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dire les dépenses de l'organisme, sont en raison inverse de la fécondité dans toute la série animale depuis le tænia. jusqu'à l'homme, il s'efforce de prouver que le progrès futur de l'humanité, en augmentant les frais d'individuation par le travail intellectuel, entraînera une diminution dans la reproduction de l'espèce dont l'excès engendre aujourd'hui de si terribles luttes pour l'existence. Cette lutte pour la vie constitue, en attendant, le facteur du progrès par excellence. La pression de la population qui dépasse constamment les moyens d'existence est la cause certaine du développement matériel, intellectuel et moral de la société; sans la compétition qu'elle établit, dit Spencer, le développement de la puissance mentale n'aurait pas lieu, car la vie ne coûterait pas tant d'efforts. Seuls, les plus intelligents, les plus industrieux, les plus moraux survivront. Il en résultera nécessairement un accroissement dans les frais d'individuation par l'accroissement des grands centres nerveux, qui sont susceptibles d'une plus grande usure. Déjà l'on a pu constater qu'en moyenne le cerveau d'un homme civilisé pèse 30 pour cent de plus que celui d'un sauvage (?) et l'on sait que la réflexion et l'empire sur soi nécessitent un cerveau développé. Il en résultera nécessairement une diminution de la réserve disponible pour la reproduction de l'espèce au bénéfice de la conservation de l'individu. Quand cet équilibre sera atteint, le travail du cerveau deviendra plus facile et plus puissant. La pression de la population cessera également, quand l'homme aura atteint l'équilibre entre sa structure et celle de la société, entre sa nature et celle de son milieu inorganique dont il apprend déjà à réduire les causes de destruction.

La balance entre la genèse et la mortalité, entre les forces destructives et les forces conservatrices, sera donc finalement atteinte par le fait de l'évolution.

Nous nous permettons de douter que cette apocalypse de la science ait quelque chance de remplacer celle de saint Jean, en dépit des spéculations scientifiques sur lesquelles

elle repose et qui sont de nature à séduire les imaginations.

Les Principes de sociologie publiés en dernier lieu reposent complètement sur les idées que nous venons de résumer. Dans l'analyse des phénomènes sociaux et des progrès de l'esprit humain depuis les âges préhistoriques, Spencer procède toujours par des comparaisons puisées dans le domaine de la biologie, en s'efforçant d'assimiler sans cesse la structure et l'évolution des agrégats sociaux à ceux des agrégats organiques.

C'est ainsi qu'il constate que l'intégration dans les sociétés se fait, comme dans les animaux, par condensation en même temps que par extension, et que la différenciation se précise à mesure que la complexité augmente. Toute société qui s'organise se différencie, comme les organismes, par la division du travail,et à mesure que les fonctions se spécialisent, que les classes se forment, la dépendance entre les hommes, comme entre les organes, devient plus étroite, ils deviennent nécessaires les uns aux autres. On peut supprimer une portion d'un animal inférieur sans nuire au reste, mais on ne saurait couper en deux un mammifère sans le tuer.

Il constate ensuite, dans la sociologie, une distinction analogue à celle qui existe en biologie entre les organes et les fonctions de relation et de nutrition.

Toute société qui s'organise se divise nécessairement en deux classes, dont l'une est chargée de pourvoir aux nécessités de la vie (femmes, esclaves, laboureurs, artisans), et dont l'autre préside aux rapports ordinairement hostiles avec les sociétés environnantes ou les puissances occultes (guerriers, prêtres). On constate, du reste, des divisions analogues dans les sociétés animales comme chez les fourmis (1).

(1) V. Les fourmis, de sir John Lubbock, lecture du soir à la Royal Institution, mars 1878.

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Quand on passe de la phase agricole à la phase industrielle, la différenciation des fonctions devient plus sensible. Une troisième classe, celle des commerçants, apparaît, qui se charge de l'échange des produits. De même, dans les animaux supérieurs, un système circulatoire et distributif transmet aux membres externes les produits élaborés par les organes internes, produits qui passent directement de l'un à l'autre presque sans élaboration chez les animaux inférieurs.

