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jours vraies, sur l'évolution et la constitution de la matière, de la vie et de la société (1).

C'est ainsi qu'il a parcouru depuis vingt ans le domaine des sciences physiques, biologiques, psychologiques et sociales, en imprimant à chacun des sujets qu'il abordait un cachet d'originalité et d'apparente précision, parfois si saisissant qu'il a rallié autour de lui les représentants les plus indépendants de l'École positiviste.

Cependant des critiques sévères ont traité ses ouvrages de romans, à cause des enchaînements d'hypothèses scientifiques qui forment la trame de plusieurs chapitres. Ce sont en effet des romans, mais des romans anglais, pleins d'observations ingénieuses, de descriptions fines et précises, de vues originales, qui découvrent des horizons souvent trompeurs, mais toujours nouveaux.

Herbert Spencer a le premier donné la formule complète de la doctrine moderne de l'évolution naturelle, fondée sur les révélations des sciences physiques.

Plus économiste que naturaliste à ses débuts, il fut le véritable créateur de la doctrine de la sélection naturelle par la concurrence vitale. Darwin n'a fait que tirer de ce principe son explication de la transformation des espèces. Depuis lors, tous les travaux publiés par Herbert Spencer dans l'ordre scientifique et philosophique portent l'empreinte de ses premières études, ce qui contribue pour une large part à leur originalité. Le volumineux ouvrage intitulė Premiers principes dans lequel l'auteur a développé pour la première fois sa doctrine évolutionniste en partant du principe scientifique de la conservation de l'énergie, et du principe économique de la division du travail, forme la base de son œuvre, qui consiste à rechercher dans les lois nécessaires de la matière la cause de l'évo

(1) Premiers principes. — Principes de biologie. Principes de psychologie. Introduction à la science sociale. Éléments de science sociale. - L'éducation physique, intellectuelle et morale.

lution de l'univers et du progrès organique et social.

Dès les premières pages du livre, l'auteur détermine nettement son but qui est de rechercher comment l'ordre et l'harmonie du monde ont pu sortir du chaos, sans intervention surnaturelle, par les seules forces de la matière ; comment en d'autres termes, et pour adopter la terminologie un peu pédante qu'il affectionne, la matière s'intègre nécessairement en passant de l'homogénéité à l'hétérogénéité, de l'indéfini au défini, de l'incohérent au cohérent; comment l'évolution des individus et des sociétés se constitue, comme celle de la matière, par le passage de l'état homogène indéfini à un état hétérogène défini. En un mot, cette formule générale est à ses yeux l'invariable expression de la loi du progrès dans tous les ordres, physiques, biologiques, psychologiques et sociaux.

Cependant il n'hésite pas à reconnaître, avec une franchise qui l'honore, l'horizon borné de son système. « Mes inductions, dit-il, valent non pour la genèse des choses en soi; mais pour leur genèse telle qu'elle se manifeste à la conscience humaine. Après tout ce qui a été dit, le mystère dernier demeure ce qu'il était exactement. Nous avons beau réussir à ramener l'équation à ses termes les plus simples, nous ne sommes pas plus capables pour cela d'en dégager l'inconnue. La science conduit l'esprit à reconnaître de plus en plus que l'univers est un problème insoluble, le commencement, la fin, et l'essence des choses lui échappent ; elle donne ainsi à la religion une base plus ferme en lui assignant pour domaine l'Inconnaissable, et la rend meilleure en détruisant peu à peu les superstitions. >>

Il est prudent de ne pas attacher à ces protestations de foi plus de valeur qu'à celles de M. Huxley. En effet, quand Herbert Spencer identifie l'inconnaissable avec la force dont le monde physique et moral ne sont que des manifestations, il frise de bien près le panthéisme.

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S'il est vrai que ce qu'il appelle les forces physiques sont des modes divers de mouvement, et qu'elles se transforment indéfiniment sans que la somme d'énergie de l'univers varie, il devient possible de concevoir «< comment la matière a pu passer d'une homogénéité indéfinie et incohérente à une hétérogénéité définie et cohérente. En effet, les diverses parties d'un agrégat sont diversement modifiées par une force incidente et, par suite des réactions des parties qui subissent ces modifications, la force elle-même doit se diviser en fractions modifiées différemment. Il s'ensuit que chaque division différenciée de l'agrégat devient un centre d'où une division différenciée de la force originelle est de nouveau diffusée. Enfin, puisque des forces dissemblables doivent produire des résultats différents, chacune de ces forces différenciées doit produire dans tout l'agrégat une nouvelle série de différenciations (1). »

