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pérateur; nous voulons enfin obtenir ce retour en batterie avec une vitesse à peu près constante, quel que soit l'angle de tir, et c'est la fonction du modérateur. Tout ce jeu repose sur des organes mesurés au dixième, au cinquantième de millimètre près.

Le frein d'un canon de 75 mm. limite le recul à 1,20 m. environ, et, en outre, ce recul se fait régulièrement, étant lié au passage d'un liquide par des orifices extrêmement étroits. On crée une résistance supprimant la brutalité de cette poussée en arrière qui accompagne le départ de l'obus. Grâce aux orifices étroits, toute une masse se meut, en glissant onctueusement sur une autre ; le mouvement est souple, léger. Pendant ce recul de 1,20 m. environ, la force vive de la masse reculante peut être emmagasinée par des ressorts dont l'axe est parallèle à celui du tube, et de fait certaines armées emploient des ressorts. Dans les freins hydropneumatiques, le ressort est, en réalité, une masse d'air, qui se comprime et se détend (l'air peut être remplacé par un autre gaz). Ainsi, après le recul, le canon avance de 1,20 m. environ, par un jeu de liquide, de gaz, de tiges, de soupapes, d'orifices calculés et contrôlés. Ce n'est pas tout; il faut régulariser le retour en batterie. Lorsque le tube est horizontal, le retour en batterie n'a que des frottements à vaincre, la pesanteur n'entre pas en action. Si, au contraire, on tire sous un grand angle, le tube est très incliné, le retour en batterie se fait malgré la pesanteur et il y aurait là une cause de retard si on ne parait le coup par le modérateur. Cet organe, automatiquement, facilite d'autant plus le retour en batterie que le tube est plus incliné ; plus le poids travaille, et plus le modérateur travaille en sens contraire, automatiquement.

Quelles difficultés à vaincre, dans tout cela, en particulier pour rendre étanches les divers réservoirs, accolés les uns aux autres, et traversés par des mécanismes délicats!

Une fabrication précise, comme celle du canon et du frein, repose sur un contrôle consciencieux, fondé sur les mesures, d'une part, et sur l'emploi d'une série de calibres maxima et minima. Par exemple, pour vérifier un trou cylindrique, nous aurons deux cylindres pleins, l'un de 20 mm. de diamètre, l'autre de 20,05 mm.; le premier doit passer et le second ne doit pas pouvoir entrer. Quel que soit le procédé de contrôle, la méthode consiste essentiellement à réaliser l'interchangeabilité totale des organes des matériels, à rendre les divers matériels de 75, par exemple, pratiquement identiques; quel avantage pour les réparations à faire au front!

Avant la guerre, nos ateliers d'artillerie avaient créé cette interchangeabilité totale, pour le canon et la mitrailleuse. Mais lorsque, pendant la guerre, on veut mettre au point une fabrication, je crois qu'il peut devenir indispensable, faute de temps, de sacrifier l'interchangeabilité totale et d'exiger simplement une interchangeabilité limitée... Ce qui n'a pas été mis au point, en temps de paix, a bien des chances de n'être pas pleinement mis au point pendant la guerre.

Dans cette revue très rapide, je ne saurais parler des affûts, qui ont à avaler des percussions violentes, ni des matériels anciens, que toutes les armées ont utilisés, autant que possible, ni des matériels de tranchée, ni du canon d'infanterie, ni des instruments de visée, ni des chargements et des fusées... il faut bien, cependant, regarder, un instant, la fabrication de l'obus vide.

Un wagon arrive à la forge, chargé de petits cylindres d'acier : ce sont les lopins, destinés à faire les obus. D'abord, à la presse, on transforme le cylindre plein en un cylindre creux muni d'un fond, un grand verre à bière! Cette coupe massive est tréfilée, s'allonge en se régularisant. Puis, un marteau-pilon transforme, en une ogive, les bords de la coupe, portés au rouge brique.

L'ébauche se refroidit dans un coin ; ensuite le tour lui donnera sa forme définitive et une ceinture de cuivre sera posée à la presse. Il faut maintenant faire les vérifications prescrites.

La chambre du canon est calculée, en vue de la pression à obtenir; la partie rayée du tube est calculée, d'après la vitesse initiale à réaliser; entre la chambre et les rayures nous avons le cône de raccordement destiné à arrêter l'obus, par la ceinture de cuivre. Il faut donc que les divers diamètres de l'obus soient contrôlés. Il est nécessaire que la chambre du canon soit fermée hermétiquement; en outre, l'obus doit être apte à recevoir la fusée ; il doit avoir la capacité prévue pour son chargement. Enfin, au point de vue de la balistique extérieure, l'obus doit avoir une longueur donnée, son centre de gravité doit rester entre deux limites fixées et il doit être placé sur l'axe géométrique (sinon l'obus est balourd). L'obus doit encore offrir certaines qualités de résistance. Bref l'obus, comme le canon, donne au contrôle l'occasion d'exercer son talent et sa conscience.