Dans les sociétés plus avancées on observe bientôt deux systèmes régulatifs, plus ou moins indépendants l'un de l'autre, celui de la vie de relation et celui de la vie de nutrition, qui correspondent exactement aux systèmes nerveux cérébrospinal et grand sympathique. Ce dernier système qui préside aux fonctions de l'appareil alimentaire est pratiquement indépendant de l'autre chez les vertébrés supérieurs. Dans les sociétés humaines, suivant la prédominance de l'un ou de l'autre des deux systèmes régulatifs, la nation se rapproche du type guerrier ou du type industriel, c'est-à-dire du gouvernement absolu où tous les organes obéissent à l'impulsion du pouvoir central, ou du gouvernement républicain et décentralisé. C'est l'industrie qui opère le passage de l'un à l'autre; elle est donc la mère du progrès social moderne et de la liberté; c'est elle qui fait disparaître insensiblement le despotisme dans l'État comme dans la famille, en affranchissant le citoyen, la femme et l'enfant, en fondant la société sur le principe de l'échange volontaire des services. Des associations de citoyens se chargent spontanément de fonctions qui, dans les nations. constituées sur le type primitif, c'est-à-dire guerrier, sont remplies par le gouvernement. Les pays libres sont les pays où l'industrie est le plus développée.

L'organisation domestique qui a préludé à l'organisation politique dans les tribus nomades de l'âge patriarcal subit aujourd'hui une désintégration au profit de l'agrégat social. La division entre les familles, qui maintenait autre

fois la cohésion dans chacune d'elles, a disparu devant les progrès de la civilisation. Depuis qu'elles se sont associées comme éléments d'un groupe plus étendu, les individus agissent comme membres de leur société plus souvent que comme membres de leur famille. Des individus appartenant à des souches différentes s'associent en des fonctions communes comme l'on voit dans l'évolution embryonnaire des cellules d'origine et de nature différentes s'associer pour former un nouvel organe.

Ainsi les grandes unités nationales modernes, après avoir absorbé successivement les tribus, les seigneuries et les petits royaumes, tendent à absorber les groupes plus petits qui sont les familles.

Spencer se demande s'il y a une limite à cette désintėgration de la famille, et si le sentiment des devoirs de la société envers les enfants va remplacer la tendresse des parents. Il trouve encore dans la biologie la réponse à sa question, car les animaux supérieurs prennent plus de soins de leurs enfants que les autres. Il croit donc qu'un mouvement en sens contraire va se produire.

<«< Il doit y avoir, dit-il, une opposition absolue entre le régime de la famille et celui de l'État. L'enfant a besoin d'une aide incessante, d'une générosité absolue; le jeune homme ne doit recevoir que proportionnellement à son mérite, dès qu'il entre dans la bataille de la vie.

» Le principe de la société doit être la justice absolue dans les actes sociaux. Appliquez à la société le principe de la famille; elle succombera, parce que ses membres les moins méritants survivront, aux dépens des plus méritants, et qu'elle ne pourra plus soutenir la lutte avec les sociétés rivales (1). »

<< La relation entre le despotisme domestique et le despotisme politique est évidente. La condition des femmes s'améliore partout où l'activité industrielle prédomine sur l'ac

(1) La science sociale, ch. XII.

tivité militaire. Les dispositions du code civil inspirées par Napoléon Ier seront nécessairement modifiées, et le sont en fait dans les sociétés industrielles les plus avancées, comme en Angleterre et en Amérique, où les femmes sont arrivées à une condition plus élevée et plus libre que partout ailleurs.

» Il en est de même pour la condition des enfants; dans les sociétés guerrières, leur sujétion était poussée à l'extrème; les parents avaient droit de vie et de mort sur eux, et la condition des filles était inférieure à celle des garçons.

» A l'époque féodale, le despotisme familial régnait dans toute sa force, et il persista jusqu'à la révolution française. Les enfants étaient élevés tyranniquement, et l'on arrangeait pour eux des mariages sans les consulter. Depuis, les progrès de la liberté nés du développement industriel ont fait que les pères et les maîtres, de despotes qu'ils étaient, sont devenus des amis (1). »

Bien des lecteurs ne partageront pas, et pour cause, l'enthousiasme de Spencer au sujet de la désagrégation de la famille dont les tristes conséquences se font jour de toute part dans nos sociétés modernes grisées de rationalisme. Ils n'y verront, avec plus de raison, que le prélude de la désagrégation des sociétés, dont la famille est le fondement nécessaire.

L'indépendance et l'originalité d'esprit d'Herbert Spencer s'affirme surtout dans son traité sur l'éducation. Il n'hésite pas à s'attaquer de front à l'un des préjugés les plus en vogue dans le monde des libres penseurs, à savoir que le plus sûr moyen de moraliser les masses est de répandre l'instruction primaire et moyenne.

Quel rapport peut-il y avoir, dit-il, entre la connaissance de la grammaire, de l'arithmétique, de la géographie etc. et le développement du sens moral, l'amour du bien, du vrai et du beau.

(1) Ibid., ch. XIII.

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