Voilà pour lui le point de départ et la cause de l'évolution de l'univers. La loi qui démontre l'instabilité de l'homogène se résume à dire que toute force active produit plusieurs effets différents; formule claire et simple pour des ignorants, mais risible pour des mathématiciens habitués à ne pas se payer de mots et qui ne voient dans ces élucubrations que de la mécanique travestie. Partant de là, l'auteur explique comme suit l'évolution du cosmos. «En se précipitant vers divers centres de gravité, les masses de matière causent inévitablement une rotation générale dont la vitesse augmente en raison de la condensation. Ainsi le système solaire primitivement homogène pour la forme, la densité, la température etc., s'est différencié peu à peu à mesure que les progrès de la condensation engendraient la division de la nébuleuse, les combinaisons chimiques, les dégagements de chaleur, de lumière et d'électricité.

(1) Premiers principes, § 156.

» Ainsi les changements ignés de la terre proviennent de la précipitation de la matière cosmique vers son centre de gravité, comme les changements aqueux (circulation océanique et fluviatile, pluie, époque glaciaire etc.) résultent de la précipitation de la matière solaire; en effet, le rayonnement du soleil, source principale de l'énergie terrestre, moteur de l'eau, de l'air, des plantes et des animaux, paraît devoir être attribué uniquement aujourd'hui à la condensation >> (1).

Enfin l'évolution vitale se réduit, elle aussi, en dernière analyse à une condensation de matière, concomitante avec une dissipation de mouvement; le règne végétal étant chargé principalement d'accumuler l'énergie que dépense le règne animal. « Ce sont les transformations matérielles de forme et de mouvement qui engendrent les transformations fonctionnelles; l'évolution des individus est constituée comme l'évolution des espèces par le passage d'un état homogène à un état hétérogène » (2).

L'être vivant sort de l'embryon par une série de différenciations successives, et la paléontologie démontre que la division du travail s'est manifestée aussi dans l'évolution de l'espèce par la multiplication et la complication des organes et de leurs activités fonctionnelles.

La loi du progrès s'exerce donc dans le temps et dans l'espace d'une manière identique, et la science, « qui a pour objet la coexistence et la séquence des phénomènes, »> doit s'attacher à suivre pas à pas, dans toutes les directions possibles, cette intégration continue de la matière qui produit le passage de l'incohérence à la cohérence.

H. Spencer s'efforce de montrer par des comparaisons tirées de l'économie politique les procédés et les lois de l'évolution vitale. « Parfois on entend sous le nom de progrès la simple croissance; ainsi quand il s'agit d'une

(1) Premiers principes, § 156.

(2) Ibid.

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nation, du nombre de ses membres et du territoire sur lequel elle s'est étendue : exemple de la loi d'intégration.

» Quand les voies de communication deviennent bonnes et nombreuses, les divers districts arrivent à se vouer à des fonctions diverses, et ainsi à dépendre les uns des autres : exemple de la loi de passage de la cohérence à l'incohérence.

>> La fabrication du calicot, du drap, des soieries, des dentelles se concentre dans tel ou tel comté; celle de la coutellerie, de la quincaillerie etc., dans telle ou telle ville; enfin chaque localité se distingue plus ou moins du reste par un travail qui en devient la grande affaire: exemple de la loi de passage de l'indéfini au défini, de l'intégration et de la ségrégation. >>

Les lois de la modification organique dans l'évolution de l'espèce trouvent dans les lois de l'économie politique une interprétation non moins ingénieuse. C'est ici que, selon H. Spencer, l'étude des opérations sociales jette la plus vive lumière sur les opérations vitales, parce qu'il y a dans les sociétés une dépendance mutuelle de fonctions, semblable à celle qui existe dans les organismes, et une réaction essentiellement semblable des fonctions sur les structures.

Pourquoi un organe exercé un peu au delà de ses besoins. se met-il à croître, et se trouve-t-il en état d'opposer à un accroissement de demande un accroissement d'offre? « Nous savons, dit H. Spencer (1), que nécessairement les changements rythmiques produits par des actions antagonistes ne sauraient être portés à l'excès dans une direction sans qu'il se produise un excès équivalent dans la direction opposée; c'est un corollaire de la persistance de l'énergie que nulle déviation, effectuée par une cause perturbatrice agissant sur quelques membres d'un système en équilibre mobile doit (à moins qu'elle ne détruise l'équili

(1) Premiers principes, § 85.

V.

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