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distinguait point entre ce droit et le droit canon, cette distinction ne devait pas être faite (1). Les partisans de ce système se prononçaient en outre contre la prescription de quarante ans, en soutenant, en thèse générale, que vouloir exciper de la prescription en usage contre les droits des églises particulières, en faveur des coutumes dérogeantes, ce serait prouver beaucoup trop; car, dans cette hypothèse, toute coutume contraire à une loi générale de l'Église ne pourrait être protégée que par une période de cent ans, attendu que les lois générales émanent de l'Église romaine, contre laquelle il n'y a qu'une prescription de cent ans qui puisse prévaloir (2). Mais c'est là une fausse induction qui repose sur une confusion, évidemment postérieure à l'ère des Décrétales; car autrement il y aurait vraiment lieu de s'étonner que, parmi les anciens canonistes, il ne s'en soit pas trouvé un seul qui ait eu cette même idée. Or, comme aucun d'eux n'a fait la distinction dont il s'agit, on s'explique difficilement comment elle a pu venir à la pensée de Grégoire IX. Mais examinons la chose en elle-même.

On peut dire sans doute, à la gloire de l'Église romaine, que les lois générales ont été formées dans son sein; cela est rigoureusement vrai et exact dans un certain sens; mais ce n'est pas à dire pour cela qu'elles émanent proprement d'elle. Elle prend une part immédiate à leur confection. C'est là pour elle, indubitablement, un insigne honneur; mais la puissance législative ne réside point en elle, elle réside originairement et intégralement dans le successeur de saint Pierre, l'évêque universel de l'Église. L'auréole de gloire qui resplendit autour du chef auguste a rejailli sur l'Église romaine, et l'a décorée, il est vrai, de divers priviléges infiniment honorables; de ce nombre est celui de n'avoir contre elle que la prescription de cent ans; mais ce privilége, l'Église romaine ne peut le revendiquer que comme tel et pour elle seule (3); il ne peut conséquemment se rapporter aux

(1) Reiffenstuel, loc cit., n. 106.

(2) Reiffenstuel, loc. cit., n. 307, p. 165. - Schmalzgrueber, loc. cit., n. 10, v. Argumentum contrariæ.

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diverses dispositions de la législation papale pour l'Église universelle. Les lois générales émanées du pape sont le domaine commun de la catholicité; elles appartiennent à chaque église, au même titre qu'à l'Église de Rome; elles ne constituent point les priviléges de cette dernière, mais une partie du jus commune. Et ainsi, une fois placé à ce point de vue général, que la prescription était une condition essentielle de la coutume, il fallait nécessairement, pour prescrire contre le droit commun, appliquer la règle générale, adoptée dans le droit canon, d'une prescription régulière de quarante ans.

Dans plusieurs passages des sources canoniques du droit, il est question encore, relativement aux coutumes, d'un intervalle de temps immémorial; mais cela ne se rapporte qu'aux cas où il s'agit de l'acquisition de certains droits déterminés, et l'on ne peut en conclure que le principe, qu'à défaut de titre la preuve d'un laps de temps déterminé ne suffit pas, mais qu'il faut une prescription immémoriale, soit applicable à toutes les coutumes en général (1).

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Enfin, pour ce qui est de la preuve de la prescription (2) exigée par les canons, il est laissé au juge d'user de tous les moyens d'investigation historique à sa disposition pour arriver à cette preuve, et ici les témoignages oraux et les documents écrits sont également admissibles. Ces derniers ont non-seulement à constater les différents actes, mais encore à fixer l'époque à dater de laquelle ces actes se sont produits sans réclamation. Un moyen de preuve toujours certain, c'est la connaissance antérieure d'une coutume in contradictorio, parce que cela suppose que le juge avait déjà alors sa conviction formée sur la prescription de la coutume. Toutefois aucune espèce de preuve du nombre d'années requis ne suffirait à établir la validité juridique d'une coutume si elle n'était pas raisonnable; c'est pourquoi nous allons maintenant passer à l'examen de cette qualité pour en exposer le véritable sens.

(1). Layman, loc. cit.

(2) Reiffenstuel, loc. cit., § 7, n. 170, p. 172.

§ CLXIII.

5. Les coutumes, pour être canoniquement valides, doivent être
raisonnables.

Que faut-il entendre par coutume raisonnable? Cette question est, à double titre, d'une importance majeure (1): spécialisée pour le juge, dans tous les cas particuliers, par le droit canon, sous cette formule pratique : La coutume invoquée est-elle raisonnable (2)? elle est, dans sa formule générale, très-diversement résolue par les canonistes.

On chercherait en vain dans le droit canon une définition expresse de la coutume raisonnable; mais il en retrace le caractère dans un si grand nombre d'exemples particuliers, que l'on peut trouver dans ces appréciations diverses la base solide d'une règle générale et sûre dans le domaine du droit ecclésiastique. Cette règle est celle-ci : En cas de doute, surtout lorsqu'il s'agit d'une coutume præter legem (3), le juge doit présumer toujours en faveur de la coutume (4).

