Sayfadaki görseller
PDF
ePub

Nous ne décrirons pas l'expérimentateur, un prêtre. Appelons-le, si vous le voulez bien, l'abbé Durand. Faire autour de son nom une publicité serait l'exposer aux sollicitations de tous les braves gens qui veulent refaire leur puits ou creuser dans leur prairie un abreuvoir. Monsieur Durand n'a rien du sourcier professionnel, et n'aspire pas à la célébrité.

Il s'est seulement posé cette question: Y a-t-il un problème des sourciers? La baguette tourne-t-elle? Dans l'affirmative, faut-il attribuer son mouvement à l'auto-suggestion seule ?

Pour le savoir, il a cueilli une fourche de bois vert, aux branches souples et bien égales; il l'a prise dans ses mains suivant le rite habituel, et s'est promené bravement au-dessus d'un petit ruisseau. Aucune sensation; mais la baguette s'est relevée vers sa poitrine ou inclinée vers le sol, suivant qu'il la tenait de telle ou telle façon. Des séminaristes veulent tenter la même expérience; beaucoup essaient en vain, mais quelques-uns obtiennent des résultats analogues.

Monsieur Durand a répété fréquemment depuis deux ans sa tentative sur des cours d'eau visibles, sur des courants cachés et couverts, et sa baguette réagit toujours. Un confrère va le mettre à l'épreuve. Dans les vastes sous-sols d'un monastère ancien, uniformément dallés de larges blocs de schiste, épais de plusieurs centimètres, deux sources ou infiltrations sont captée afin de protéger 1 s fo .dations. Dans ces salles voût ́es et partout humides, aucun signe extérieur ne les révèle au regard le plus perspicace ; l'autosuggestion sera réduite à la probabilité de pile ou face, une chance sur deux de réussite. Mais la baguette de l'abbé Durand lui permet d'indiquer avec précision les deux emplacements. Dans un jardin voisin, un puits fut autrefois condamné parce que l'eau en était douteuse. Il est maintenant recouvert, masqué sous une épaisseur d'un mètre de terre, et la verdure des massifs le dissimule; les deux témoins de la recherche ne sont pas d'accord sur sa position, et ne peuvent suggestionner l'opérateur. Là encore le jardinier viendra constater que la baguette a dit vrai.

Un curé des environs entend parler de la baguette; comme par hasard, il désirerait un bassin dans le petit

--

dess

d'est

Mais,

tères.

enclos du presbytère. L'abbé Durand le parcourt lente-
ment. «Si les procédés rapportés dans les livres sont exacts,
dit-il, un petit filet d'eau traverse votre potager à environ
1,50 m. sous terre ; voici le tracé de son parcours.
répond M. le curé, votre tracé aboutit à la cave de la ferme
voisine, cave souvent inondée... » Ce détail imprévu décide
à tenter l'aventure, et l'eau apparaît entre 1,50 et 2 mètres.
Au cours d'un voyage de vacances, Monsieur Du and
visite une propriété dans le Midi de la France. Le maître
de céans est inquiet de la sécheresse, son puits baisse ;
aura-t-il de l'eau jusqu'au retour des pluies? Un géologue
a été appelé, car l'exploitation agricole est importante.
En attendant sa venue, l'abbé Durand a machinalement
cueilli une baguette dans la haie la plus proche. « Votre
puits est bien placé, dit-il, mais cependant je crois qu'il y
a plus d'eau à quelques mètres vers la droite de l'excava-
tion. » L'expert déclare que le puits est à l'endroit apparem-
ment le meilleur, sur l'unique nappe de quelque importance
possible sur cette hauteur isolée, où l'eau se rencontre dans
une poche sableuse séparée du massif calcaire par une mince
couche d'argile feuilletée. A quelque temps de là, le châte-
lain écrit : « Vous souvient-il que lors de notre promenade,
baguette en main, vous disiez qu'à votre avis le grand
puits du potager était un peu excentrique au courant sou-
terrain, que vous présumiez passer à côté ? (Du côté droit
en regardant la ferme). Eh bien! nous avons curé ce puits,
l'eau ayant beaucoup baissé. Or nous avons constaté que,
en ce moment, l'eau vient à peu près exclusivement de ce
côté droit >>.

Enfin, il faut se borner, la maison de campagne d'un séminaire se trouvait démunie à l'époque des vacances scolaires, la sécheresse ayant tari les puits. Sur ce plateau à pente très faible, où l'eau de surface se rencontre un peu partout au niveau de l'argile yprésienne, la géologie est un médiocre secours, puisqu'en trois endroits d'un espace restreint la nappe semble épuisée. Pourtant la baguette réagit encore, comme si un petit ruisselet souterrain, qu'elle suit de part et d'autre de l'enclos sur plusieurs centaines de mètres, donnait quelque espoir. Cela semble une gageure, cai le point choisi pour la fouille est à vingt mètres à peine d'un

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

puits desséché. Les séminaristes veulent en avoir le cœur net; ils empruntent une sonde de puisatier. Leur forage, qui n'est même pas tubé, s'éboule au niveau des sables. aquifères. Une pompe placée dans le trou de vingt centimètres de diamètre, donne chaque jour deux cents litres d'eau pendant les deux semaines des vacances.

Évidemment tout cela est peu de chose : peut-on cependant l'expliquer uniquement par le flair géologique guidant l'auto-suggestion ?