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Il ne suffit pas de mesurer; il faut voir et juger. Il est, en particulier, un défaut grave, qu'on recherche avec soin la retassure au culot de l'obus. Armé d'une lampe électrique, dans la main gauche, et d'une fine pointe d'acier, dans la main droite, le contrôleur gratte le culot de l'obus et, s'il trouve le défaut, l'obus est rebuté. La retassure, qui se signale par un orifice aux bords irréguliers, minuscule, correspond à une fissure interne, parfois profonde, susceptible de causer cet accident terrible, l'éclatement du projectile dans l'àme du canon. On attribue, en général, la retassure à une insuffisante élimination des parties malsaines du lingot, après la coulée... Ce que nous retiendrons, assurément, c'est que le contrôle doit connaître le métal et la métallurgie.

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Une question se pose évidemment le recrutement des contrôleurs des forges pendant la guerre. Je crois qu'un homme intelligent, qu'il soit « dans le civil » patron serrurier ou licencié ès sciences, arrive vite, s'il est bien dressé, à contrôler quelques objets déterminės. Mais, au contraire, il est fort difficile d'arriver à contrôler, avec compétence, tous les matériels.

Si l'on veut pouvoir former, assez rapidement, des contrôleurs, pendant la guerre, il est nécessaire d'avoir, en temps de paix, un cadre d'officiers, ou d'ingénieurs, ou de contrôleurs d'armes, solidement instruit et exercé. Ne comptons pas trop sur les improvisations en temps de guerre !

La formation du contrôleur est d'autant plus délicate que le contrôle ne saurait conserver, pendant les hostilités, une rigidité algébrique. L'usine présente, un beau jour, un organe, dont la fabrication représente une grande quantité de métal (le métal est difficile à trouver) et plusieurs mois de travail (la main-d'oeuvre est limitée, puisqu'elle est une force soustraite aux armées), et cet organe a une défectuosité reconnue. Mais si, avec certaines précautions, avec des avertissements nettement transmis, cet organe est encore. relativement utilisable au front, le rebuterons-nous? C'est en pareille circonstance que s'exerce la sagacité avertie du contrôle, car ce qui est bon est bon, et ce qui est mauvais est mauvais, mais toute la question est de savoir si le demi-bon est utilisable.

Nous ne pouvons suivre les canons et les lots d'obust dans toute la série des épreuves d'essai qui précèdent leur arrivée au front des armées. Voyons-les immėdiatement en position, les munitions dans un boque teau, ou sous un feuillage artificiel, les canons sous bois, ou encore dans le talus bordant un chemin de erre, talus dans lequel des niches sont creusées, pour

le matériel comme pour le personnel. Parfois, la batterie s'abrite dans des ruines qui font penser au << Memento quia pulvis es..... » et les canonniers, dans leurs sabots, ne bougent guère, surtout lorsque le champ voisin porte l'écriteau sinistre « terrain ypérité ».... Les voilà, ces braves canonniers, immobiles et patients, quand c'est nécessaire, prompts à se déplacer, quand il faut changer de logis, mais chacun. sait qu'il leur faut absolument, entre autres choses, leur tabac, leur « pinard » et le respect de leur tour de départ en permission!

Et nous retrouvons ici des techniciens, au service des batteries; pour comprendre leur rôle, il faut suivre l'ordre historique.

Après deux mois de guerre de mouvement, en 1914, le front s'est à peu près stabilisé pour longtemps, comme une longue corde qui, tirée de deux côtés par des mains vigoureuses, finit par prendre une position d'équilibre autour de laquelle, jusqu'en 1918, on ne verra que d'assez faibles oscillations. La guerre de tranchées commençait, et les gens avertis la prévoyaient très longue. Le service géographique de l'Armée française prit alors une initiative remarquable et proposa au Général Joffre d'adapter (1) « à la guerre de position, que l'on venait d'inaugurer, les procédés de tir en usage jusqu'ici dans la guerre de siège. Le Général Commandant en chef accepta, sans la moindre hésitation, cette offre du Service Géographique et lui laissa complètement carte blanche pour cette nouvelle organisation ».

Ce que devint, peu à peu, cette organisation, nous le verrons et ainsi nous nous rendrons compte de l'un des aspects de la vie, sur le terrain des opérations, de

(1) Le Général Bourgeois était alors le Directeur du Service Géographique. Voir son article dans la REVUE SCIENTIFIQUE, 27 novembre 1920.

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