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<< Ainsi, ajoute Spencer, on comprend la nécessité de la composition particulière de la matière organique. Sans cette extrême mobilité moléculaire des éléments et des composés mis en jeu dans la vie, on ne verrait pas se produire l'élimination rapide des résidus, et l'échange incessant de la matière ne pourrait subsister.

» D'autre part, sans l'union de ces éléments si mobiles en des composés immensément complexes, dont les atomes relativement vastes sont rendus immobiles par leur inertie, la fixité mécanique, qui empêche les éléments des tissus vivants de se diffuser en même temps que les résidus de la décomposition des tissus, ne pourrait se constituer.

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Ainsi, dans les substances dont les organismes sont composés, les conditions nécessaires à la redistribution si rapide de matière et de mouvement, qui constitue l'évolution, se trouvent remplies bien plus qu'il ne semble. Les redistributions de matière entraînent nécessairement partout des redistributions de mouvement, ce qui explique l'intime subordination des changements organiques et fonctionnels.

Le lecteur nous pardonnera de nous étendre si complaisamment sur les premières pages des Principes de biologie. Nous avons cru devoir analyser en détail le chapitre « de la matière organique, » d'abord parce qu'il permet d'apprécier la manière neuve et originale de l'auteur anglais et ensuite parce qu'il est la base de toutes les interprétations ingénieuses par lesquelles Spencer s'efforce de tirer des phénomènes de la biologie la démonstration de l'évolutionisme.

En effet, pour pénétrer les lois qui président à la transformation des organes et des fonctions, il importe avant tout de se rendre compte de la constitution et des transformations de la matière organique. C'est ce que Herbert Spencer s'attache à démontrer avec beaucoup d'art dans les premiers chapitres que nous venons de résumer.

Les chapitres suivants sont consacrés à l'étude de l'ac

tion des forces physiques sur la matière organique et des réactions de la matière organique sur les forces.

Entre autres explications ingénieuses des phénomènes élémentaires de la vie, nous signalerons le passage où Spencer interprète, à la lumière de récentes découvertes de physique moléculaire, l'opération qui sert de base à tous les phénomènes organiques et qui établit une démarcation entre la vie végétale et la vie animale: la production par les ondulations éthérées d'arrangements moléculaires instables dont le renversement met en liberté les forces accumulées sous des formes nouvelles.

Son interprétation repose sur ce fait que les composés les plus facilement décomposables par la lumière, sont ceux où il existe un contraste marqué entre les poids atomiques des éléments et la vitesse de leurs vibrations.

L'on retrouve toujours, dans toutes les hypothèses et les théories hasardées par Spencer pour expliquer les phénomènes d'évolution organique, cette idée dominante, que la variabilité des édifices organiques croît proportionnellement à l'hétérogénéité de leurs unités moléculaires, et que, lorsqu'un équilibre est rompu, il ne saurait cesser d'y avoir des modifications jusqu'à ce qu'un nouvel équilibre soit atteint.

S'agit-il, par exemple, d'expliquer les phénomènes si compliqués de la génération dans l'échelle des êtres : l'agamogenèse, les générations alternantes, l'hermaphrodisme, la génération sexuelle, la régénération des organes et les curieuses lois de la restauration de l'espèce par la fécondation croisée (1) mises en lumière par Darwin, voici comment raisonne notre auteur.

Dès qu'il existe entre les unités qui composent un agrẻgat de légères dissemblances, la physique et la chimie démontrent toujours l'existence d'une instabilité relative. La plupart des alliages métalliques en sont la preuve, car ils

(1) Voir, dans cette Revue, notre premier article, tome ш, p. 142.

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se liquefient à des températures bien plus basses que leurs composants formés d'agrégats homogènes.

Or, s'il est vrai que le mélange de deux édifices moléculaires stables engendre un édifice instable, le mélange de deux édifices cellulaires stables doit amener l'instabilité du produit, c'est-à-dire la variation; car il doit en être des atomes complexes qui composent les organismes comme des unités simples du monde inorganique. Chez les unités de cet ordre, comme chez les unités d'un ordre plus simple, une ressemblance imparfaite doit amener un équilibre polaire imparfait et, en conséquence, une aptitude moindre à résister aux forces perturbatrices.

