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de l'église DE FRANCE.

losophes, il exposait avec netteté les grandes vérités qu'il voulait démontrer, et devant cette simple exposition, les objections des adversaires du christianisme disparaissaient d'elles-mêmes.

Cette méthode était incontestablement préférable à celle de de Fréron, par exemple, qui se prenait corps à corps avec Voltaire. Le philosophe de Ferney reçut, dans ces pugilats, de graves blessures, on ne peut en disconvenir; sa haine pour Fréron le dit assez; mais il faut avouer aussi qu'il était supérieur, du côté de l'esprit, à son antagoniste, et qu'il le tua sous le ridicule.

Fréron faisait au philosophisme une guerre de chaque jour dans son Année littéraire; mais comme ses mœurs ne répondaient pas à la sainteté de la cause qu'il défendait, il s'attirait parfois de dures vérités. Il avait débuté dans le monde littéraire par sa collaboration aux recueils périodiques de l'abbé Desfontaines. Cet abbé, qui avait été Jésuite comme Fréron, fit la guerre au philosophisme; mais les hommes vraiment religieux n'approuvaient pas plus sa polémique que celle de son ex-confrère. L'un et l'autre attaquaient plus les philosophes comme écrivains que comme ennemis de la religion. Sous ce rapport, ils avaient un désavantage évident; et leurs œuvres ne pouvaient, au point de vue littéraire, lutter avec celles de Voltaire, de Rousseau, de d'Alembert et même de Diderot. De plus, leurs principes, comme ceux de tous les Jésuites, n'étaient pas exacts. On remarque encore parmi ces religieux quelques apologistes comme le P. Colonia, auteur d'un ouvrage intitulé: La religion chrétienne autorisée par les témoignages des auteurs païens. Ce Jésuite eût mieux fait de suivre la carrière où il était entré par cet ouvrage, que de céder à sa haine contre PortRoyal, qui lui fit composer la Bibliothèque anti-janseniste, ouvrage tellement exagéré, qu'il fut censuré à Rome. Il le refondit dans le Dictionnaire des livres jansenistes, dans la composition duquel il eut le P. Patouillet pour digne collaborateur. Feller luimême 'avoue que le zèle du P. Colonia lui fit apercevoir la secte des Jansénistes où elle n'était pas. Feller eut trop souvent le même défaut, aussi bien que la plupart de ses confrères. Malgré la passion qui éclate presque à chaque page des ouvrages de ce dernier Jésuite, nous devons cependant le mentionner parmi les apologistes de la religion, pour son Catéchisme philosophique. Cet ouvrage n'est pas fort remarquable; cependant il peut être utile à ceux qui commen

Feller. Vo Colonia.

cent l'etude des apologistes chrétiens. Un autre Jésuite, Baltus, se distingua par un ouvrage en faveur des prophéties qui établissent la religion chrétienne. Il fut surpassé cependant, sur cette matière, par Lefranc de Pompignan, archevêque de Vienne. Ce vertueux prélat mérite une place des plus distinguées parmi les apologistes de la religion. Ses principaux ouvrages sont: Questions diverses sur l'incrédulité; l'Incrédulité convaincue par les prophéties; la Religion vengée de l'incrédulité par l'incrédulité elle-même; la Dévotion réconciliée avec l'esprit. Ces ouvrages sont généralement écrits avec sagesse et clarté ; mais on n'y remarque pas le cachet d'un esprit vraiment philosophique. Sous ce rapport, il fut dépassé par deux écrivains qui ne sont pas assez connus : Para-duPhanjas et Lamourette. Le premier se distingua surtout par sa Philosophie du christianisme; le second, par ses Pensées sur la philosophie de l'incrédulité, et sur La philosophie de la foi. Ces deux ouvrages sont incontestablement des plus profonds qui aient été écrits pour la défense de la religion. L'auteur s'y montre aussi philosophe que croyant, et démontre avec une logique entraînante et avec éloquence que la vraie philosophie et la foi se prêtent un mutuel secours pour diriger l'esprit de l'homme et l'amener à la connaissance de la vérité. Mentionnons encore Jacques et Duvoisin parmi les apologistes de la religion.

Après avoir nommé les principaux orateurs, théologiens ou apologistes qui prirent la défense du christianisme contre les philosophes, nous devons faire connaître les poètes qui suivirent la même carrière. Ceux qui méritent d'être cités sont : Louis Racine, de Bernis, de Polignac, Lefranc de Pompignan et Gilbert.

