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aux coutumes, élevé par l'empereur d'Allemagne dans la querelle des investitures (1). Urbain II repoussait dans les mêmes termes l'usurpation de Robert, comte de Flandre (2), qui s'était arrogé un droit de succession ou plutôt de dépouilles sur les biens des clercs décédés, et prétendait étayer ce droit sur l'usage du pays. C'est aussi sur les usages et coutumes du pays que l'État, dans ses démêlés avec l'Église, fondait le plus souvent une foule d'injustes prétentions; comme, par exemple, les avitæ consuetudines d'Angleterre (3), qui valurent la mort à saint Thomas de Cantorbéry; et c'était là encore l'éternel prétexte qu'invoquaient jadis tant de princes, de comtes et de seigneurs, pour justifier les innombrables exactions qu'ils commettaient sur les domaines de l'Église (4).

Ces conditions restrictives de la légitimité des coutumes sont également sanctionnées dans les recueils de droit canon par une foule de témoignages, ainsi que par un grand nombre de décisions pontificales. Alexandre III, par exemple, tout en reconnaissant l'autorité de la coutume, ajoute que « néanmoins elle ne doit préjudicier ni à la vérité, ni à la loi. » Grégoire IX émet la même opinion en ces termes (5): « Comme les péchés sont d'autant plus lourds qu'ils tiennent plus longtemps les âmes malheureuses dans leurs chaînes, il est évident, pour quiconque n'a pas perdu

(1) Can. Si consuetudine, 5, d. 8. Berardi, Gratiani canon. genuin., p. II, tom. II, p. 344. — Dial. int. Cluniac. et Cisterc. (Martène, Nov. Thes. Anecd., tom. V, col. 1592.)

(2) Urban. II, P., Epist. ad Robert., ann. 1092 (Conc. Rem, dans Hardouin, tom. VI, p. II, col. 1699). — Epist. Cleri Flandr., ad Raynald. Archiep., col. 1700.

(3) Johan. Pictav. Ep., Epist. ad Thom. Cantuar. Archiep. (Lupus, Oper., tom. X, p. 65): Detestabiles illas profanasque consuetudines. - Johan. Saresb., Epist. 145 (edid. Gilės, vol. I, p. 238).

(4) Gottfr. Vindoc., Epist., lib. I, ep. 2, ad Paschal. II, P. (Sirmond., Op., vol. III, col. 626): Perversæ quædam exactiones sive consuetudines. Lib. II, ep. 24, ad Gottfr. Ep., col. 704.- III, 7, ad Raimund. Ep., col. 751: Execrandæ consuetudines. - V, 20, ad Guillem. Duc. Aquit., col. 863: Consuetudines violenter impressæ. — Gregor. M., Epist., lib. I, ep. 66, ad Felic. Massan. Ep. (vol. II, col. 553).

(5) Cap. Cum tanto, 11, X, h. t. (§ 162, p. 405, note 6).

le sens commun, qu'aucune coutume ne saurait déroger au droit naturel (§ 149) dont la transgression entraîne le péril de l'âme. Une telle coutume ne mériterait plus que le nom de peste. »

Ces paroles de Grégoire, empruntées au célèbre chapitre Cum tanto (p. 403, not. 5), sont suivies de celles-ci, qui posent les véritables bases de la théorie de tout le droit canon sur le droit coutumier: «En effet, continue ce pape (1), bien que l'antique coutume n'ait pas une médiocre autorité, elle ne peut aller cependant jusqu'à préjudicier à une loi, cette loi fût-elle purement positive, c'est-à-dire de droit humain, à moins qu'elle ne puisse invoquer en sa faveur une prescription accomplie dans les conditions exigées par la raison et par la loi. »

