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des jeûnes, des prières, des œuvres d'expiation, en vue du salut de la foi et de l'église de France.

Cependant Louis XVI avait secrètement référé à Rome de la constitution civile du clergé, qu'on le pressait de sanctionner par sa signature. En faisant connaître au souverain Pontife les dangers qui allaient éclater sur l'église de France en cas de refus, il l'avait respectueusement adjuré d'examiner si des concessions n'étaient pas possibles ou opportunes. Voici dans quels termes Pie VI lui répondit :

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<< A notre très-cher fils en Jésus-Christ, salut et bénédiction apostolique. Quoique nous soyons loin de douter de la ferme et profonde résolution où vous êtes de rester attaché à la religion catholique, apostolique et romaine, au Saint-Siége, centre de l'unité, à notre personne, à la foi de vos glorieux ancêtres, nous n'en devons pas moins appréhender que, les artifices adroits et un captieux langage surprenant votre amour pour vos peuples, on ne vienne à abuser du désir ardent que vous avez de mettre l'ordre dans votre royaume, et d'y ramener la paix et la tranquillité. Nous qui représentons Jésus-Christ sur la terre, nous à qui il a confié le dépôt de la foi, nous sommes spécialement chargé du devoir, non plus de vous rappeler vos obligations envers Dieu et envers vos peuples, car nous ne croyons pas que vous soyez jamais infidèle à votre conscience, ni que vous adoptiez les fausses vues d'une vaine politique; mais, cédant à notre amour paternel, de vous déclarer et de vous dénoncer de la manière la plus expresse que, si vous approuvez les décrets relatifs au clergé, vous entraînez par cela même votre nation entière dans l'erreur, le royaume dans le schisme, et peut-être vous allumez la flamme dévorante d'une guerre de religion. Nous avons bien employé jusqu'ici toutes les précautions pour éviter qu'on ne nous accusat d'avoir excité aucun mouvement de cette nature, n'opposant que les armes innocentes de nos prières auprès de Dieu; mais si les dangers de la religion continuent, le chef de l'Eglise fera entendre sa voix; elle éclatera, mais sans compromettre jamais les devoirs de la charité.

> Votre majesté a, dans son conseil, deux archevêques, dont l'un, pendant tout le cours de son épiscopat, a défendu la religion contre les attaques de l'incrédulité; l'autre possède une connaissance approfondie des matières de dogme et de discipline. Consultez-les; prenez avis de ceux de vos prélats en grand nombre, et des docteurs de votre royaume, distingués tant par leur piété que par leur savoir. Vous avez fait de grands sacrifices au bien de votre peuple; mais s'il était en votre disposition de renoncer même à des

droits inhérents à la prérogative royale, vous n'avez pas le droit d'aliéner en rien ni d'abandonner ce qui est dû à Dieu et à l'Eglise, dont vous êtes le fils aîné.

> Prenons confiance dans la Providence divine, et, par un attachement inviolable à la foi de nos pères, méritons d'en obtenir le secours dont nous avons besoin. Quant à nos dispositions particulières, nous ne pouvons désormais être sans inquiétude et sans douleur, à moins de savoir la tranquillité et le bonheur de votre majesté assurés. C'est dans ce sentiment d'une affection toute paternelle que nous vous donnons, du fond de notre cœur, à votre majesté, ainsi qu'à votre auguste famille, notre bénédiction apostolique. Donné à Rome, à Sainte-Marie-Majeure, le dix juillet 1790, la seizième année de notre pontificat. >>

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Les deux prélats aux conseils desquels le pape Pie VI priait le roi de s'en rapporter, eurent tous deux la pusillanimité d'engager Louis XVI à souscrire aux volontés de l'assemblée constituante. L'un d'eux, M. de Pompignan, archevêque de Vienne, en mourut de douleur et de remords; et l'autre, M. de Cicé, archevêque de Bordeaux, publia plus tard une humble et pieuse rétractation 1. Le vingt-quatre août 1790, Louis XVI apposa donc sa signature sur la constitution civile du clergé, et sanctionna l'établissement du schisme dans le royaume qui, jusqu'alors, s'était honoré du nom de très-chrétien.

