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Parmi ces vulgarisateurs, M. Eddington tient évidemment un rang des plus distingués. Son exposé, d'un intérêt soutenu, frappe par son extrême originalité faite pour surprendre les lecteurs de tradition latine, accoutumés à d'autres formes didactiques, ce qui ne veut pas dire, tant s'en faut, pour leur déplaire.

Et tout d'abord ce sont deux ouvrages parfaitement distincts qui se trouvent, en fait, réunis sous une couverture commune. L'auteur a tenu à le mettre lui-même en évidence en dotant chacune de ces parties d'une pagination spéciale et d'une table à part.

La seconde, sur laquelle nous reviendrons plus loin, est une théorie purement mathématique, indispensable à qui veut approfondir le sujet, mais destinée, cela va sans dire, aux seuls spécialistes entendant la langue symbolique de l'algèbre.

C'est dans la première partie, conçue sur un tout autre plan, que se manifeste surtout la puissante originalité de l'auteur. Ce qu'on y trouve, c'est, pour aboutir à la théorie nouvelle de la relativité et à ses principales conséquences, un examen critique très serré, très fin, très profond, des idées qui sont à la base de l'explication des lois de l'univers, présenté sous une forme très libre, très alerte, d'une belle tenue littéraire, propre à faire valoir les moindres nuances de la pensée, et dont la traduction est loin d'avoir atténué les précieuses qualités.

L'ouvrage débute, en manière de prologue, par une conversation entre un physicien expérimental, un mathématicien pur et un relativiste mettant en lumière, non sans humeur, les divergences de leurs points de vue respectifs à propos de cette question primordiale : « Qu'est-ce que la géométrie ? »>

Pour le premier, qui s'en tient à la présomption fondée sur l'immense majorité des expériences renouvelées quotidiennement, nous vivons dans un Univers euclidien où l'espace, entité pleinement indépendante du temps, obéit rigoureusement aux principes de la géométrie classique. Pour le second, les diverses géométries ne sont que des systèmes purement logiques développant toutes les conséquences de postulats pris comme point de départ, sans

qu'il se soucie autrement de la confrontation de ces conséquences avec les lois que nous offre l'Univers physique. Tandis que le troisième, « en définissant l'espace comme un espace mesuré, reconnaît nettement que toute mesure comporte l'emploi d'un appareil matériel; la géométrie qui en résulte est une étude de propriétés d'extension de la matière. Il se refuse à considérer toute autre entité d'une transcendance plus élevée », et, par voie de conséquence, il arrive à considérer que, « puisque la géométrie naturelle est l'étude des propriétés d'extension de la matière et que l'on a trouvé que leur ordre dans l'espace ne peut être envisagé indépendamment de leur ordre dans le temps, il est devenu nécessaire de généraliser notre géométrie en y faisant intervenir une quatrième dimension, le temps ».

Que les relations spatiales, objet propre de l'étude de la géométrie, ne puissent être envisagées indépendamment du temps, ou, du moins, que l'espace euclidien n'apparaisse plus que comme une sorte de section à trois dimensions d'un univers qui en posséderait nécessairement quatre, c'est là l'idée, étrange pour des cerveaux façonnés comme les nôtres, par quoi vont être révolutionnés les fondements de la science. On pourrait toutefois supposer qu'un ingénieur, assistant à l'entretien des trois précédents interlocuteurs, intervînt discrètement dans le colloque par une observation du genre de celle-ci : « Bien que les considérations d'ordre très concret qui absorbent mon activité journalière, me rivant un peu à la terre, ne me permettent guère d'atteindre d'un coup d'aile aux régions élevées où se meut tout à son aise votre pensée, Monsieur le relativiste, je suis certes bien loin de méconnaître, et même mieux, j'apprécie hautement la transcendante importance des idées nouvelles que vous soutenez avec une dialectique si persuasive, et j'admire les conséquences, d'une si vaste portée, qui en découlent dans le domaine de la philosophie naturelle; mais, quand il s'agit des applications que nous avons, nous autres, à poursuivre chaque jour dans le domaine de la technique, il s'en faut et de combien ! que l'approximation atteigne à la limite où les conséquences de ces conceptions nouvelles commenceraient à se faire sentir. A nos yeux, dès lors, la vieille théorie mécaniste, fondée sur les notions d'espace

euclidien et de temps absolu, conserve encore tout son prix, et vous me permettrez de souhaiter que les maîtres chargés d'enseigner les éléments de la science à ceux qui n'ont d'autre ambition que d'en faire un usage correct dans l'immense domaine de ses applications journalières, ne cèdent pas, dès maintenant tout au moins, avant que ces idées nouvelles ne soient parvenues à leur pleine maturité, à la tentation de renoncer, dans leur enseignement, à la simplicité essentielle de la théorie classique ».

A quoi, sans doute, le relativiste répliquerait qu'il n'a cure de ce côté terre à terre de la question et laisse aux intéressés le soin d'en décider, ce genre de considération étant parfaitement étranger au but qu'il a en vue. Et ainsi, tout le monde serait d'accord; mais le lecteur qui commençait à prendre un peu peur du bouleversement auquel il pouvait se croire tenu de soumettre sans délai les principes sur lesquels il a vécu jusqu'ici, en éprouverait quelque soulagement.