Louis Racine, digne fils de l'auteur d'Athalie, consacra son talent poétique à exposer les preuves de l'existence de Dieu et de la Révélation. Son Poëme de la religion est écrit en fort beaux vers. On ne pourrait, sans injustice, demander à un poëme didactique de ce genre les détails qui émeuvent les passions ou qui frappent l'imagination. Avant tout, Louis Racine voulait être exact et orthodoxe. Il y a réussi, et son poëme est considéré comme une des œuvres les plus pures de notre littérature. Voltaire opposa au poëme de Racine celui de la Religion naturelle; s'il égala le poète chrétien pour la poésie, il reste loin derrière lui pour la vraie philosophie et les sentiments.

Le cardinal de Polignac, qui joua le rôle que nous avons vu dans les affaires de la Constitution Unigenitus, réfuta en bons vers

latins l'athéisme et le matérialisme; son Anti-Lucrèce est, sans contredit, un bon ouvrage; mais, composé en latin, il ne pouvait avoir beaucoup d'influence sur les idées de la société. Le cardinal de Bernis voulut imiter Louis Racine. Son poëme de la Religion vengée est loin de son modèle, quoiqu'on y rencontre quelques beaux vers. Lefranc de Pompignan, frère de l'archevêque de Vienne du même nom, défendit la religion dans plusieurs ouvrages qui ne sont pas sans mérite, particulièrement dans ses Poésies sacrées, et dans ses Discours philosophiques. Le pauvre et malheureux Gilbert osa s'attaquer au philosophisme dans ses satires. S'il eût vécu plus long-temps, on peut croire qu'il eût parcouru cette carrière d'une manière distinguée. Ce qui reste de lui atteste un vrai talent poétique. Quelques poésies, au moins légères, ne permettent pas d'accepter sans réserves Gilbert parmi les poètes défenseurs de la religion; nous en dirons autant de J.-B. Rousseau, si connu par ses belles odes sacrées, et même du cardinal de Bernis, qui sacrifia trop à la galanterie dans ses vers.

D'après le tableau rapide que nous venons de présenter des travaux entrepris, dans tous les genres, pour la défense de la religion contre le philosophisme, on sera convaincu qu'il y avait, au sein de l'Église, de nombreux éléments auxquels une habile impulsion eût pu faire produire de grands résultats. Malheureusement, cette impulsion manqua. Le haut clergé, en France, était trop occupé de ses misérables querelles sur le Jansénisme, pour prendre une généreuse initiative et concentrer vers le point menacé toutes les forces de l'Église. Les efforts restèrent isolés, voilà pourquoi ils échouèrent à peu près contre la coalition du philosophisme et de la franc-maçonnerie, et que l'Église fut submergée avec la royauté. Tandis que les évêques s'occupaient de refuser les sacrements et la sépulture aux Jansenistes, les ennemis de la Révélation et de l'Église continuaient leur œuvre, et arrachaient des cœurs ces grands principes que tant de discussions intestines avaient déjà ébranlés.

Nous avons devancé les temps pour présenter dans leur ensemble les principaux traits de la grande lutte qui eut lieu au xvm.* siècle entre le philosophisme et l'Église. Nous devons revenir aux événements religieux qui eurent lieu en France dans les dernières années du pontificat de Benoît XIV, qui se termina en 1758.

III.

Situation des affaires à la mort du cardinal de Fleury.

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Boyer et Christophe de Beaumont. Continuation des troubles religieux. Leurs tristes résultats. - Entreprise sur les biens ecclésiastiques. Négociations du cardinal de La Rochefoucauld. - Édit de 1754. Opposition faite par le clergé à cet édit. -Bref Ex omnibus de Benoît XIV. Déclaration du roi de 1756 Opposition des assemblées du clergé. Actes de l'assemblée de 1765. Mort de Benoît XIV. Clément XIII, pape.- Affaire de l'abolition des Jésuites en France. Causes de la haine universelle dont les Jésuites étaient l'objet.- Accusations élevées contre eux. - Procès du P. La Valette- Conduite de Clément XIII å Sa mort. l'égard des Jésuites. Élection de Clément XIV. — Tableau de son Sa conduite à l'égard des Jésuites. Bref de Opposition des Jésuites à ce bref. Mort de Louis XV.

pontificat et de sa vie privée. suppression de la Compagnie.

de Clément XIV. — Pie VI son successeur.

