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Arrivons aux montagnes. « Où sont les montagnes? Quelles sont les plus proches, les plus belles, les plus visitées? Se ressemblent-elles toutes, ou présentent-elles des aspects différents? Commençons naturellement par les plus voisines, celles qui nous appartiennent et nous touchent (1). » C'est de celles-ci surtout que nous parlera M. Dupaigne. La forme de la France, le bassin de Paris, les Vosges, le Plateau Central, le Jura, les Pyrénées, la comparaison des Pyrénées et des Alpes, les Alpes enfin, feront presque tous les frais d'un long chapitre où un seul paragraphe, relativement court, est consacré aux autres montagnes de l'Europe; il est suivi de quelques pages seulement sur les montagnes lointaines.

Cette inégalité dans le partage du sujet n'a rien qui doive surprendre. L'auteur ne s'est point proposé de dresser un inventaire complet et détaillé de toutes les montagnes du globe; son livre est une œuvre de vulgarisation, destinée aux voyageurs, aux jeunes gens surtout, que la saison des vacances conduit aux pays des montagnes. Il veut les aider, avant le départ, à préparer le voyage et, au retour, à fixer leurs souvenirs. Les détails spéciaux devaient donc être consacrés aux montagnes que nos touristes européens visitent avec prédilection, celles de la Suisse, de la France et de l'Italie. Donnons avec l'auteur les honneurs à la France.

Si nous jetons les yeux sur la carte de la France et des pays voisins, dont le livre de M. Dupaigne est orné, nous voyons s'étendre au nord une vaste dépression dont Paris est le centre. Paris, selon l'expression de M.Élie de Beaumont (2), est « le pôle creux et attractif du sol français... » il << est devenu la capitale de la France et du monde civilisé... » et « réunit autour de lui les richesses de la nature, de l'industrie et de la pensée. » Le sol français a aussi « un pôle saillant et répulsif; » c'est le Cantal, ce sont les monts Dore, points culminants du Plateau Central dont les saillies granitiques, flanquées de masses calcaires, occupent, au sud du Bassin de Paris, une superficie à peu près égale à celle de ce dernier. « Tout semble fuir en divergeant de ce centre élevé qui ne reçoit du ciel qui le surmonte que la neige qui le couvre pendant plusieurs mois de l'année. Il domine tout ce qui l'entoure et ses vallées divergentes versent les eaux dans toutes les directions. Les routes s'en échappent en rayonnant comme les rivières qui y prennent leur source » et traversent en tous sens la ceinture de plaines qui l'entoure et où s'élève une pléiade de villes riches et industrielles. Au delà de ces plaines se dressent « les remparts de trois chaînes montagneuses, sur la crête desquelles est la

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limite du territoire français; à l'est le Jura et les Alpes, et au sud, entre les deux mers, les Pyrénées (1). » Mais revenons d'abord vers l'est, derrière la ligne de collines qui ceint le Bassin de Paris. Là serpente, dans une direction du sud au nord et sur une longueur de 260 kil.du pied du Ballon d'Alsace au pied opposé du mont Tonnerre, la chaîne des Vosges, << montagnes charmantes, montagnes aimées de tous ceux qui les ont visitées. On y trouve sur une moindre échelle, avec moins de fatigues et de dangers, tout ce qu'on va chercher en Suisse : les verts pâturages, les sombres forêts, les eaux limpides, les torrents sauvages, les cascades écumantes, les lacs tranquilles, les populations intelligentes, patriotiques, braves, honnêtes et hospitalières (2). » Jeunes touristes, allez visiter la chaîne des Vosges; si les Alpes vous réclament, traversez-la du moins par Gérardmer. Allez admirer ses trois lacs et le col de la Schlucht; de là vous monterez au Honeck, puis, suivant les sommets jusqu'au Rothenbach, vous descendrez vers Mulhouse par la charmante vallée de Saint-Amarin.

Le Plateau Central est peu connu et peu visité des touristes. Cette île granitoïde au sein d'un terrain calcaire est cependant intéressante à plus d'un titre. Sa forme est presque circulaire; son plus grand diamètre mesure environ 300 kilomètres; sa hauteur moyenne atteint 750 m. L'Auvergne, le Velay et le Vivarais, avec leurs volcans éteints, leurs cratères et leurs coulées de laves, la couronnent; dans ses flancs et à ses pieds sont situés les grands dépôts houillers de Saint-Étienne, d'Alais, d'Aubin, du Commentry, du Creuzot, etc. Bien des régions pittoresques nous arrêteraient au Plateau Central, si nous n'avions à jouir des spectacles plus grandioses qui nous attendent dans les Pyrénées et les Alpes. Saluons à la hâte les sommets du Jura, d'où l'on embrasse si bien l'ensemble du soulèvement Alpin, et remarquons la disposition de cette chaîne de montagnes; elle est des plus intéressantes et des plus instructives au point de vue géologique. Nous avons là un exemple classique de ce que les géologues appellent un plissement de terrains. « Il semble, en effet, que les couches du terrain jurassique, d'abord horizontales, se soient plissées et contournées sous une forte pression agissant à l'est et à l'ouest, de manière à produire ces chaînes et ces vallées parallèles, dans lesquelles la crête des chaînes présente le sommet des courbes formées par le terrain plissé, tandis que le fond des vallées en offre la concavité (3).