Caractère raisonnable, prescription légale telles sont donc, selon Grégoire IX, les conditions voulues pour que la coutume ait force de loi; la glose du canon Frustra et celle de la décrétale Cum tanto (2) y en ajoutent neuf à dix autres. Ainsi la coutume doit avoir subi l'épreuve d'un contradictorium judicium et avoir été pratiquée, par ceux qui l'observent, avec conscience de leur droit et avec l'intention de continuer à l'avenir à la prendre pour règle de conduite; l'objet auquel elle se rapporte doit être prescriptible; elle doit elle-même justifier son nom de coutume par l'antiquité de son origine, ainsi que par une pratique traditionnelle et constante; elle ne doit point blesser l'équité naturelle (3); de plus, il faut qu'elle ait été introduite en connaissance de cause, non par le fait d'une pure tolérance de la part du législateur, encore moins à la faveur d'une erreur; enfin, il est nécessaire que la plus grande partie de la population soit familiarisée avec l'usage de cette coutume; car, de même que la minorité ne peut faire une loi valable, de même elle ne saurait nou plus établir une coutume obligatoire.

Or, en examinant de près ces conditions exigées par la glose

(1) Supra, § 162.

(2) Glossa Consuetudinem, ad Can. Frustra, 7, d. 8, 11, v. Scias ergo. - Glossa Legitime sit præscripta, ad cap. Cum quanto, cit.

(3) Glossa Legitime, cit. - Puchta, Gewohnheitsrecht, vol. II, p. 25 sqq.

pour la validité canonique des coutumes, on découvre immédiatement que plusieurs sont défectueuses. Si la preuve d'une coutume in contradictorio judicio était une condition indispensable, il n'y aurait pas de coutume possible; car ou elle n'est qu'une lettre morte devant la sentence du juge, et alors le juge ne peut déclarer qu'elle a eu force de loi et qu'elle a pris racine dans la législation coutumière; ou elle est en pleine vigueur, et alors elle n'a pas besoin d'une reconnaissance judiciaire qui lui imprime le sceau de la loi (1). Il en est de même du consentement du législateur; Boniface VIII dit, il est vrai, que le pape garde tous les droits dans le sanctuaire de son cœur (2); mais il ajoute luimême qu'il ne faut pas entendre par là que la connaissance qu'il en a s'étend aux coutumes et statuts de chaque localité, de chaque individu, et que ce sont là des faits particuliers qui ne peuvent être atteints par des lois générales qui ne les ont point spécialement en vue (3). Enfin, pour ce qui est du consentement du peuple (4), manifesté par l'acceptation de la majorité, il en est de cette condition, empruntée par la glose à la théorie de Julien, comme de la plupart des autres qu'elle énonce, et qui rentrent dans les deux principales posées par Grégoire IX (5).

La glose elle-même finit par se ranger à ce système; Jean Séméca, l'auteur de l'énumération que nous avons reproduite, ainsi que Barthélemy (6) et Bernard de Botone (7), réduit les conditions constitutives de la validité de la coutume aux deux que nous avons présentées comme suffisantes et indispensables. Nous allons les examiner successivement.

Leuren,

(1) Pirhing, Jus canon. h. t., sect. 1, § 4, n. 23 (tom. I, p. 125). — Reiffenstuel, Jus canon. h. t., § 6, n. 146 sqq. (tom. I, p. 170). Forum eccles. h. t., q. 380 (tom. I, p. 206).

(2) Cap. Licet Romanus, 1, de Constit. in 6to (I, 2).

(3) Puchta, loc. cit., p. 46.

(4) Reiffenstuel, loc. cit., 15, n. 110 sqq., p. 166.

(5) Id., ibid., § 2, n. 30, p. 157.

(6) Glossa Consuetudinem, cit. - Hoc breviter teneas, quod sufficit, secundum canones, quod sit rationabilis et præscripta: ut extra de consuetu, cap. ulti. Bartholo. Brixien.

(7) Glossa Legitime, cit. Sed secundum hanc decr. satis sufficere videtur, si consuetudo solummodo sit rationabilis et præscripta. Ber.

§ CLXII.

