Sayfadaki görseller
PDF
ePub

fait connaître cette genèse de l'Opus minus et de l'Opus tertium.

« Tout comme l'Opus secundum, dit-il (1), a été écrit pour éclaircir et compléter l'Opus primum, ainsi j'ai composé ce troisième écrit (tertiam scripturam) pour l'intelligence et la perfection des deux précédents. Car, il y a dans cet ouvrage bien des choses magnifiques contenant la beauté de la sagesse (decorem sapientiae continentia) que l'on ne trouve pas dans d'autres ouvrages. »

L'Opus magnum, l'Opus minus et l'Opus tertium sont donc assez naturellement écrits sur le même plan. Cette remarque à de l'importance, car nous ne possédons pas encore en entier l'Opus tertium et peut-être est-il même en partie perdu. Un premier fragment, nous l'avons déjà dit, avait été publié à Londres, en 1859; Duhem vient de nous en donner un second; l'identité du plan des trois Opera permet de deviner la place que les deux fragments retrouvés occupent dans l'Opus tertium complet. Partant donc de l'indication que Bacon lui-même lui a fournie, sur les rapports mutuels qu'ont entre eux les trois ouvrages, Duhem prouve, par une discussion très serrée des textes, que le fragment de l'Opus tertium publié par Brewer en est le commencement; il est suivi d'une lacune; puis vient le fragment retrouvé par Duhem luimême, et ce fragment est probablement suivi d'une nouvelle lacune. Pour abréger, je n'en dirai pas davantage. Nous ne sommes cependant pas au bout des pièces curieuses qu'Arnaud de Bruxelles avait réunies dans le Manuscrit 10264 du fonds latin de la Bibliothèque Nationale. Outre le traité De ponderibus de Jordan de Némore et le fragment de l'Opus tertium, il renferme encore un très intéressant petit manuel de géographie. Duhem a profité des données qu'il lui fournissait pour écrire un article

(1) Le passage est emprunté au Cap. I (p. 6) du fragment de l'« Opus tertium » publié par Brewer

sur Ce qu'on disait des Indes occidentales avant Christophe Colomb, article qui a paru dans la REVUE Générale des Sciences purES ET APPLIQUÉES (1). Il en résulte qu'on croyait la largeur de l'Atlantique très inférieure à ce qu'elle est en réalité, erreur évidemment propre à encourager l'audace des navigateurs, puisqu'elle diminuait les difficultés à voir dans leur entreprise.

Je ne connais que par le titre, Un document relatif au calendrier, article publié en 1911, dans l'Hommage à Louis Olivier (2), mais il me reste à dire un mot d'un des personnages les plus curieux, les plus importants auxquels Duhem se soit intéressé ; j'ai nommé Nicole Oresme.

Il lui consacra une étude qui parut, elle aussi, dans la REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES sous le titre de Un précurseur français de Copernic, Nicole Oresme (3). Elle fut suivie à bref délai d'un complément dans l'ARCHIVUM FRANCISCANUM HISTORICUM : François de Meyronnes, O. F. M., et la question de la rotation de la terre (4). Ce religieux de saint François était, comme Oresme, un précurseur de Copernic. Mais, tenons-nous-en à Oresme.

Quel savoureux prosateur ! Car, ce n'est pas simplement l'un des maîtres de la pensée scientifique au XIVe siècle que nous admirons en lui, il est aussi l'un des bons modèles de la vieille langue française. Écoutons ce début de sa traduction du traité De Caelo et Mundo d'Aristote.

<«< Au nom de Dieu, cy commence le livre d'Aristote appelé Du Ciel et du Monde, lequel du commandement

(1) T. XIX, Paris, Armand Colin, 1908, pp. 402-406. (2) Paris, 1911, p. 97.

(3) T. XX, Paris, Armand Colin, 1909, pp. 860-873.

Postérieurement à l'article de Duhem, M. Wieleitner a encore publié une étude importante sur Nicole Oresme: Ueber den Funktionsbegriff und die graphische Darstellung bei Oresme. BIBLIOTHECA MATHEMATICA, 3o série, t. XIV, Leipzig, Teubner, 1913-1914, pp.193

141.

(4) T. VI, Ex Typographia Collegii sancti Bonaventurae ad Claras aquas prope Florentiam, 1913, pp. 23-25.

de très souverain et très excellent prince Charles, le quint de ce nom, par la grâce de Dieu Roy de France, désirant et amant toutes nobles sciences;

» Je, Nicole Oresme, Doyen de l'Église de Rouen, propose de translater et exposer en françois. >>

Charles V, roi de France, ami de toutes les « nobles sciences» était surtout marri de les savoir, dans son royaume, enseignées partout en latin. Apanage exclusif des moines et des clercs, elles étaient ignorées de la bourgeoisie et de la noblesse. Charles résolut de les faire sortir des cloîtres et des universités où elles étaient restées jusque là confinées. C'est dans ce but qu'il pria le Doyen de l'Église de Rouen de traduire le traité Du Ciel et du Monde par Aristote.

