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qui, naturellement, n'a pu résister au contrôle des observations modernes.

Parmi les êtres fauteurs des tremblements de terre, les mânes auxquels, plus tard, succédèrent les damnés dans les croyances populaires des peuples chrétiens, méritent une mention spéciale, tant est grand, dans toutes les parties du monde et à toutes les époques, le nombre des légendes où nous les voyons en relations avec des phénomènes sismiques et volcaniques. L'origine en est sans doute la terreur qu'inspire la mort et le rôle malfaisant que l'homme a partout attribué aux défunts dans leur vie souterraine, forme grossière sous laquelle ils concevaient l'immortalité de l'âme. C'est donc logiquement qu'on leur imputa le déchaînement des tremblements de terre.

A toutes ces fables, qui prennent des formes analogues dans l'interprétation d'autres phénomènes naturels, le célèbre ethnologue Edward Tylor (1) a attribué l'heureuse expression de « Contes pour expliquer ». Il ne faut pas les confondre avec l'innombrable cycle de

légendes et de mythes où figurent des tremblements de terre à titre de simples épisodes. Notons ici que, dans ce dernier cas, on peut, dans certaines circonstances, reconnaître, à l'origine de semblables récits, un tremblement de terre effectivement arrivé et, parfois même, un sisme de date connue qui situe la légende dans la chronologie.

Nous ne poursuivrons pas plus loin cette brève esquisse d'une partie de la sismologie ancienne, dont il nous suffisait de faire connaitre la grande importance au point de vue de l'ethnographie, de la philosophie et surtout de l'évolution des croyances de l'homme au sujet des tremblements de terre. Une étude plus développée risquerait de paraître puérile à qui ne s'inté

(1) La civilisation primitive. Trad. de l'anglais sur la 2e édit. Paris, 1876.

resse point aux traditions populaires. Nous retiendrons surtout que cette sismologie des primitifs a traversé toute l'histoire et qu'aujourd'hui encore on peut en reconnaître les traces dans certaines croyances populaires.

II. LES PHILOSOPHES GRECS AVANT ET APRÈS ARISTOTE

Pendant une longue période de six siècles avant notre ère, les philosophes grecs, si épris de la nature, ont eu le temps d'imaginer de nombreuses théories sismiques. Saut celle d'Aristote, nous ne les connaissons qu'indirectement. Celle-ci mérite par son exceptionnelle importance d'être traitée à part; quant aux autres, nous adopterons, pour en donner une idée, l'ordre chronologique.

On ignore si Phérécidès (première moitié du vi° siècle) professait effectivement une théorie des tremblements de terre, mais suivant des traditions rapportées par de nombreux écrivains postérieurs, Cicéron (1) et Diogène Laerce (2) par exemple, on sait qu'il prédisait les commotions terrestres par l'examen de l'état des eaux des puits. Il tirait ainsi des pronostics, de phénomènes qui n'étaient qu'un effet consécutif du mouvement sismique. Cette erreur s'est maintenue de longs siècles, pour disparaître seulement de nos jours, après l'insuccès d'une tentative entreprise en 1874 par Stefano de Rossi pour organiser en Italie des observations systématiques.

On ne saurait passer sous silence l'étrange opinion attribuée à Pythagore, disciple de Phérécidès, par Claude Elien (3), qui vivait au commencement du

(1) De la divination. Liv. III. Ch. XIII. L.
(2) Vie des philosophes. Vie de Phérécidès.
(3) Histoires variées. Liv. IV. Chap. XV.

IIIe SÉRIE. T. XXIX.

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Ie siècle de notre ère : Les tremblements de terre s'expliqueraient par les assemblées des mânes réunis sous terre. On a peine à croire à une telle aberration de la part du célèbre philosophe, et l'on peut supposer qu'il s'agit là d'une légende née pendant l'intervalle de plus de six siècles qui sépare Pythagore de cet écrivain, contemporain d'Alexandre Sévère. En tout cas, si l'attribution à Pythagore est fondée, il est à penser que le philosophe aura déduit cette interprétation des croyances des Egyptiens, qui donnaient. l'importance que l'on sait aux faits et gestes du Double. A la vérité, on ignore si les Egyptiens attribuaient aux mânes les tremblements de terre. Il nous semble même probable que non, car leur pays était à peu près indemne de ces phénomènes. En tout cas, ils s'en préoccupaient si peu qu'ils ne nous en ont laissé aucun document.

