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ce caractère se trouvera sans cesse navré, humilié, I porte l'empreinte du caractère divin; on ne doit donc confondu par la rencontre directe et accablante de cet pas être surpris que ceux dont les principes sont opposés esprit tout-puissant qui l'enveloppera de toutes parts. à ce caractère soient aussi opposés à l'Évangile. Le ChrisL'on doit se rappeler ici que le gouvernement divin ne tianisme anticipe sur les découvertes de la mort. Il souborne pas son action, comme les autorités humaines, à lève ce voile qui cache Dieu à notre vue; il fait agir le la superficie des choses; il ne se contente pas d'une sou-système du monde spirituel sur notre conscience; il nous mission extérieure, il va droit à la pensée; c'est aux sentimens, c'est à la volonté qu'il adresse ses sommations; il pénètre dans ces replis de l'âme où, ici-bas, nous mettons souvent notre orgueil et notre plaisir à nourrir des sentimens de mépris et de haine contre cette même supériorité de force qui nous a enchaînés, terrassés et réduits au silence.

Le Chrétien adoptera naturellement cette manière de voir, comme l'expression de la vérité céleste; et celui-là même qui rejette la révélation, s'il croit à l'existence d'un être tout-puissant et moralement parfait, et s'il ne trouve aucune invraisemblance à supposer que le mé- | lange du bien et du mal, ainsi que le système d'éducation morale qui se lie à ce mélange, cesseront avec notre vie actuelle, doit admettre la probabilité de notre hypothèse.

offre un exemple du gouvernement suprême et intérieur de la Divinité; il nous montre de plus près son carac tère dans ses véritables proportions, et nous fait voir ainsi les points sur lesquels nous en différons. Il nous condamne par l'autorité de Dieu; il nous sourit et nous attire à lui par sa pureté inaltérable. L'homme qui ré pugne à ees jouissances spirituelles rejettera le Christianisme; il replacera un voile entre le Ciel et lui; il s'efforcera d'oublier les redoutables secrets que ce voile nous cache. Peut-être, hélas ! ne sortira-t-il de sa fatale illusion qu'en se trouvant face à faee avec le Dieu dont il a négligé les avertissemens et méprisé les offres d'amitié, offres qui, si elles avaient été acceptées, auraient mis sa volonté en accord avec cette volonté souveraine qui régit l'univers, et l'auraient rendu capable de prendre un intérêt de joie et de sympathie à tous les parties de l'administration divine.

Je parlerai plus tard de la douceur attrayante et toute puissante du caractère de Dieu, tel qu'il nous est révélé dans sa parole, et des invitations qu'il fait aux pécheurs; mais je voudrais maintenant attirer l'attention sérieuse de mes lecteurs sur cette considération, qu'une discordance de principes avec le régulateur de l'univers ne peut manquer d'entraîner un certain degré de peine et de malheur. Quoiqu'il existe peu d'esprits sans doute qui trouvent de la difficulté à admettre jusqu'à un certain