Le Doyen s'exécuta à la satisfaction royale et reçut en récompense de son travail l'évêché de Lisieux. C'est lui qui nous l'apprend dans l'épilogue de sa version :

« Et ainsi à laude de Dieu, j'ai accompli le Livre du Ciel et du Monde au commandement de très excellent prince Charles, le quint de ce nom, par la grâce de Dieu roy de France, lequel en ce faisant m'a fait évêque de Lisieux ».

Cette libéralité de Charles V permet de dater la traduction française Du Ciel et du Monde, car on sait qu'Oresme fut fait évêque de Lisieux, le 3 octobre 1371.

Duhem n'a pas publié l'œuvre d'Oresme en entier, mais seulement les chapitres 24 et 25 du second livre, dans lesquels le Doyen de l'Église de Rouen développe ses idées sur le système héliocentrique du monde.

Épilogue

Comment caractériser en quelques mots l'ŒŒuvre historique de Duhem?

Le professeur de Bordeaux savait le latin et le grec comme un philologue. Il s'entendait en paléographie, connaissait les philosophes de tous les temps, les jugeait

avec bon sens, mais était avant tout un maître en sciences physiques et mathématiques ; qualités très différentes qui furent rarement réunies dans un même homme à un pareil degré. Ses nombreuses lectures l'avaient richement documenté, aussi ses ouvrages resteront-ils longtemps pour les futurs historiens des sciences une source inépuisable d'information.

Duhem avait sa manière de comprendre l'histoire. Jamais il n'entendit celle des sciences, comme l'entendirent un Montucla, un Chasles, un Cantor. Jamais il ne la conçut comme le simple récit objectif des faits. Une préoccupation étrangère le domine toujours, sans jamais le porter cependant à fausser la vérité : l'histoire viendrait-elle infirmer ou confirmer les idées philosophiques qu'il s'était faites sur la valeur et la nature des théories physiques? C'était pour lui le vrai problème à résoudre. J'ai suffisamment insisté sur ce caractère de ses recherches historiques pour ne plus m'y attarder.

En résumé, Duhem fut le dernier grand historien des sciences qu'ait produit la France. Qu'on pardonne à un étranger de le constater avec regret au moment de déposer la plume.

Avec Montucla et Delambre, c'est la France qui a créé l'histoire des mathématiques et de l'astronomie. Elle l'a continuée avec Michel Chasles. Grâce aux encouragements que Chasles et Joseph Bertrand prodiguèrent à Cantor, c'est encore la France qui contribua à donner le grand historien à l'Allemagne. Au commencement du xxe siècle, Paul Tannery et Duhem tenaient haut l'étendard de l'histoire des sciences. Il semblait que cette histoire dût rester une discipline toute française. Mais, hélas ! ni Paul Tannery, ni Pierre Duhem n'ont formé d'élèves. On ne leur voit pas de successeurs. Puissionsnous, cependant, en fermant les volumes que nous venons d'analyser, ne pas avoir salué en eux les feux du soleil couchant !

H. BOSMANS.

Les grands Problèmes monétaires

L'Inflation

I

DÉFINITION DE L'INFLATION. SES FACTEURS, SES EFFETS

Nous allons essayer de définir et de montrer le mécanisme d'un phénomène économique exerçant aujourd'hui son influence sur le monde entier. La guerre le fit connaître ; il acquit bientôt une telle notoriété qu'il fut déclaré cause de la plupart des troubles contemporains. Son essence, comme son action, est loin d'être sans mystère, et ce fait contribua beaucoup à accroître les responsabilités qu'on lui attribuait. C'était la vie chère d'abord, avec son cortège de troubles économiques et sociaux : l'inflation en était cause, peut-être à elle seule. Les changes entre les pays autrefois alliés furent secoués : encore un de ses méfaits. Quant à ses conséquences moins directes, elles ne se comptaient plus.

Peut-être, en étudiant ici l'inflation, pourrons-nous préciser le degré de cette responsabilité, et même la restreindre.

Définissons l'inflation : « Un excès de puissance d'achat »; dire que c'est un excès de moyens de payement est sensiblement équivalent. Ces définitions deviendront plus claires lorsque nous aurons écarté quelques idées encombrant fatalement l'esprit de qui n'est pas familier avec la matière.

« ÖncekiDevam »