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sion Nicolas Bischi, préfet de l'Annone, et l'astreignit à rendre ses comptes. Il annonça qu'il dépouillerait de leurs emplois tous ceux qui les avaient acquis par des moyens illégitimes. En supprimant plusieurs pensions, il économisa à la chambre apostolique une dépense annuelle de quarante mille écus romains. Il promit aux cardinaux de les consulter dans toutes les affaires. C'était se faire valoir aux dépens de son prédécesseur, qui avait été singulièrement avare de sa confiance. Il se montra humain, accessible, laborieux, tempérant. En un mot, son début concilia presque tous les suffrages.... Il partageait tout son temps entre ses devoirs religieux, son cabinet, son muséum et la bibliothèque du Vatican. »

Ainsi s'expliquait sur le nouveau Pape un homme qu'on n'accusera pas de le ménager, l'auteur des Mémoires historiques et philosophiques sur Pie VI et son pontificat, jusqu'à sa retraite en Toscane, imprimés pour la première fois, en 1798, sous le directoire national de la république française. Cet auteur appelle retraite en Toscane l'enlèvement brutal du Pape octogénaire par le gouvernement français, qui l'arracha de son siége, le traîna captif en Toscane, puis ailleurs, enfin en France, où il mourut en prison l'année suivante : c'est que cet auteur avait à cœur de pallier, sinon de justifier, la persécution de la république française envers le chef de l'humanité chrétienne. Cet auteur est Jean-François Bourgoing, né à Nevers en 1748, et mort en 1811 ambassadeur de l'empereur Napoléon à Dresde. Ses Mémoires sont historiques, car on y trouve des détails intéressants, des aveux extrêmement curieux ; ils sont surtout philosophiques, car le Pape et la cour de Rome y sont jugés avec beaucoup de légèreté et de partialité; on y trouve des réflexions démenties par les faits, et le philosophe souvent en contradiction avec l'historien. « A Dieu ne plaise, dit-il, t. 1, p. 90, que nous veuillons peindre Pie VI sous de trop odieuses couleurs. Ce serait une injustice, quand même il serait en possession de son rang éminent; ce serait une lâcheté après la catastrophe qui l'en a précipité. » Et malgré cette injustice et cette lâcheté, Bourgoing calomnie volontiers ce Pontife détrôné et banni; il interprète défavorablement ses actions les plus louables, il ne voit dans tout ce qu'il fait que vanité. Mais c'est surtout dans les différends de Pie VI avec les souverains, que Bourgoing donne plus de preuves de cette mauvaise foi et de cette persévérance à le déprimer. Il avoue, page 255, que le Pape pouvait paraître un objet de pitié, et que presque tous les souverains semblaient s'être donné le mot pour le tourmenter; et, dans tout son ouvrage, il appelle le blâme sur ce Pape si digne de pitié, et il lui reproche de ne s'être pas prêté

au plaisir de ces princes et à leur concert pour le tourmenter. Ces Mémoires sont donc, comme on voit, très-philosophiques, et quand ils avouent quelque chose à la louange du Pape, on peut y compter 1.

C'était le cardinal Braschi qui avait déterminé Clément XIV à l'établissement de ce beau musæum, où les chefs-d'œuvre de tous les arts, les antiquités les plus précieuses devaient attirer les voyageurs de toutes les nations civilisées. Tous les projets que Braschi méditait depuis long-temps avaient un caractère de noblesse, de générosité, où son âme se peignait tout entière. Nous ne ferons qu'indiquer les plus importants : les travaux exécutés dans le port d'Ancône, le seul des états du Pape où le commerce pût être protégé ; le fanal qui fit partie de ces travaux, lesquels méritèrent à Pie VI une statue pareille à celle de Clément XII, et un arc de triomphe à côté de celui de Trajan; la sacristie magnifique ajoutée à la basilique de Saint-Pierre; les réparations faites à l'entrée du palais Quirinal, où il fit relever le fameux obélisque; les embellissements de l'abbaye Subiaco, qu'il avait possédée auparavant. Mais tout cela disparaît et s'efface auprès de la vaste entreprise du dessèchement des marais Pontins. Dès les premiers temps de la république romaine, et depuis, sous les empereurs, enfin, plus récemment encore, sous les pontificats de Boniface VIII, de Martin V, de Léon X, de Sixte V et de Clément XIII, on avait fait de vaines tentatives pour assainir cette malheureuse contrée, où une population tout entière naît, languit et s'éteint bientôt au milieu des vapeurs pestilentielles, et que le voyageur même ne traverse impunément qu'avec des précautions indispensables: Pie VI voulut, à l'exemple de ses prédécesseurs, essayer d'achever ce double monument de gloire et de bienfaisance. Il visita lui-même cette terre de désolation; il y venait tous les ans encourager et diriger les travaux. On lui a reproché bien injustement d'avoir dissipé les trésors de l'état dans un projet chimérique. Une souscription volontaire procura des fonds considérables qui soulagèrent le fisc. Douze mille arpents de terre rendus à la culture des grains et à la nourriture des troupeaux furent vendus au duc Braschi, neveu du Pape, par la chambre apostolique. La voie appienne, ce chef-d'œuvre de l'industrie des Romains, fut dégagée des encombrements inutiles qui la surchargeaient et ne faisaient qu'augmenter la stagnation des eaux. C'est aujourd'hui un chemin droit et uni qui conduit rapidement à Terracine et qui dispense de faire un détour long et