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Deux archevêques, l'élite du clergé de France, conseillant à Louis XVI de sanctionner le schisme de son royaume, malgré l'avertissement contraire du Pape, voilà un fait étrange. D'où peut venir tant d'ignorance ou tant de pusillanimité? Nous avons vu plus d'une fois les évêques courtisans de la France moderne opposer aux Papes les libertés de l'église gallicane; libertés envers le Pape, nous a dit Fénélon, servitudes envers le roi; libertés par suite desquelles le roi est plus maître de l'Eglise en France que le Pape. Or, l'assemblée constituante avait concentré en elle tous les pouvoirs de la nation et du roi. Donc elle avait plus de pouvoir que le Pape pour réformer et réglementer l'église gallicane. Voilà comme ont pu raisonner les deux archevêques pour se faire illusion. Autre malheur. Par suite de ces préventions nationales, bien des pasteurs en France se dispensaient de parler à leurs ouailles de leur Pasteur suprême, de sa souveraine autorité, de l'obéissance que lui doivent et pasteurs et ouailles, et rois et peuples. Nous connaissons telle ville de quinze mille âmes, où, à l'époque du schisme

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de 1790, jamais les fidèles n'avaient ouï leurs pasteurs leur dire un mot de notre Saint-Père le Pape, de son autorité comme vicaire de Jésus-Christ, de la soumission filiale que tous les chrétiens lui doivent. Aussi, au moment du péril, se trouvèrent-ils comme des brebis errantes, sans guide et sans règle; et, sur ce grand nombre, à peine s'en rencontra-t-il trois cents qui, à la longue et par des voies indirectes, apprirent de quoi il était question.

Cependant Louis XVI écrivit au Pape pour le prier de confirmer, au moins provisoirement, quelques-uns des articles de la constitution civile du clergé. Le Pontife assembla des cardinaux à ce sujet, et résolut, sur leur avis, de consulter les évêques de France, comme plus à portée de connaître et toute la suite des décrets et les moyens à prendre dans ces conjonctures difficiles. Le trente octobre, trente évêques de France signèrent un écrit devenu célèbre, sous le titre d'Exposition des principes sur la constitution civile du clergé. L'auteur, M. de Boisgelin, archevêque d'Aix, et l'un des signataires, y avait défendu les vrais principes de l'Eglise, sans plaintes, sans amertume, et avec une modération et une solidité qui eussent peut-être ramené des esprits moins prévenus. L'Exposition réclamait la juridiction essentielle à l'Eglise, le droit de fixer la discipline, de faire des règlements, d'instituer des évêques et de leur donner une mission, droit que les nouveaux décrets lui ravissaient en entier. Elle n'oubliait pas de se plaindre de la suppression de tant de monastères, de ces décrets qui fermaient des retraites encore souvent consacrées à la piété, qui prétendaient anéantir des promesses faites à Dieu, qui apprenaient à parjurer ses serments, et qui s'efforçaient de renverser des barrières que la main de l'homme n'a point posées. Les évêques demandaient en finissant qu'on admit le concours de la puissance ecclésiastique pour légitimer tous les changements qui en étaient susceptibles, qu'on s'adressât au Pape, sans lequel il ne se doit traiter rien d'important dans l'Eglise; qu'on autorisât la convocation d'un concile national ou de conciles provinciaux; qu'on ne repoussât pas toutes les propositions du clergé; enfin, qu'on ne crût pas qu'il en était de la discipline de l'Eglise comme de la police des états, et que l'édifice de Dieu était de nature à être changé par l'homme. Cent dix évêques français ou ayant des extensions de leurs diocèses en France, se joignirent aux trente évêques de l'assemblée, et l'Exposition des principes devint un jugement de toute l'église gallicane. Beaucoup d'évêques publièrent en outre des instructions pastorales. Des ecclésiastiques instruits les secondèrent par des ouvrages utiles et solides. Des laïques mêmes entrèrent dans la lice, et l'on fut surtout

étonné de voir des jansénistes repousser la doctrine de leur parti, et attaquer le rédacteur de la constitution, l'avocat janséniste Camus, par ses propres armes.

L'assemblée constituante, ayant la sanction du roi pour son œuvre, décréta, le vingt-sept novembre 1790, que tous les évêques et curés qui n'auraient pas fait, sous huit jours, le serment de fidélité à la constitution civile du clergé, seraient censés avoir renoncé à leurs fonctions. Il fut dit aussi que, sur le refus du métropolitain ou de l'évêque le plus ancien, de consacrer les évêques élus, cette consécration serait faite par quelque évêque que ce fût, et que, quant à la confirmation et institution canonique, l'administration civile indiquerait à l'élu un évêque quelconque auquel il s'adresserait. Ces énormités étaient capables d'ouvrir les yeux aux plus aveugles.