Nous voyons ainsi comment des hommes vicieux peuvent jouir d'un certain degré de contentement dans ce monde et cependant être malheureux dans l'autre, sans qu'il soit nécessaire de supposer une grande altération dans le système général du gouvernement de Dieu et sans faire entrer aucun châtiment positif dans les causes de leur misère. L'on peut observer que cette manière d'envisager la question donne au vice une forme, une étendue et une puissance très différentes de celles qui lui sont généralement attribuées parmi les hommes. Nous avons ici-bas principalement à faire aux choses ex-point la vérité de cette remarque, et quoiqu'il n'y ait térieures, et c'est pour cela que le nom de vice s'applique plus communément à la conduite apparente qu'au caractère intime. Mais, dans le monde des esprits, il n'en est pas ainsi. Là, une dissonnance avec le père des esprits, soit dans le principe, soit dans l'objet, constitue le vice et s'identifie avec le malheur. Ainsi, un homme qui a vécu dans ce monde avec utilité et dignité, mais d'après des principes différens de ceux du caractère divin, doit sentir, quand il se trouve sous l'action directe de ce caractère, un manque d'harmonie, une opposition, qui ne peuvent que troubler ou exclure le bonheur. Ainsi encore, les effets de l'orgueil, la vanité ou l'égoïsme, quand ils sont combinés avec la prudence, peuvent être souvent très avantageux dans cette vie; et cependant, si ces principes sont en opposition avec le caractère de Dieu, ils rendent les esprits sur lesquels ils règnent incapables de participer au joies du ciel. L'Écriture dit que les joies du ciel consistent dans une ressemblance avec Dieu ou dans une soumission joyeuse et pour ainsi dire sympathique à sa volonté; et comme les hommes suivent naturellement F'impulsion de leurs propres penchans sans les rapporter à la volonté divine, il est évident qu'un changement total de principes est nécessaire pour nous rendre capables de goûter le bonheur spirituel.

C'est pour produire ce changement indispensable et salutaire que l'Évangile nous a été envoyé du ciel. Il

rien de compliqué dans le raisonnement qui s'y rattache, une conception distincte du principe étant de la première importance dans toutes les manières de considérer la religion, je l'expliquerai ici par une comparaison tirée des affaires plus palpables et plus généralement comprises du monde matériel qui nous entoure. Une période de l'histoire d'Angleterre nous fournira pour cet objet des exemples frappans. Cette époque se distingue entre toutes les autres par les contrastes remarquables qu'elle offre dans les sentimens et les principes politiques des différentes classes de la nation; elle est pour cela particulièrement propre à démontrer l'influence qu'exerce sur le bonheur une opposition de principes entre le pouvoir qui gouverne et une partie de ses sujets.

Il est aisé d'imaginer avec quelle satisfaction grave et sévère un zélé partisan de Cromwell devait contempler l'appareil de solennité rigide et formaliste qui régnait et dans le gouvernement et parmi le peuple d'Angleterre, pendant le protectorat. Mais d'où naissait une telle satisfaction? Assurément ce ne pouvait être que de l'accord qui existait entre les habitudes personnelles de cet homme et celles de l'autorité suprême. Ses vues, ses inclinations coïncidaient en tous points avec celles du gouvernement; chaque mesure de l'administration lui était agréable, parce qu'elle était en fait une expression de sa propre volonté. Il se trouvait ainsi dans un état

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de bonheur politique, et, s'il n'y avait eu dans le monde ou dans l'éternité d'autre gouvernement que celui de la république, il aurait été parfaitement et constamment

heureux.

les actions extérieures, tandis que le trait le plas saillant de l'autre est le principe d'où les actions dériveat. Ainsi, dans l'exemple que nous venons de donner, on peut aisé— ment supposer qu'un grand nombre de motifs divers agissaient sur les partisans de Cromwell, et que la gravité solennelle de la république pouvait captiver différens esprits, d'après différens principes. Les gens pieux pouvaient l'aimer par de certaines idées de religion; quelques-uns par l'idée fanatique que cette forme extérieure servait à une sorte d'expiation des péchés secrets; d'autres, par goût pour la rudesse républicaine; d'autres enfin, par haine pour le papisme et la famille des Stuarts. Or, ces principes différaient tous par leur na

ques égards se ressembler; en sorte que le bonheur des citoyens ne dérivait point d'une sympathie de principes avec le gouvernement, mais d'une coïncidence dans les effets de leurs principes. Si l'autorité du