1754-1773.

1

Mort

LAS des discussions qui troublaient la France, à propos du Jansénisme, Louis XV donna, en 1754, une déclaration pour prescrire le silence le plus absolu sur toutes ces querelles. Le cardinal de Fleury était mort depuis onze ans, laissant la France sans argent et avec une lourde guerre sur les bras 1. Malgré son économie proverbiale, il n'avait su qu'aggraver le désordre des finances, et son amour pour la paix ne l'avait pas assez bien inspiré pour prévenir une guerre désastreuse. Courtisan plein de galanterie jusqu'à la mort, il avait vécu plutôt au milieu des femmes de la cour que des hommes d'État. Il était naturellement porté à la douceur; mais l'ambition le rendit persécuteur de tous ceux qu'il plaisait aux Jésuites de faire passer pour Jansénistes.

A sa mort, la duchesse de Châteauroux, maîtresse du roi, dirigea le ministère composé de nullités. Boyer, évêque de Mirepoix, ancien précepteur du roi, eut la direction des affaires ecclésiastiques. Madame de Pompadour succéda bientôt à la duchesse de Châteauroux dans la direction des affaires. De tels ministres s'occupaient de toute autre chose que de questions religieuses. La guerre prenait le reste des préoccupations que laissaient les plaisirs et les fêtes. Pendant ce temps-là, la lutte intestine continuait entre Port-Royal et les Jésuites, qui se montraient d'autant plus cruels que leurs

1 Mémoires de Richelieu, de Choiseul, de Georgel, de Besenval; Voltaire, Siècle de Louis XV et Histoire du Parlement; Gazette de France.

de l'église de FRANCE.

ennemis avaient été presque mis hors de combat sous le ministère du cardinal de Fleury. Boyer soutenait à la cour les traditions de Fleury, et savait arracher son élève pour quelques instants à ses infâmes orgies, pour en obtenir des ordonnances favorables aux persécuteurs. Christophe de Beaumont, archevêque de Paris depuis 1746, secondait Boyer. Du moins ces deux évêques étaient vertueux, ce qui était rare à la cour de Louis XV. Après la mort de Boyer, l'abbé de Bernis, digne protégé de madame de Pompadour, devint l'homme important avec le comte de Stainville, autre protégé de la fameuse duchesse, et qui se fit connaître sous le titre de duc de Choiseul.

Lorsque Fleury et Boyer furent morts, le fanatisme anti-Janséniste n'eut plus à la cour de soutiens influents. Une atmosphère d'incrédulité enveloppait le gouvernement, et Christophe de Beaumont était en disgrâce. Cet archevêque avait montré un zèle extraordinaire dans la poursuite des Jansénistes. Le bon et pieux Coffin lui-même avait été traité en hérétique, et on lui avait refusé les sacrements. Des ecclésiastiques subalternes, encouragés par l'appui de l'archevêque, montraient un zèle qui allait parfois jusqu'au plus absurde fanatisme. Le Parlement prenait parti pour les persécutés, et la cour restait témoin presque insensible des troubles. Lorsqu'en 1752, le Parlement eut décidé que la bulle Unigenitus n'était ni une règle de foi, ni un jugement de l'Église, le plus vif enthousiasme éclata dans la population. Le conseil d'État cassa son arrêt, mais le Parlement suivit dans ses jugements la règle qu'il s'était tracée. De leur côté, les Molinistes redoublèrent de fureur. Les prédicateurs tonnaient autant contre les Parlements que contre les philosophes, et les magistrats faisaient arrêter les prédicateurs. Quelques incrédules, pour fronder la cour et les Jésuites, feignaient d'être Jansénistes; les anathêmes et les colères troublaient trop souvent les derniers moments des malades; les hôpitaux eux-mêmes étaient autant de théâtres où le fanatisme se montrait dans toute sa nudité. On exigeait des déclarations catégoriques de pauvres gens qui ne comprenaient rien aux questions agitées. Les hommes légers s'amusaient de tous ces troubles; ils lançaient dans le public une foule de chansons et de pamphlets satiriques. Les hommes sérieux en gémissaient; les vrais Chrétiens versaient des larmes sur la religion, dont toutes ces querelles scandaleuses détruisaient la légitime influence dans les âmes.

Les Jésuites étaient ivres de joie au milieu de ce désordre. Ils

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