Nous avons parlé de l'extrême divergence des opinions sur le sujet qui nous occupe; en voici une rapide esquisse : quelquesuns donnent le nom de raisonnable à la coutume qui peut devenir l'objet d'une loi juste dérogeant à une autre loi déjà existante (5). Cette définition est incontestablement exacte; mais elle ne fait faire un pas à la solution de la question. Une autre opinion veut qu'il n'y ait de coutume irraisonnable que celle qui blesse un principe de droit naturel ou de droit divin (6). Selon une troisième, on doit considérer comme telle toute coutume en opposi

pas

Pir

(1) V. Savigny, System des heutigen roemischen Rechts, vol. I, p. 428. (2) Glossa Rationabilia, ad Cap. Consuetudinem, 1, h. t. in 6to. hing, Jus canon. h. t., § 5, n. 30 (tom. I, p. 127).

(3) Schmalzgrueber, Jus canon. h. t., § 2, n. 8 (tom. I, p. 50).

(4) Reiffenstuel, Jus canon. h. t., § 2, n. 43 (tom. I, p. 158).

(5) Sanchez, de Matrimon., lib. VII, disp. 4, n. 14 (Edit. Lugd. 1690, t. II, p. 15). — Reiffenstuel, loc. cit., § 2, n. 33, p. 257.

(6) Navarrus, Consil. 3, de censib., n. 4.

tion avec la loi naturelle ou divine, ou réprouvée par le droit canon, ainsi que celle qui peut être une occasion de péché, ou qui préjudicie, sous un autre rapport, au bien de l'Église ou de l'État (1).

De ces deux dernières définitions, la première est évidemment beaucoup trop vague; car il y a une foule de coutumes qui ne pèchent point directement contre la loi divine et n'en sont pas moins irraisonnables. La dernière présente une notion assez exacte au fond, mais elle est trop compliquée dans sa contexture pour ne pas faire désirer une formule plus simple et plus précise. Mais enfin elle est admissible, et par là même met à néant les deux autres.

Maintenant, quelle est l'acception du mot ratio? Dans les sources du droit canonique, très-souvent, ce mot s'entend de cette raison suprême et divine, qui n'est autre chose que la volonté de Dieu manifestée aux hommes dans la loi révélée, et ainsi, cette volonté est la raison fondamentale de la loi, et la loi divine est la vérité.

D'après cette explication, par ratio on doit entendre l'ensemble des principes qui découlent de la loi divine par voie de déductions rationnelles, et cela est raisonnable qui est d'accord avec ces principes, ou, pour parler le langage du droit séculier, qui est conforme à la nature de la chose. Or, ici la chose même est divine; c'est l'Église fondée par Jésus-Christ, et conséquemment le mot raisonnable signifie conforme à la nature, à l'esprit, à la fin de l'Église. On doit comprendre qu'il s'agit spécialement ici de la législation ecclésiastique. En effet, de même que l'autorité législative de l'Église dérive de la volonté divine, ainsi sa législation repose sur le fondement de la loi divine; c'est dans cette loi qu'elle a pris racine et qu'elle puise sa force vitale. Constamment dirigée par le Saint-Esprit, l'Église ne peut dévier des principes de la loi divine, et par cela même ses prescriptions

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·Schmalz

(1) Layman, Theol. moral., lib. I, tract. 4, cap. 24, n. 4, p. 84. fenstuel, loc. cit., n. 34, Pirhing, loc. cit., n. 29. P. 157. grueber, loc. cit., n. 7.

ont toujours une connexion au moins médiate avec cette loi. Ceci ne saurait s'appliquer aux ordonnances que chaque évêque peut rendre comme législateur de son diocèse. Mais de ce que la législation ecclésiastique suit généralement la voie qui lui est tracée par la loi divine, cela ne veut pas dire qu'elle marche toujours parallèlement à celle-ci, invariable et imprescriptible comme elle; non, mais seulement que l'Église tient constamment ses prescriptions générales en harmonie avec la loi divine, tout en se con. formant aux temps et aux circonstances. Or, si la législation de l'Église n'est, en quelque sorte, qu'un reflet de la loi divine, un rayonnement de la lumière de la vérité, n'est-on pas autorisé à énoncer en principe que toute coutume contraire à la loi de l'Église est contraire à la raison, son opposition directe avec cette loi impliquant par là même une opposition indirecte avec la loi divine? Évidemment; seulement il est essentiel de bien fixer la limite de ce principe.

Ce qui est certain d'abord et facile à concevoir, c'est qu'il y a des lois ecclésiastiques qui prohibent certaines actions plus immédiatement que d'autres, à raison de leur culpabilité. Ces lois ont conséquemment pour objet d'empêcher ces actions, mauvaises, non-seulement à cause de leurs suites funestes pour l'ordre spirituel, mais encore et surtout à cause du danger qui en résulte pour le salut de ceux qui s'en rendent coupables.

On peut citer pour exemples les cas de trafics simoniaques (1), ou bien encore ceux où des évêques ou des patrons réduisent tellement les revenus affectés aux besoins des pasteurs paroissiaux, que ceux-ci n'ont plus les moyens de vivre (2).

Or, comme l'âme humaine, selon la pensée d'Alexandre III (note 1), reproduite par Grégoire IX dans la décrétale Cum tanto (§ 164), est d'autant plus enchaînée par le péché, qu'elle vit plus longtemps dans ses liens honteux, et que les prévarications des hommes, bien loin de diminuer par la durée, ne font que se multiplier quand les actions qui les constituent passent à l'état

(1) Cap. Non satis, 8. Cap. Cum in Ecclesiæ, 9, X (de Simon., V, 3). (2) Cap. Exstirpandæ, 30, X, de Præb. (III, 5).

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