'Picot. Mémoires, an 1775.

TOME XXVII.

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incommode pour regagner la route de Naples. On creusa, en outre, un large canal qui facilita davantage l'écoulement des eaux vers le lac Fogliano et qui devait par la suite augmenter les mouvements du commerce. Une ville tout entière, dont les plans étaient déjà adoptés, aurait embelli et couronné ces superbes ouvrages; mais les troubles qui survinrent, et la révolution française surtout, y apportèrent un obstacle invincible1.

Disons encore un mot de ces institutions charitables, que Pie VI ne négligeait point au milieu des soins de l'administration temporelle; de ces conservatoires qu'il érigea pour de jeunes filles indigentes; de l'hospice fondé à Rome même en faveur des frères des écoles chrétiennes, qu'il chargea de l'éducation des enfants du peuple, et de la touchante reconnaissance qu'ils lui témoignèrent, en mettant sur la façade de leur maison ces mots si beaux et si simples Pie VI, père des pauvres. A côté de ces actes modestes de bienfaisance, l'histoire ne doit pas omettre la magnificence que Pie VI déployait dans les cérémonies pontificales. Clément XIV les avait trop négligées, et le peuple romain avait fait entendre des murmures. Ce fut une leçon pour son successeur. Au reste, nul ne pouvait, mieux que Pie VI, rendre l'éclat et la dignité convenables aux devoirs du chef suprême de la religion. Il était encore, dans un âge avancé, un des plus beaux hommes de son temps. Une physionomie noble et spirituelle, une taille haute et développée dans les plus belles proportions, donnaient à toutes ses manières, à tous ses mouvements, une grâce, une majesté qui excitaient au plus haut degré l'affection et le respect. Le peuple s'écriait souvent : Qu'il est beau! qu'il est beau! Il est aussi beau qu'il est saint! Un écrivain anglais, John Moore, et un luthérien qui l'avaient vu officiant pontificalement, l'un à Rome et l'autre à Vienne, en parlent dans leurs Mémoires avec un enthousiasme d'autant moins suspect qu'ils semblent se le reprocher comme une espèce d'idolatrie. Ce qu'il faut observer dans ces récits, où l'on ne serait pas étonné que deux écrivains protestants eussent mêlé quelques réflexions un peu critiques, c'est qu'au milieu de ces ravissements, pour lesquels ils trouvent à peine des expressions qui répondent à leurs pensées, ils ne parlent jamais qu'avec un profond respect « de la piété du souverain Pontife, de ces larmes de componction qui baignaient ses yeux élevés vers le ciel, de cette dévotion fervente qui se peignait dans toute son attitude et dont il était impossible, disent-ils, qu'on ne fût pas profondément ému. » Ce sentiment les domine,

1 Biogr. univers., t. 34, art. Pie VI, par Desportes-Boscheron.

les entraîne presque malgré eux; et c'est un hommage qu'ils se plaisent à rendre au culte imposant et sublime de l'Eglise romaine1. Chaque jour Pie VI célébrait les saints mystères et y semblait abîmé devant la majesté suprême; ensuite il allait faire sa prière au tombeau de saint Pierre, et là, confondu dans la foule innombrable des fidèles, ne se distinguait que par son recueillement, sa ferveur, son humilité profonde; au sortir de l'église, F'après-midi, pour sa récréation, il se faisait conduire à celle des églises de Rome où le saint-sacrement était exposé. Après y être resté une demi-heure en adoration, il allait reprendre ses occupations ordinaire.

Telle est la série des souverains Pontifes que Dieu donna à son Eglise, de 1750 à la fin du dix-huitième siècle. Ils étaient tous nés en Italie. Ce pays eut encore la gloire de produire à la même époque plusieurs vertueux personnages dont Dieu a manifesté la sainteté par des miracles.

