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J'ose réclamer l'indulgence du lecteur pour la partie théorique de mon travail; elle est assez ardue et il est pourtant nécessaire de s'en bien pénétrer pour comprendre les difficultés et le grand intérêt pratique de cette question.

I. HISTORIQUE.

Le daltonisme n'est connu que depuis peu de temps. C'est en 1777 que furent signalés les premiers cas. Deux frères, les nommés Harris, de Mary-Port, en Cumberland, étaient atteints de cette infirmité. Il en est fait une mention incomplète et peu scientifique dans une lettre de Jos. Huddart à Priestley (1).

Le premier fait bien décrit est celui du célèbre physicien et chimiste anglais, John Dalton. Il s'aperçut lui-même de son infirmité dans le courant de l'année 1790. Il s'occupait à cette époque de botanique, et il remarqua qu'une fleur de geranium zonale, qui est de couleur violette, lui paraissait bleue au jour, et rouge quand il l'examinait à la lumière d'une bougie. Les autres personnes ne s'apercevaient pas de ce changement de coloration. Ainsi averti, Dalton se mit à étudier ses sensations visuelles, et il donna bientôt une description détaillée et exacte des particularités de son sens chromatique (2).

Telle est aussi l'origine du terme de daltonisme donné à ce vice de la vue. Le terme est impropre puisqu'il ne se rapporte qu'à une seule espèce de vice, alors qu'il en existe plusieurs. Les Anglais ont, du reste, protesté contre l'usage que l'on faisait du nom d'un de leurs plus grands savants, et ils proposèrent la dénomination de Colourblindness (Far

(1) Jos. Huddart. An account of persons who could not distinguish colours, in a letter to the Rev. Jos. Priestley. Philosophic. Transact. vol. LXVII, part. 1, pag. 260, XIV.

(2) John Dalton. Extraordinary facts relating to the vision of colours, with observations. Memoirs of the Literary and Philosophical Society of Manchester. V. Part. I (1798), p. 28.

benblindheit - cécité pour les couleurs). D'autres disent achromatopsie, dyschromatopsie, chromatopseudopsie, etc. J'emploierai toujours le mot de daltonisme qui, tout défectueux qu'il est, offre au moins l'avantage de ne pas prėjuger la théorie de cette infirmité.

Depuis Dalton, le nombre de cas s'est considérablement multiplié. Seebeck (1) est le premier qui ait fait des recherches étendues sur la fréquence du daltonisme. Plus tard Wilson (2) s'occupa de la question au point de vue pratique, et spécialement dans ses rapports avec les chemins de fer et la marine. Enfin de nos jours, M. Favre, en France, M. Holmgren, en Suède, MM. Cohn, Magnus et Stilling, en Allemagne, le professeur Pflüger, en Suisse, le Dr Jos. Jeffries, en 'Amérique, le prof. Donders, en Hollande, M. Daae, en Norwège, ont poursuivi ces travaux et ces recherches.

Parmi ceux qui ont le plus contribué à l'étude théorique de la question, nous citerons principalement M. Helmholtz (3), M. Holmgren (4), M. Hering, de Prague (5) et M. Delbœuf, de Liège (6).

(1) A. Seebeck. Ueber den bei manchen Personen vorkommenden Mangel an Farbensinn. Poggendorffs Annalen der Physik und Chemie. Bd. XLII (1837), n. 10, p. 177.

(2) G. Wilson. Researches on colour-blindness, with a supplement on the danger attending the present system of railway and marine coloured signals. Edinburgh, 1855.

(3) Helmholtz. Optique physiologique, trad. par E. Javal et N. Klein. Paris. 1867, p. 388 et suivantes.

(4) Holmgren. De la cécité des couleurs dans ses rapports avec les chemins de fer et la marine. Paris, Masson.

Du même. Om färgblindheten i sverige. Förutskickadt meddel. Upsala Läkareförenings Förhandligar. 1878.

Du même. Om nägra nyare praktiska metoden att upftaka färgblindhet. Upsala Läkaref. Förhandl. 1878.

Du même. Om de färgade skuggorna och färgblindheten. Upsala Läk. Förh.

1878.

(5) Hering. Zur Lehre vom Lichtsinne. Sechs Mittheilungen an die Kaiserl. Akademie der Wissenschaften in Wien. Carl Gerold's Sohn. Wien, 1878. (6) Delbœuf et Spring. Le daltonisme Recherches expérimentales et théoriques. Revue scientifique de la France et de l'étranger. 23 mars 1878.

Delbœuf. Rapport sur les questions relatives au daltonisme intéressant les

Dans le grand nombre de cas qui ont été décrits, il en est quelques-uns assez caractéristiques par les confusions singulières auxquelles ils donnèrent lieu. C'est ainsi qu'on cite un M. Collardeau, passionné pour le dessin, où il réussissait très bien. Lorsqu'il lui prenait fantaisie de vouloir enluminer ses paysages, il ne produisait qu'un barbouillage sans nom de couleurs mal assorties. Pour lui, il n'y voyait qu'un mélange de clair et d'obscur et des gradations d'une même nuance (1). Un officier, nommė Zimmermann, de Riga, n'avait également aucune notion des couleurs; au billard il ne distinguait les billes rouges des jaunes que parce que celles-là lui paraissaient plus sombres que celles-ci. Il portait ordinairement un uniforme rouge; un jour de revue, on lui prépara un habillement vert; il ne s'aperçut pas de ce changement; et il allait se rendre à la revue, tout de vert habillé, quand on l'avertit. du tour qui lui avait été joué.

