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DE LA RELIGION.

411. Nous avons à exposer, dans ce traité, les preuves de la divinité de la religion contre les déistes et les rationalistes, qui prétendent, les uns, que la religion n'est qu'une invention des hommes; les autres, qu'il n'y a pas d'autre religion que la religion naturelle, et qu'on doit rejeter comme inutile et comme fausse la révélation de toute vérité qu'on ne peut démontrer philosophiquement par les lumières de la raison. Pour procéder avec ordre, nous parlerons, 1o de la religion en général; 2o de la révélation en général; 3o de la révélation primitive; 4o de la révélation mosaïque; 5o de la révélation évangélique. Ces différentes révélations se rapportent toutes trois à la religion chrétienne.

PREMIÈRE PARTIE

DE LA RELIGION EN GÉNÉRAL.

CHAPITRE PREMIER.

Notion de la religion.

412. Le mot religion vient de religare, relier; ou de relegere, relire; ou de reeligere, élire, choisir de nouveau; parce que la religion nous attache et nous unit étroitement à Dieu (1); ou parce qu'elle nous rappelle que nous devons nous occuper souvent des

(1) Vinculo pietatis obstricti Deo et religati sumus: unde ipsa religio nomen accepit. Lactance, Divin. instit., lib. IV.

choses de Dieu; ou parce qu'en pratiquant la religion, nous choisissons Dieu de nouveau, comme étant le souverain bien que nous avions perdu par le péché (1). Quelle que soit l'étymologie de ce mot, on entend par religion le culte de Dieu, qui en est le principal objet; la raison des devoirs que nous avons à remplir envers Dieu. On l'appelle aussi la société de l'homme avec Dieu. Les livres saints se servent du mot de pacte, d'alliance, fœdus, pactum, pour désigner la religion sous l'Ancien et le Nouveau Testament. 413. Mais, pour donner une notion plus étendue de la religion en général, nous ajouterons que la religion est « une institution divine, naturelle et positive, qui nous oblige, sous la sanction des ⚫ peines et des récompenses, d'honorer Dieu par la foi, l'espérance « et l'amour, par l'adoration, l'esprit de sacrifice, la reconnais«sance, la prière, et l'observation de ses lois. »

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La religion est une institution divine; elle a Dieu pour auteur; une religion qui serait l'ouvrage des hommes, une fois reconnue pour telle, tomberait avec l'imposture qui lui aurait donné le jour. C'est une institution naturelle, c'est-à-dire, fondée sur les rapports naturels, essentiels et nécessaires de la créature au créateur; rapports de dépendance dans l'homme vis-à-vis de Dieu, et d'indépendance dans Dieu vis-à-vis de l'homme. Comme créature, l'homme dépend nécessairement et tout entier de Dieu; et Dieu, qui est l'être des êtres, ne dépend ni ne peut dépendre d'aucun autre; il se suffit à lui-même en tout et pour tout l'homme est donc le subordonné de Dieu. D'ailleurs, comme créature raisonnable, il est capable de connaître la vérité et d'aimer le bien, dont la jouissance peut le rendre heureux. Il doit donc tendre vers Dieu, qui, étant la vérité même, peut seul remplir le vide de son intelligence, comme lui seul peut, parce qu'il est le souverain bien, rassasier les désirs de son cœur, qui n'est satisfait que par la possession de l'infini: Fecisti nos ad te, Domine; et inquietum est cor nostrum, donec requiescat in te.

414. La religion n'est pas seulement naturelle, elle est en même temps une institution positive. Quoique le culte que nous rendons à Dieu lui soit naturellement dû, il était nécessaire que Dieu en déterminât lui-même les principaux actes, et fit connaître à l'homme la manière dont il devait être honoré. La religion nous oblige sous la sanction des peines et des récompenses : sans cette sanction, elle serait impuissante; ce ne serait plus une loi,

(1) Voyez saint Thomas, Sum. part. 2, 2, quæst. 81, art. 1.

mais une simple manifestation d'une volonté stérile de la part de Dieu.

415. Elle nous oblige d'honorer Dieu par la foi, l'espérance, l'amour, l'adoration, l'esprit de sacrifice, la reconnaissance, la prière, et l'observation de ses lois. Nous honorons Dieu par la foi; en croyant à sa parole, nous reconnaissons qu'il est la vérité même, qu'il ne peut ni se tromper, ni tromper les hommes. Nous l'honorons par l'espérance; nous espérons en lui, parce qu'il est toutpuissant et infiniment bon. Nous l'honorons par l'amour; nous l'aimons, parce qu'il est tout ensemble souverainement bon et souverainement parfait. Nous l'honorons par l'adoration; en nous prosternant à ses pieds, nous confessons que lui seul est grand, qu'à lui seul est dû honneur et gloire, soli Deo honor et gloria. Nous l'honorons par l'esprit de sacrifice; en offrant à Dieu ce qui est à notre usage, en nous offrant nous-mêmes, nous rendons témoignage au haut domaine qu'il a sur nous et sur toutes les créatures. Nous l'honorons par la reconnaissance; par nos actions de graces, nous reconnaissons que Dieu est l'auteur de tout don, la source de tout bien dans l'ordre temporel comme dans l'ordre spirituel. Nous l'honorons par la prière; en l'invoquant, nous témoignons que tout dépend de Dieu, que nous en dépendons nousmêmes. Nous l'honorons enfin par l'observation de ses lois; en lui obéissant, nous professons qu'il est notre maitre, le législateur suprême, le souverain arbitre de toutes choses.

