, leur valut, dans le traité d'Augsbourg de l'année 1555, de voir leur État reposer sur une nouvelle base politique (5). Toute

(1) Voy. l'ouvrage déjà cité de v. Aretius.

(2) Indultum corrigendi notabiles excessus clericorum in Bavaria. Aretin, loc. cit., p. 14.

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- V.

fois, ce traité, dont le principal objet était de reconnaître l'existence légale des États protestants de l'empire, accordait aux hérétiques, sur le territoire de ces États, les mêmes droits religieux qu'aux catholiques. Ainsi, c'est le traité d'Augsbourg qui a servi de fondement au nouveau système d'après lequel une confession séparée de l'Église peut être mise politiquement sur un pied d'égalité avec l'Église. Néanmoins cette sorte de parité n'existait alors que pour les souverains, mais non pour les sujets.

L'inauguration de ce système brisait dans son principe l'économie de la puissance impériale; l'empire cessait d'exister comme protecteur spécial de l'Église; il n'avait plus qualité pour intervenir efficacement dans les combats du pouvoir spirituel contre une doctrine stigmatisée d'hérésie par ce même pouvoir, et contre ses conséquences; sous ce rapport, l'Église n'avait plus de recours qu'aux souverains catholiques. Quant aux princes protestants, par cela même que leurs coreligionnaires leur avaient reconnu le droit d'exiger une nouvelle économie ecclésiastique, ils exerçaient désormais le pouvoir spirituel en harmonie avec cette économie. Cependant, au sujet de l'origine purement juridique de cette puissance spirituelle des souverains temporels, il a surgi, dans le cours des temps, différents systèmes (§ 139) qui ne sont pas restés sans influence, même sur les rapports des monarques catholiques avec l'Église romaine. Mais il faut peut-être mettre encore au-dessus de cette influence sur la position respective des deux pouvoirs celle d'un système éclos de l'action simultanée de certaines tendances schismatiques et de deux hérésies: le calvinisme et le jansénisme; nous avons nommé le gallicanisme, ce phénomène historique si fécond en conséquences, et qui va fixer notre attention.

§ CXXXV.

14 Gallicanisme.

Pour quiconque apprécie sainement l'État chrétien du moyen

âge, il ne peut rester un instant douteux que, bien que le pouvoir séculier y fût complétement indépendant dans sa sphère, il ne dût néanmoins, en vertu de son origine et de sa destination providentielle, reconnaître la prééminence de l'Église, comme directrice des peuples et des princes dans les voies de l'ordre moral. Alors qu'elle se soumet docilement et sans réserve à cet ordre moral, la puissance civile n'est rien moins qu'indépendante, dans le sens absolu du mot; mais quand, se sentant gênée dans la liberté de son action, elle brise cette chaîne modératrice, il est évident qu'elle devient beaucoup plus libre, beaucoup plus maîtresse de son domaine terrestre. Et voilà pourquoi l'hérésie et le schisme ont de tout temps renfermé tant d'attrait et de séduction pour les gouvernements temporels. Que si cette scission dans la foi ou dans l'obéissance éclate au grand jour et par une révolte déclarée, l'Église a du moins une consolation dans sa douleur; elle peut, en opposant au mal des remèdes énergiques, en arrêter les progrès ultérieurs. Il n'en est point ainsi lorsque le schisme, se couvrant d'un masque hypocrite, proteste extérieurement, en dépit d'une révolte secrète, du plus pur et du plus fidèle attachement à l'Église. C'est cette forme déguisée et captieuse que revêtit, dès son origine, la tendance connue sous le nom de gallicanisme (1), et qui a trouvé dans le jansénisme son aliment principal (2).

Dans aucun pays, les tendances schismatiques qui agitèrent tout l'Occident pendant le quatorzième et le quinzième siècle, ne s'étaient autant répandues et n'avaient jeté de si profondes racines qu'en France. C'étaient elles qui avaient donné le jour à cette pragmatique sanction dont l'abrogation légale n'aboutit qu'à faire disparaître l'ivraie pour la voir surgir de nouveau avec plus

(1) A. Charlas, de Libertatibus Ecclesiæ gallicanæ, edit. 3tia, Rom. 1720, 3 vol. in-4°. (Sangalli), Romani Pontificis summa auctoritas, jus et præstantia œcumenicorum conciliorum atque Ecclesiæ gallicanæ placitis asserta, defensa et vindicata. Favent. 1779, p. 24, lib. II. Litta, Lettres sur les quatre articles. Joseph de Maistre. Walter, Kirchenrecht, § 114.

(2) De Maistre.

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