Un daltonien bien connu, qui a mis son infirmité à profit pour la science, M. Delboeuf de Liège, raconte luimême qu'il s'aperçut pour la première fois de son infirmité vers l'âge de 8 ou 9 ans. Dans un moment de récréation, à l'école primaire, il s'avisa de dire à ses camarades que la langue est bleue. Cette assertion provoqua une explosion de rire et donna lieu à une discussion, au bout de laquelle le jeune daltonien crut avoir été la victime d'un complot formé contre lui. Il ne fut convaincu de son erreur que lorsqu'elle lui fut confirmée par sa mère.

M. Delbœuf rapporte aussi qu'un de nos meilleurs dessinateurs, M. Florimond Van Loo, de Gand, est atteint du même vice. Quand il s'adonnait à la peinture, il lui

administrations de chemins de fer. Bulletin de l'Académie royale de Belgique. Série 2, t. XLV, n. 4-1878.

(1) Rosier. Observations sur la physiologie et l'histoire naturelle. xII, p. 87, 1779. Cité par M. Warlomont, dans son savant article sur la Chromatopseudopsie, du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, publié sous la direction du Dr Dechambre.

arriva plusieurs fois de donner aux arbres un feuillage d'un beau rouge. Malgré tous ses efforts, il ne put se corriger et dut renoncer à la peinture. Son infirmité ne l'empêche pas d'être un connaisseur délicat en fait de tableaux. Un fait de confusion assez étrange me fut raconté par un Anglais, avec lequel je faisais la traversée de Copenhague à Christiania. Un de ses amis est membre, comme lui-même, de la secte des Quakers. On sait qu'une des règles de cette secte est de ne jamais porter que des vêtements de couleur sombre. Or cet ami, devant se faire confectionner un nouveau costume, choisit chez le tailleur une étoffe de nuance claire et voyante. C'est dans cet accoutrement qu'il se rendit au prêche, où il fut accueilli, à sa profonde stupéfaction, par des signes hautement manifestés de réprobation et d'indignation. Les explications qu'on lui donna de cette réception le mirent sur la trace de son infirmité, dont il eut ensuite d'autres preuves très évidentes.

Je pourrais multiplier l'énumération de ces faits qui deviennent de plus en plus nombreux.

II. THÉORIES.

On peut définir le daltonisme : l'absence, complète ou incomplète, de la faculté de distinguer les couleurs ou certaines d'entre elles.

Trois théories ont été émises pour expliquer cette singulière anomalie de la vue. Ce sont celles de Young-Helmholtz, de Hering, et de Delbœuf. Je vais les exposer aussi succinctement et aussi clairement que possible.

THÉORIE YOUNG-Helmholtz.

Les corps lumineux sont, comme on le sait, le siège de mouvements vibratoires qui se propagent dans toutes les. directions par l'intermédiaire des molécules d'éther. Ces. oscillations de l'objet lumineux et de l'éther peuvent diffé

rer, soit par leur étendue, soit par leur durée. Les variations de l'étendue de chaque oscillation produisent les différences d'intensité de lumière; d'après la durée de l'oscillation, le corps lumineux se présente avec le caractère d'une couleur spéciale.

La lumière que projette un objet est perçue par nous parce qu'elle impressionne notre rétine, cette membrane nerveuse qui se trouve à la partie postérieure du globe de l'œil, et parce que cette impression est transmise à notre cerveau par l'intermédiaire du nerf optique.

Je viens de dire que la lumière peut varier de qualité suivant la durée d'oscillation des molécules éthérées qui constituent ce qu'on appelle improprement un rayon lumineux; ce rayon peut donc être diversement coloré, et cependant nous n'avons qu'une seule et unique membrane sensible, chargée de percevoir les diverses couleurs. Pour que les couleurs soient perçues par nous, il n'y a que deux hypothèses possibles : ou bien la rétine est formée d'une seule espèce d'éléments sensibles, qui réagissent différemment sous l'action des diverses espèces d'oscillations de l'éther; ou bien la rétine renferme plusieurs sortes d'éléments, qui réagissent toujours de la même façon, tout en différant entre eux.

Cette dernière hypothèse forme le principe fondamental de la théorie Young-Helmholtz.

Tout le monde connaît le spectre solaire, ce rectangle coloré formé par les divers rayons provenant de la décomposition de la lumière solaire à l'aide d'un prisme. On sait que ce spectre se compose principalement de six couleurs. assez distinctes le rouge, l'orangé, le jaune, le vert, le bleu et le violet. Ces couleurs sont nommées primitives ou homogènes; elles ne sont plus susceptibles d'être décomposées.

On sait aussi qu'il est possible de reconstituer la lumière blanche en réunissant de nouveau, à l'aide de différents artifices, les rayons colorés qui sortent du prisme.

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