dians de lire dans le sixième chant du Purgatoire ce beau passage où le poète apostrophe l'Italie. Ahi! serva Italia, di dolore ostello, Nave senza nocchiero, in gran tempesta, Des images poétiques. Ces images ne sont autre chose que la peinture des objets avec des couleurs assez vives et assez frappantes, pour que l'imagination soit séduite par le prestige de l'art. Veut-on entendre ce que le Dante entendit lui-même à l'entrée de l'enfer ? qu'on lise la peinture qu'il en fait. Quivi sospiri, pianti, ed alti guai Risonavan per l'aer senza stelle; Parole di dolore, accenti d'ira, Voci alte e fioche, e suon di man con elle, Facevan un tumulto, il qual s'aggira Sempre 'n quell' aria senza tempo tinta, la Veut-on voir des ames furieuses, déchirées par rage et le désepoir? Veut-on voir les furies infernales, telles qu'elles sont dans le séjour de Pluton? écoutons encore le Dante : Questi si percotean non pur con mano; Ma con la testa, e col petto, e co' piedi, Ove in un punto vidi dritte ratto Tre furie infernal di sangue tinte, Che membra femminili aveano ed alto E con idre verdissime eran cinte ; Veut-on, s'il est possible de s'exprimer ainsi, flatter son odorat par la suavité des parfums, et sa vue par la variété des couleurs parsemées dans une agréable vallée ? Voici la peinture que notre poète nous en offre. Oro, ed argento fino, e cocco, e biacca, Fresco smeraldo in l'ora che si fiacca, Come dal suo maggiore è vinto il meno. Non avea pur natura ivi dipinto ; Ma di soavità di mille odori, Vi faceva un incognito indistinto. Veut-on voir des personnes pâles, difformes et décharnées par la faim? en voici encore la peinture par cet admirable poète. Negli occhi era ciascuna oscura e cava, Du langage d'action. L'expression d'un mouvement quelconque de l'ame, par un geste, par un soupir, par un regard, etc., est appelée langage d'action. C'est par une suite de leur sensibilité et de la vivacité de leur imagination, que les Italiens ont employé et varié ce langage à l'infini. Le poète qui examine et étudie la nature, peut trouver dans l'expression de ces mouvemens la peinture fidelle des passions les plus fortes et des mouvemens de l'ame les plus secrets. Le Dante, étant celui peut-être de tous les poètes, qui a le mieux observé et détaillé la nature, et qui a créé les mots et les expressions les plus propres à faire sentir tout ce que son œil pénétrant apercevait, a dû, mieux que tout autre, peindre de leurs propres couleurs, les mouvemens de l'ame les plus profonds, et les plus inaccessibles aux regards des autres hommes. On va juger de ce que j'avance, par les exemples qui suivent, pris au hasard dans les œuvres de ce grand peintre. E come quei che con lena affannata, Quando s'accorser ch' io non dava loco, Per lo mio corpo al trapassar de' raggi, Guardando > A guisa di leon quando si posa. Io mi rivolsi d'ammirazion pieno Al buon Virgilio, ed esso mi rispose Alto sospir che duo!o strinse in hui Mise fuor prima... Les épithètes offrent, surtout dans la langue poétique des Italiens, une des plus grandes difficultés, à cause de l'abondance prodigieuse de ces mots et des différentes attributions, que l'analogie a données souvent à une même épithète. Il est vrai aussi que le poète peut trouver dans l'emploi de ces mots un moyen de rendre l'expression plus énergique et plus brillante; mais hoc opus, hic labor. Pour apprendre à apprécier et à sentir l'effet que produisent les épithètes, lorsqu'elles sont bien choisies et bien placées, je ne saurais mieux faire que de renvoyer les étudians à la lecture du sixième chapitre de l'ouvrage, qui a pour titre: Richerche intorno alla natura dello stile le célèbre auteur des Délits et des Peines, le marquis Beccaria; ouvrage qui fait autant d'honneur à l'Italie que ceux des Dumarsais et des Condillac en font à la France. , par Je ne finirais pas, si j'entreprenais de citer tous les exemples où les épithètes arrêtent l'esprit et frappent fortement l'imagination du lecteur. En voici quelquesuns toujours empruntés du Dante. Di cui la fama ancor nel mondo dura, Ala qui la morta poesia risurga. Les comparaisons sont un des plus beaux ornemens de la poésie; elles mettent les objets dans leur véritable jour, et donnent à la pensée plus de force et plus d'éelat. Le Dante en offre des modèles parlans dans les suivantes, tirées du Paradis. E forse in tanto, in quanto un quadrel posa, E vola, e da la noce si dischiava..... E siccome saetta che nel segno Percuote pria che sia la corda queta..... Indi, come orologio che ne chiami Nell' ora che la sposa di Dio surge Che l'una parte e l'altra tira ed urge, Tin tin sonando con si dolce nota, Che 'l ben disposto spirto d'amor turge: Come si volgon per tenera nube Du' archi parallelli e concolori, |