Aristote (1) et Sénèque (2) ont exposé, mais celui-ci plus clairement que celui-là, les théories sismiques des philosophes antérieurs au Stagirite. Nous n'en ferons qu'un résumé succinct, leur intérêt historique étant restreint du fait qu'elles n'ont guère eu d'influence sur l'évolution des théories ultérieures. D'ailleurs nous ne les connaissons que de seconde main.

C'est d'abord Thalès de Milet (639 à 519). Il s'expliquait les tremblements de terre par la mobilité de la planète qu'il supposait voguer sur la Grande Mer, ou Océan, hypothèse cosmogonique vraisemblablement venue de l'Inde védique ou brahmanique. Elle se sera transmise, par la Perse, au bassin occidental de la Méditerranée, tout en se conservant dans les écrits bouddhistes. Thalès étayait sa théorie, nous dit Sénèque, sur ce fait d'observation que les grands tremblements

(1) Météorologie. Liv. II. Chap. VII. (2) Questions naturelles. Liv. VI.

de terre s'accompagnent souvent d'éjections d'eaux venues du sous-sol par les craterlets suivant l'expression employée par notre terminologie moderne. Le philosophe romain objecte avec raison que ce phénomène accessoire n'a pas une ampleur en proportion avec la cause qu'il met en jeu; qu'il n'accompagne d'ailleurs pas tous les tremblements de terre: et qu'enfin les commotions sismiques devraient se faire sentir par toute la Terre, puisqu'elles agiteraient en bloc toute la planète.

Anaximène de Milet vivait au vie siècle, donc peu après Thalès. Il aurait prédit avec succès un tremblement de terre aux Lacédémoniens, mais on ignore comment. Avec une réelle compréhension du sujet, il trouva, dans la Terre elle-même, la cause de ses commotions, idée logique s'il en fut, mais qui mit des siècles à faire son chemin, puisque, jusqu'au seuil de nos temps modernes, nous verrons encore prédominer dans les théories l'influence de causes externes, cosmiques et météorologiques. Dans des vides souterrains, tombent, selon Anaximène, les débris de la planète, débris dissous par l'eau, rongés par le feu, emportés par un souffle violent, ou délabrés par de vagues causes de destruction. Les voûtes de ces cavernes s'écroulent et font trembler la Terre. Anaximène est donc le précurseur d'une théorie moderne qui, après avoir joui d'une vogue remarquable, n'a plus guère de partisans, quoiqu'elle soit soutenue encore par un éminent sismologue, Agamennone. Nous en reparlerons.

Sur la théorie sismique d'Anaxagore de Clazomène (milieu du vi° siècle), nous possédons plusieurs renseignements. D'après Aristote, il invoquait l'action de l'éther, entité physique des anciens, dont l'essence nous est peu compréhensible: c'est une théorie obscure, que le philosophe de Stagire ne rend d'ailleurs pas plus claire

en la réfutant. Mais selon Plutarque (1), Anaxagore attribuait les tremblements de terre « à ce que l'air, s'étant introduit par dessous (l'écorce terrestre), vient se heurter à la surface intérieure de la terre, surface dense qui ne saurait lui livrer passage; alors l'air s'agite et met en mouvement la terre où il est contenu ». Cette conception ne diffère pas essentiellement, comme nous le verrons, de la théorie aristotélicienne. Sénèque, au contraire, range Anaxagore parmi les philosophes qui, tout en se séparant sur le mode d'action, sont d'accord pour attribuer les tremblements de terre au feu. Nous aurons à revenir là-dessus à propos des théories électriques.

Démocrite d'Abdère, mort au cours de la 94° olympiade (404 à 401), modifia un peu l'opinion d'Anaximène en invoquant le choc des eaux souterraines contre les parois de leurs conduits, et Sénèque acceptera aussi cette manière de voir.

Puis vint Aristote dont la théorie si célèbre a eu trop de longévité pour ne pas mériter d'être examinée à part.

Ces quelques renseignements sont amplement suffisants pour des théories peu connues, vite tombées dans l'oubli, sauf celle d'Anaximène. Elles n'intéressent plus guère que les érudits.

Après Aristote, comme nous l'apprend Diogène Laerce dans ses Vies des philosophes, Zénon de Citium (362 à 264) et Épicure (343 à 271) ont transmis la théorie du Maître à leurs disciples des écoles stoïcienne et épicurienne.

III. LA THEORIE D'ARISTOTE ET SES ORIGINES

La théorie aristotélicienne des tremblements de terre a régné sans conteste jusques et y compris une partie

(1) Opinions des Philosophes. Liv. III. Chap IX. Les tremblements de terre.

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