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CHAPITRE IV.

Administration et juridiction ecclésiastiques.

Autrefois, toutes les administrations russes étaient collégiales; c'étaient des colléges ou conseils qui discutaient les affaires de finance, de guerre, de travaux publics, etc. Les rouages de notre système administratif et centralisateur ont paru au gouvernement russe de meilleurs modèles à suivre, et les administrations collégiales ont été remplacées par des ministres dont le pouvoir et la volonté ont nécessairement plus de souplesse sous la main du prince. Les administrations collégiales religieuses ont cependant survécu à cette réforme. Il y a à Varsovie une commission ecclésiastique, composée d'un évêque et de deux assesseurs ecclésiastiques, qui sont consultés par la commission supérieure des affaires de l'intérieur du royaume de la Pologne, dans toutes les affaires administratives qui concernent le clergé, telles que dîmes, biens-fonds des paroisses et fondations pieuses, etc. Il y a à Saint-Pétersbourg un collége ecclésiastique catholique fondé par un ukase du 10 novembre 1801', pour servir de ministère des

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1 Voyez Appendice, no 7.

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cultes aux six diocèses latins de l'Empire'. Le métropolitain de l'Eglise latine est président-né de ce conseil, qui se compose d'un évêque latin, d'un abbé mitré et de six prélats représentant les six diocèses et élus par eux. Le collége ecclésiastique est consultatif en matière d'administration, et a l'autorité d'une cour de cassation en matière judiciaire.

L'autorité des évêques diocésains a été réglée par les manifestes de 1772 et 1774 pour les provinces polonaises et russes. Ces manifestes reconnaissent aux évêques les pouvoirs et les facultés que leur accordent les canons. Ils nomment, en conséquence, les desservants dans toutes les églises et chapelles de leur diocèse; ils règlent les frais du culte, ils tiennent la main à l'exécution des lois de l'Eglise concernant les sacrements, les enterrements et la sanctification du dimanche. Ils jugent les infractions aux lois canoniques avec l'assistance d'un consistoire nommé et présidé par eux; enfin ils jouissent du droit de collation des bénéfices, d'après un ukase du 10 novembre 1801, $3, et c'est seulement dans le cas où la décision des évêques est contestée par les parties qu'il en est référé au métropolitain de Varsovie, pour les

Il ne s'agit ici que de l'Eglise latine dans les provinces russes proprement dites.

2 Hic episcopus et in omnibus ubiquè locorum in imperio nostro existentibus romano-catholicis ecclesiis potestatem eamdem exercendi facultatem habet, respectu religionis suæ, secundùm canones ecclesiasticos (Manifest. du 12 mars 4774).

diocèses du royaume de Pologne, et au collége établi à Saint-Pétersbourg pour les diocèses de l'empire. Ces deux juridictions supérieures prononcent en dernier ressort, en se conformant aux lois canoniques et sans se préoccuper de l'autorité politique, sauf l'exception relative aux communications avec le Saint-Siége '.

On a présenté le collége ecclésiastique de SaintPétersbourg comme un instrument docile du gouvernement russe; cependant nous voyons que, d'accord avec le légat du Saint-Siége, les grecsunis avaient demandé qu'on leur permît d'avoir des représentants dans ce collége ecclésiastique, que cette demande fut accueillie avec bienveillance par l'empereur Alexandre, et que la fidélité de l'Eglise grecque-unie à l'Eglise romaine n'a jamais été ébranlée tant que les choses ont été maintenues dans cet état, c'est-à-dire jusqu'en 1828, époque à laquelle fut établi un collége ecclésiastique séparé pour l'Eglise grecque-unie. C'est depuis cette séparation, et seulement dix années après, qu'a eu lieu l'apostasie de cette Eglise sous la conduite de ses évêques.

Les affaires où il s'agit d'offenses causées par des ecclésiastiques sont, en Russie et en Pologne du. ressort de l'autorité ecclésiastique. Dans les causes criminelles où se trouvent compromis des membres du clergé catholique, les députés du

1 Ukase du 40 novembre 1801.
2 Ukase du 4 juillet 1804.

clergé assistent de droit à l'instruction du juge→ ment'.

Il y a dans toutes ces institutions, relatives à l'administration et à la juridiction ecclésiastiques, un vice qui se retrouve dans tous les établissements religieux de la Russie: c'est toujours le pouvoir temporel qui se fait législateur de sa propre autorité, écartant avec soin l'intervention de l'autorité spirituelle, et disposant du domaine de l'Eglise comme de celui de l'Etat pour mieux enraciner, sans doute, dans l'esprit des peuples, l'idée de la suprématie du pouvoir temporel; mais, d'un autre côté, il est impossible de méconnaître que le législateur russe a gardé quelque respect pour la loi de l'Eglise, et que, s'il a agi en gouvernement absolu, il n'a pas agi en gouvernement athée. Enfin, s'il se montre ombrageux de tout ce qui peut limiter son autorité temporelle, et jaloux de renfermer l'Eglise catholique dans d'étroites limites, c'est l'Eglise seule qui dirige, dans ces limites, son troupeau d'après ses préceptes et ses lois.

Si quelque chose en France devait être indépendant de l'autorité temporelle, depuis que la Charte a rendu cette autorité indifférente, depuis qu'un ministre des cultes ne peut appartenir, constitutionnellement, à aucune religion, c'est évidemment. l'administration spirituelle et disciplinaire de l'Eglise. Mais, ici encore, et plus que partout,

1 Code des lois de l'empire, volume IX, § 333, et volume X, § 2031.

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les principes de liberté de la Charte ont été foulés aux pieds. Vers la fin du xvm° siècle, une voix qui s'intitulait la voix du sage et du peuple, et qui n'était autre que celle de Voltaire, avait proclamé le principe de la suprématie temporelle. « Il ne « doit pas y avoir deux puissances dans un Etat. « Tout doit être soumis à la puissance tempo«relle, disait le chef de l'école philosophique. « Les ministres de la religion sont dans l'Etat «< comme les précepteurs dans la maison d'un père « de famille; le prince a sur ceux-là la même au« torité qu'un père sur celui-ci. Par conséquent, « le prince peut, à son gré, modifier, changer, ré« former, anéantir la discipline de l'Eglise ; dispo« ser, comme de ses biens propres, en faveur de <«< qui lui semble bon, des bénéfices séculiers et réguliers, desbiens des couvents, des monastères, « de toutes les communautés religieuses, attendu « que ceux qui les possèdent ne sont bons qu'à «< prier Dieu, et qu'il peut et doit forcer ces der«niers à labourer la terre1. »

Ce sont ces principes qui ont été substitués à ceux de la Charte. C'est ainsi qu'on a pris pour base de la législation actuelle les articles organiques, décrétés, comme les lois russes, sans le concours de l'autorité spirituelle, et repoussés constamment par les protestations du Saint-Siége. On ne s'est pas même contenté de ces lois pour

1 Pamphlet de Voltaire, publié en 1768.

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