4. De la prescription comme condition de la validité canonique
des coutumes.

La coutume dans le droit canon a toujours le caractère d'une pratique; elle résulte, en conséquence, naturellement et régulièrement d'une suite d'actes homogènes (1). Pour formuler une règle précise et rationnelle, la loi devait se baser non sur tel nombre déterminé de ces actes, mais nécessairement sur tel laps de temps pendant lequel ils devaient s'être produits sans réclamation (2). Et tel est en effet le sens que le droit canon attache au mot prescription en matière de lois coutumières. On voit que ce mot n'est pas pris ici dans son acception usuelle. Ce serait donc une erreur complète, au point de vue du droit canonique, que d'établir une synonymie d'idées entre la coutume et la prescription; celle-ci court au profit de telle église ou de tel particulier, et ne peut avoir sa base dans le fait d'une personne qui, ayant un droit de plainte, néglige d'en faire usage: la prescription, dans ce cas, a conséquemment pour effet d'amoindrir les droits de la partie lésée, ce qui n'a point lieu pour la coutume (3). On peut donc rigoureusement dire, non comme Grégoire IX, que la coutume se prescrit, mais qu'elle prescrit contre la loi; et toute l'analogie entre la prescription exigée pour la validité de la coutume et celle nécessaire pour l'acquisition ou la déchéance de droits privés se réduit principalement à ce que l'une et l'autre supposent un certain intervalle de temps (4).

Or, à cet égard, il faut d'abord répondre à cette question:

(1) Supra, § 162.

(2) Puchta, das Gewohnheitsrecht, vol. II, p. 95.

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(5) Leuren, Forum eccles. h. t., cap. 1, q. 370 (tom. I, p. 201 sq.). Hostiens., Summa h. t., n. 13, fol. 15. Fagnani, Comment. ad Cap. Venerabilis, X, de Censib. (III, 39). — Reiffenstuel, Jus canon. h. t., §1, n. 23 (tom. I, p. 156).

(4) Layman, Jus canon. h. t., ad Cap. Cum tanto, 11, n. 9 (vol. I, p. 197).

Pourquoi l'Église, par analogie avec la prescription en matière de plainte, a-t-elle exigé un certain laps de temps pour la validité de la coutume? Le motif est facile à comprendre en agissant ainsi. l'Église a suivi le principe universel en vertu duquel. elle protégeait, dans les limites du droit, toutes les pratiques auxquelles l'antiquité conférait une certaine autorité (§ 162). Les Pères de l'Église s'expriment déjà dans ce sens (§ 159), et telle a été jusqu'à nos jours la pratique constante. Or, l'Église étant dirigée par des lois et d'après des lois, les coutumes ne sont à ses yeux, avant toutes choses, que de simples faits qu'elle tolère comme des exceptions, et auxquels elle reconnaît une certaine force juridique, pourvu qu'ils soient marqués du sceau de l'ancienneté et approuvés par la raison. Elle va si loin à cet égard, qu'alors même qu'une coutume notoirement établie manque la preuve du temps exigé, elle laisse ceux qui l'invoquent dans une quasi possessio juris. C'est la solution donnée par Innocent III au sujet d'unc élection contestée pour le siége de Sutri, en attendant qu'il réglât toute l'affaire par une décision définitive (1).

de

Le chapitre Cum Ecclesia, qui renferme cette décision, a aussi son importance pour la solution de la question déjà depuis longtemps débattue: Quel est le laps de temps requis pour la prescription d'une coutume? Le système le plus exact serait de prendre pour base, non un nombre déterminé d'années, mais uniquement la longue durée d'une coutume (2), en en abandonnant l'appréciation au jugement des autorités compétentes, pour chaque cas particulier. Tel est le sens de la constitution de Constantin. Or, Grégoire IX a-t-il pris cette disposition pour base dans la décrétale Cum tanto, en se bornant à en faire une simple paraphrase et à reproduire d'une manière plus positive la condition de la Consuetudinis longævæ exprimée précédemment (5)? Cela est plus que douteux (4); la raison en est que, par là, Gré

(1) Cap. Cum Ecclesia, 3, X, de Causa possess. (II, 12).

(2) V. Savigny, System des heutigen roemischen Rechts, vol. I, p. 154. (3) Savigny, loc. cit., p. 427, note q.

(4) Rosshirt, Geschichte des Rechts im Mittelalter, vol. I, p. 475.

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