Maintenant, conduisons le même individu jusqu'au temps de Charles II; plaçons-le dans le voisinage de cette cour brillante et dissolue. Nous pouvons nous le figurer dans cette situation, marchant à pas lents, une sombre tristesse empreinte sur tous ses traits. L'amertume de son cœur est augmentée par la gaîté générale: la rencontre fréquente d'opinions et d'habitudes qui sont en opposition avec les siennes le mettent dans un état continuel d'irritation. Il se retire à une plus grande distance du siége du gouvernement, et tâche de se déroberture, quoique leurs résultats extérieurs pussent à quelà ces pénibles conflits dans le sein de sa famille. Là, tout est réglé d'après ses principes et selon son goût; il jouit donc d'un degré tolérable de félicité, troublé cependant de temps à autre par les nouvelles publiques, par des rumeurs qui lui font craindre d'être arrêté comme sus-gouvernement se fût étendue sur les esprits aussi bien pect, par les visites importunes des officiers du gouvernement, quelquefois même par un manque de sympathie politique avec ses amis ou les membres de sa propre famille. Tout à coup son repos est détruit par un ordre de la cour, qui l'arrache sa retraite et l'oblige à vivre | dans la capitale, pour être plus immédiatement sous les yeux du gouvernement. Là, il se trouve de nouveau en présence de tout ce qu'il méprise et déteste; son aversion s'accroît par l'impossibilité d'en repousser l'objet, et il apprend à nourrir avec une sorte de plaisir le sentiment de son malheur, comme le seul témoignage que son àme n'est point subjuguée. Il est, en un mot, dans un état complet de malheur politique.

L'esquisse que je viens de tracer peut être utile comme explication des lois naturelles qui font dépendre notre bonheur de notre sympathie avec le pouvoir qui nous gouverne, et comme exemple des moyens (toujours précaires) dont nous nous servous pour rétrécir notre horizon, pour éloigner de notre vue les objets qui nous causent de la peine, et nous garantir du choc des principes qui sont en opposition avec les nôtres.

Le champ de ce monde offre un grand nombre de divisions et de subdivisions séparées les unes des autres par de fortes barrières, et reconnaissant différentes autorités, ou la même autorité peut-être à des degrés différens. Ce sont autant d'abris où les hommes peuvent se réfugier, quand ils sont poursuivis par la justice ou par l'injustice de leurs semblables. Mais, aussi long-temps que nous restons sous l'empire d'une même autorité, nous pouvons bien trouver un asile momentané contre ses hostilités dans le cercle le plus étroit d'une société privée; toutefois nous sommes toujours exposés à ètre arrachés de notre retraite; et, d'après la nature des choses, notre bonheur dépend toujours plus ou moins de la volonté de ce gouvernement.

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que sur les corps, alors ceux-là seals qui auraient adhéré
à ce système sévère, précisément par les mèmes motifs
que le gouvernement, auraient été heureux et considé-
rés comme bons citoyens. La collision des principes op-
posés aurait été dans ce cas aussi violente que celle des
actions extérieures dans notre supposition. En morale,
une action ne signifie pas seulement un effet, mais un.
principe mis en pratique; ainsi, dans un gouvernement.
spirituel, tout effet qui serait produit par une passion
(l'orgueil, par exemple), quoique utile au bien public,
prendrait le nom d'action orgueilleuse, et serait con--
damné comme tel par un juge qui désapprouverait le
sentiment de l'orgueil. L'homine ne peut lire au fond-
des cœurs : il est obligé de deviner les principes par leurs
effets; mais néanmoins son jugement est toujours dé-
terminé par la nature du principe auquel il attribue ces
effets.

Supposons donc que nous fussions placés sous un gouvernement surnaturel, et que ce gouvernement fût tellement fort, que l'idée de lui résister ou de lui échapper impliquât une absurdité, il deviendrait évidemment de la plus haute importance pour nous d'en connaître exactement les principes et d'y conformer les nôtres. En effet, tant que nous ne serions pas parvenus à ce point, nous ne pourrions jouir d'aucune tranquillité; nous souffririons sans cesse de l'inquiétude de voir notre volonté entraînée malgré ses efforts par le courant d'une volonté plus puissante. Cependant, pour arriver à notre but, de grandes difficultés se présenteraient. En premier lieu, il pourrait n'être pas très aisé de découvrir les principes précis de l'administration. Il y a peu d'actions qui ne puissent dériver d'un grand nombre de principes différens; il faudrait donc observer long-temps les faits et en tirer beaucoup d'inductions, pour arriver à une conclusion satisfaisantes et en second lieu, après avoir découvert ces principes, nous pourrions bien trouver qu'ils sont en opposition directe avec les nôtres.