Cette réserve une fois faite, on se sent plus à l'aise pour aborder l'examen des considérations nouvelles, exposées avec un talent si distingué et sous une forme si personnelle par l'auteur, sans se laisser arrêter par le caractère extraordinairement paradoxal avec lequel tout d'abord elles se présentent à nous.

Le point de départ de ces considérations nouvelles se trouve dans l'impossibilité d'expliquer, avec la théorie jusqu'ici regardée comme classique, le résultat surprenant de l'expérience de Michelson et Morley concernant l'invariabilité de la vitesse mesurée de la lumière, quelle que soit la vitesse relative de la terre par rapport au courant d'éther. C'est à la discussion de ce fait paradoxal que se rapporte le Chapitre I de l'ouvrage, fait dont la première explication a été fournie par l'hypothèse, à première vue plus qu'étrange, de Fitzgerald, consistant à admettre que toute partie d'appareil matériel et rigide, comme celui servant à déterminer le chemin suivi par la lumière, a une longueur variable avec son orientation par rapport au courant d'éther. Cette hypothèse, dite de « la contraction de Fitzgerald », si choquante au premier abord, pour le simple bon sens, a fini, au reste, par apparaître comme plausible depuis les recherches

théoriques de Lorentz et Larmor. Les considérations qui s'y rattachent ont abouti au principe dit de la « relativité restreinte » qui revient à affirmer l'impossibilité « par quelque expérience que ce soit, de mettre en évidence un mouvement uniforme par rapport à l'éther ».

Les conséquences de ce principe « d'un caractère véritablement révolutionnaire », comme le reconnaît M. Eddington lui-même, sont mises par lui en lumière d'une façon frappante et nous tenons à le répéter — non dépourvue d'humour; c'est le sel qui facilite l'ingestion d'un aliment devant lequel, a priori, l'estomac ne laisse pas de se con

tracter.

A la suite de cette piquante discussion, l'auteur en arrive à définir la thèse relativiste qui a, d'après lui, « pour principe d'écarter certaines hypothèses qui ne sont exigées par aucun fait connu et qui nous empêchent de comprendre la simplicité de la nature ».

Cette thèse relativiste fait, avec force détails des plus suggestifs, l'objet du Chapitre II, où le progrès nouveau réalisé, en cet ordre d'idées, par les profondes spéculations d'Einstein, se fait sentir dans les lignes qui suivent : « C'est l'expérience qui nous a ramenés au principe de relativité pour le mouvement uniforme ; arrivés à ce point nous avons cherché une extension possible de ce principe au mouvement accéléré, car nous sentions qu'il était difficile et arbitraire de nous arrêter là. Nous essayons maintenant de concevoir un système de la nature qui soit indifférent au genre du mouvement animant l'observation. Nous aurons alors la synthèse complète de ce que perçoivent des observateurs ayant les uns par rapport aux autres tous les genres possibles de mouvement sans nous en tenir seulement aux mouvements. uniformes... >>

Et l'auteur montre, par une analyse très fine, que la réalisation de ce plan comporte nécessairement la considération de l'Univers à quatre dimensions (le temps s'ajoutant ici aux trois dimensions spatiales ordinaires) dont l'étude détaillée fait l'objet du Chapitre III.

Cette combinaison de l'ordre des événements dans le temps et dans l'espace pour en former un ordre unique à quatre dimensions conduit, par voie d'extension, aux diverses no

tions qui seront à la base de la géométrie appropriée à la nouvelle conception de l'Univers : l'événement qui y joue le rôle du point dans la géométrie classique, l'intervalle provenant de l'extension de la notion de distance, etc... Tous les principes qui se rencontrent à la base de cette géométrie nouvelle trouvent, sous la plume de M. Eddington, une expression frappante. Au nombre des conséquences premières, assez imprévues, qui en découlent, le lecteur n'est pas peu surpris de tomber sur une justification rationnelle de l'hypothèse de la contraction de Fitzgerald.

Une des conquêtes les plus sensationnelles des nouveaux concepts réside dans « la solution du mystère de la gravitation »> suivant l'expression de M. Langevin. C'est dans la considération des champs artificiels de force, envisagés du nouveau point de vue où il se place, que M. Einstein a découvert le fil conducteur qui devait le mener à cette solution. C'est à nous le faire comprendre que tend le Chapitre IV. Les exemples fournis par la force centrifuge due à la rotation de la Terre, par celles aussi qui naissent des changements de direction ou de vitesse des aéroplanes, conduisent à cette remarquable induction que tout champ de force artificiel perçu par un observateur est lié à la courbure de la ligne d'Univers (de l'Univers à quatre dimensions, s'entend) de cet observateur. Cette manière de voir, implique la renonciation à toute tentative de différencier les champs de force artificiels des champs de gravitation naturels et conduit à regarder comme champ de gravitation le champ de force mesuré, moyennant la spécification nécessaire de quelque observateur. Ce n'est d'ailleurs qu'au moment où l'observateur « est dévié de sa ligne d'Univers propre qu'il a la sensation de se trouver au sein d'un champ de force »; par là se révèle l'importance de la considération des «< ligues d'Univers naturelles des corps libres qui semblent empreintes d'un certain caractère absolu dans l'Univers à quatre di

mensions >>.

Finalement, l'étude des champs de force se trouve ramenée à une étude purement géométrique ; c'est, jusqu'à un certain point, faire un retour en arrière en revenant, pour le champ gravitationnel du soleil, de la description newtonienne à la description képlérienne. Mais, comme le remar

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