Dès lors ce fut comme un jugement de Dieu; dès lors commença la séparation des uns d'avec les autres; dès lors commença l'épuration du clergé français et la régénération de la France catholique. Le vingt-sept décembre 1790, Henri Grégoire, curé d'Emberménil, connu par l'exaltation de ses principes révolutionnaires, donna l'exemple de la défection. Il monta à la tribune, prêta le serment du schisme, et prononça un discours pour justifier son scandale. Comme un autre ange apostat, il fut suivi de soixante de ses confrères qui siégeaient au côté gauche. Trente-six ecclésiastiques se joignirent depuis à lui, et deux évêques, l'évêque d'Autun, Talleyrand, et celui de Lydda, Gobel, suffragant de Bâle pour la partie française du diocèse.

Le quatre janvier 1791 avait été fixé aux ecclésiastiques de l'assemblée nationale pour la prestation du serment de défection et de schisme. Autrefois, sous Néron et Dioclétien, le peuple païen, assemblé au théâtre, s'écriait : Les chrétiens aux lions! Aux lions les chrétiens! Le quatre janvier 1791, au moment que le président de l'assemblée allait faire l'appel nominal des ecclésiastiques jusquelà fidèles, un groupe de misérables s'écria: A la lanterne! A la lanterne les évêques et les prêtres qui ne feront pas le serment! — C'est qu'on pendait aux crochets des lanternes publiques ceux qu'on ne prenait pas le temps de réserver à la guillotine. Quelques laïques de l'assemblée demandèrent qu'on mit fin à ces clameurs sanguinaires, afin que le clergé pût répondre au moins avec une apparence de liberté. « Non, messieurs, dirent les ecclésiastiques fidèles, ne vous occupez pas de ces clameurs d'un peuple qu'on abuse. Son erreur et ses cris ne dirigeront pas notre conscience...>> Le président appelle d'abord M. de Bonnac, évêque d'Agen. « Mes

sieurs, dit le prélat au milieu du plus profond silence, les sacrifices de la fortune me coûtent peu; mais il en est un que je ne saurais faire, celui de votre estime et de ma foi ; je serais trop sûr de perdre l'une et l'autre, si je prêtais le serment qu'on exige de moi. » Cette réponse captive un instant l'admiration. Le président appelle M. Fournet, curé du même diocèse. « Messieurs, dit à son tour ce digne prêtre, vous avez prétendu nous rappeler aux premiers siècles du christianisme; eh bien! avec toute la simplicité de cet àge heureux de l'Eglise, je vous dirai que je me fais gloire de suivre l'exemple que mon évêque vient de me donner. Je marcherai sur ses traces, comme le diacre Laurent marcha sur celles de Sixte, son évêque; je le suivrai jusqu'au martyre. » Ces paroles si belles provoquèrent des grincements de dents parmi le côté gauche. M. Leclerc, curé du diocèse de Séez, se lève à l'appel du président : << Je suis né catholique, apostolique et romain ; je veux mourir dans cette foi; je ne le pourrais pas en prêtant le serment que vous me demandez. » A ces mots, la gauche éclate de fureur, et demande qu'on mette fin à ces sommations individuelles. M. de Saint-Aulaire, évêque de Poitiers, craignant de manquer une si belle occasion de témoigner sa foi, s'avance vers la tribune malgré son grand âge, et dit: < Messieurs, j'ai soixante-dix ans; j'en ai passé trente-trois dans l'épiscopat; je ne souillerai pas mes cheveux blancs par le serment de vos décrets, je ne jurerai pas. » A ces mots, tout le clergé de la droite se lève, applaudit et annonce qu'il est tout entier dans les mêmes sentiments.

L'assemblée, qui avait vu le roi plier sous ses décrets, est étonnée de cette fermeté des évêques et des prêtres. Les députés quittent leurs siéges, se réunissent en groupe, se dispersent de nouveau, ne savent à quel parti s'arrêter. Au dehors retentissent les cris: A la lanterne tous les évêques et tous les prêtres qui ne jureront pas ! Ceux-ci, tranquilles et sereins, demandent que l'on continue l'appel nominal. Enfin, le jureur Grégoire monte à la tribune, et s'efforce de persuader au clergé de la droite que l'intention de l'assemblée n'a jamais été de toucher à la religion, à l'autorité spirituelle ; qu'en faisant le serment, on ne s'engage à rien de tout ce qui serait contraire à la foi catholique. « Nous demandons, répondent les évêques et les prêtres de la droite, que cette explication soit d'abord convertie en décret. » L'assemblée s'y refuse, et ordonne qu'au lieu d'interpellations individuelles, on leur fasse une sommation générale. Le président dit alors : « Que ceux des ecclésiastiques qui n'ont pas encore prêté leur serment se lèvent et s'avancent pour le prêter. Pas un seul ne s'avance, pas un seul ne se lève.

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