Toutes les fois qu'on a recours au monde matériel et à ses intérêts, pour éclaircir ce qui se rapporte aux intérêts de l'esprit et à ceux du monde invisible, il est Dans de telles circonstances, ce qu'il y aurait de plus très important de se rappeler la différence frappante désirable pour l'instruction du peuple serait que le gouqui sépare les deux sujets : l'un embrasse exclusivement i verne ment incorporat tous les principes de son adminis

tration dans une suite d'actions intéressantes, dont la narration offrirait le développement clair et précis de ces principes à quiconque voudrait y prèter une attention sérieuse. Après que le gouvernement aurait agi de la sorte, il serait évidemment de l'intérêt et du devoir des sujets d'étudier avec soin l'histoire qui leur aurait été communiquée, afin de familiariser leur esprit avec les principes qui y seraient développés, d'apprendre à suivre Elle nous représente l'homme dans un état déplorable la route qui y serait tracée, et de se pénétrer, autant de péché, en donnant la masse du mal naturel qui existe que possible, des sentimens que ce document serait fait dans le monde comme une sorte de mesure de sa défecpour inspirer. Le peuple se livrerait à cette tâche avec tuosité morale; elle indique en même temps que la maplus ou moins de zèle, suivant qu'il serait plus ou moins ladie doit être très violente, puisqu'elle réclame un fortement convaincu qu'elle doit conduire au bonheur, remède aussi énergique. Cependant, le fait reconnu que et en proportion de la persuasion où il serait que cette le plus grand mal naturel ne tombe pas toujours là ou le histoire représente en effet le vrai caractère du gouver- mal moral est le plus évident, tout en faisant naître la nement. L'approbation et l'affection pourraient seules notion d'une existence future, obscurcit jusqu'à un ceramener la réussite de pareils efforts. La crainte pourrait | tain point l'idée que nous nous formons du caractère engager à la poursuite de l'objet; mais un parfait accord divin. Les notions que la religion naturelle nous donne de volonté est le résultat d'un principe plus noble. En sur la bonté de Dieu ne naissent donc pas tant d'une masupposant, pour aller plus loin, que cette harmonie de nifestation distincte et non équivoque de cette qualité, sentimens fût une des principales fins du gouvernement, que de la comparaison générale de plusieurs faits qui, alors l'obéissance des sujets, si elle ne procédait pas d'un combinés ensemble, conduisent à cette conclusion. véritable accord d'intention, ne pourrait renfermer en elle-même les élémens d'une complète harmonie, et ne remplirait point le grand objet du gouvernement.

l'auteur de la nature à réprimer et à punir le mal moral. de Cette théorie jette quelque lumière sur le caractère de Dieu et sur celui de l'homme. Elle nous montre dans la Divinité non-seulement une sollicitude générale pour le bonheur des hommes, mais son désir constant de les conduire à ce bonheur par le moyen d'un caractère moral qui a son approbation exclusive.

SECTION II.

J'ai fait ces remarques pour mieux expliquer l'objet de la révélation chrétienne, et pour montrer la nécessité de croire ce qu'elle annonce, afin que cet objet ait son plein accomplissement dans chaque cas individuel. Le but du Christianisme est de mettre le caractère de l'homme en harmonie avec celui de Dieu. Pour cette fin, il est évidemment indispensable de se former une juste idée du caractère divin. Les ouvrages de la création, les dispensations de la Providence, et les témoignages de notre conscience sont des données qui, sérieusement examinées, suffisent pour nous faire concevoir cette idée. Mais les hommes oublient le Créateur, en s'occupant sans cesse de ses ouvrages, et son caractère est tellement opposé au leur, qu'ils détournent les yeux de la contemplation d'une pureté qui les condamne. Dans les cas mèmes les plus favorables, l'idée transmise par ces lumières naturelles perd beaucoup de son effet moral par sa forme vague et abstraite.