Saint Jean-Joseph de la Croix vint au monde le quinze août 1652, dans la ville d'Ischia, située dans une île du même nom, à peu près en face de la ville de Naples. Le même jour, fête de l'Assomption de la sainte Vierge, il reçut le baptême et le nom de Charles Cajétan. Ses parents appartenaient à une famille noble, mais se distinguaient encore bien plus par une haute piété. Ils avaient beaucoup d'enfants; cinq de leurs fils quittèrent le monde pour se retirer dans des cloîtres et ne vivre que pour Dieu. L'un d'eux surtout, Charles Cajétan, donna dès ses premières années les plus belles espérances. On ne remarquait en lui rien de puéril ; toujours amical envers tout le monde, jamais il ne montra de l'humeur envers qui que ce fût. Il avait une dévotion particulière pour la bienheureuse mère de Dieu, en l'honneur de laquelle il avait dressé un petit autel dans un endroit retiré de la maison de son père, où il venait sans cesse lui adresser ses prières avec une confiance toute filiale. Dès qu'il fut en âge de comprendre l'importance et la grandeur des sacrements, ses parents le firent approcher de ceux de la pénitence et de la sainte communion. Chaque semaine, il se préparait à les recevoir par le silence, le jeûne et des pratiques de pénitence; car dès-lors il avait soin de coucher sur un lit très-dur. Il ne se départit plus de ce genre de vie, lorsqu'à un âge plus avancé il se voua à l'étude des sciences. Toute offense de Dieu l'affligeait profondément, et tous ses efforts, ses paroles et ses exhortations tendaient à éloigner du péché ses compagnons d'étude, qui le regardaient tous comme un modèle de pureté et de toutes les vertus.

1

' Biogr. univ., t. 34, art. Pie VI, par Desportes-Boscheron.

Dieu voulut avoir cette belle âme toute à lui dans la fleur de sa jeunesse. Aussi Cajétan, à peine âgé de dix-sept ans, redoubla-t-il d'efforts pour mener une vie plus austère, et mériter, par des prières ferventes, les lumières de l'Esprit-Saint. Précisément à cette époque vint d'Espagne en Italie le serviteur de Dieu, Jean de Saint-Bernard, Franciscain déchaussé, de la réforme de saint Pierre d'Alcantara, pour propager dans cette contrée cet ordre sévère. Quand il arriva dans la patrie de notre saint, il le transporta tellement par ses discours et par ses vertus, que celui-ci prit aussitôt la résolution de s'attacher à lui et ne conserva plus aucun doute sur la volonté de Dieu à cet égard. Il partit donc aussitôt pour Naples, où il sollicita avec ardeur son admission dans l'ordre, et après avoir reçu l'habit, il échangea son nom contre celui de Jean-Joseph de la Croix.

Ses supérieurs décidèrent qu'il ferait son noviciat à Naples et qu'il y prononcerait ses vœux solennels. Ses pratiques de dévotion, à cette époque, présentaient un caractère d'austérité extraordinaire: il jeûnait tous les jours, ne dormait que peu d'heures et portait partout avec lui, selon les paroles de saint Paul, la mortification de Jésus-Christ dans son esprit et dans son cœur. Il s'étudia particulièrement à imiter le fondateur de son ordre, saint François, ainsi que saint Pierre d'Alcantara. S'il observait avec ponctualité les commandements de Dieu et de l'Eglise, il n'était pas moins exact dans l'accomplissement des moindres règles de son ordre. Un de ses frères se distinguait-il par la pratique plus élevée de quelque belle vertu, il s'efforçait aussitôt de l'égaler, non par un sentiment de jalousie, mais pour profiter de la grâce que Dieu lui faisait en lui mettant de si beaux exemples sous les yeux.

Quand il eut fait ses vœux, le vingt-cinq juin 1671, ses supérieurs lui donnèrent la mission difficile et pénible d'aller fonder un nouveau couvent dans le Piémont, à Afile. Le saint ne recula devant aucune fatigue pour mener à heureuse fin cette grande entreprise; il y consacra toutes ses forces et tous ses soins. Il alla même si loin, qu'il voulut que cette maison, la première de cet ordre fondée en Italie, non-seulement rivalisât avec celle de Pedroso, établie dans la province d'Estramadure en Espagne, par saint Pierre d'Alcantara, mais encore qu'elle l'emportât sur elle par la sévérité de la règle. Non content d'y voir la sainte vertu de pauvreté observée dans toute sa rigueur, il voulut encore que, selon l'esprit des premiers couvents, le silence le plus absolu y régnât, que les règles de l'ordre y fussent observées avec la plus grande ponctualité, et que dans le chant des heures, qui avait lieu avec de longues pauses, on introduisît d'autres prières.

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