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(1) P. 85.

(2) P. 95.

(3) Dussieux, Géographie générale. — Cité par l'auteur, p. 105.

« Nous voici arrivés aux Pyrénées, la chaîne la plus gigantesque en Europe, après les Alpes et le Caucase, simple et presque rectiligne comme cette dernière, véritable type des chaînes de montagnes (1). » On peut, avec quelques restrictions, admettre la comparaison de M. Élisée Reclus qui voit, dans les ramifications des Pyrénées, « une brauche d'arbre, ou mieux encore, une feuille de fougère » qui « se divise et se subdivise, à droite et à gauche, en petits rameaux, en feuilles et en folioles (2); » mais ne perdez pas de vue que cette feuille a 450 kilomètres de longueur sur 100 de largeur et une superficie d'environ 33 000 kilomètres carrés (3). La chaîne des Pyrénées va en exhaussant ses pics en s'avançant vers l'est; à 170 kilomètres de l'Atlantique le pic du Midi d'Ossau dépasse la limite des neiges éternelles; nous trouvons là les caractères des chaînes alpestres. Est-ce à dire que les beautés des Pyrénées soient comparables à celles des Alpes? Ne touchons pas à cette question; il y a des beautés que l'on ne compare pas et les beautés de la nature sont de celles-là. Allez visiter les Pyrénées mais ne vous dispensez pas de voir les Alpes, « ce pêle-mêle de gigantesques massifs séparés, dominés par des groupes de cimes neigeuses, et se joignant par des rameaux qui s'entrecroisent dans tous les sens. » Vous y trouverez réunies toute la variété et toute la magnificence des spectacles de la nature. Suivez le conseil de M. E. Rambert (4) : « Il faut vivre avec les Alpes. » Voyez-les du moins ; et si le hasard ou les affaires vous appellent un jour en Italie, ne perdez pas l'occasion de contempler les grandes Alpes. Si vous disposez de quelques jours et si le froid et la neige ne vous effrayent point, engagez-vous à pied dans un de ces magnifiques passages qui conduisent à Milan ou à Turin; celui du Grand Saint-Bernard par exemple ; je vous le recommande tout spécialement, parce que, en vous permettant d'admirer la nature, il vous procurera la satisfaction de saluer en passant un des plus beaux monuments de la charité chrétienne.

M. Dupaigne, à la fin de ce chapitre, jette un coup d'œil sur le reste de l'Europe; il signale à son lecteur les chaînes de montagnes, les massifs, les pics célèbres ou intéressants; il le conduit ensuite aux montagnes lointaines les mieux connues aux noms desquelles il a soin de rattacher ceux des savants voyageurs qui les ont explorées.

Ce qui intéresse avant tout le visiteur des montagnes, c'est d'être renseigné sur leur hauteur. Mais d'abord avons-nous une idée bien nette de ce que l'on appelle ici hauteur ou altitude d'une montagne ? Ce n'est pas,

(1) P. 108.

(2) Joanne, Itinéraire général de la France, t. VI; Pyrénées, introduction par Élisée Reclus. Cité par l'auteur, p. 108.

(3) P. 108.

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comme on pourrait le croire, la distance verticale de la cime au plan de la base; ce plan a lui-même une certaine altitude, donc généralement cette distance verticale ne sera qu'une partie de la véritable hauteur dont il est ici question. Celle-ci est la distance verticale qui sépare le sommet de la montagne du niveau moyen des mers; c'est-à-dire de cette surface idéale, mais précise et constante, qui est la moyenne entre toutes celles que les vagues, les vents et les marées font prendre à la mer. Cette surface de niveau moyen, prolongée à travers les continents, passe tantôt au-dessus tantôt au-dessous du sol, en sorte que l'altitude d'une montagne est la somme algébrique de l'altitude du plan de sa base et de la distance verticale de celui-ci au sommet. L'œil est un instrument bien trompeur dans l'appréciation des hauteurs; nous possédons heureusement deux moyens de les mesurer indépendants des caprices de notre organe : l'un très exact mais souvent impraticable, ce sont les mesures trigonométriques; l'autre sujet à l'erreur mais applicable à tous les points accessibles, c'est l'emploi du baromètre. Le baromètre le plus en Vogue dans le monde excursioniste est le baromètre à siphon de GayLussac, perfectionné par Bunsen; les baromètres anéroïdes, plus commodes mais souvent paresseux et trop impressionnables aux variations de température, commencent aussi à être en faveur. Les hauteurs des principales montagnes d'Europe sont aujourd'hui connues; M. Dupaigne les groupe dans un tableau des « hauteurs relatives des montagnes auprès de nos monuments et de nos collines. » On voit en parallèle la tour de Notre-Dame (66 m.) et l'Elbrouz (5630 m.). Quel contraste entre les ouvrages des hommes et les œuvres de Dieu !