La même remarque s'applique aussi à la notion que nous avons de la sainteté divine, ou de l'approbation exclusive que Dieu accorde à un certain caractère particulier, mais non avec autant d'étendue; car la conscience arrive ici plus directement au but que la raison n'y arrive dans l'autre cas. Les motifs qui dérivent de la comparaison dont nous venons de parler ne peuvent être aussi influens, aussi actifs que ceux qui naissent de la croyance à un fait simple et certain que nous nous représentons sans efforts, qui développe ses instructions sans obscurité, et qui nous donne une règle invariable par laquelle nous pouvons juger en tout temps des pensées et des intentions de Dieu dans ses transactions avec les hommes. La théologie naturelle devient donc presque nécessairement un sujet de spéculations métaphysiques, plutôt qu'un système de principes pratiques. Elle marque la distinction du juste et de l'injuste; mais elle n'attache pas aussi efficacement notre amour à ce qui est juste et notre haine à ce qui est injuste.

Nous pouvons observer souvent qu'il existe de la dévotion réelle parmi ceux mêmes qui professent les plus absurdes superstitions; mais il serait difficile de trouver un dévot parmi ceux qui suivent la religion naturelle. La raison en est que ces superstitions, quoiqu'elles n'aient aucun rapport avec le vrai caractère de Dieu, ont cependant quelques relations avec la constitution morale de l'homme. La religion naturelle donne sans doute une idée beaucoup plus parfaite du caractère divin; mais l'homme qui se sent coupable, et qui n'a point d'autres connaissances religieuses que celles qui lui sont fournies par sa seule raison, doit éprouver une perplexité extrême. Il croit que Dieu est miséricordieux; mais les

Quand nous considérons la création ou l'action de la Providence comme des indications du caractère divin, nous sommes frappés des apparences diverses qui s'offrent à nous. D'un côté, nous voyons la vie, la santé, le bonheur; de l'autre, la mort, la maladie, la souffrance, le malheur. La première classe de phénomènes nous fournit des argumens pour établir la bonté de Dieu; mais que ferons-nous des faits opposés? Parmi les théories inven-blessures qu'il sent dans sa conscience et le malheur tées sur ce sujet, celle qui présente le moins de difficultés est fondée sur deux supositions: premièrement, que le bien moral est la condition nécessaire d'un bonheur permanent; secondement, que le mali:eur est destiné par

dont il se voit entouré lui démontrent aussi que Dieu est d'une pureté qui n'admet aucune transaction avec le vice. Il ne sait que penser; il est tenté ou de se livrer au désespoir, ou de détourner entièrement ses pensées d'un

sujet aussi alarmant. Toutes ces situations de l'esprit, le désespoir, l'indifférence, la perplexité, sont également contraires à la santé morale de l'âme, et également opposées à cette obéissance zélée et confiante qui dérive de la reconnaissance pour la miséricorde d'en-haut, et de l'estime qu'inspire le mérite saint et généreux qui s'y offre à nous. Dans de telles circonstances, l'esprit doit naturellement chercher pour sa propre défense à rabaisser jusqu'à son niveau les règles du devoir moral, ou à se mettre dans un état d'hostilité contre le législateur qui exige de lui plus qu'il n'est disposé à accorder. C'est sous cette forme de faiblesse et de perversion que nous voyons en général la religion naturelle, et ce phénomène affligeant ne nous étonnera pas, si nous considérons que ses principes consistent en des conclusions abstraites de notre intelligence qui ne font à notre cœur aucun appel puissant.

bonheur, de mettre leurs vues en accord avec celles du pouvoir qui les gouverne. Ce sentiment devient plus fort et plus efficace, lorsque le caractère offert à leurs regards est de nature à exciter l'estime et l'affection d'un observateur désintéressé; mais son influence s'accroît encore infiniment, quand l'Ètre aimable et puissant dont ils ont à étudier la volonté leur est représenté comme un bienfaiteur exerçant sa puissance et déployant son caractère pour les rendre particulièrement heureux.