Les molécules d'un agrégat qui n'ont pas un arrangement équilibré tendent fatalement vers un arrangement plus stable, en vertu de la loi d'équilibre (1). Ainsi, le fer forgé cristallise lentement par la vibration qui donne à ses molécules une liberté dont elles profitent pour s'ajuster et reprendre un état d'équilibre polaire. Pendant que ces réarrangements s'opèrent, l'agrégat exerce une force coercitive sur ses unités. Ainsi un cristal en voie de formation, contraint les atomes qu'il emprunte à la solution à prendre une certaine forme, et même à refaire cette forme quand elle a été endommagée. Chaque atome obéit aux forces exercées sur lui par les autres déjà polarisés. Les diverses phases de l'évolution d'un organisme ou d'une espèce sont l'expression de l'antagonisme de ces deux forces. Tant que l'excès des forces moléculaires sur les forces antagonistes de l'agrégat existe, il y a dépense en croissance, développement et fonctions, parce que la force accumulée sous forme de tension moléculaire reste sans contrepoids. La cessation de la croissance indique l'établissement de l'équilibre relatif entre ces deux forces; c'est ordinairement alors qu'apparaît le phénomène de la reproduction.

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Lors donc que nous voyons dans la génération alternante, par exemple chez les pucerons, la génération par sexe n'apparaître qu'après le terme de la croissance, c'est que l'état d'équilibre entre les forces productives de celle-ci et les forces antagonistes commence à s'établir. Les deux genres de cellules germinatives, dont la fusion va devenir le point de départ d'une évolution nouvelle, sont aussi dans un état voisin de l'équilibre stable; mais leur union va renverser cet équilibre dans le germe détaché, parce qu'il est formé par le mélange d'unités physiologiques légèrement différentes détachées d'individus légèrement différents.

Le fait d'unir un groupe d'unités provenant d'un organisme avec un groupe d'unités provenant d'un autre organisme, diminue la tendance vers l'équilibre comme dans les alliages métalliques; les unités recouvrent alors une telle liberté qu'elles redeviennent susceptibles de la redistribution qui constitue l'évolution. Voilà pourquoi les individus trop proches parents sont moins propres que d'autres à avoir des rejetons, et pourquoi le croisement des races contribue à l'amélioration de l'espèce.

L'agamogenèse, c'est-à-dire la génération sans sexes, est possible dans les organismes peu différenciés, aussi longtemps que, l'assimilation l'emportant beaucoup sur la dépense, l'équilibre stable n'est pas établi; mais dès qu'un obstacle à la croissance surgit, les unités de l'agrégat sont exposées à s'équilibrer, leur mobilité diminue, et les groupes de ces unités détachées (bourgeons) perdent la faculté de se réarranger en la forme spécifique.

L'autofécondation devient impossible dans les organismes supérieurs, et reste possible dans les organismes inférieurs parce que, chez les uns, les unités physiologiques légèrement différentes transmises par les parents sont soumises à des forces constantes qui tendent à remodeler les deux ordres d'unités suivant la même forme, tandis que chez les autres l'hétérogénéité subsiste entre les unités physiologiques; les cellules germinatives mâles et femelles,

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développées dans le même individu peuvent être assez différentes pour produire par leur union des germes féconds, et plusieurs générations de descendants se fécondant euxmêmes peuvent se succéder avant que la dissemblance des divers ordres d'unités diminue au point qu'ils ne puissent plus se féconder eux-mêmes. Les mêmes principes expliquent les résultats variables des unions entre proches parents et les phénomènes de variation dans l'espèce : les unités physiologiques varient d'autant plus dans chaque individu que les différences de condition, entraînant des différences fonctionnelles plus considérables, imposent à ces unités des différences plus tranchées.

« En résumé, dit Spencer, cette hypothèse peut expliquer tous les phénomènes et réunir par un lien commun les faits, en apparence les plus éloignés, les plus exceptionnels et les plus inconciliables. Elle acquiert une probabilité beaucoup plus forte encore si l'on considère qu'elle fait concorder les faits de genèse, de variation et d'hérédité avec les premiers principes. En effet, les différenciations de ces unités plastiques qui sont justement les atomes les plus intégrés, les plus instables et les plus hétérogènes, et leur équilibration que nous voyons se produire dans les agrégats qui conservent des conditions constantes, ne sont que des corollaires des principes universels qui découlent de la grande loi de la conservation de l'énergie. La condensation de la vie, le progrès de l'espèce dans les générations successives, devient une conséquence de l'incidence continue de nouvelles forces pour remplacer celles qui ne cessent d'aboutir rythmiquement à l'équilibre dans l'œuvre de la propagation de l'espèce >> (1). Voilà, certes, une hypothèse qui, malgré la phraséologie dont elle s'enveloppe, fait honneur à l'imagination de l'auteur, puisque son élasticité lui permet d'embrasser en une seule synthèse tous les faits étranges, mis en lumière par la physiologie moderne. S'il suffisait

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(1) Principes de biologie, t. 1, c. 10.

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