Signalons, en terminant ce simple exposé, une remarque assez curieuse de Monsieur Durand. Lorsqu'il prospecte les environs immédiats d'un courant coulant à l'air libre ou sous la terre, sa baguette ne réagit pas seulement dans une zone centrale à l'aplomb du ruisseau. Mais, de part et d'autre, elle traverse d'ordinaire trois, quatre, et quelquefois cinq zones symétriques par rapport à l'axe du courant, où des phénomènes de même ordre se reproduisent, comme si, parallèlement au lit, il existait trois, quatre, cinq bandes d'influence séparées par autant de bandes de silence. L'analogie paraîtra singulière avec ce que nous savons des mouvements vibratoires, des interférences d'ondes électriques, sonores, lumineuses... Coïncidence peut-être, mais qui valait d'être notée.

Que conclure? Notre ami Durand garde sa conviction que le problème des sourciers n'est pas résolu a priori par une fin de non-recevoir, et que l'auto-suggestion, souvent constatée, toujours difficile à éviter complètement, ne donne pas de tous ces faits une explication adéquate.

CHARLES POISSON.

BIBLIOGRAPHIE

I

LA VIE ET LES TRAVAUX DU CHEVALIER JEAN-CHARLES DE BORDA (1733-1799). ÉPISODES DE LA VIE SCIENTIFIQUE AU XVIIIe SIÈCLE, par JEAN MASCART, professeur à la Faculté des Sciences, Directeur de l'Observatoire de Lyon. Introduction par M. ÉMILE PICARD, Secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences. Un vol. in-8o de VIII-821 pages, fascicule 33 de la Nouvelle Série (II, Droit, Lettres) des Annales de l'Université de Lyon. Lyon, Rey; Paris, Picard, 1919.j

Le volume de M. Mascart est une œuvre d'érudition qu'il faut juger comme telle. Une lecture attentive du titre de ce travail fait prévoir qu'il en contient en réalité deux; mais, au lieu de se suivre, comme on pourrait le croire, ils se compénètrent du commencement jusqu'à la fin. Ce sont : d'abord, La vie et les travaux du chevalier Jean-Charles de Borda; ensuite, des Épisodes de la vie scientifique au XVIIIe siècle. Nous ne serions pas surpris si plus d'un lecteur trouvait que le plan général de M. Mascart prête un peu le flanc à la critique; car, il faut l'avouer, les Épisodes de la vie scientifique au XVIIIe siècle se rattachent parfois à la biographie de Borda par un lien assez artificiel et viennent couper à l'improviste le récit. Défaut qui eût entaché une œuvre purement littéraire, mais d'une importance beaucoup moins sérieuse dans un travail d'érudition. Or, c'est un travail de ce genre que M. Mascart a voulu nous donner, et, ercore une fois, nous le jugerons comme tel. Ceci entendu, j'ajoute immédiatement que ce travail est le fruit de longues recherches, et qu'il faut en penser beaucoup de bien.

« Le nom du chevalier de Borda, dit M. Émile Picard dans l'Introduction, n'est certes pas ignoré. Il rappelle à beaucoup deux ou trois instruments, mais bien peu savent quelle fut la haute valeur du savant, dont l'activité prodigieuse s'est portée sur les mathématiques, l'astronomie, la physique, et qui sut appliquer de la façon la plus heureuse ses connaissances théoriques à la navigation et à la géodésie ».

Après la lecture de ce passage, j'ai ouvert, pour rafraîchir mes souvenirs, l'Histoire de l'Astronomie au XVIII siècle pai Delambre (Paris, Bachelier, 1827). L'historien français, qui avait personnellement connu Borda, en parle avec éloges à plusieurs reprises, notamment dans sa notice sur Tobie Mayer (p. 446). Mais il le fait toujours en termes fort courts. Borda méritait mieux, cependant A-t-il aujourd'hui une biographie digne de lui? J'hésite à répondre. Mais, s'il fallait dire non, le coupable serait Borda lui-même et pas du tout son biographe. Le chevalier était trop grand seigneur, trop imbu des préjugés de caste, pour se faire valoir comme savant. Il eût cru déroger. En conséquence, il a peu publié et n'a pas laissé de correspondance scientifique. Malgré les patientes et minutieuses recherches de M. Mascart, nous sommes loin de connaître Borda comme nous le souhaiterions. Et cependant il est à craindre que, faute de plus amples documents, le Directeur de l'Observatoire de Lyon n'ait épuisé le sujet. Quel dommage!

Voilà pour la vie et l'œuvre de Borda. Mais comment résumer en quelques lignes les multiples dissertations qui forment l'objet des Episodes de la vie scientifique au XVIII siècle? Donnons du moins le titre de quelques-unes parmi les plus importantes: Aperçu de la situation de la Marine française au début de la carrière de Borda; Réorganisation de la Marine française à la fin de la royauté ; Histoire de l'Académie de Marine (dissertation particulièrement intéressante); Recherches sur la construction des Tables de la Lune et sur les vicissitudes de la solution du problème des longitudes. Cette étude est à rapprocher de l'Histoire de la Longitude à la mer au XVIII siècle en France, par F. Marguet. Ce dernier, lieutenant de vaisseau et professeur à l'École navale, traite le sujet sous un aspect très généIVe SÉRIE. T. 1.

13

« ÖncekiDevam »