C'est ainsi que Dieu est représenté dans le NouveauTestament; et tels sont les motifs qui nous appellent à l'aimer, à lui obéir, à l'imiter. Si le caractère de Dieu est en effet tel qu'il est décrit dans l'Évangile, ceux qui rejettent l'histoire dans laquelle ce caractère est développé se privent eux-mêmes du moyen de familiariser leur esprit avec le gouvernement divin, et de mettre en harmonie avec lui leurs vues et leurs affections.

Quand on considère la beauté, la sagesse divine, qui brillent dans la forme que Dieu a choisie pour nous communiquer la connaissance de son caractère, il est impossible de ne pas être pénétré de gratitude et d'admiration. L'objet de l'Évangile est de mettre l'homme en

Une seule action, simple et intelligible, donne à l'idée du caractère moral qu'elle manifeste une vie et une puissance que ne sauraient atteindre une multitude de définitions abstraites. Ainsi, les théories abstraites de patriotisme et de vertu publique sont d'un bien petit intérêt, si on les compare avec le grand spectacle qu'of-harmonie avec Dieu; le sujet sur lequel son action fre la conduite héroïque de Régulus, quand on le voit au milieu du sénat élever seul la voix contre les propositions humiliantes de Carthage, contre ces propositions qui l'auraient rendu à la liberté, et que, par cette raison même, l'on était prêt à accepter; quand on le voit de même ne compter pour rien ni le désespoir de sa fafamille, ni les larmes de ses concitoyens pénétrés d'admiration, ni l'horreur du sort qui le menace, et retourner en Afrique, plutôt que de trabir ses devoirs envers Rome et le saint respect de la vérité.

De même les vues abstraites sur le caractère divin que nous tirons de l'observation de la nature sont, en général, plutôt des divisions de l'intelligence que des principes moraux qui influent sur les sentimens et sur la conduite; et quelque vraies qu'elles puissent être, elles sont bien loin de toucher et d'entraîner, comme lorsqu'elles sont représentées d'une manière vivante dans l'histoire d'une action déterminée et intelligible.

Ainsi, pour aider notre faiblesse et pour conformer ses instructions aux principes de notre nature, Dieu a daigné nous présenter une intéressante série d'actions dans lesquelles son caractère moral est pleinement et clairement démontré, du moins en ce qui nous concerne. Dans cette narration, la tendresse la plus engageante, la plus touchante bonté, se combinent admirablement avec la pureté la plus parfaite; tous les traits de cette histoire font un appel si pressant, si irrésistible à notre estime, à notre gratitude, à notre repentir, à notre intérêt, que celui qui a la conviction de sa réalité possède en elle un principe efficace et puissant qui subjugue son esprit et le met en harmonie avec la volonté du GrandÊtre dont le caractère est ainsi représenté.

La peinture du caractère d'une autorité souveraine, quel que soit ce caractère, intéresse toujours fortement l'attention de ses sujets: ils ne peuvent manquer de sentir combien il leur importe, et cela pour leur propre

s'exerce est donc le cœur humain, dans les diverses conditions où il peut se trouver. Il s'adresse au savant et à l'ignorant, au sauvage et à l'homme civilisé, à celui dont les mœurs sont pures et à l'être dépravé; il parle à tous précisément le même langage.

Quel est donc ce langage universel ? Ce ne peut être celui des discussions métaphysiques, ou ce qu'on appelle le raisonnement abstrait; car il ne serait alors intelligible que pour le petit nombre, et son influence pratique ne s'étendrait qu'à un plus petit nombre encore.