416. On distingue dans la religion deux sortes d'actes : les uns qu'elle commande elle-même, comme l'adoration, le sacrifice, la prière, et généralement tous les actes qui se rapportent directement au culte de Dieu; les autres, qu'elle ne commande point, mais qu'elle dirige vers Dieu comme étant la fin dernière de toutes nos actions, même de celles qui, de leur nature, n'ont aucun rapport avec la religion (1): telles sont les actions dont parle saint Paul, lorsqu'il dit : « Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit « que vous fassiez toute autre chose, faites tout pour la gloire de « Dieu; sive manducatis, sive bibitis, sive aliud quid facitis, « omnia in gloriam Dei facite (2). » Ainsi, la religion nous prescrit et de rendre au Créateur le culte qui lui est dû, et de sanctifier nos actions en les rapportant à Dieu d'une manière au moins implicite, sans excepter celles qui passent en morale pour être matériellement

(1) Saint Thomas, Sum. part. 2, 2, quæst. 81, art. 1. (2) Epist. I ad Corinthios, c. x, v. 31.

indifférentes. C'est la religion qui entretient en nous la piété, et, avec la piété, la charité, par laquelle nous aimons Dieu pour Dieu, nous nous aimons nous-mêmes à cause de Dieu, et nous aimons nos semblables comme nous-mêmes, toujours à cause de Dieu, par amour pour Dieu : Una est charitas, quia non alia charitas diligit proximum, quam illa quæ diligit Deum (1).

D'après cette simple notion, on concevra facilement que la religion répond parfaitement aux besoins de l'homme et de la société.

CHAPITRE II.

De la nécessité de la religion.

417. La religion est nécessaire à l'homme, nécessaire à la société. Il faut donc admettre une religion comme vraie, à moins qu'on ne dise que l'erreur est le principe du bonheur de l'homme et du bonheur des peuples.

ARTICLE I.

La religion est nécessaire à l'homme.

418. L'homme est né pour être heureux; il tend naturellement et invinciblement vers le bonheur, comme vers sa fin dernière. Il peut se tromper, il est vrai, soit dans le choix des moyens, soit en confondant le vrai bonheur avec un bonheur qui n'est qu'apparent; mais il est dans sa nature de vouloir être heureux; il le désire même lorsqu'il cherche à se détruire; car il n'agit ainsi que parce que sa destruction, quelque contraire qu'elle soit à ses instincts naturels et à la raison, lui paraît, dans telle ou telle circonstance, préférable à la vie. L'homme peut donc être heureux et vraiment heureux : ses désirs ne sauraient être illusoires; Dieu ne se joue point de sa créature. Or, l'homme ne peut être heureux que par la religion; la religion seule peut lui procurer le bonheur pour lequel il est né, la félicité après laquelle il soupire si ardemment. En effet, l'homme a reçu du Créateur la faculté de connaître, d'aimer et d'agir; la

(1) Saint Augustin, serm. CCLXV

faculté de connaître la vérité, qui est l'objet de son intelligence; la faculté d'aimer le souverain bien, qui est l'objet de son amour; ét la faculté d'agir, c'est-à-dire, la faculté de se porter librement vers la vérité et le souverain bien (1), qu'il doit recevoir par la possession plus ou moins parfaite de Dieu, qui, étant lui-même tout ensemble la vérité et le souverain bien, peut seul, sous ce double rapport, satisfaire les besoins de notre intelligence et de notre cœur, et devenir une récompense digne de l'homme: Ego ero merces tua magna nimis (2). L'homme doit donc, pour arriver au bonheur, se mettre en rapport avec Dieu, s'attacher et s'unir étroitement à Dieu; il doit, par conséquent, pour être vraiment heureux, pratiquer la religion, puisque ce n'est qu'en la pratiquant qu'il se met en société avec Dieu.

419. Non-seulement l'homme désire de connaître la vérité, mais il désire de connaître la vérité infinie; non-seulement il cherche le bien, mais il cherche le bien infini. Or, cette vérité infinie, on ne la découvre qu'en Dieu; ce bien infini, on ne le trouve non plus qu'en Dieu, que dans les récompenses de la religion : « La « vie éternelle est de vous connaître, vous qui êtes le seul vrai « Dieu; hæc est autem vita æterna, ut cognoscant te, solum « Deum verum (3). » Il n'y a que la religion qui puisse régler et fixer notre intelligence, en nous faisant connaître positivement les vérités qui nous intéressent dans l'ordre moral; qui puisse régler et fixer notre cœur, en nous proposant des biens infinis dans leur objet, qui répondent à l'immensité de nos désirs. C'est la religion qui nous donne la connaissance de Dieu, comme étant le principe et la fin de toutes choses; la connaissance de l'homme et de ses destinées; c'est elle qui nous apprend à tous avec autorité, aux enfants comme aux adultes et aux vieillards, aux pauvres comme aux riches, aux petits comme aux grands, aux sujets comme aux princes, aux simples et aux ignorants comme aux philosophes et aux savants, que Dieu nous a mis au monde pour le connaître, l'aimer, le servir, et, par ce moyen, acquérir la vie éternelle. C'est la religion qui nous explique les rapports de l'homme tant avec Dieu qu'avec ses semblables, et qui, en nous représentant le Créateur comme le père de tous les hommes, auxquels elle donne une origine, une nature et une fin communes, nous fait comprendre ces deux admirables préceptes, dont le second est la conséquence du premier : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur,

(1) Nous supposons le dogme de la grâce, sans laquelle on ne peut rien dans l'ordre du salut. — (2) Genèse, c. xv, v. 2. — (3) Saint Jean, c. XVII, Vv. 3

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