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sans l'avoir jamais étudié, sans avoir même les connaissances nécessaires pour en entreprendre l'étude : de présenter aux amateurs du vrai beau, des modèles sublimes et parfaits; d'inspirer aux étrangers le désir de connaître le plus grand de tous les poètes de l'Italie. Mais que l'on ne se flatte pas d'y parvenir par une lecture superficielle. Le Dante est aussi difficile qu'il est grand : il faut, pour bien l'entendre, lire attentivement plusieurs fois le même passage, se rendre raison de la construction de chaque phrase, faire l'analyse grammaticale et logique de chaque proposition, rétablir souvent l'ordre de la construction directe, avoir une connaissance parfaite des ellipses et des autres figures principales; étudier le sens propre et le sens figuré de chaque mot; réfléchir, méditer, revenir souvent aux mêmes idées.

Ma cosi salda voglia è troppo rada.

DU VERS ITALIEN EN GÉNÉRAL.

NoN, ce n'est point le nombre des syllabes, ce n'est point la rime qui constitue le vers italien. Ce n'est point la rime, car nous avons des poëmes, et des poëmes dignes d'être placés au premier rang, écrits en vers non rimés; ce n'est point le nombre des syllabes, puisque, si dans un vers un seul mot change de place, le vers n'y est plus, quoique les mots et le nombre des syllabes soient toujours les mêmes. En pourrait-on douter? Voici un exemple capable de convaincre l'organe le plusrebelle.

I venni in luogo d'ogni luce muto

Che mugghia, come få mar per tempesta,
Se da contrari venti è combattuto,

La bufera infernal che mai non resla,

Mena gli spirti con la sua rapina,
Voltando e percotendo gli molesta.
Quando giungon davanti a la ruina :

Quivi le strida, il compianto e 'l lamento:
Bestemmian quivi la virtù divina.

Ces vers sont très-harmonieux, et en les lisant il nous semble entendre le fracas épouvantable de ce vent furieux que le poète entendit lui-même aux enfers. Mais écrivonsles autrement, c'est-à-dire changeons la place des accens toniques, en laissant les mêmes mots et le même nombre de syllabes, et voyons ce qui en résulte.

In luogo d'ogni luce muto io venni

Che mugghia, come per tempesta fa 'l mar,

Se è combattuto da venti contrari.

L'infernal bufera, che mai non resta, etc.

Quel changement! toute l'harmonie a disparu, et toute idée de vers est détruite.

Si le vers italien résultait du nombre des syllabes, il suffirait pour faire un vers de huit syllabes, d'en ajouter une à celui de sept: ainsi en augmentant d'une syllabe le vers de Pétraque :

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on aurait un vers de huit syllabes; mais cette combinaison de mots ne donne point de vers, donc ce n'est pas le nombre des syllabes qui constitue le vers italien.

S'il en était ainsi, ne pourrait-on pas, en effet, dans un vers quelconque, changer la place d'une syllabe, sans le détruire? Cependant, si dans le vers:

Io vidi già nel cominciar del giorno, on déplace une seule syllabe, comme: Io già vidi nel cominciar del giorno,

toute l'harmonie est détruite, et le vers a cessé d'exister.

Pour mieux faire sentir cette vérité, je mets ici quelques vers du Dante, desquels on verra disparaître tout le charme de l'harmonie, par le changement de place d'un mot ou d'une syllabe, ou d'un seul accent tonique. Piangene ancòr la trista Cleopatra,

Che fuggendogli innanzi, dal colubro

La morte prèse subitana ed àtra.

Celui qui sent l'harmonie caractéristique de ces vers, sentira aussi qu'elle n'existe plus, en les écrivant de la manière suivante :

Cleopatra piangene ancòr la trista,

Che innanzi fuggèndogli, dal colùbro, etc.

Voici maintenant un vers dont l'harmonie est aussi séduisante que la pensée en est belle.

Voi che intendendo il terzo ciel movete.

Changeons la place d'une syllabe, et voyons ce qui en résultera.

Che intendendo il terzo ciel voi movete.

Quoique le nombre des syllabes soit toujours le même, l'harmonie et le vers n'existent plus.