Il faut que les qualités morales auxquelles ce langage s'adresse soient de nature à être, en grande partie, indépendantes de l'état de civilisation ou de barbarie; tel il est aussi en réalité. Il s'adresse précisément aux principes que Hume désigne comme « des espèces d'instincts << naturels, que le raisonnement, ni aucune opération de « la pensée, ne serait capable de produire ou d'empêcher << d'exister 1. »Ses argumens consistent en une narration de faits; et si l'on croit fermement à la vérité de ces faits, leur action sur notre caractère découle nécessairement de cette croyance. L'Évangile nous offre l'image d'un amour merveilleux, pour exciter notre reconnaissance; d'un mérite saint et sublime, pour attirer notre estime et notre vénération; il nous offre une vue du danger, pour en inspirer la crainte; un refuge, pour nous donner la sécurité et la joie; enfin une gloire éternelle, pour animer et soutenir jusqu'à la fin notre espérance.

SECTION III.

Ce qui me paraît constituer une religion raisonnable, c'est qu'il y ait une connexion directe et naturelle entre les doctrines qu'elle enseigne et le caractère moral qu'elle cherche à développer. Si la croyance aux doctrines ne

Recherches sur l'entendement humain, sect. 5, 1re partie.

tend pas à inspirer au disciple plus de zèle et d'exacti- | ché sous un déguisement, se rendit dans le camp entude dans l'accomplissement de ses obligations morales, il s'é'ève des doutes légitimes sur la vérité de cette religion. En d'autres termes, les doctrines doivent s'accorder avec les préceptes et renfermer dans leur substance même des motifs pressans de mettre ces préceptes en pratique; car, s'il n'en était pas ainsi, elles seraient inutiles. Que m'importe l'histoire d'un autre monde, si elle n'a aucun rapport intelligible avec mes devoirs ou avec mon bonheur!

Si nous appliquons cette règle aux religions que divers peuples se sont créées, nous y trouverons peu de sujets d'approbation et beaucoup de sujets d'étonnement et de pitié. Les peuples qui ont le plus excellé dans les arts, la littérature et la politique, sont tombés sur ce point dans l'erreur la plus déplorable. Leurs maximes morales pouvaient être bonnes, mais ces maximes avaient autant de relation avec leurs doctrines religieuses qu'avec l'histoire de l'astronomie. Parmi les aventures de Jupiter, de Brama ou d'Osiris, quelle est celle qu'on pouvait présenter aux hommes pour faire naître en eux un noble sentiment ou pour les exciter à une belle action? La force des préceptes moraux était plutôt amoindrie qu'augmentée par les faits de la mythologie. On trouve plusieurs excellens préceptes dans la religion de Mahomet, mais elle ne contient aucun éclaircissement sur le caractère de Dieu qui surpasse ou égale même la religion naturelle dans l'appui qu'elle prête à la morale. Loin de là, l'un des dogmes les plus importans qu'ait enseignés Mahomet, celui d'une vie future, doit, vu la forme sous laquelle il l'a présenté, contrarier l'action de ses préceptes moraux. Il décrit cette vie future comme un état dans lequel on jouira de tous les plaisirs des sens, sans jamais éprouver de satiété; et cependant il prêche la tempérance et l'abnégation de soi-même. Dès lors tous les sacrifices inspirés par la croyance à sa doctrine sont purement extérieurs, car le principe, réel de la tempérance ne saurait naître de l'espoir des excès auxquels on pourra se livrer dans un autre temps. Les systèmes philosophiques ne sont pas plus exempts de reproche d'absurdité que les superstitions populaires. Qui pourrait lire l'ouvrage de Cicéron sur la nature des dieux, sans reconnaître la justesse de la sentence prononcée par l'apôtre contre cette classe de raisoneurs : « En se pro« clamant des sages, ils sont devenus fous. >>

