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définiment. A la longue, les torrents deviennent des rivières stables et, le long des côtes, la mer finit par se construire, à l'aide des débris mêmes du rivage, une digue de cordons littoraux qu'elle ne franchira plus désormais. En outre, l'expérience des dernières campagnes maritimes, et spécialement de celle du Challenger, nous apprend que les dépôts détritiques, formés par l'action combinée des vagues et des fleuves, ne dessinent jamais, autour des continents, qu'une zone étroite, dont la largeur ne dépasse pas trois cents kilomètres.

Par suite, pour que les dépôts sédimentaires ne cessent pas de se former et pour qu'ils arrivent à recouvrir successivement les divers points du globe, il faut que l'équilibre qui tend à se produire soit de temps en temps troublé par un changement dans les relations réciproques de la terre et des eaux. Tel est précisément le rôle du plissement de l'écorce. Il change les rivages des mers, il rend de nouvelles portions des côtes accessibles à l'action destructive des éléments. En même temps, à mesure que naissent les montagnes et que se circonscrivent les bassins océaniques, l'uniformité primitive des conditions physiques à la surface du globe fait place à une variété de mieux en mieux marquée, dont le monde organique subit le contre-coup. Ainsi la succession ininterrompue et la constante diversité des phénomènes de l'ordre sédimentaire se rattachent, non moins étroitement que les phénomènes éruptifs, à la notion simple du plissement de l'écorce terrestre.

Il n'est pas jusqu'aux manifestations de l'activité organique qu'on ne puisse, à bon droit, faire rentrer dans la même formule; car les polypiers, ces puissants constructeurs de calcaire, n'accumulent de couches importantes qu'à la faveur d'un affaissement continu de leur support, indice certain d'une ride en voie de formation.

En résumé, toutes les inégalités de la surface du globe ont une cause unique et sans cesse agissante, bien qu'elle

doive probablement se manifester par saccades: la contraction du noyau liquide qui perd sa chaleur, d'où dérive, pour l'enveloppe solide, la nécessité de s'adapter sans cesse à la forme nouvelle que réclament les conditions de son équilibre. C'est ainsi que, depuis les premiers âges du globe, les continents se sont formés par des adjonctions successives, qui rendaient leur contour de plus en plus compliqué. La surface des mers a constamment diminué d'étendue; mais en même temps leur profondeur ne cessait de croître avec la hauteur des continents. De là sont nées ces conditions physiques si diverses où les effets naturels de la latitude se compliquent de mille modifications dues à la nature du sol, à l'altitude, à l'exposition, au voisinage ou à l'éloignement de la mer. Ainsi toutes ces circonstances extérieures, dont la variété donne un si grand charme à notre globe en même temps qu'elle est, pour l'activité humaine, le plus puissant des stimulants, sont contenues en germe dans la loi que nous avons posée.

En terminant, qu'il nous soit permis de faire remarquer qu'en cette matière nous n'avons rien innové. Nous nous sommes borné à préciser, en les justifiant par leur accord avec les observations les plus récentes, des notions qui, depuis longtemps, forment le fonds de l'enseignement géologique en France. Si, dans l'expression donnée à la formule qui concerne les inégalités de la surface du globe, nous pouvons revendiquer un peu plus de rigueur que n'en avaient apporté nos illustres devanciers, du moins, dans les conséquences qu'il nous a paru légitime d'en tirer, nous n'avons fait que nous rattacher aux doctrines que professaient les Élie de Beaumont, les d'Omalius d'Halloy et tant d'autres maîtres éminents. Il nous est doux de rendre cet hommage à leur mémoire et de constater l'appui décisif que les progrès de la science apportent aux conceptions théoriques de ces grands esprits.

A. DE LAPPARENT,

Vice-doyen de la faculté des sciences à l'Université catholique de Paris.

LA COSMOGONIE BIBLIQUE

D'APRÈS LES PÈRES DE L'ÉGLISE (1)

III

LES PÈRES CAPPADOCIENS ET LEURS IMITATEURS.

Les trois illustres Pères de l'Église qu'on a surnommės les trois grands Cappadociens, parce qu'ils étaient originaires de la Cappadoce, saint Grégoire de Nazianze, saint Basile, son ami, et saint Grégoire de Nysse, frère de saint Basile, forment un groupe à part et comme une école particulière dans l'Église d'Orient. Ils tiennent une sorte de milieu entre les Alexandrins et les Syriens. Ils se rattachent par certains liens à l'école d'Alexandrie, spécialement par leur amour pour Origène (2) dont les deux premiers avaient rassemblé les plus beaux morceaux sur la Bible, dans un recueil qui est parvenu jusqu'à nous sous le nom de Philocalie; mais ils ne s'inféodèrent pas aux doctrines de Philon et des Origénistes, et ils préférèrent gé

(1) Voir la livraison précédente.