Les vers suivans sont parfaits. Leur harmonie est détruite, si un seul accent change de place. Les voici écrits tels qu'ils doivent être prononcés.

E falla dissimile al sommo bene.

Come stella con stella si colloca.
Seguendo 'l cielo sempre fu durabile.

Poscia tra esse un lume si schiari.

Si dans le premier de ces vers, l'élévation de la voix que l'on doit faire sur la troisième syllabe du mot dissimile;

se fait sur la seconde, où l'accent tonique se trouve naturellement, si l'on dit :

E falla dissimile al sommo bene,

ce n'est plus un vers, ce n'est pas même de la prose. Dans le second vers, le mot colloca a naturellement l'accent tonique sur la première syllabe; mais le poète, par licence, l'a transporté sur la seconde. Or si, au lieu de prononcer colloca, on prononçait colloca, le vers serait détruit.

Il arrivera la même chose si, dans le troisième et le quatrième, on change la place du dernier accent, qui doit être, d'après les lois de l'harmonie, sur la dixième syllabe. Il reste donc prouvé, qu'en changeant la place d'un seul mot, d'une seule syllabe, d'un seul accent, le vers italien disparaît aussitôt.

Ce qu'il y a d'étonnant, c'est que si dans un vers on supprime un seul repos, savoir un des intervalles qui servent de complément à la mesure, de même que les soupirs en musique, cette suppression détruit tout-à-fait le vers. Que l'on prononce bien le suivant :

Indi tanta dolcezza al cor mi viene.

En prononçant ce vers, la voix s'élève d'un degré sur la huitième syllabe, au-dessus des autres ; et elle ne passe à la neuvième qu'après un repos qui, avec la syllabe mi, forme précisément les deux quarts de la mesure dont la syllabe còr compose la première moitié. Si au lieu d'écrire cor mi viene, on écrit core viene, on a toujours le même nombre de syllabes et à la même place, mais le vers n'y est plus, par la seule et unique raison que le repos qui avait lieu entre la syllabe qui a l'accent tonique, et celle qui la suit immédiatement, n'existe plus.

On m'a objecté qu'il n'y a pas un seul poète italien chez qui l'on ne rencontre un grand nombre de vers où ce repos n'a point lieu, et l'on m'a cité le vers de l'Arioste,

Bianca neve è 'l bel collo e 'l petto latte,

en me disant qu'entre petto et latte, il n'y a pas de repos, et que par conséquent, le poète a violé les lois de l'harmonie, ou que mes principes ne sont pas justes.

J'ai répondu, qu'entre les mots petto et latte, il existe une pause réelle, et qu'il n'y a pas un seul Italien qui, en lisant ce vers, ne fasse entendre ce repos, guidé par un sentiment intérieur, dont peut-être il ignorera la raison. J'ai ajouté que cette pause est commandée par la grammaire, par le sentiment, par l'accent oratoire, et par la dignité du vers; par la grammaire, parce que cette pause donne à celui qui écoute, le tems de suppléer le verbe è, que l'ellipse supprime, pour rendre l'expression plus énergique; par le sentiment, parce qu'au moyen de cette pause, on dispose l'ame de celui qui écoute, aux émotions dont le poète est affecté; par l'accent oratoire, parce que sans cette pause, la voix du lecteur n'aurait pas le tems de se préparer aux modulations analogues aux idées; par la dignité du vers enfin, parce qu'en le prononçant sans les vers tombe tout-à-fait.

cette pause,

Donc le nombre des syllabes dans le vers italien, n'est pas plus partie intégrante du vers qu'il ne l'est dans les vers grecs et latins.

Mais, si ce n'est ni la rime ni le nombre des syllabes, qu'est-ce donc qui produit cet ensemble harmonieux, d'où résulte la beauté du vers italien? Ce n'est autre chose que le rapport des tons graves et aigus, ainsi que nous le démontrerons bientôt par des preuves qui ne laisseront rien à désirer. Ce sont eux qui impriment aux vers le mouvement et les impulsions que l'ame communique aux choses même insensibles, et qui établissent ce grand intervalle qui sépare la poésie de la prose.

De l'accent.

Ce mot, dans son acception générale, signifie toute modification différente de la voix dans l'articulation des

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