Un mot caractérise la disposition générale des montagnes, le groupement; de là les expressions de massifs et de chaînes. Seuls certains volcans dressent leurs cônes de débris au sein des plaines. Au contraire la forme des montagnes est aussi variée que les causes dont elle dépend, la nature des roches, leur disposition, le climat, la fréquence et l'intensité des pluies, des vents et des autres agents atmosphériques. Ici ce sont les sommets arrondis des montagnes granitiques, les domes, les ballons, les tétes et les mottes; là les plateaux et les tours des montagnes calcaires ; voici des pics formés de couches schisteuses presque verticales ou de roches éruptives fondues; une pointe qui se dresse isolée, c'est la dent de Jaman; une cime élancée et étroite, c'est la pointe de Sales ou l'aiguille du Géant. Laissons les points les plus bas, les cols, les passes, les passages; ne nous arrêtons pas non plus à considérer les vallées; leurs bois, leurs eaux et leurs champs ont tant de charmes, elles nous retiendraient trop longtemps. Hâtons-nous de laisser la poésie des montagnes et d'aborder la partie scientifique du livre de M. Dupaigne.

«De quoi sont faites les montagnes?» Comment répondre brièvement à cette vaste question? Comment résumer en quelques lignes les cinquante

pages que l'auteur lui consacre? Je pourrais tout au plus dresser une table des matières; dire par exemple que l'on divise les matériaux les plus importants des montagnes en roches plutoniques, neptuniennes, métamorphiques; que la silice domine dans les roches éruptives soit à l'état pur et cristallisé (quartz), soit dans son composé le plus abondant ici, le feldspath, soit enfin dans les variétés de ce dernier, l'orthose, l'albite, etc.; que ces minéraux se combinent d'une manière très variée pour donner les roches granitiques avec leurs cristaux en masse compacte; les roches porphyriques avec leur pâte et leurs noyaux; les roches volcaniques avec leurs pores et leurs bulles. Et si nous abordons la question des roches neptuniennes que de choses à signaler sur les actions mécaniques, chimiques et vitales de l'eau qui, poursuivant lentement mais constamment son œuvre, a trituré, charié, décomposé, tassé les argiles, les sables, les grès, les silex, les calcaires; creusé et orné nos plus belles grottes. Et ces autres puissances, l'action chimique des gaz et des liquides; la chaleur terrestre, la pression qui ont métamorphosé l'argile en schistes et les calcaires en marbres. Et les mines, et les filons, et la houille..... Je m'arrête; je crains que cette liste de mots dépouillés des détails si intéressants dont les encadre M. Dupaigne, ne rebute le lecteur.

Signalons plutôt cette bonne remarque, qui ouvre un savant chapitre sur l'origine des montagnes. « Ne soyons pas trop ambitieux dans nos affirmations; ayons la modestie d'admettre qu'il reste quelque chose à faire pour nos petits-enfants, et contentons-nous d'appeler hypothèses les opinions qui ne sont pas mathématiquement ou expérimentalement démontrées » (1). Esquissons à grands traits les idées de l'auteur sur la naissance et la formation des montagnes.

C'est un fait bien établi que, dans les couches de la croûte terrestre explorées par l'homme, la température croît avec la profondeur suivant une loi plus ou moins régulière. Supposons que cette augmentation progressive de la température continue à travers les couches que l'expérience n'a pas atteintes, et nous arrivons à l'hypothèse du feu central dont les éruptions volcaniques seraient une preuve sensible. Cette hypothèse, jointe à la conception de Laplace sur la formation de notre système planétaire, présente à l'esprit une théorie cosmogonique satisfaisante. A l'origine la masse entière du soleil, de son cortège de planètes et de leurs satellites, remplit uniformément, à l'état de gaz extrêmement raréfié, l'immense espace qu'embrasse l'orbite de Neptune. L'attraction anime pour ainsi dire ces matériaux des mondes qu'emporte un mouvement général de rotation. Peu à peu la nébuleuse solaire se refroidit et se contracte; sa rotation s'accélère; elle se déprime aux pôles, s'aplatit en len

(1) P. 250.

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