(2) Socrate, Hist. eccl. 1. 1v, c. 26; Migne, Patr. gr., t. LXVII, col. 529; Sozomène, Hist. eccl. 1. vi, c. 17, ibid., col. 1333.

néralement au sens allégorique le sens littéral, comme les écrivains de l'école d'Antioche (1). Le sentiment des trois Pères sur la cosmogonie mosaïque est à peu près le même. Ils conservent le principe de l'allégorisme, mais ils ne croient pas devoir expliquer toute la création d'une manière allégorique; ils s'affranchissent de la théorie philonienne, et expliquent dans le sens littéral les diverses phases de l'œuvre des six jours.

On peut les considérer comme les principaux défenseurs de l'opinion que nous avons déjà rencontrée dans saint Éphrem, d'après laquelle Dieu créa d'abord la matière première et l'ordonna ensuite pendant les six jours mosaïques. Elle est, à leurs yeux, une sorte de conciliation entre Origène et ceux de ses antagonistes qui répartissaient la création entre les six jours. Ils conservent à la création élémentaire le nom alexandrin de création simultanée; mais ils voient, comme les défenseurs du sens littéral, des productions réelles, non des allégories, dans les œuvres de chaque jour. Saint Ambroise et saint Grégoire le Grand adoptèrent leur sentiment et le soutinrent dans l'Église latine, ainsi que nous le verrons en son lieu.

Un trait caractéristique des Cappadociens, qui mérite d'être relevé et par lequel ils se rapprochent de l'école d'Alexandrie plus que de celle d'Antioche, c'est la haute es

(1) S. Basile et S. Grégoire de Nazianze avaient connu à Athènes Diodore de Tarse. S. Basile eut des rapports personnels avec S, Éphrem. Lengerke, Commentatio de Ephramo Syro, p. 4. S. Basile rejeta expressément la méthode allégorique des Pères alexandrins, et il s'en écarta de plus en plus à mesure qu'il avança en âge (quoiqu'il conservât toujours plusieurs de leurs opinions), dans ses Homélies, II, 5; III, 9; IX, 1. Migne, Patr. gr., t. xxix, col. 40, 73, 188. « Il en est, dit-il dans ce dernier endroit, qui n'admettent pas le sens vulgaire des Écritures, pour qui l'eau n'est pas de l'eau, mais je ne sais quelle autre nature,... qui dénaturent la création des reptiles et des bêtes sauvages, au profit de leurs allégories, semblables aux interprètes de songes qui expliquent les fantastiques visions des rêves en les faisant tourner à leur but. Pour moi de l'herbe est de l'herbe; plante, poisson, animal domestique, je prends tout dans le sens littéral. Car je ne rougis point de l'Évangile. T. I, 16. Trad. Fialon, Etude sur S. Basile, p. 490. Cf. p. 291.

time qu'ils professent pour la science. Ils sont épris de l'amour du bien dire, comme saint Jean Chrysostome, et ils rajeunissent la langue grecque, en créant un nouvel idiome où, sous les teintes vives et animées de la Bible, on reconnaît toujours la pureté des lignes attiques (1); on retrouve dans leurs écrits

Ce langage sonore, aux douceurs souveraines,

Le plus beau qui soit né sur des lèvres humaines (2),

exprimant des pensées plus hautes que celles de Socrate et de Platon. Mais, mieux que ne devait le faire l'orateur à la bouche d'or, ils sentent tout le prix de la science, ils l'ont étudiée (3) et ils s'en servent pour expliquer et commenter la parole de Dieu. « Le premier des biens, s'écrie saint Grégoire de Nazianze, c'est la science; et je n'entends pas seulement la nôtre, cette noble science qui dédaigne les ornements et la pompe du langage pour ne s'attacher qu'au salut et à la beauté des biens spirituels; je parle aussi de la science profane, que tant de chrétiens, bien aveugles sans doute, rejettent comme pleine d'écueils et de dangers, comme éloignant de Dieu. Faut-il mépriser le ciel, la terre et l'air, parce qu'ils ont reçu un culte criminel d'hommes qui, au lieu de Dieu, adoraient l'œuvre de Dieu ?... Ne méprisons pas la science, parce qu'elle déplaît à quelques-uns, et regardons ses ennemis comme des grossiers et des ignorants. Ils voudraient que tout le monde leur ressemblât pour cacher leur ignorance dans celle des autres.... N'avoir que les mœurs ou la science

(1) Fialon, Étude historique et littéraire sur S. Basile, 1865, p. 197. (2) André Chénier.

(3) Pour se rendre compte de la science de S. Basile, voir les notes qu'a jointes M. Fialon à sa traduction de l'Hexameron. Ibid., p. 301 et suiv. et p. 259-268. Voir aussi le discours de S. Grégoire de Nazianze sur S. Basile, d'où est extrait le passage que nous allons citer, en particulier, col. 525. « Dans cette œuvre magnifique, dit M. Fialon (Hexaméron, p. 268) Platon, Aristote, Plotin et Origène se donnent la main pour interpréter la cosmogonie mosaïque et en démontrer la vérité. »

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