Comme les principes et les sentimens naturels auxquels s'adresse la religion sont précisément les mêmes que ceux que nous mettons continuellement en pratique dans les affaires de ce monde, nous devons nous attendre à trouver de la ressemblance entre les doctrines d'une religion véritable et les moyens et les argumens par lesquels un homme vertueux acquiert de l'influence sur le caractère et la conduite de ses semblables. Quand un homme en invite un autre à faire une chose, voilà le précepte; quand il appuie sa demande par quelques moyens de persuasion, voilà la doctrine. Les Athéniens étant en guerre avec les Héraclides, l'oracle déclara que le peuple dont le roi mourrait le premier sortirait victorieux du combat. Aussitôt que cet oracle fut connu, Codrus, ca

nemi, et livra volontairement sa vie, en se battant contre un soldat qui le tua sans le connaître. Les Athéniens envoyèrent redemander le corps de leur roi, et alors le souvenir de l'oracle effraya si fort les Héraclides, qu'ils s'enfuirent en désordre. Maintenant, supposons que l'intention de Codrus fût d'inculquer aux Athéniens le principe du patriotisme. S'il eût simplement publié une proclamation dans laquelle il eût commandé à tous les citoyens de préférer à leur propre vie les intérêts de leur pays, il leur aurait donné un précepte moral, mais sans doctrine correspondante. S'il eût joint à cette proclamation des promesses de biens et d'honneurs, en retour de l'obéissance, c'eût été ajouter au précepte une doctrine extrêmement puissante; néanmoins cette doctrine aurait produit plutôt des actions courageuses que des sentimens et des principes patriotiques: la vanité, l'avarice auraient pu gagner les récompenses promises à l'amour de la patrie. Mais si Codrus désirait exciter et vivifier le principe du patriotisme dans le cœur de ses concitoyens, il fit choix du plus éloquent et du plus irrésistible de tous les argumens, en sacrifiant sa vie pour eux; car il enchaîna leur admiration et leur gratitude à l'esprit qui l'avait animé, et il les pénétra de son amour pour cette patrie dont il s'était fait le représentant et la rançon.

C'est un fait surprenant et néanmoins incontestable, que nous sommes comparativement peu affectés par les vérités abstraites en morale. Les cris d'un enfant excitent plus d'émotion dans presque toutes les âmes que vingt pages de raisonnemens sans réplique. Une connaissance instinctive de ce fait nous guide dans nos relations avec nos semblables, et celui qui a formé le cœur de l'homme a prouvé la vérité de sa parole révélée, en se montrant instruit des moyens les plus efficaces de communiquer à ses créatures la persuasion et l'enseignement. Il me paraît donc utile d'entrer dans de plus grands développemens sur l'analogie qui existe entre les voies persuasives de l'Evangile et les argumens reconnus pour les plus énergiques qui puissent être adressés aux sentimens humains, dans la question des intérêts de l'humanité.

Représentons-nous une réunion d'hommes voyageant le long du rivage de la mer. L'un d'eux, connaissant mieux le terrain que ses compagnons, les avertit qu'ils approchent de sables mouvans, et leur montre une bouée qui indique un passage dangereux. Ils ne voient cependant pas grand sujet de s'alarmer; ils désirent avancer, et ne peuvent se résoudre à faire un long circuit pour éviter ce qui ne leur paraît qu'un péril imaginaire; ils rejettent donc le conseil de leur ami, et poursuivent leur route. Dans cette circonstance, à quel argument cet ami aura-t-il recours? Quel moyen de persuasion pourra-t-il imaginer, pour imprimer aux voyageurs une forte conviction de la réalité du danger et de la bienveillance désintéressée de celui qui les en avertit? Les paroles sont restées sans effet; il doit tenter une autre méthode : il doit agir. C'est ce qu'il fait. Ne voyant plus d'autre moyen de les persuader, il les prie d'attendre un seul instant, jusqu'à ce qu'ils aient vu la vérité de ses avertis

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